Par Le Batonnier le vendredi 25 mars 2022
Catégorie: Actualités juridiques

Requête en aggravation d’une mesure : un certificat médical oui, mais un certificat élaboré à cette fin

L’exigence d’un certificat médical circonstancié est présentée comme la traduction procédurale du principe de nécessité qui gouverne la protection juridique des majeurs. Elle est appréciée avec rigueur par la Cour de cassation ainsi que le montre une nouvelle fois l’arrêt rendu par la première chambre civile le 2 mars 2022, publié au Bulletin.

En 2019, le fils d’une personne protégée sollicite la conversion en curatelle renforcée de la curatelle simple dont sa mère bénéficie depuis un an. Il est fait droit à sa demande mais la personne protégée interjette appel. La cour d’appel d’Aix-en-Provence, le 2 juillet 2020, confirme le jugement. La majeure persiste. Devant la Cour de cassation, elle allègue l’irrégularité de la saisine du juge des tutelles : selon le moyen, la requête déposée n’était pas conforme aux articles 431 et 442 du code civil car le certificat médical circonstancié qui l’accompagnait était parvenu au juge antérieurement et avait été élaboré, non pas en vue de l’aggravation de la mesure, objet de la demande, mais pour activer un mandat de protection future. La première chambre civile devait donc préciser si, pour que soit recevable la demande de renforcement d’une mesure de protection, doit être fourni, simultanément à la requête, un certificat médical circonstancié élaboré spécialement à cette fin.

La cour casse l’arrêt d’appel et conclut à l’irrecevabilité de la requête et à l’irrégularité de la saisine du juge de première instance. Au visa des articles 431, 442, alinéas 3 et 4, du code civil, combinés aux articles 1218 et 1228 du code de procédure civile, elle rappelle d’abord que le juge peut à tout moment mettre fin à une mesure de protection, la modifier, ou lui substituer une autre mesure, mais qu’il ne peut la renforcer que si la requête qui lui est adressée est accompagnée d’un certificat médical circonstancié ; elle précise ensuite, même si les textes mobilisés ne l’exigent pas expressément, que ne remplit pas cette exigence le certificat médical qui n’a pas été « établi à cette fin ».

L’arrêt apporte ainsi une précision inédite au dispositif régissant la saisine du juge des tutelles. La position retenue, pour exigeante qu’elle paraisse, est incontestablement conforme aux principes fondamentaux de la protection juridique des majeurs.

Une précision inédite

En l’espèce, il était acquis qu’un certificat médical circonstancié, dûment élaboré par un médecin inscrit sur la liste établie par le procureur de la République, avait été fourni, même si on pouvait s’interroger sur le fait qu’il accompagnât réellement, comme l’exigent les textes, la demande d’aggravation de la mesure. En revanche, l’arrêt retient l’argument de la demanderesse selon lequel ce document, ayant été établi à une autre fin, ne remplissait pas les exigences légales.

Un certificat médical circonstancié « accompagnant la requête »

En l’espèce, le requérant sollicitait l’aggravation de la mesure dont bénéficiait sa mère ; le juge des tutelles y avait fait droit en ordonnant la transformation de la curatelle simple en une curatelle renforcée de l’article 472 du code civil (sur la notion d’aggravation de la mesure, v. Rép. civ., v° Majeur protégé, F. Marchadier, n° 150). Lorsque, comme en l’espèce, est sollicitée une mesure plus protectrice, doivent être respectées les mêmes règles que lorsqu’est demandée l’ouverture d’une mesure de protection : le juge ne peut se saisir d’office et la requête doit non seulement émaner d’une des personnes énumérées à l’article 430 du code civil mais être en outre accompagnée, « à peine d’irrecevabilité », d’un certificat circonstancié élaboré par un médecin inscrit (exigence écartée pour une demande de renouvellement à l’identique, d’allègement de la mesure ou de mainlevée de celle-ci ; un simple certificat médical qui peut être rédigé par n’importe quel médecin suffit et son absence ne conduira pas à l’irrecevabilité de la demande ; Civ. 1re, 9 nov. 2016, n° 14-17.735, Dalloz actualité, 25 nov. 2016, obs. V. Da Silva ; D. 2016. 2336

; ibid. 2017. 1490, obs. J.-J. Lemouland et D. Noguéro

; AJ fam....

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :