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Quand tous les moyens sont bons – prescription ou exclusion – pour éviter de garantir

Une société prenant la forme d’une agence a exercé les fonctions de syndic d’une copropriété. Elle a été désignée en qualité d’administrateur provisoire sur requête d’un copropriétaire, en l’espèce une seconde société ayant pour principal associé le gérant de l’agence précitée. Par un jugement du 22 novembre 2010, devenu irrévocable, la responsabilité de la société de syndic, placée en cours de procédure en liquidation judiciaire, a été retenue et la créance du syndicat des copropriétaires au passif de cette société a été fixée à la somme de 55 389,53 € en principal correspondant au montant des frais et honoraires perçus en tant qu’administrateur provisoire, à la somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts et à celle de 2 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile. Ces sommes n’ayant pu être recouvrées, le syndicat des copropriétaires a assigné le 13 août 2013 l’assureur de responsabilité de la société de syndic et la société de courtage, par l’intermédiaire de laquelle le contrat d’assurance avait été conclu, afin d’obtenir le paiement des causes du jugement du 22 novembre 2010 ainsi que des dommages-intérêts pour résistance abusive.

Par un arrêt rendu le 15 mars 2018, la cour d’appel de Montpellier a confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Montpellier du 17 mars 2015 ayant déclaré recevables les demandes du syndicat des copropriétaires représenté par son nouveau syndic comme n’étant pas prescrite. Mais la cour d’appel a infirmé partiellement le jugement et, statuant à nouveau, a déclaré que la garantie responsabilité civile est acquise en faveur du syndicat des copropriétaires et condamné en conséquence l’assureur à payer au syndicat les sommes de 43 527,53 € et de 5 000 €, avec les intérêts au taux légal depuis l’assignation initiale en date du 13 août 2013, et condamné solidairement l’assureur et le courtier à payer au syndicat des copropriétaires de 3 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’assureur et le courtier ont formé un pourvoi en cassation. La deuxième chambre civile, dans un arrêt rendu le 6 février 2020, rappelle, en premier lieu, l’effet interruptif de la prescription d’une demande en justice, même en référé, tendant à la communication sous astreinte du contrat d’assurance par l’assureur et le courtier, puis précise, en second lieu, les critères permettant de retenir une faute dolosive d’un professionnel au sens de l’article L. 113-1, alinéa 2, du code des assurances.

L’interruption de la prescription résultant de l’action en référé introduite contre l’assureur tendant à la communication forcée de la police d’assurance

L’assureur a reproché à l’arrêt de confirmer le jugement ayant déclaré recevables les demandes du syndicat des copropriétaires comme n’étant pas prescrites. À cet effet, il a soutenu, en premier lieu, que « l’interruption de la prescription ne peut s’étendre d’une action à une autre, sauf lorsque les deux actions, bien qu’ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première ; que tel n’est pas le cas de l’action en référé tendant à obtenir la communication forcée d’un contrat d’assurance et l’action directe de la victime contre l’assureur, la première ne tendant pas à obtenir la garantie de l’assureur et n’en étant même pas le préalable nécessaire ; d’où il suit qu’en décidant le contraire pour déclarer que l’interruption résultant de l’action en référé introduite contre l’assureur et le courtier les 12 et 14 décembre 2012, tendant à la communication forcée d’une police d’assurance avait interrompu le délai d’exercice de l’action directe introduite par assignation du 13 août 2013, après l’expiration de la prescription quinquennale applicable, la cour d’appel a violé l’article 2241 du code civil ».

En second lieu, l’assureur a invoqué que « l’interruption de la prescription en ce qui concerne le règlement de l’indemnité peut résulter de l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception de l’assuré à l’assureur ; d’où il suit qu’en décidant que l’envoi d’une lettre recommandée à l’assureur par la victime exerçant l’action directe, qui n’est pas l’assurée et ne se substitue pas à ce dernier mais exerce un droit propre, interrompait la prescription de l’action directe, la cour d’appel a violé l’article L. 114-2 du code des assurances ».

Par un arrêt du 6 février 2020, la deuxième chambre civile a jugé que le moyen n’était pas fondé, car « en application de l’article 2241 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, une demande en justice, même en référé, interrompt la prescription ; qu’ayant constaté que le syndicat des copropriétaires avait introduit les 12 et 14 décembre 2012 une action en référé contre l’assureur et le courtier pour obtenir la communication sous astreinte du contrat d’assurance, la cour d’appel en a exactement déduit que la prescription de l’action directe avait été interrompue jusqu’à la date de l’ordonnance rendue le 23 mai 2013 et que l’action engagée le 13 août 2013 n’était pas prescrite ».

Rappelons, d’une part, que l’article L. 114-2 du code des assurances (modifié par ord. n° 2017-1433, 4 oct. 2017, art. 4) dispose que « la prescription est interrompue par une des causes ordinaires d’interruption de la prescription et par la désignation d’experts à la suite d’un sinistre. L’interruption de la prescription de l’action peut, en outre, résulter de l’envoi d’une lettre recommandée ou d’un envoi recommandé électronique, avec accusé de réception, adressés par l’assureur à l’assuré en ce qui concerne l’action en paiement de la prime et par l’assuré à l’assureur en ce qui concerne le règlement de l’indemnité ». Il est appelé à une réforme de la prescription biennale, notamment de retenir une durée quinquennale similaire au droit commun (D. Noguéro, Provocation à la réforme de la prescription biennale au sujet de l’article R. 112-1 du code des assurances [Au-delà d’un nouvel arrêt de la Cour de cassation], RRJ, Droit prospectif, 2016-2, p. 725-753).

D’autre part, l’article 2240 du code civil (modifié par la L. n° 2008-561, 17 juin 2008, art. 1) prévoit que « la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription », puis l’article 2241 (également modifié par la L. n° 2008-561, art. 1) retient que « la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. Il en est de même lorsqu’elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l’acte de saisine de la juridiction est annulé par l’effet d’un vice de procédure ».

Depuis la réforme de la prescription (A. Astegiano-La Rizza, L’assurance et la réforme de la prescription en matière civile, RGDA 2008, n° 4, p. 833 s. ; C. Brenner et H. Lécuyer, La réforme de la prescription, JCP N 2009, n° 12, étude 1118, p. 24 s.) l’article 2241 a remplacé la citation en justice par la demande en justice. En outre ont été supprimés le commandement et la saisie (B. Beignier et J.-M. Do Carmo Silva [dir.], Code des assurances 2019, 13e éd., LexisNexis, 2019, sous art. L. 114-2, p. 200).

La jurisprudence concevait déjà, en amont de la réforme, que l’effet interruptif concerne toute assignation, que ce soit une action au fond ou en référé. Tantôt il pourra s’agir d’un référé-expertise, qui aura cet effet interruptif (Civ. 1re, 18 juin 1996, n° 94-14.985, D. 1998. 45 image, obs. H. Groutel image ; RGDA 1996. 624, note R. Maurice). Tantôt un référé-provision aura ce même effet (Civ. 1re, 27 févr. 1996, n° 93-11.560, RGAT 1996. 196, note A. Besson ; 12 févr. 1991, nos 88-19.826 et 86-18.678, RTD civ. 1991. 797, obs. R. Perrot image ; RGAT 1996. 337, note J. Landel et H. Margeat).

Il paraît logique que l’effet interruptif s’étende à un référé mis en œuvre aux fins de communication d’un contrat d’assurance, lequel permet au tiers souhaitant intenter une action directe de connaître l’étendue de la garantie. On constate trop souvent un refus de communication des polices d’assurance dans ce contexte, a fortiori injustifiable lorsqu’on est en présence d’assurances obligatoires qui ont été instituées – insistons – avec l’objectif de garantir l’indemnisation des tiers victimes autant que la dette de responsabilité de l’assuré.

La faute dolosive d’un syndic de copropriété et l’exigence d’un scénario prémédité

S’agissant du second moyen, l’assureur a reproché à l’arrêt d’infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de déclarer que la garantie responsabilité civile est acquise en faveur du syndicat des copropriétaires, de le condamner, en conséquence à payer au syndicat des copropriétaires les sommes de 43 527,53 € et de 5 000 €, avec les intérêts au taux légal depuis l’assignation initiale en date du 13 août 2013 et de le condamner solidairement avec la société de courtage à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il a été soutenu que l’assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d’une faute intentionnelle ou dolosive de l’assuré.

Pour les demandeurs au pourvoi, la cour d’appel constate qu’une même personne était à la fois le gérant de l’agence syndic de la copropriété litigieuse et le principal associé de la société civile immobilière (SCI) propriétaire des lieux occupés par l’agence et copropriétaire au sein de la copropriété litigieuse. Par l’effet de la requête en désignation d’un administrateur provisoire, cette personne ès qualités d’administrateur provisoire remplaçait cette même personne ès qualités de syndic. Le syndic avait commis une faute ayant consisté à ne pas convoquer dans les délais l’assemblée générale, sans motif légitime et la vacuité des motifs présidant à la requête en désignation d’un administrateur provisoire, ajoutant que « l’habile requête d’IKBF, qui omettait de préciser toutes les qualités de son principal associé, constituait une parade permettant de continuer la gestion quoiqu’il arrive, soit couvert d’une administration provisoire, malgré la promesse non tenue d’une assemblée générale le 22 juillet, en invoquant des raisons techniques non démontrées ». Selon eux, la cour d’appel énonce enfin que le syndic « “promettant d’un côté de tenir l’assemblée générale en juillet, mais ne pouvant ignorer de l’autre côté en sa qualité d’associé principal que la SCI IKBG sollicitait sa nomination provisoire” et obtenu sous cette dernière casquette des honoraires sans commune mesure avec ceux qu’il aurait reçus en qualité de syndic ».

Pour l’assureur et le courtier, il « résultait de l’ensemble de ces constatations que l’agence Pacific, syndic, avait, usant des différentes qualités d’Olivier Bernard, son gérant, manœuvré de telle sorte qu’il avait sciemment organisé sa nomination en qualité d’administrateur provisoire, manœuvre qui lui avait permis d’obtenir le versement d’honoraires sans commune mesure avec ceux qu’il aurait reçus en qualité de syndic, ce qui établissait qu’il s’était volontairement placé dans une situation dont il ne pouvait ignorer qu’elle conduirait inéluctablement au dommage occasionné ».

En définitive, les demandeurs au pourvoi ont estimé que la cour d’appel n’avait pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé l’article L. 113-1, alinéa 2, du code des assurances, en décidant que « la démonstration n’est pas certaine que la faute ayant entraîné sa responsabilité ait eu un caractère volontaire et dolosif au moment de sa commission » et que « la preuve n’est pas rapportée d’un scénario prémédité englobant l’abstention volontaire de convoquer l’assemblée générale, dans le dessein de se faire nommer administrateur provisoire jusqu’à ce que le juge du fond démontre scrupuleusement l’absence de démonstration des raisons invoquées à l’appui de la requête en désignation d’un administrateur provisoire ».

Néanmoins, pour la Cour de cassation, aux termes de motifs détaillés, le moyen n’est pas fondé, car, « ayant retenu par une appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve soumis à son examen que la démonstration n’était pas certaine de ce que la faute ayant entraîné la responsabilité du syndic ait eu un caractère volontaire et dolosif, sa carence pouvant aussi bien résulter de sa négligence, de son imprévoyance, de son incompétence personnelle ou organisationnelle au sein de son cabinet, ce qui constituait une faute simple, seule démontrée avec certitude, puis relevé que la preuve n’était pas rapportée d’un scénario prémédité englobant l’abstention volontaire de convoquer l’assemblée générale, dans le dessein préconçu de se faire nommer administrateur provisoire, la cour d’appel a pu en déduire qu’il n’était pas justifié d’une faute dolosive au sens de l’article L. 113-1 du code des assurances ».

La haute juridiction continue ainsi à réaliser un contrôle, serré, de la qualification juridique des faits relatifs à une faute dolosive ou intentionnelle.

On peut se féliciter tout d’abord que la haute juridiction ne fasse plus référence à la disparition d’un aléa à l’instar de décisions récentes (R. Bigot, La faute intentionnelle et la faute dolosive, des sœurs jumelles ?, sous Civ. 2e, 25 oct. 2018, n° 16-23.103, bjda.fr 2018, n° 60). L’observateur attentif de la jurisprudence relevait ainsi que la faute dolosive consistait en « un manquement conscient de l’assuré, délibéré même, à une obligation à laquelle il était tenu, dont il résulterait la suppression de l’aléa inhérent au contrat d’assurance, même sans intention de rechercher le dommage, surtout dans toute son ampleur » (D. Noguéro, Faute intentionnelle ou dolosive ? Tradition confirmée de la troisième chambre civile de l’exigence du dommage tel qu’il est survenu, RDI 2015. 425 image). La tendance à ne plus déborder la définition de cette faute qualifiée sur l’aléa paraît ainsi se confirmer (D. Noguéro, Vers une évolution de la troisième chambre civile pour une conception moins stricte de la faute intentionnelle ou dolosive ?, RDI 2017. 485 image).

De plus, la quête d’autonomie ou d’identité propre de la faute dolosive, assez récente (Civ. 3e, 7 oct. 2008, n° 07-17.969, RDI 2008. 561, obs. L. Karila image ; Civ. 2e, 28 févr. 2013, n° 12-12.813, Dalloz actualité, 15 mars 2013, obs. T. de Ravel d’Esclapon ; D. 2013. 2058, chron. H. Adida-Canac, R. Salomon, L. Leroy-Gissinger et F. Renault-Malignac image ; 12 sept. 2013, n° 12-24.650, Dalloz actualité, 24 sept. 2013, obs. T. de Ravel d’Esclapon ; D. 2014. 571, chron. L. Lazerges-Cousquer, N. Touati, H. Adida-Canac, E. de Leiris, T. Vasseur et R. Salomon image), ou renouvelée (J. Bigot, A. Pélissier et L. Mayaux, Faute intentionnelle, faute dolosive, faute volontaire : le passé, le présent et l’avenir, RGDA 2015. 75 s.), conduit à mieux la distinguer de la faute intentionnelle, du moins ne plus la confondre avec celle-ci, compte tenu des dispositions « gémellaires » du code des assurances (R. Bigot, La faute intentionnelle et la faute dolosive, des sœurs jumelles ?, art. préc).

Cette ouverture – à la conception stricte – est encouragée par certains auteurs (Dalloz actualité, 15 nov. 2018, obs. J.-D. Pellier ; S. Abravanel-Jolly, De la notion de la faute dolosive exclusive du risque, LEDA déc. 2018, n° 111q1, p. 2 ; Notion de faute intentionnelle en assurance : une nécessaire dualité, www.actuassurance.com 2009, n° 11) et se justifie pleinement dans le domaine de professions très réglementées disposant de doubles mécanismes de garantie permettant de manière quasi systématique d’indemniser la victime. L’effet de la faute intentionnelle ou dolosive y est moins radical pour l’auteur d’un tel agissement ayant la qualité de particulier.

Pour cette raison, on peut comprendre qu’en aval, la Cour de cassation hésite moins que par le passé à caractériser une telle faute et qu’en amont, l’assureur historique et prédominant des avocats et des professions du droit hésite également un peu moins à soulever le moyen.

À ce titre, quelques jours précédant l’affaire commentée, par un arrêt du 8 janvier 2020 précisément, il a été retenu que commet une faute intentionnelle exclusive de la garantie de l’assureur, au sens de l’article L. 113- 1, alinéa 2, du code des assurances, manifestant sa volonté de créer le dommage tel qu’il est survenu, l’avocat qui, ayant conscience du caractère fictif des opérations et de l’impossibilité de restituer les fonds encaissés par ses soins, a ainsi participé sciemment à des faits pénalement répréhensibles (R. Bigot, La faute intentionnelle de l’avocat, sous Civ. 1re, 8 janv. 2020, n° 18-19.782, Lexbase avocats n° 300, 6 févr. 2020 ; comp. pour la faute intentionnelle non caractérisée d’un avocat, compte tenu des éléments probants insuffisants pour établir sa volonté de rechercher le dommage résultant du défaut de remboursement de l’indemnité d’immobilisation versée au titre d’une promesse de vente, v. R. Bigot, Le radeau de la faute intentionnelle inassurable (à propos de Civ. 1re, 29 mars 2018, nos 17-11.886 et 17-16.558, bjda.fr 2018, n° 57). Dans ce contexte de comportements pénalement répréhensibles, la haute juridiction conçoit la faute intentionnelle comme celle ne s’inscrivant que dans le dommage recherché par l’assuré en réalisant l’infraction (Civ. 2e, 8 mars 2018, n° 17-15.143, LEDA 2018, 111e8, obs. F. Patris).

La doctrine a relevé, à propos de cette autre décision, que celle-ci « se rapproche d’une espèce ayant donné lieu à un arrêt de cassation dans laquelle il était justement reproché aux juges du fond d’avoir retenu une telle faute (Civ. 2e, 29 mars 2018, n° 17-11.886, LEDA 2018, 111g2, obs. S. Abravanel-Joly). La différence entre les deux réside manifestement dans une plus forte implication de l’avocat dans les faits délictueux dans notre cas et conduisant à l’exclusion de la garantie de l’assureur. Le rapprochement des deux décisions montre à quel point la caractérisation d’une faute intentionnelle dépend des éléments de faits » (D. Krajeski, Caractérisation de la faute intentionnelle exclusive de la garantie de l’assureur, Hebdo édition privée n° 811, 30 janv. 2020).

Il est ajouté que « cela justifie, en l’espèce, le rappel effectué par la Cour de cassation sur le pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond. Il ne faut cependant pas s’y tromper, un contrôle est exercé sur la façon dont les juges vont appliquer la définition prétorienne (volonté de créer le dommage tel qu’il est survenu) encore précisée dans la décision » (ibid. ; comp. J. Bigot et alii, Traité de droit des assurances. Le contrat d’assurance, 2e éd., LGDJ, t. 3, 2014, n° 1638).

Certes, pour des particuliers, la faute intentionnelle ne peut se déduire de la seule conscience de ce que le risque assuré se produira, mais de la volonté de créer le dommage (Civ. 2e, 28 mars 2019, n° 18-15.829, RGDA 2019, 116n2, obs. A. Pimbert). Mais pour certains professionnels, cette volonté de créer le dommage, ou quasi-intention de nuire au client, est rarissime, pour ne pas dire inexistante. En réalité, il s’agit le plus souvent d’un comportement « affairiste », en d’autres termes d’une faute lucrative, le professionnel ne recherchant pas directement le dommage mais ayant parfaitement conscience que l’acte qu’il réalise, non seulement sera fortement susceptible de générer des dommages, mais surtout qu’il lui apportera un gain supérieur à l’éventuelle franchise en cas de sinistre (R. Bigot, La faute intentionnelle ou le phœnix de l’assurance de responsabilité civile professionnelle, RLDC 2009/59, n° 3406, p. 72-77).

Cette analyse conduit à de « subtiles distinctions entre conscience et volonté » et « se rapproche d’autres décisions rendues dans un cadre professionnel identique et dans lesquelles on retrouve une façon similaire de caractériser la faute intentionnelle », au point que l’on puisse s’étonner avec la doctrine qu’il s’agisse d’une « curieuse matière tout de même que le droit des assurances où la victime se voit contrainte de minimiser les agissements du responsable pour espérer être indemnisée par l’assureur » (D. Krajeski, art. préc.).

Peut-être est-il temps, pour sortir de ce paradoxe et éviter ces subtiles distinctions, de traiter juridiquement, dans l’assurance, « les comportements socialement les plus nocifs » par un autre mécanisme, comme une déchéance (S. Pellet, La faute dolosive est inassurable : la deuxième chambre persiste et signe, RDC 2019, n° 115u3, p. 42).

En l’état, puisque tous les moyens peuvent paraître bons, selon certains assureurs, pour éviter d’indemniser, remercions la Cour de cassation de jouer pleinement son rôle de gardienne du temple de la garantie, certes au prix d’une lecture de l’article L. 113-1 du code des assurances imprégnée d’un raffinement élevé de l’esprit.

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