Effet dévolutif de l’appel ou l’art du copier-coller
CTRL-C – CTRL-V. Voilà bien la manière la plus sûre de s’assurer de l’effet dévolutif auprès de la cour d’appel. Il suffit, pour se faire, de reprendre le dispositif de la décision attaqué et non pas ses demandes. À défaut, c’est bien l’appel qui restera collé comme l’illustre cet arrêt publié.
Une société relève appel d’un jugement du tribunal de commerce et la société intimée soulève devant la cour d’appel de Rouen l’absence d’effet dévolutif dès lors que l’appelante aurait visé, sur sa déclaration d’appel, ses demandes au lieu et place des chefs de jugement critiqués. La cour constate l’absence d’effet dévolutif de l’appel, motif pris qu’elle n’est saisie d’aucune demande tendant à voir réformer ou infirmer telle ou telle disposition du jugement entrepris et dire n’y avoir lieu à statuer. Le moyen du pourvoi soutenait que « la déclaration d’appel de la société Normafi indiquait expressément que ce dernier tendait à la « réformation et/ou annulation de la décision sur les chefs » relatifs aux demandes qu’elle énumérait, de sorte que l’appel avait déféré à la cour la connaissance de ces chefs du jugement ; qu’en retenant qu’elle n’aurait été saisie d’aucune demande de la société Normafi tendant à voir réformer « telle ou telle disposition du jugement entrepris », la cour d’appel a violé les articles 4 et 562 du code de procédure civile ». La demanderesse au pourvoi arguait encore qu’il ne pouvait s’agir que d’une nullité de forme conditionnée à la preuve d’un grief et que la cour d’appel avait fait « une application excessivement formaliste de l’article 562 » puisque l’acte d’appel ne laissait pas de place au doute sur l’objet d’appel. La réponse de la deuxième chambre civile pour rejeter le moyen mérite d’être citée in extenso :
« 5. En vertu de l’article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s’opérant pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.
6. En outre, seul l’acte d’appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.
7. Il en résulte que lorsque la déclaration d’appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l’effet dévolutif n’opère pas, quand bien même la nullité de la déclaration d’appel n’aurait pas été sollicitée par l’intimé.
8. Par ailleurs, la déclaration d’appel affectée d’une irrégularité, en ce qu’elle ne mentionne pas les chefs du jugement attaqués, peut être régularisée par une nouvelle déclaration d’appel, dans le délai imparti à l’appelant pour conclure au fond conformément à l’article 910-4, alinéa 1, du code de procédure civile.
9. Ces règles encadrant les conditions d’exercice du droit d’appel dans les procédures dans lesquelles l’appelant est représenté par un professionnel du droit, sont dépourvues d’ambiguïté et concourent à une bonne administration de la justice en assurant la sécurité juridique de cette procédure. Elles ne portent donc pas atteinte, en elles-mêmes, à la substance du droit d’accès au juge d’appel.
10. Dès lors, la cour d’appel, ayant constaté que la déclaration d’appel se bornait à solliciter la réformation et/ou l’annulation de la décision sur les chefs...