Nécessité d’indemniser la perte de rémunération liée aux titres-restaurant

Le principe de réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime (Civ. 2e, 28 oct. 1954, JCP 1955. II. 8765, note Savatier) impose de déterminer avec exactitude les préjudices subis par cette dernière. Cela est particulièrement délicat en matière de dommage corporel, un dommage unique étant source d’une multitude de préjudices (S. Rouxel, Recherche sur la distinction du dommage et du préjudice en droit privé français, Thèse Grenoble II, 1994). La nomenclature Dintilhac, bien qu’elle n’ait pas de valeur normative formelle (M. Robineau, Le statut normatif de la nomenclature Dintilhac, JCP 2010. 612), est un guide utile. Un contentieux régulier porte néanmoins, tant sur l’articulation entre les différents postes de préjudices, que sur leur contenu précis. L’arrêt rendu par la deuxième chambre civile le 30 mars 2023 en est une nouvelle illustration.

En l’espèce, la victime d’un accident de la circulation a été assignée par l’assureur de l’autre véhicule impliqué en raison d’un désaccord sur l’indemnisation. La cour d’appel a, d’abord, évalué sa perte de gains professionnels sans tenir compte, ni d’une éventuelle perte de revenus consécutive à la rupture conventionnelle de son contrat de travail, ni de la perte de la contribution de l’employeur à l’acquisition de titres-restaurant. Elle n’a, ensuite, pas pris en compte la perte de droits à la retraite au titre de l’incidence professionnelle. Elle a, enfin, considéré que le préjudice sexuel permanent de la victime ne devait pas donner lieu à une indemnisation distincte, dès lors que sa réparation avait déjà eu lieu au titre du Déficit fonctionnel permanent (DFP). Ces différents points sont contestés par la victime dans son pourvoi.

Défaut de base légale concernant le refus d’indemnisation de la perte de revenus et de la perte de droits à la retraite consécutives à la rupture conventionnelle du contrat de travail

La Cour de cassation considère que les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard du principe de réparation intégrale, d’une part, en ne vérifiant pas « si la rupture conventionnelle du contrat de travail de M. [F], intervenue après son reclassement au sein de l’entreprise dans un poste adapté à ses séquelles, était, ou non, en lien avec son accident » (pt 11) et, d’autre part, en ne recherchant pas « si M. [F], qui avait sollicité l’indemnisation de la perte de ses droits à la retraite pour la période postérieure à la rupture conventionnelle de son contrat de travail, justifiait, ou non, d’un tel préjudice en lien avec ses séquelles » (pt 14).

Il est évident que la cour d’appel aurait dû davantage motiver sa décision pour refuser...

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