Mortellement blessé dans un accident de la circulation, un individu laisse derrière lui son épouse et ses quatre enfants qui assignent en justice l’assureur du véhicule impliqué dans l’accident aux fins d’obtenir l’indemnisation de leurs préjudices. Il est d’ores et déjà important de préciser que le défunt percevait de son vivant l’allocation aux adultes handicapés et que son épouse disposait quant à elle du revenu de solidarité active.
La cour d’appel de Douai, par un arrêt du 1er février 2018, a débouté la veuve de sa demande d’indemnisation de son préjudice économique au motif que dès lors que les époux ne vivaient, au jour du décès, « que des seules prestations de solidarité nationale, et qu’après ce décès, la situation nouvelle de Mme E… T…, qui relève toujours de la solidarité nationale, devra être à nouveau appréciée à ce titre, […] celle-ci ne peut justifier d’un préjudice économique réel à la suite du décès de son conjoint ». Les juges du fond ont également précisé que « la sanction du doublement des intérêts légaux prononcée par le premier juge à l’encontre de l’assureur aura cours jusqu’au 4 avril 2016 ».
La veuve forme alors un pourvoi soulevant deux questions devant la Cour de cassation. D’une part, l’AAH perçue par un individu de son vivant peut-elle être prise en considération, à la suite de son décès, pour la détermination du revenu de référence du foyer et l’évaluation du préjudice économique subi par le conjoint survivant ? D’autre part, dans quelles mesures les dispositions de l’article L. 211-13 du code des assurances peuvent-elles être relevées d’office par le juge ?
La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, par sa décision du 24 octobre 2019, casse et annule partiellement l’arrêt attaqué. Elle précise, dans un premier temps, au visa du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, que l’AAH, « versée à la victime avant son décès afin de lui garantir un minimum de revenus, doit être prise en considération pour déterminer le montant de ce revenu annuel de référence du foyer », puis dans un second temps, que les juges du fond ont violé l’article 16 du code de procédure civile en soulevant d’office le moyen tiré de l’application de l’article L. 211-13 du code des assurances sans le soumettre préalablement à la discussion des parties.
Si ce second point retiendra moins longuement l’attention, il n’est cependant pas inintéressant d’exposer en quelques mots les fondements de la solution de la Cour de cassation.
Sur le relevé d’office des dispositions de l’article L. 211-13 du code des assurances. Dans le cadre de la procédure d’indemnisation de l’assurance obligatoire des véhicules terrestres à moteur, il est notamment prévu par l’article L. 211-9 du code des assurances que l’assureur est tenu...