L’efficacité d’une DNI perdure après la cessation de l’activité professionnelle !
En un peu plus d’une décennie, la problématique de l’insaisissabilité des immeubles d’un entrepreneur sous procédure collective est devenue un incontournable du droit des entreprises en difficulté. Chacune des décisions rendues en ce domaine est scrutée et retient l’attention des praticiens et de la doctrine (v. réc., Com. 10 mars 2021, n° 19-21.971, à paraître ; Dalloz actualité, 6 avr. 2021, obs. B. Ferrari ; D. 2021. 573 ; ibid. 1736, obs. F.-X. Lucas et P. Cagnoli ).
L’arrêt ici rapporté n’échappe pas à la règle et son apport dépasse même les frontières du droit de la faillite.
En l’espèce, le 19 novembre 2013, un entrepreneur individuel a déclaré insaisissables ses droits sur une maison d’habitation lui appartenant ainsi qu’à son épouse commune en bien. Cette déclaration a été publiée le 28 novembre 2013 au service de la publicité foncière et le 23 juin 2014 au répertoire des métiers. Malheureusement, le 9 février 2015, l’entrepreneur a fait publier, au même répertoire, la cessation de son activité professionnelle. Le 30 juin 2015, une procédure de liquidation judiciaire était ouverte à son encontre. Or, le débiteur ayant opposé au liquidateur les dispositions de la Déclaration notariée d’insaisissabilité (DNI), le mandataire l’a assigné en inopposabilité de celle-ci. Las, l’arrêt d’appel confirme l’opposabilité de la DNI au liquidateur et ce dernier forme un pourvoi en cassation.
Astucieuse, l’argumentation du mandataire reposait sur une interprétation littérale de l’article L. 526-1 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2015-990 du 6 août 2015.
Ce texte prévoyait notamment que « par dérogation aux articles 2284 et 2285 du code civil, une personne physique immatriculée à un registre de publicité légale à caractère professionnel ou exerçant une activité professionnelle agricole ou indépendante peut déclarer insaisissables ses droits sur l’immeuble où est fixée sa résidence principale (…) ». Partant, la radiation du débiteur du répertoire des métiers, intervenue antérieurement à l’ouverture de la procédure collective, aurait entraîné la cessation des effets de la DNI, puisque formellement, le débiteur n’avait plus la qualité « d’entrepreneur » entendue comme étant une personne physique immatriculée à un registre de publicité légale à caractère professionnel. Par conséquent, l’insaisissabilité de l’immeuble ayant cessé en raison de la perte de la qualité d’entrepreneur, le bien pouvait être appréhendé par le liquidateur afin d’être réalisé dans l’intérêt collectif des créanciers.
Au-delà de la technique, le pourvoi posait surtout la question inédite de l’opposabilité d’une DNI à une liquidation judiciaire ouverte postérieurement à la cessation de l’activité professionnelle de l’entrepreneur.
Las pour le liquidateur, la Cour de cassation ne souscrit pas à son analyse et rejette le pourvoi.
Pour la Haute juridiction, la DNI, peut faire publier la personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, n’a d’effet qu’à l’égard des créanciers dont les droits naissent, après sa publication, à l’occasion de l’activité professionnelle du déclarant. Dès lors, les effets de cette déclaration subsistent aussi longtemps que les droits des créanciers auxquels elle est opposable ne sont pas éteints, sauf renonciation du déclarant lui-même, de sorte que la cessation de son activité professionnelle ne met pas fin, par elle-même, aux effets de la déclaration.
L’arrêt sous...