On sait que les titres exécutoires judiciaires sont soumis à un délai de prescription particulier. L’article L. 111-4 du code des procédures civiles d’exécution (qui était initialement l’art. 3-1 de la loi n° 91-650 du 9 juill. 1991 portant réforme des procédures civiles d’exécution) dispose en effet, en son alinéa 1er, que « L’exécution des titres exécutoires mentionnés aux 1° à 3° de l’article L. 111-3 ne peut être poursuivie que pendant dix ans, sauf si les actions en recouvrement des créances qui y sont constatées se prescrivent par un délai plus long » (les titres concernés sont plus précisément les décisions des juridictions de l’ordre judiciaire ou de l’ordre administratif lorsqu’elles ont force exécutoire, ainsi que les accords auxquels ces juridictions ont conféré force exécutoire, les actes et les jugements étrangers ainsi que les sentences arbitrales déclarés exécutoires par une décision non susceptible d’un recours suspensif d’exécution, sans préjudice des dispositions du droit de l’Union européenne applicables, et les extraits de procès-verbaux de conciliation signés par le juge et les parties). Mais cette disposition n’est pas applicable en Nouvelle-Calédonie. L’article 25, II, de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile prévoit en effet que « La présente loi, à l’exception de son article 6 et de ses articles 16 à 24, est applicable en Nouvelle-Calédonie ». Or, le texte instituant la prescription décennale des titres exécutoires judiciaires est l’article 23 de ladite loi. Cette prescription doit donc être écartée s’agissant de l’exécution des titres judiciaires en Nouvelle-Calédonie. Encore fallait-il déterminer la prescription applicable à ces titres exécutoires, question à laquelle la première chambre civile de la Cour de cassation a dû répondre dans un arrêt du 9 décembre 2020. En l’espèce, suivant acte du 21 février 2006, le Fonds social de l’habitat a consenti à un particulier un prêt destiné à l’acquisition d’un bien immobilier. Par la suite, le 11 janvier 2017, le prêteur a délivré à l’emprunteur un commandement aux fins de saisie immobilière sur le fondement d’un jugement du tribunal de première instance de Nouméa du 8 janvier 2013, devenu irrévocable. Invoquant la prescription de l’action du prêteur, l’emprunteur l’a assigné en annulation du commandement.
La cour d’appel de Nouméa, dans un arrêt du 10 décembre 2018, a déclaré la créance prescrite et a donc fait droit à la demande de l’emprunteur, au motif que « l’article L. 137-2 du code de la consommation ne distingue pas selon le type d’action, et notamment pas entre les actions en paiement en vue d’obtenir un titre exécutoire et celles en recouvrement en vertu d’un tel titre, que ce texte institue un régime de prescription dérogatoire au droit commun applicable à toutes les actions engagées par un professionnel tendant au paiement des sommes dues pour les biens ou les services qu’il a fournis à un consommateur, que le délai de prescription biennal s’applique tant à l’action en vue d’obtenir un titre exécutoire qu’à celle en recouvrement en vertu du titre obtenu et que l’action du prêteur, fondée sur un jugement du 8 janvier 2013, n’a été engagée que le 11 janvier 2017 ».
Le prêteur se pourvut donc en cassation, au motif « qu’en Nouvelle-Calédonie, l’exécution des décisions de justice...