Utiles précisions sur les pouvoirs du juge commis à la surveillance des opérations de partage

Par son avis rendu le 18 décembre 2020, la Cour de cassation a pris position sur l’épineuse question de l’étendue des pouvoirs du juge commis, désigné pour surveiller les opérations de partage successoral complexes. La question se posait essentiellement en termes de répartition des compétences entre le président du tribunal judiciaire et le juge commis, lorsqu’il en a été désigné un.

Les textes

De fait, les textes organisent de manière très précise les pouvoirs du président du tribunal judiciaire en matière de successions et notamment d’indivision, tout comme les règles procédurales qui président à son intervention. Ainsi, l’article 1379 du code de procédure civile énumère les demandes qui, en matière successorale, relèvent de la compétence du président du tribunal judiciaire statuant sur requête, par contraste avec l’article 1380 du même code qui vise les demandes sur lesquelles le président du tribunal doit statuer suivant les règles de la procédure accélérée au fond (anc. procédure en la forme des référés, sous l’empire du droit antérieur au décr. n° 2019-1419 du 20 déc. 2019).

Parallèlement, et sans que l’articulation entre ces textes ne soit précisée, le code de procédure civile prévoit l’hypothèse dans laquelle l’indivision serait suffisamment complexe pour justifier la désignation, d’une part, d’un notaire pour procéder aux opérations de partage et, d’autre part, d’un juge pour surveiller ces opérations : le juge commis. Les pouvoirs dudit juge sont ensuite précisés par les articles 1365 à 1376 du même code. Pour l’essentiel, le juge se voit confier des missions consistant à débloquer les situations de conflit qui entravent le bon déroulement de la procédure de partage devant le notaire. Il peut ainsi désigner un expert (C. pr. civ., art. 1365), convoquer les parties pour tenter une conciliation (C. pr. civ., art. 1366 et 1373), adresser des injonctions, prononcer des astreintes et procéder au remplacement du notaire commis (C. pr. civ., art. 1371, al. 2), désigner un représentant pour pallier la défaillance d’un héritier lors de l’établissement de l’état liquidatif (C. pr. civ., art. 1367) ou du tirage au sort des lots (C. pr. civ., art. 1376 et 1363), octroyer une prorogation de délai (C. pr. civ., art. 1370), ou encore effectuer un rapport sur les désaccords persistant entre les parties (C. pr. civ., art. 1375). L’ensemble de ces prérogatives semble résumé par l’affirmation de l’article 1371, alinéa 1er, du code de procédure civile, aux termes duquel le juge commis « veille au bon déroulement des opérations de partage et au respect du délai » imparti au notaire pour dresser un état liquidatif. Ce rôle d’appui qui lui est confié dans le cadre des opérations de partage se prolonge dans la fonction de juge de la mise en état que lui confère l’article 1373, alinéa 5, du code de procédure civile.

Tout cela laisse entendre que le rôle du juge commis se cantonnerait à l’encadrement de la procédure de partage, sans aller jusqu’à la prise de décisions de fond concernant les modalités du partage ou la gestion de l’indivision au cours de la procédure de partage. Une disposition, toutefois, laisse planer un doute sur l’étendue de ses pouvoirs : celle de l’article 1371, alinéa 3, du code de procédure civile, qui l’autorise, sans plus de précision, à statuer « sur les demandes relatives à la succession pour laquelle il a été commis ». C’est justement tout l’objet de la demande d’avis soumise à la Cour de cassation, que de solliciter une interprétation de la portée de ce texte.

La demande d’avis

Dans l’affaire ayant donné lieu à la saisine de la Haute juridiction, un notaire désigné pour effectuer les opérations de liquidation partage d’une indivision successorale a saisi le juge commis pour lui demander l’autorisation de procéder, à titre provisionnel, au remboursement de sommes avancées par certains indivisaires pour le compte de l’indivision ainsi qu’au paiement de toutes charges et dettes à venir, par prélèvement sur les prix de vente de biens immobiliers dépendant de l’indivision successorale. La vente desdits biens avait été autorisée judiciairement par une décision précédente.

Or, ce type de demande relève en principe de la compétence du président du tribunal judiciaire, fondée sur les articles 815-6 et 815-11 du code civil.

En effet, l’article 815-6, alinéa 1er, du code civil permet au président de prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l’intérêt commun, ce qui peut viser le paiement des dettes et charges de l’indivision par prélèvement sur les fonds...

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