L’arrêt commenté est riche en instructions car il s’inscrit dans le mouvement de rigueur insufflé par la deuxième chambre civile sur les actes de la procédure d’appel tout en apportant une réponse à une question qui n’avait pas, sauf erreur, été tranché par la Cour de cassation à propos de la saisie à tiers détenteur.
Il offre également l’occasion d’évoquer la réforme du droit des sûretés puisque celle-ci a toiletté la mise en œuvre du droit de suite attaché à l’hypothèque.
Les faits de l’espèce étaient assez classiques : en vertu de rôles exécutoires émis pour le recouvrement de plusieurs années d’imposition fiscale impayées, un comptable du service des impôts des particuliers (le Trésor public) a inscrit deux hypothèques légales sur un immeuble appartenant à son débiteur.
Deux années après ces inscriptions, le débiteur, pensant peut-être par ce biais pouvoir échapper à ses obligations fiscales, a fait apport de son bien immobilier à une société civile immobilière, dont la gérante n’était autre que son épouse, omettant l’une des caractéristiques attachées à l’hypothèque : le droit de suite de l’article 2461 du code civil (dans sa rédaction antérieure à l’ord. n° 2021-1192 du 15 sept. 2021 portant réforme du droit des sûretés, applicable à l’espèce, mais qui se retrouve dans le nouvel art. 2454 du même code, avec quelques évolutions).
Le Trésor public aurait pu opter pour une action paulienne (C. civ., art. 1167, dans sa rédaction antérieure à l’ord. n° 2016-131 du 10 févr. 2016, qui se retrouve désormais relooké à l’art. 1341-2 du même code) afin de faire juger l’inopposabilité de cet apport tant la manœuvre était grossière.
Il a opté pour une autre voie, celle de l’exercice du droit de suite par la procédure de saisie à tiers détenteur laquelle est poursuivie en vertu des modalités prévues au code des procédures civiles d’exécution.
Le préalable à la mise en œuvre de ce droit de suite réside dans l’obligation de faire signifier un commandement de payer au débiteur ; cet acte a été signifié par le Trésor public à son débiteur.
Il a été suivi d’un commandement de payer ou de délaisser adressé à la société civile immobilière (SCI) devenue propriétaire d’un bien grevé d’hypothèque et donc ayant la qualité de tiers détenteur.
Le Trésor public a ensuite assigné la SCI et le débiteur à l’audience d’orientation. Lors de cette audience, ni le tiers détenteur ni le débiteur ne constituent avocat et donc n’élèvent aucune contestation.
Le juge de l’exécution exerce son office et après avoir vérifié la régularité de la procédure, mentionne la créance et ordonne la vente forcée.
Le débiteur et le tiers détenteur interjettent appel. Ils sollicitent de la cour qu’elle infirme le jugement d’orientation, déclare caducs les commandements, ordonne la mainlevée de la saisie immobilière et à titre subsidiaire, annule les commandements.
La cour d’appel...