Formalisme des conclusions d’appel : la discussion en discussion !
Discussion, du latin discussio, secousse, ébranlement. Ou lorsque l’étymologie révèle tout sens. Ou non-sens. Une société appelante se voit déboutée, selon un arrêt du 19 janvier 2021, de l’ensemble de ses demandes par la cour d’appel d’Amiens pour n’avoir pas exposé ses moyens dans une partie « Discussion ». Pour la cour, les conclusions de l’appelante « se limitent à présenter l’objet de la demande décliné d’abord en fait puis en droit » de sorte qu’il n’existe pas de discussion des prétentions et moyens. L’appelante forme un pourvoi contre l’arrêt en avançant qu’elle avait bien formulé plusieurs prétentions au dispositif de ses conclusions, qu’elle les discutait explicitement dans une partie intitulée « B. En droit » et que la cour ne pouvait dès lors refuser de répondre aux demandes qu’elle avait formulées. Pour casser et annuler en toutes ses dispositions l’arrêt et renvoyer les parties devant la cour d’appel de Douai, la deuxièmeÂÂÂÂ chambre civile livre la réponse suivante :
« Vu l’article 954, alinéas 2 et 3, du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 et l’obligation pour le juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis :
5. Aux termes du deuxième alinéa de ce texte, les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions et si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière distincte.
6. Le troisième alinéa de ce texte dispose que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.
7. Ces dispositions, qui imposent la présentation, dans les conclusions, des prétentions ainsi que des moyens soutenus à l’appui de ces prétentions, ont pour finalité de permettre, en introduisant une discussion, de les distinguer de l’exposé des faits et de la procédure, de l’énoncé des chefs de jugement critiqués et du dispositif récapitulant les prétentions. Elles tendent à assurer une clarté et une lisibilité des écritures des parties.
8. Elles n’exigent pas que les prétentions et les moyens contenus dans les conclusions d’appel figurent formellement sous un paragraphe intitulé « discussion ». Il importe que ces éléments apparaissent de manière claire et lisible dans le corps des conclusions.
9. Pour confirmer le jugement, l’arrêt retient que les conclusions de l’appelante ne comprenant aucune partie discussion au sens de l’article 954, alinéas 2 et 3, du code de procédure civile puisque qu’elles se limitent à présenter l’objet de la demande décliné d’abord en fait puis en droit, de sorte que la cour d’appel, qui n’a pas à répondre au moindre moyen invoqué dans une partie « Discussion », ne peut que confirmer le jugement, sans qu’il soit utile d’examiner la question de la recevabilité des moyens nouveaux opposée par les intimés.
10. En statuant ainsi, alors que les conclusions de l’appelante...