Compétence internationale en matière de divorce

La notion de résidence habituelle, très usitée dans les divers règlements européens, continue à susciter des hésitations. Cette notion ne fait l’objet d’aucune définition dans les règlements qui l’utilisent. Pas davantage, les textes ne prévoient un renvoi au droit national des États membres pour en fixer le sens. La notion doit donc recevoir une définition européenne autonome qui, selon la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), doit tenir compte du contexte et des objectifs des dispositions (pt 39). En somme, la notion de résidence habituelle peut recevoir une définition différente selon le texte à appliquer.

En l’espèce, il était question de l’application du règlement n° 2201/2003 du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale (dit règlement Bruxelles II bis) et plus précisément de l’application de son chef de compétence en matière de divorce.

L’article 3-1°, a, du règlement, intitulé compétence générale, offre, en matière de divorce, plusieurs options de compétence au demandeur, fondée sur la résidence : « Sont compétentes […] les juridictions de l’État membre a) sur le territoire duquel se trouve la résidence habituelle des époux, ou la dernière résidence habituelle des époux dans la mesure où l’un d’eux y réside encore, ou la résidence habituelle du défendeur, ou en cas de demande conjointe, la résidence habituelle de l’un ou l’autre époux, ou la résidence habituelle du demandeur s’il y a résidé depuis au moins une année immédiatement avant l’introduction de la demande, ou la résidence habituelle du demandeur s’il y a résidé depuis au moins six mois immédiatement avant l’introduction de la demande et s’il est ressortissant de l’État membre en question […] ». La compétence pour statuer sur le divorce est primordiale, car elle peut induire des compétences accessoires : ainsi la compétence pour statuer sur une demande relative à une obligation alimentaire accessoire au divorce (règl. n° 4/2009, dit « règlement aliments », 18 déc. 2008, art. 3, c) ou pour statuer sur les questions de régime matrimonial en lien avec la demande en divorce (règl. n° 2016/1103, dit « règlement régimes matrimoniaux », 24 juin 2016, art. 5, § 1).

Dans les faits, un homme de nationalité française et une femme de nationalité irlandaise se sont mariés en Irlande. Vingt-quatre années après, l’homme saisit les juridictions françaises d’une demande en divorce. À cette époque et, semble-t-il, depuis quelques années, le demandeur travaillait en semaine en France, où il était installé dans un appartement, mais parallèlement se rendait au domicile familial en Irlande, chaque fin de semaine pour y retrouver son épouse et ses enfants. En somme, le demandeur avait deux résidences : l’une familiale en Irlande, l’autre professionnelle en France. Les juridictions françaises étaient-elles compétentes pour statuer sur son divorce ? Pouvait-on considérer, pour l’application de l’article 3 du règlement n° 2201/2003, qu’une même personne puisse avoir deux résidences...

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