Au-delà de cette limite votre tarif reste encore et toujours valable…
La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, avait modifié le régime de la postulation en posant, notamment qu’en matière de saisie immobilière, de partage, de licitation et de sûretés judiciaires, les droits et émoluments de l’avocat resteraient fixés sur la base d’un tarif déterminé selon des modalités prévues au titre IV bis du livre IV du code de commerce (Loi n° 71-1130 du 31 déc. 1971, art. 10, al. 2).
Deux années plus tard, le décret n° 2017-862 du 9 mai 2017, relatif auxdits tarifs règlementés devait être publié, suivi par un arrêté du 6 juillet entré en vigueur au 1er septembre 2017.
L’article 1er de l’arrêté du 6 juillet précisait que les tarifs des avocats étaient fixés pour une période transitoire comprise entre le 1er septembre 2017 et le 1er septembre 2019. A quelques jours de cette date, un nouvel arrêté du 8 août 2019 était publié (v. F. Kieffer, Au-delà de cette limite votre tarif reste valable…, Dalloz actualité, 5 sept. 2019). Cet arrêté n’apportait pas de grandes nouveautés puisque le tarif initial (C. com., art. R. 444-71 à R. 444-77 et A. 444-187 à A. 444-202) avait été reconduit pour deux ans, jusqu’au 31 août 2021.
Il tenait cependant compte des modifications apportées au code des procédures civiles d’exécution par la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice dite « loi Justice » à la suite de laquelle l’article L. 322-5 du code des procédures civiles d’exécution avait été complété par un aliéna pour permettre le recours à la vente de gré à gré, en cas d’accord unanime de toutes les parties, même lorsque la vente forcée a été ordonnée et tant que les enchères n’ont pas été ouvertes. Il fallait donc prévoir de réglementer la rémunération de l’avocat pour cette nouvelle modalité de réalisation du bien saisi ce qu’avait précisé l’arrêté du 8 août 2019 en complétant l’article A. 444-191 du code de commerce et en prévoyant que l’avocat poursuivant devait percevoir, en cas de vente de gré à gré intervenant après l’audience d’orientation, le même émolument qu’en cas de vente amiable sur autorisation judiciaire.
Enfin, l’arrêté du 8 août 2019 avait également apporté une précision en matière de distribution du prix de vente. Pour les actes réalisés en matière de distribution, l’article A. 444-192 du code de commerce dans sa rédaction antérieure au nouvel arrêté renvoyait à l’article A. 663-28 du même code relatif au tarif des mandataires judiciaires. Or, cette dernière disposition n’envisageait pas de réduction de moitié en présence d’un seul créancier. Pour les avocats, la procédure de distribution amiable offre en effet deux voies, l’une simplifiée en présence d’un seul créancier (C. pr. exéc., art. R. 332-1), l’autre plus complexe en présence de plusieurs créanciers (C. pr. exéc., art. R. 332-2). Aussi, même si les cas étaient assez rares, certains praticiens estimaient que même en pratiquant la voie simplifiée de l’article R. 332-1 du code des procédures civiles d’exécution, ils pouvaient prétendre à un émolument plein. Le simple ajout qu’en présence d’un seul créancier l’émolument était réduit de moitié, avait pour but de mettre un terme à cette interprétation erronée en complétant l’article A. 444-192 pour y ajouter que dans le cadre de la distribution du prix, l’émolument est réduit de moitié lorsqu’il n’existe qu’un seul créancier.
Reconduction du tarif actuel jusqu’au 31 août 2023
Ainsi, après l’arrêté du 8 août 2019, le tarif applicable depuis le 1er septembre 2017 avait été reconduit jusqu’au 31 août 2021.
Au cours de cette période, la DGCCRF et le CNB devaient s’entendre pour permettre de déterminer les modalités destinées à recueillir des données auprès des avocats dans l’objectif de pouvoir analyser celles-ci pour mettre en place un tarif moins inspiré du tarif ancien (du 2 avr. 1960) mais se rapprochant davantage des critères posés par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
La situation sanitaire au cours de l’année 2020 n’a pas permis de mettre en place ces modalités, lesquelles, au surplus auraient générées des analyses inexploitables tant l’économie au cours de l’année 2020 a été bouleversée. C’est pourquoi, le tarif applicable depuis le 1er septembre 2017, reconduit pour deux années par l’arrêté du 8 août 2019 ne pouvait qu’être reconduit pour deux nouvelles années. C’est chose faite avec l’arrêté du 2 août 2021 qui reconduit le tarif actuel jusqu’au 31 août 2023.
Nouveautés
Deux nouveautés accompagnent cependant cet arrêté.
Taux de remise maximal de 20% sur les émoluments proportionnels
Tout d’abord, le premier alinéa de l’article A. 444-202 du code de commerce est modifié et prévoit désormais que les remises prévues au dernier alinéa de l’article L. 444-2 du même code qui peuvent être consenties par les avocats sur les émoluments proportionnels sont désormais fixés dans la limite d’un taux de remise maximal de 20 % (le taux était de 10 %, mais il a été passé à 20 % pour les autres professions réglementées; il s’agit donc d’un simple alignement) applicable à la part d’émolument calculée sur les tranches d’assiette supérieures ou égales à 100 000 €.
Procédure de distribution : réduction de moitié du droit proportionnel en présence de la procédure simplifiée en présence d’un seul créancier
Ensuite, pour la procédure de distribution du prix de vente, avec une nouvelle modification de l’article A.444-192 du code de commerce, la modification apportée par l’arrêté du 8 août 2019 ayant souvent mal été interprétée par les praticiens et juges de l’exécution.
L’idée à l’origine était de prévoir une tarification pour la procédure complexe en présence de plusieurs créanciers (C. pr. exéc., art. R. 332-2) avec un droit proportionnel, lequel serait réduit de moitié en présence de la procédure simplifiée en présence d’un seul créancier (C. pr. exéc., art. R. 332-1).
La première version du texte avait généré une mauvaise interprétation, certains praticiens appliquant un droit proportionnel plein, même en présence d’une procédure simplifiée. Aussi, lors des discussions avec la DGCCRF pour la rédaction de l’arrêté tarifaire, le CNB avait suggéré une rédaction plus claire sur ce point.
Malheureusement, la rédaction du texte a à nouveau été source de confusion, certains juges de l’exécution considérant que l’émolument devait être réduit de moitié, même en présence d’une procédure complexe, lorsqu’un seul créancier était colloqué, ce qui n’était pas l’esprit du texte.
C’est pourquoi, l’arrêté du 2 août 2021 revient sur l’esprit qui avait fondé ce texte et modifie l’alinéa 2 de l’article A. 444-192 du code de commerce qui dispose désormais que « Lorsque la distribution est soumise aux dispositions de l’article R. 332-1 du code des procédures civiles d’exécution, cet émolument est réduit de moitié. »
Désormais c’est clair : en présence d’une procédure à un seul créancier, l’avocat poursuivant la distribution peut prétendre à un émolument réduit de moitié, en présence d’une procédure à plusieurs créanciers, il peut prétendre à un émolument plein, quel que soit le nombre de créanciers colloqués.
Il n’en reste pas moins que ce tarif reste encore et toujours provisoire et qu’une fois que les modalités destinées à permettre le recueillement des données aura été mis en place, la DGCCRF travaillera sur un tarif répondant au critère de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Donc, la nouvelle limite est bien fixée au 31 août 2023, mais… et au-delà de cette prochaine limite, il n’est pas certain que le tarif en vigueur reste (encore) valable.