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Coronavirus : conséquences pour le notariat et les contrats en cours

Face à la propagation du virus, le gouvernement a décrété « l’état d’urgence sanitaire » et imposé des mesures drastiques de confinement. Malgré ces mesures, Jean-François Humbert, président du Conseil supérieur du notariat (CSN) a appelé ses confrères sur Twitter le 16 mars dernier à poursuivre une activité à distance. L’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 qui est relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire fournit, un « premier kit de secours » pour les rédacteurs d’actes (M. Mekki, JCP N, n° 4, avr. 2020).

La réception des actes nécessitant la présence physique des parties

Conformément aux dispositions du décret n° 2020-260 du 20 mars 2020, les notaires peuvent recevoir des actes si la présence des parties est justifiée par un motif « familial impérieux ». Ils disposent ainsi d’un pouvoir d’appréciation sur ce point et sur le respect des mesures sanitaires.

Le travail et les signatures à distance

Les offices notariaux demeurent « virtuellement ouverts » (Expression de Me Bertrand Savouré) grâce au télétravail et moyens de communications électroniques. Les notaires disposent de la faculté de procéder à la signature d’un acte authentique électronique à distance. Ce dispositif permet à un notaire de recevoir un acte dans son étude, recueillir la signature de son client, le consentement de l’autre partie à l’acte pouvant être recueilli, le même jour par-devant un autre notaire qui participe à distance à l’acte (art. 20 du décr. n° 71-941 du 26 nov. 1971 relatif aux actes établis par les notaires).

Le recours à ce procédé nécessite au préalable que les parties signent des procurations électroniques. Le CSN préconise, dans une note d’information du 25 mars 2020, le recours systématique à des solutions de signature électronique avancé au sens du règlement européen eIDAS n° 910/2014 du 23 juillet 2014. Les actes solennels qui nécessitent la signature d’une procuration authentique sont exclus de ce dispositif.

Les dispositions du décret n° 2020-395 du 3 avril 2020 autorisant l’acte notarié à distance pendant la période d’urgence sanitaire

En vertu de ce décret, les notaires peuvent, jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire, recevoir seul et à distance le consentement des parties à l’acte pour la régularisation d’un acte authentique électronique (AAE) uniquement. Contrairement au dispositif précédent, aucun mandataire n’est requis, l’acte étant signé électroniquement par le notaire. Ce procédé suppose que le notaire contrôle l’identité des parties et dispose d’un système de visioconférence certifié par le CSN.

Les obstacles au recours à la signature d’un acte à distance

Le notaire doit disposer d’un collaborateur pour représenter une ou plusieurs parties (article 1161 du Code civil) dans le cadre des procurations électroniques. Il doit être en possession de toutes les pièces nécessaires à la rédaction de l’acte. La prorogation d’un état hypothécaire auprès des services de la publicité foncière s’avère difficile durant le confinement. Enfin, le notaire doit être équipé d’un système de visioconférence sécurisé, ce qui n’est pas le cas de tous les offices notariaux.

Les dispositions de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus

Les dispositions qui vont suivre sont enfermées d’une « période juridiquement protégée » déterminée à l’article 1er de l’ordonnance. Elles sont applicables du 12 mars 2020, la loi étant d’application immédiate, au 24 mai 2020, date de la cessation de l’état d’urgence. L’ordonnance prévoit que la prolongation des délais expirera dans un délai d’un mois à compter de la cessation de l’état d’urgence, soit le 24 juin 2020 sauf dérogation.

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La prorogation des délais légaux

La prolongation ne concerne que les délais légaux, les délais conventionnels, étant exclus du champ d’application de l’ordonnance. La prorogation des termes ou des conditions devra résulter d’un accord des parties au contrat, le paiement des obligations contractuelles devant toujours avoir lieu à la date prévue par le contrat (Rapport remis au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020).

Exemple : Levée d’option d’une promesse unilatérale de vente

Monsieur X a signé une promesse unilatérale de vente avec une levée d’option au 15 avril 2020. Le bénéficiaire devra obtenir du promettant une prorogation conventionnelle du délai de la levée d’option.

Exemple : Promesse synallagmatique de vente

Monsieur X a signé une promesse synallagmatique de vente avec une réitération de la vente au 15 avril 2020 sous peine de caducité du contrat. Si le délai est cristallisé durant le confinement, en raison « d’un empêchement provisoire » (M. Mekki, JCP N, n° 4, avr. 2020), il est préférable pour les parties de signer un avenant pour différer la date de réitération.

Le débiteur de l’obligation peut invoquer les dispositions de l’article 2234 du code civil ou encore la force majeure prévue par l’article 1218 du code civil, voire l’imprévision même si la doctrine émet des réserves à cet égard (M Mekki, JCP E n° 13, 27 mars 2020. Act. 317).

Impact de l’ordonnance sur les délais légaux

L’ordonnance ne prévoit ni une suspension générale ni une interruption générale des délais arrivés à terme pendant la période juridiquement protégée (art. 2). Ce mécanisme aura néanmoins pour effet d’interrompre le délai s’il a commencé à courir et de le reporter à la fin de cessation de l’état d’urgence, le 24 mai 2020 et de le prolonger d’un mois soit le 24 juin 2020. À compter de cette date, le délai légalement imparti pour agir court de nouveau dans la limite de deux mois.

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Sont exclus de ce dispositif, les délais dont le terme est échu avant le 12 mars 2020 : leur terme n’est pas reporté. Il en est de même si le terme est fixé au-delà de la période juridique protégée, le bénéficiaire du délai légal ne pourra bénéficier d’aucun report, ces délais n’étant ni suspendus, ni prorogés.

Les articles 6 et 7 de l’ordonnance prévoient une prolongation des délais pour les personnes publiques (art. 6 et 7 de l’ordonnance) qui disposent d’un droit de préemption public ou délivrent des autorisations d’urbanisme.

Sont concernés le délai d’exercice du droit légal de rétractation de l’acquéreur à la condition légale d’obtention de prêt, le délai dont bénéficie le locataire pour préempter dans le cadre d’un congé pour vendre, etc.

Renonciation des parties à la prolongation des délais

Le cadre juridique de l’ordonnance, qui se superpose au droit existant pour offrir des délais supplémentaires, ne s’impose pas aux parties. Elles peuvent écarter ce dispositif et exécuter le contrat (v. la circ. n° CIV/01/20 du 26 mars 2020). La doctrine recommande au notaire rédacteur de rédiger une clause de reconnaissance de conseil donné afin de satisfaire à son devoir d’information et conseil (M. Mekki, JCP N, n° 4, avr. 2020). Le non-respect de l’obligation d’information constitue une condition suffisante du dommage (Civ. 1re, 17 mars 2016, n° 15-16.098, AJDI 2016. 375 image). Le Professeur Mekki, recommande également d’insérer une renonciation expresse afin « d’éviter les comportements déloyaux » (M. Mekki, JCP N, préc.).

Mécanisme du report du terme

Exemple : délai légal de rétractation

Le droit légal de rétractation de dix jours expire le 18 mars 2020.

Ce délai est interrompu et il est reporté à la fin de la période d’urgence sanitaire plus un mois soit le 24 juin 2020. À compter de cette date, l’acquéreur bénéficie du délai de dix jours de rétractation. L’acquéreur aura jusqu’au 4 juillet 2020 pour se rétracter

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Exemple : Prescription 

Une dette est exigible depuis le 20 mars 2015 ; le délai de prescription quinquennale arrive à expiration le 20 mars 2020 suivant la date de l’acte constitutif. Le délai sera reporté à la fin de la période juridiquement protégée le 24 juin auquel il faudra ajouter le bénéfice d’un délai de deux mois.

Le créancier aura jusqu’au 24 août 2020 pour agir.

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Exemple : condition légale suspensive de prêt

L’acquéreur d’un bien immobilier a signé une promesse synallagmatique de vente avec une condition suspensive d’obtention d’un prêt. Le délai légal d’un mois doit expirer le 18 mars 2020.

Ce délai est interrompu et il est reporté à la fin de la période d’urgence sanitaire plus un mois comme le prévoit l’article 2 de l’ordonnance soit le 24 juin 2020. La réalisation de la condition suspensive doit intervenir au plus tard le 24 juillet 2020.

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Variante : les parties ont inséré dans l’avant-contrat un délai de deux mois

Si l’on opère une lecture littérale de l’ordonnance, la condition suspensive est pendante jusqu’au 24 juillet 2020, les délais conventionnels étant exclus de ce dispositif (Pour une interprétation similaire, v. M. Mekki, JCP N, n° 4, avr. 2020). L’immobilisation prolongée de l’immeuble peut avoir des conséquences financières pour le vendeur qui devra assumer certaines charges (assurance, taxe foncière, perte de loyer, etc.). Il appartiendra au notaire instrumentaire de lever toute incertitude en informant les parties sur la portée du mécanisme issu de l’ordonnance et éventuellement de fixer dans le cadre d’un avenant la date de réalisation de la condition suspensive.

Exemple n° 4 : DPU au profit d’une collectivité publique

Le notaire instrumentaire a notifié le droit de préemption le 20 février 2020. Pour rappel, la commune dispose d’un délai de deux mois pour prendre position (C. urb., art. L. 213-2). L’article 7 de l’ordonnance suspend et reporte le délai à la fin de la période juridiquement protégée.

Le délai est suspendu jusqu’au 24 juin et reprend son cours après cette date.

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Variante : le délai du droit de préemption commence à courrier à compter du 20 mars 2020

L’article 7 prévoit que le délai est suspendu pendant la période juridiquement protégée et reprend son cours après cette date. La commune aura jusqu’au 24 août pour préempter. Ce mécanisme ne s’impose pas à la commune qui peut toujours décider de préempter ou de renoncer durant la période juridiquement protégée.

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La paralysie des clauses contractuelles

L’article 4 de l’ordonnance prévoit la paralysie des clauses contractuelles visant à sanctionner l’inexécution du débiteur.

Deux hypothèses sont envisagées par l’ordonnance :

les clauses dont le délai a expiré pendant la période juridiquement protégée sont réputées n’avoir pas pris cours ou produit effet qui sera reporté un mois après cette période, si le débiteur n’a pas exécuté son obligation d’ici là. les astreintes et clauses pénales qui avaient commencé à courir avant le 12 mars 2020. Leur cours est suspendu pendant la période juridiquement protégée, elles reprendront effet dès le lendemain.

Exemple : Clause pénale 

Un contrat, comportant une clause pénale devait être exécuté le 5 mars. Le 6 mars, le créancier a adressé une mise en demeure à son débiteur par laquelle il lui laissait dix jours pour exécuter le contrat, la clause devant produire ses effets à l’issue de ce délai.

Le délai expirant lors de la période juridiquement protégée, la clause pénale ne produira pas ses effets quand bien même le débiteur ne s’exécute pas. Si le débiteur ne s’exécute pas pendant la période juridiquement protégée, la clause ne pourra produire son effet que dans le mois qui suit la fin de cette période.

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Exemple : Clause pénale

Un contrat devait être exécuté le 1er mars ; une clause pénale prévoit une sanction de 100 € par jour de retard. Le débiteur n’ayant pas achevé l’exécution à la date prévue, la clause pénale a commencé à produire ses effets le 2 mars.

Les astreintes et clauses pénales qui ont commencé à courir avant le 12 mars 2020 sont suspendues pendant la période juridiquement protégée. Elle recommencera à produire son effet le lendemain si le débiteur ne s’est toujours pas exécuté.

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Contrats renouvelables par tacite reconduction et contrats dont la résiliation est encadrée dans une période déterminée

L’article 5 de l’ordonnance permet au cocontractant qui n’a pas pu procéder à la résiliation ou s’opposer au renouvellement d’une convention en raison de l’expiration du délai au cours de la période protégée, de bénéficier d’une prolongation de deux mois après la fin de cette période.

Exemple

Un contrat a été conclu le 25 avril 2019 pour une durée d’un an. Celui-ci prévoit que le contrat sera automatiquement renouvelé sauf si l’une des parties adresse une notification à son cocontractant au plus tard un mois avant son terme.

Conformément à l’article 5 de l’ordonnance, le délai ayant expiré durant la période juridiquement protégée, chaque cocontractant pourra s’opposer au renouvellement jusqu’au 24 août 2020.

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