Révision de la jurisprudence sur le délai de recours en révision
Voilà quelques années que la Cour de cassation juge que l’article 528-1 du code de procédure civile s’applique indifféremment aux voies de recours ordinaires et extraordinaires, et indistinctement en sous ordre de ces dernières : une partie qui a comparu n’est recevable à former ni un pourvoi en cassation ni un recours en révision contre un jugement qui n’a pas été notifié dans les deux ans de sa date (quant à la tierce opposition, une partie ayant comparu ne saurait en régulariser une en toute hypothèse). La Cour de cassation révise sa propre jurisprudence : l’article 528-1 ne s’applique finalement pas au recours en révision.
Avant de nous pencher sur le revirement opportun, revenons sur la jurisprudence antérieure.
Jurisprudence antérieure
Le recours en révision est une voie de recours extraordinaire aux côtés du pourvoi en cassation et de la tierce-opposition. Il est régi par le droit commun des voies de recours extraordinaire et diverses dispositions spéciales, figurant aux articles 593 à 603 du code de procédure civile.
Extraordinaire parmi les recours extraordinaires, le recours en révision est essentiellement ouvert en cas de fraude d’une partie ayant volontairement et délibérément trompé la juridiction saisie. Il permet de remettre en cause un jugement passé en force de chose jugée (insusceptible de recours suspensif), voire irrévocable (insusceptible de recours autre qu’en révision).
Les causes d’ouverture sont « précisément et limitativement énumérées par l’article 595 » du code de procédure civile : fraude, rétention d’une pièce décisive, éléments de preuve reconnus ou judiciairement déclarés faux (Civ. 2e, 18 févr. 1999, n° 97-11.767, inédit). L’article 596 l’enserre dans un délai de deux mois à compter du jour où l’intéressé a eu connaissance de la cause de révision, la jurisprudence étant stricte sous ce rapport, exigeant même de l’auteur du recours qu’il apporte la preuve de cette date (Civ. 2e, 12 févr. 2004, n° 02-11.913, D. 2004. 736 ; 13 sept. 2007, n° 06-20.757 ; 24 juin 1987, n° 86-11.547) et plus généralement de la recevabilité de son recours (Civ. 2e, 8 nov. 2001, n° 00-15.125, inédit).
Le contact de cet article 596 – et plus généralement de la logique du recours en révision – avec l’article 528-1 du code de procédure civile devait susciter des étincelles jurisprudentielles. De droit commun, l’article 528-1 forme en binôme avec l’article qui précède. Selon l’article 528, les délais de recours courent par principe à compter de la notification du jugement. Cependant, selon l’article 528-1, si le jugement n’a pas été notifié dans les deux ans de son prononcé, la partie ayant comparu n’est plus recevable à exercer un recours à titre principal ; cette disposition n’étant applicable qu’au jugement tranchant tout le principal ou mettant fin à l’instance sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident. L’idée est, au choix, de sanctionner l’inertie procédurale des parties ou de voir dans leur passivité processuelle une forme d’acquiescement tacite.
Déjà, une tension est palpable. L’article 528-1 a vocation à sécuriser les décisions demeurées non notifiées dans les deux ans de leur date s’agissant des recours principaux d’une partie ayant comparu. En contrepoint, le recours en révision procède de l’adage classique au nom duquel la fraude corrompt tout : dans l’ordre juridique français, ne peuvent demeurer des décisions – même irrévocables – ayant été surprises...