« Mauvais hoir se déshérite » ; mauvais père libère le fils. Ainsi pourrait-on compléter la célèbre maxime à la lumière de l’arrêt rendu ce 31 mars 2021 par la première chambre civile de la Cour de cassation.
Au décès de son frère, un homme avait chargé une société de pompes funèbres de procéder à l’organisation des funérailles. Le prix des prestations n’ayant pas été réglé, le prestataire assigna son client en paiement. Celui-ci appela en garantie son neveu, le fils du défunt, qui avait par ailleurs renoncé à la succession de son père. L’appel en garantie était sollicité sur le fondement des articles 205 et 371 du code civil. Selon le premier de ces textes, « les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin ». D’après le second, « l’enfant, à tout âge, doit honneur et respect à ses père et mère ».
Un jugement fut rendu en dernier ressort le 18 décembre 2019 par le tribunal d’instance de Châteauroux qui rejeta la demande d’appel en garantie aux motifs, d’une part, que les conditions de la subrogation légale n’étaient pas réunies (puisque l’oncle n’avait pas procédé au paiement des frais funéraires), d’autre part, que le défunt n’avait jamais cherché à entrer en contact avec son fils et ne s’était jamais occupé de lui. Les juges du fond semblaient ainsi réaliser une application post-mortem de l’exception d’indignité prévue à l’article 207 du code civil, selon lequel « quand le créancier aura lui-même manqué gravement à ses obligations envers le débiteur, le juge pourra décharger celui-ci de tout ou partie de la dette alimentaire ».
Le succombant forma un pourvoi en cassation. Les deux premières branches du moyen rappelaient fort justement que l’appel en garantie ne nécessite pas que le paiement ait été réalisé : il suffit qu’il doive intervenir en exécution de la condamnation principale susceptible d’être prononcée. La troisième branche arguait de l’article 806 du code civil selon lequel l’héritier qui renonce à la succession « est tenu à proportion de ses moyens au paiement des frais funéraires de l’ascendant ou du descendant à la succession duquel il renonce ». Selon la quatrième et dernière branche, l’application de l’article 371 du code civil n’est pas conditionnée à l’existence d’un lien affectif entre l’enfant et ses parents.
La Cour de cassation fut ainsi saisie d’une question de pur droit à laquelle elle n’avait encore jamais eu l’occasion de répondre : l’exception d’indignité prévue à l’article 207 du code civil s’applique-t-elle à l’obligation du descendant de contribuer aux frais funéraires ?
Les juges du droit répondent positivement et rejettent le moyen. Après avoir détaillé la teneur des articles 205, 207, 371 et 806 du code civil (§§ 4 à 7) la première chambre civile de la Cour de cassation réalise une « combinaison de ces textes » pour en déduire que « lorsque l’actif successoral ne permet pas de faire face aux frais d’obsèques, l’enfant doit, même s’il a renoncé à la succession, assumer la charge de ces frais, dans la proportion de ses ressources », avant d’ajouter : « Il peut toutefois en être déchargé en tout ou partie lorsque son ascendant a manqué gravement à ses obligations envers lui » (§ 8).
C’est donc « à bon droit » que les premiers juges ont énoncé que l’exception...