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Mise en liquidation judiciaire d’un dirigeant de fait dont la responsabilité est recherchée

La situation est originale. Une filiale est mise en liquidation judiciaire. La société mère est poursuivie, en tant que dirigeante de fait de sa filiale, sur le fondement de la responsabilité pour insuffisance d’actif, par le liquidateur de la filiale qui pratique contre elle une saisie conservatoire. Mais elle est elle-même mise en liquidation judiciaire avant d’être condamnée.

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Bernard Preynat ne doit pas « payer le prix du présent »

Le parquet a requis « au moins » huit ans de prison à l’encontre du prêtre Bernard Preynat qui comparaissait à Lyon pour agressions sexuelles sur dix scouts, âgés de 7 à 15 ans entre 1986 et 1989, au tribunal judiciaire de Lyon. Il encourt jusqu’à dix ans de prison. Délibéré le 16 mars 2020.

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Rapport sur les CPH : la Chancellerie conteste tout regroupement

Une brise de panique a soufflé sur les réseaux sociaux depuis quelques jours. Des avocats ont publié un rapport – non finalisé – intitulé Répartition des effectifs des CPH, émanant de la direction des services judiciaires en date de décembre 2019 (en annexe de cet article). « Alerte ! Disparition programmée des conseils des prud’hommes dans ce document de travail de la Chancellerie !

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Rapport sur les CPH : la Chancellerie conteste tout regroupement

Une brise de panique a soufflé sur les réseaux sociaux depuis quelques jours. Des avocats ont publié un rapport – non finalisé – intitulé Répartition des effectifs des CPH, émanant de la direction des services judiciaires en date de décembre 2019 (en annexe de cet article). « Alerte ! Disparition programmée des conseils des prud’hommes dans ce document de travail de la Chancellerie ! Ni les avocats ni les magistrats ne sont au courant de cette nouvelle atteinte à la justice de proximité ! », s’est exclamée, sur Twitter, Gwenaëlle Vautrin, ancienne bâtonnière de Compiègne, qui a diffusé le document.

Il prévoit plusieurs scenarii : le regroupement de conseils des prud’hommes et le regroupement d’une section agriculture et encadrement par département si l’activité de la section est inférieure à cent affaires par an, la répartition des postes selon l’organisation actuelle et le regroupement d’une section agriculture et encadrement par département si l’activité de la section est inférieure à cent affaires par an.

Pour le syndicat de la magistrature (SM), « ces réunions semblent avoir abouti, au vu du document dont nous avons eu connaissance, à des conclusions précises et étayées en termes statistiques dont certaines – un des deux scenarii envisagés – prévoient tout simplement la suppression de vingt-deux conseils de prud’hommes ».

Et d’ajouter : « il ne faut pas être grand clerc pour en déduire que les effectifs des greffes vont également être supprimés en conséquence. Il est également incompréhensible que les organisations syndicales n’aient pas été associées à ce groupe de travail dont l’un des objectifs est tout simplement la réorganisation judiciaire du contentieux prud’homal ».

Interrogée, la Chancellerie précise qu’il s’agit « d’un groupe de travail convenu dans le cadre des travaux du Conseil supérieur de la prud’homie pour tenir compte de l’impossibilité pour certains CPH de constituer des sections ». L’objectif serait « de mieux répartir les conseillers de prud’hommes entre les CPH afin de réduire la vacance de postes ». La Chancellerie assure qu’il n’est pas question de « toucher au nombre de CPH, raison pour laquelle il s’agit de répartition des effectifs et pas de carte judiciaire ».

Rapport sur les CPH : la Chancellerie conteste tout regroupement

Une brise de panique a soufflé sur les réseaux sociaux depuis quelques jours. Des avocats ont publié un rapport – non finalisé – intitulé Répartition des effectifs des CPH, émanant de la direction des services judiciaires en date de décembre 2019 (en annexe de cet article). « Alerte ! Disparition programmée des conseils des prud’hommes dans ce document de travail de la Chancellerie !

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Stationnement payant : il faut rétablir les droits des usagers

En 2019, le Défenseur des droits a vu décupler les réclamations concernant le système des forfaits post-stationnement, issu de la dépénalisation du stationnement payant. Dans un rapport publié le 14 janvier, il présente vingt recommandations pour rétablir les droits des usagers, mis à mal par un dispositif complexe et parfois mal appliqué par les collectivités.

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Proposition de loi Nogal : les mesures phares

Le mardi 14 janvier 2020, Mickael Nogal député LREM de Haute-Garonne, a présenté une proposition de loi visant à sécuriser les relations entre bailleurs et locataires.

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Retraites des avocats : le Conseil national des barreaux veut négocier avec le premier ministre

Les propositions de Nicole Belloubet et de Laurent Pietraszewski, le secrétaire d’État aux retraites, n’ont pas convaincu les instances de la profession. 

Outre un premier courrier adressé mardi 14 janvier à Christiane Féral-Schuhl, le secrétariat général du ministère de la justice a fait parvenir à la profession, quelques heures avant le début de l’assemblée générale, un autre document précisant que le gouvernement se tenait « prêt à organiser avec vous et vos experts une série de réunions sur les garanties qui pourront être apportées pour assurer la prise en compte des spécificités de la profession d’avocat dans le système universel de retraite ».

Une première réunion porterait « sur les éléments permettant de maintenir une autonomie de la Caisse nationale des Barreaux français (CNBF) parallèlement à son intégration dans le système universel de retraite ». Une deuxième rencontre serait axée sur « les incidences de la réforme sur les avocats qui perçoivent 32 000 € et un PASS ». Enfin, « les mesures d’accompagnement pour s’assurer que les avocats ne sont pas perdants à la réforme » feraient l’objet du dernier rendez-vous. 

Des « discussions techniques » bienvenues – une délégation devrait être désignée – mais insuffisantes, explique un élu du Conseil national des barreaux (CNB). Il en sera rendu compte aux avocats et l’assemblée générale a voté le principe d’une consultation finale des avocats.

La motion réitère néanmoins son désaccord avec les projets de loi de réforme des retraites et rappelle que le courrier du 14 janvier « n’apporte aucune solution aux inquiétudes et à la légitime colère des avocats, qui appellent au maintien de leur régime autonome. La solution de cette crise sans précédent est de nature politique et relève de l’arbitrage du premier ministre ». Le CNB attend donc d’être reçu par Édouard Philippe. 

La grève est maintenue.

Au cours de l’assemblée générale, « certains ont fait part de leurs réserves quant à la prolongation de la grève » mais ces avis étaient minoritaires, selon un membre de l’instance.

Retraites des avocats : le Conseil national des barreaux veut négocier avec le premier ministre

Les membres du Conseil national des barreaux ont voté à l’unanimité, lors de l’assemblée générale extraordinaire organisée en urgence vendredi 17 janvier en vue de se prononcer sur les dernières propositions du gouvernement, la poursuite de la grève pour la semaine du 20 janvier.

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Réforme de la procédure civile : modèles d’actes

Alors que l’essentiel de la réforme de la procédure civile est entré en vigueur le 1er janvier 2020, les éditions Dalloz vous proposent une sélection de modèles d’actes de procédure à jour de la réforme, rédigés en collaboration avec Me C. Lefevre Le Bihan, avocate au Barreau de Toulouse.

À cette occasion, nous avons par ailleurs réuni dans un dossier « Réforme de la procédure civile » l’ensemble des contributions relatives aux décrets de décembre 2019 relatifs à la réforme de la procédure civile, à la procédure applicable aux divorces contentieux et à la séparation de corps ou au divorce sans intervention judiciaire, et à la procédure accélérée au fond devant les juridictions judiciaires.

Nous vous en souhaitons bonne lecture.

Réforme de la procédure civile : modèles d’actes

Alors que l’essentiel de la réforme de la procédure civile est entré en vigueur le 1er janvier 2020, les éditions Dalloz vous proposent une sélection de modèles d’actes de procédure à jour de la réforme, rédigés en collaboration avec Me C. Lefevre Le Bihan, avocate au Barreau de Toulouse.

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Responsabilité du banquier présentateur du chèque comportant les noms de deux bénéficiaires

Si la juxtaposition du nom de deux bénéficiaires sur un chèque ne constitue pas, en elle-même, une anomalie apparente, la banque présentatrice est cependant tenue, lors de la remise d’un chèque portant une telle mention par l’un des deux bénéficiaires pour encaissement à son seul profit, de s’assurer du consentement de l’autre, sauf circonstances particulières lui permettant de tenir un tel consentement pour acquis.

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Brevet provisoire et transformation des certificats d’utilité en brevet : parution du décret

Un décret du 8 janvier, pris en application de la loi « PACTE », détermine les modalités de la transformation d’une demande de certificat d’utilité en demande de brevet d’invention. Il crée également une procédure pour le dépôt d’un brevet provisoire et fixe les conditions de sa mise en conformité ou de sa transformation en certificat d’utilité.

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Le délégant ne peut pas modifier unilatéralement une offre

Si le délégant peut librement négocier les offres des candidats, il ne peut pas modifier ou compléter de sa propre initiative et unilatéralement une offre.

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Suspension de l’avocat avant l’expiration du délai de production du mémoire complémentaire

Le Conseil d’État a jugé que la mesure de suspension de l’avocat du requérant prononcée avant l’expiration du délai de production d’un mémoire complémentaire fait obstacle au désistement d’office.

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Conjoncture immobilière : derniers chiffres

Dans leur dernière note de conjoncture, les Notaires de France confirment le dynamisme du marché et la tendance des prix à la hausse. Ils font pas ailleurs le point sur le comportement des étrangers non-résidents face à l’achat immobilier.

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[I]Naked[/I] est une contrefaçon : confirmation en appel

Presque deux ans après la décision de première instance, la cour d’appel s’est prononcée sur le sort de l’œuvre de Jeff Koons, Naked, sculpture en porcelaine représentant deux enfants nus se tenant mutuellement par l’épaule.

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Airbnb n’a pas besoin de carte professionnelle

Par un arrêt très attendu, la Cour de justice de l’Union européenne a décidé que la France ne pouvait exiger d’Airbnb la possession d’une carte professionnelle d’agent immobilier.

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Conditions d’une expulsion portant sur un lieu habité

Dans sa rédaction issue de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté (JO 28 janv.), l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution énonce que, lorsque l’expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu’à l’expiration d’un délai de deux mois qui suit la délivrance du commandement d’avoir à quitter les lieux, sans préjudice des dispositions des articles L. 412-3 à L. 412-7 de ce même code.

Il s’agit là de faire bénéficier la personne expulsée d’une période supplémentaire pour trouver un nouveau logement. Cependant, afin de veiller à un juste équilibre dans la protection des différents intérêts en présence, cette légitime préoccupation doit également être envisagée à l’aune des droits du créancier qui souhaite obtenir son dû au plus tôt. Il y a donc lieu de définir avec précision les conditions d’application de ce délai légal. À cet égard, certains éléments de réponse sont apportés par le législateur. Ainsi, aussitôt l’existence de ce délai affirmée, le premier alinéa de l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution précise-t-il que le juge peut réduire ou supprimer ce délai, « notamment lorsque la procédure de relogement effectuée en application de l’article L. 442-4-1 du code de la construction et de l’habitation n’a pas été suivie d’effet du fait du locataire ». De même, dans son second alinéa, cet article se poursuit en précisant que ce délai ne trouve pas application quand le juge qui ordonne l’expulsion constate que les personnes expulsées « sont entrées dans les locaux par voie de fait ». On comprend, dès lors, que des squatteurs ne sauraient tirer profit de ce délai.

Dans la présente affaire, si apparemment aucune voie de fait n’avait été commise, la légitimité de la présence dans les locaux du gérant de la société, contre qui la procédure d’expulsion a été diligentée, n’en était pas moins contestée. En l’espèce, un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) autorise une société à occuper des terrains pour une durée déterminée afin d’y exploiter un club de golf. Par la suite, le tribunal de grande instance compétent ordonne l’expulsion de cette société ainsi que de tous les occupants de son chef, sous le bénéfice de l’exécution provisoire. La société, à qui un commandement d’avoir à quitter les lieux a été délivré, saisit alors le juge de l’exécution afin d’obtenir l’arrêt de la procédure d’expulsion pour un délai de six mois, sans succès. Elle interjette donc appel de ce jugement et son gérant intervient volontairement en cause d’appel. La cour d’appel donne doublement satisfaction à la société et à son gérant, en déclarant recevable l’intervention volontaire et en prononçant l’annulation de la procédure d’expulsion ; ce que conteste l’EPIC en formant un pourvoi en cassation.

S’agissant de la régularité de l’intervention volontaire du gérant de la société, l’EPIC conteste – en prenant appui sur l’article 554 du code de procédure civile, dont les dispositions doivent être combinées avec celles de l’article 325 de ce même code – le fait que les demandes formées par l’intervenant (demandes visant le paiement de dommages et intérêts en réparation de préjudices subis du fait de la procédure d’expulsion, au titre du coût de son déménagement et de la destruction de ses meubles ainsi que de son préjudice moral) procèdent directement de la demande originaire de la société (demande visant l’annulation du procès-verbal d’expulsion et le paiement de sommes à titre de dommages et intérêts en réparation de la destruction de bâtiments modulaires) et tendent aux mêmes fins. Cependant, pour la Cour de cassation, le moyen avancé n’est pas fondé. Reprenant une solution bien établie (v. not. Cass., ch. mixte, 9 nov. 2007, n° 06-19.508, Dalloz actualité, 19 nov. 2007, obs. V. Avena-Robardet ; D. 2007. 2955, obs. V. Avena-Robardet image ; AJDI 2008. 47 image ; JCP G 2008. II. 10070, note Serinet), les hauts magistrats rappellent en effet que « l’appréciation de l’intérêt à agir de l’intervenant volontaire et du lien suffisant qui doit exister entre ses demandes et les prétentions originaires relève du pouvoir souverain des juges du fond ».

S’agissant du bénéfice du délai de deux mois prévu par l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution précité, les demandes de l’EPIC ne seront pas non plus couronnées de succès. Selon la Cour de cassation, la cour d’appel a légalement justifié sa décision d’annulation de la procédure d’expulsion et de condamnation à payer diverses sommes à titre de dommages et intérêts, en établissant que ledit gérant intervenant volontaire à la procédure d’appel « avait son domicile dans les locaux de la société […] qui avait été expulsée, faisant ainsi ressortir qu’il habitait effectivement les lieux ». La solution retenue est rigoureuse envers l’EPIC, dès lors qu’il apparaît que la convention au titre de laquelle la société expulsée occupait les lieux indiquait que le terrain litigieux avait été mis à sa disposition pour être exclusivement destiné à une activité de practice de golf, aucune autre utilisation n’étant autorisée sous peine de révocation immédiate. Le souci de protection du gérant l’a donc emporté.

Conditions d’une expulsion portant sur un lieu habité

La deuxième chambre civile se prononce sur les modalités d’application du délai d’attente de deux mois qui suit la délivrance du commandement d’avoir à quitter les lieux, prévu par l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution, lorsque l’expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef.

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Appel incident et appel provoqué : de faux jumeaux

L’appel incident et l’appel provoqué ont tous deux en commun de permettre à une partie intimée en cause d’appel de solliciter la réformation d’un ou plusieurs chefs du jugement frappé d’appel.

La similitude s’arrête là : ils obéissent à des règles procédurales profondément distinctes.

Par arrêt du 9 janvier 2020, la deuxième chambre civile résout une question inédite intéressant le formalisme de l’appel incident dans les procédures d’appel avec représentation obligatoire. Outre la solution apportée, cet arrêt permet de revenir sur un précédent arrêt tout aussi important de la même chambre du 6 juin 2019, lequel concernait le formalisme de l’appel provoqué dans les procédures d’appel avec représentation obligatoire.

L’appel incident soumis aux dispositions de l’article 911 du code de procédure civile

L’arrêt du 9 janvier 2020 statue sur le formalisme de l’appel incident formé par un intimé à l’égard d’un co-intimé défaillant.

Les principaux événements procéduraux peuvent se résumer ainsi :

• M. X forme, le 15 février 2017, appel d’un jugement à l’encontre d’un sieur Z et d’un sieur Y.

• M. X notifie ses conclusions d’appelant à l’avocat de M. Z le 12 mai 2017.

• M. Z forme un appel incident et signifie ses conclusions à M. Y le 5 juillet 2017 dans le délai de deux mois qui est alors imparti par l’article 909 du code de procédure civile1.

• Le 18 juillet 2017, M. Y constitue avocat devant la cour.

• M. Z notifie à l’avocat de M. Y ses conclusions le 3 août 2017.

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M. Y va soulever l’irrecevabilité de l’appel incident de M. Z au motif qu’étant défaillant, il n’a pas été assigné dans le délai de deux mois ayant couru à compter de la notification des conclusions de l’appelant, soit avant le 12 juillet 2017.

M. Z soutenait pour sa part que :

s’agissant d’un appel incident, il avait pour obligation de déposer ses conclusions d’appel incident à l’intérieur du délai qui lui était alors imparti pour conclure (soit deux mois),
  et qu’en vertu de l’article 911 précité, il devait signifier ses conclusions au co-intimé défaillant dans le mois suivant l’expiration de son délai pour conclure (soit 2+1 = 3 mois).

La cour d’appel de Rennes va juger :

d’une part, que « l’intimé appelant incident doit faire délivrer une assignation au co-intimé défaillant » et qu’ainsi, la signification des conclusions opérée le 5 juillet 2017 est sans valeur,
  d’autre part, que cette assignation doit être délivrée au « co-intimé défaillant dans les deux mois suivant la notification des conclusions de l’appelant à peine d’irrecevabilité » et qu’ainsi, M. Z ne pouvait se prévaloir de la notification des conclusions d’incident au conseil de M. Y le 3 août suivant.

La cour d’appel de Rennes fait ainsi primer les dispositions combinées des articles 5512 et 683 du code de procédure civile sur celles combinées des articles 909 et 9114 du même code.

Elle applique ainsi à l’appel incident les mêmes règles procédurales que l’appel provoqué.

La Cour de cassation casse l’arrêt rendu par la cour d’appel de Rennes et juge, sans renvoi, que l’appel incident de M. Z à l’encontre de M. Y est recevable.

Elle estime que la seule obligation pesant sur M. Z était de signifier ses conclusions d’appel incident à M. Y, régulièrement intimé par l’appelant, dans les délais prescrits par les articles 909 et 911 du code de procédure civile, soit avant le 12 août 2017, sauf à ce que M. Y constitue avocat avant la signification.

Sans véritable surprise, la deuxième chambre considère que :

les conclusions d’appel incident doivent être signifiées au co-intimé défaillant sans qu’il soit besoin de procéder par voie d’assignation,
  l’intimé qui forme appel incident dispose, à compter de la notification des conclusions de l’appelant, d’un délai trois mois5 (2+1) pour signifier ses conclusions d’appel incident au co-intimé défaillant ou les notifier à son avocat s’il se constitue à l’intérieur de ce délai de 3 mois, et ce conformément à sa jurisprudence habituelle6.

L’arrêt de la Cour de cassation tient ainsi compte des spécificités propres à la procédure d’appel avec représentation obligatoire introduites par la première réforme de la procédure d’appel opérée par le décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009.

En effet, l’article 911 du code de procédure civile impose à l’intimé de signifier aux parties défaillantes les conclusions prises dans le cadre de l’article 909 du code de procédure civile.

L’article 909 du code de procédure civile vise quant à lui les conclusions en réponse à celle de l’appelant mais aussi les conclusions portant appel incident.

Enfin, un appel incident peut être formé devant la cour soit contre l’appelant, soit contre un co-intimé ayant constitué avocat, soit, enfin, contre un co-intimé défaillant.

Ainsi, dans les procédures d’appel avec représentation obligatoire, l’intimé appelant incident doit seulement signifier au co-intimé défaillant ses conclusions portant appel incident.

Deux cas de figure se présenteront selon que l’intimé défaillant constitue ou non avocat dans le délai de l’article 9117 :

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Une solution radicalement différente en matière d’appel provoqué

Rappelons que l’appel provoqué est le mécanisme procédural qui permet à un intimé de former appel incident du jugement à l’encontre d’une partie de première instance qui n’a pas été intimée par l’appelant principal dans son acte d’appel.

On retrouve régulièrement cette notion dans les dossiers de construction ; ce qu’illustre d’ailleurs l’arrêt rendu le 6 juin 2019 par la deuxième chambre civile.

Il ressort des termes de cet arrêt que l’État français a acquis auprès de la société Cerep un immeuble qu’elle a fait construire par divers intervenants, dont la société Bouygues.

Se plaignant de la persistance de vices apparents, l’État a fait assigner devant le tribunal de grande instance la société Cerep, laquelle a demandé a être relevée et garantie par divers intervenants, dont Bouygues.

Le tribunal de grande instance a condamné la société Cerep à restituer une certaine somme à l’État et a condamné divers intervenants à la garantir, dont la société Bouygues.

La société Bouygues a relevé appel de ce jugement à l’encontre de la société Cerep sans intimer l’État.

La société Bouygues a conclu le 20 septembre 2016, ouvrant ainsi à l’égard de la société Cerep le délai de l’article 909 du code de procédure civile augmenté du délai de distance de deux mois dont elle bénéficiait en raison de sa domiciliation à l’étranger.

Le 20 janvier 2017 (jour d’expiration du délai 909), la société Cerep a conclu, formant notamment appel provoqué contre l’État.

Le 25 janvier 2017, la société Cerep a signifié l’appel provoqué à l’État.

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La cour d’appel de Paris a jugé cet appel provoqué irrecevable.

La Cour de cassation rejette le pourvoi formé par la société Cerep en rappelant, conformément à sa jurisprudence constante8, que l’appel provoqué doit être formé par voie d’assignation dans le délai imparti par l’article 909 du code de procédure civile sans que ce délai puisse être prorogé dans les conditions prévues par l’article 911 du même code.

La solution est là encore parfaitement logique : l’article 911 du code de procédure civile vise l’hypothèse dans laquelle une partie intimée en cause d’appel est défaillante.

Or l’appel provoqué est généralement formé par une partie intimée à l’encontre d’une partie étrangère à la procédure d’appel, ce qui explique qu’en ce qui la concerne, elle doive être assignée dans le délai prévu à l’article 909 du code de procédure civile.

Illustration schématique de la solution :

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Conseil pratique :

Identifier dès la constitution sur l’appel principal la nécessité de former ou non un appel provoqué à l’encontre de parties de première instance non intimées devant la cour.

Mise en garde :

L’intimé doit aussi envisager de former un appel principal dans l’hypothèse où il souhaite absolument poursuivre la réformation du jugement.

En effet, le décret du 6 mai 2017 a introduit à l’article 550 du code de procédure la précision selon laquelle l’appel incident ou l’appel provoqué ne sera pas reçu si l’appel principal est caduc.

 

 

Notes

1. C. pr. civ., art. 909, dans sa rédaction alors en vigueur : « L’intimé dispose, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, d’un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant prévues à l’article 908 pour conclure et former, le cas échéant, appel incident ».
2. C. pr. civ., art. 551 : « L’appel incident ou l’appel provoqué est formé de la même manière que le sont les demandes incidentes ».
3. C. pr. civ., art. 68 : « Les demandes incidentes sont formées à l’encontre des parties à l’instance de la même manière que sont présentés les moyens de défense. Elles sont faites à l’encontre des parties défaillantes ou des tiers dans les formes prévues pour l’introduction de l’instance. En appel, elles le sont par voie d’assignation ».
4. C. pr. civ., art. 911, dans sa rédaction alors en vigueur : « Sous les sanctions prévues aux articles 908 à 910, les conclusions sont notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour. Sous les mêmes sanctions, elles sont signifiées dans le mois suivant l’expiration de ce délai aux parties qui n’ont pas constitué avocat ; cependant, si, entre-temps, celles-ci ont constitué avocat avant la signification des conclusions, il est procédé par voie de notification à leur avocat ».
5. Attention : 4 mois (3+1) depuis le décr. n° 2017-891, 6 mai 2017, ayant modifié l’article 909 du code de procédure civile.
6. Civ. 2e, 27 juin 2013, n° 12-20.529 P, Dalloz actualité, 15 juill. 2013, obs. M. Kebir ; D. 2013. 2058, chron. H. Adida-Canac, R. Salomon, L. Leroy-Gissinger et F. Renault-Malignac image ; ibid. 2014. 795, obs. N. Fricero image ; 4 sept. 2014, n° 13-22.586 P, Dalloz actualité, 19 sept. 2014, obs. M. Kebir ; RTD civ. 2015. 197, obs. N. Cayrol image ; 10 avr. 2014, n° 12-29.333 P, Dalloz actualité, 2 mai 2014, obs. M. Kebir ; D. 2014. 1722, chron. L. Lazerges-Cousquer, N. Touati, T. Vasseur, E. de Leiris, H. Adida-Canac, D. Chauchis et N. Palle image ; RTD civ. 2015. 197, obs. N. Cayrol image.
7. Schémas à jour du décr. n° 2017-891, 6 mai 2017.
8. Civ. 2e, 9 janv. 2014, n° 12-27.043 P, Dalloz actualité, 24 janv. 2014, obs. M. Kebir ; D. 2014. 795, obs. N. Fricero image ; ibid. 1722, chron. L. Lazerges-Cousquer, N. Touati, T. Vasseur, E. de Leiris, H. Adida-Canac, D. Chauchis et N. Palle image ; ibid. 2015. 287, obs. N. Fricero image ; 27 sept. 2018 n° 17-13.835 P, Dalloz actualité, 26 oct. 2018, obs. R. Laffly.

Appel incident et appel provoqué : de faux jumeaux

À sept mois d’écart, deux arrêts de la Cour de cassation se penchent sur ces faux frères jumeaux que sont l’appel incident et l’appel provoqué, et mettent en lumière leur dissemblance.

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Affaire du « Mur des cons » : condamnation pour injure publique confirmée en appel

Le site d’information Atlantico a publié en avril 2013 un article contenant une vidéo enregistrée par un journaliste dans les locaux du Syndicat de la magistrature. On y découvrait que les photographies de plusieurs personnes, publiques et anonymes, avaient été épinglées sur un pan de mur, sur lequel était inscrite la mention « Avant d’ajouter un con, vérifiez qu’il n’y est pas déjà ». Parmi ces personnes figurait le père d’une jeune femme tuée en 2007 par un récidiviste, qui était intervenu à plusieurs reprises dans les médias. Celui-ci a porté plainte devant le tribunal correctionnel et s’est constitué partie civile du chef d’injure publique envers un particulier. Renvoyée devant le tribunal correctionnel, la magistrate a été déclarée coupable des faits poursuivis et condamnée à une amende de 500 € avec sursis (TGI Paris, 17e ch., 31 janv. 2019, Légipresse 2019. 155, note N. Verly et I. Soskin image ; Dalloz actualité, 5 déc. 2018 ; ibid., 7 déc. 2018 ; ibid., 10 déc. 2018, art. T. Coustet). L’intéressée a fait appel. Plusieurs questions relatives aux infractions de presse étaient soulevées dans cette affaire.

La publicité

L’élément de publicité prévu à l’article 23 de la loi du 29 juillet 1881, condition d’application de la loi sur la presse, était discuté. S’agissant d’un affichage public, la publication est réalisée par l’exposition au regard du public. Or la publicité n’est pas caractérisée si les propos ont été diffusés à des destinataires constituant entre eux une communauté d’intérêt. Toutefois, la seule présence d’un destinataire extérieur à ce groupement est susceptible d’établir la publicité du propos.

La cour précise tout d’abord que le fait d’afficher un panneau dans un local syndical et celui de diffuser sur internet une vidéo montrant ce panneau sont deux faits distincts ; la responsabilité de la magistrate ne pouvait être recherchée que pour le premier. Ensuite, la cour note que le « Mur des cons » était exposé dans un local destiné aux réunions syndicales. Ce lieu privé est devenu accidentellement et occasionnellement un lieu public dès lors que diverses personnes extérieures au Syndicat de la magistrature y sont entrées avec l’accord des représentants du syndicat. Pour les lieux dits « publics par accident », qui sont en principe fermés au public, le juge doit vérifier si la profération ou l’exposition a été accomplie avec la conscience que le propos ou le support serait effectivement entendu ou vu par des tiers. En l’espèce, la cour relève que, s’il n’est pas démontré que la magistrate a accompagné le journaliste devant le « Mur des cons », ce qu’avait retenu le tribunal, il ressort que celle-ci a rejoint l’interviewer devant le panneau et a parlé avec lui de son contenu. Il est jugé que l’appelante avait donc nécessairement conscience que le panneau serait vu par des tiers.

L’imputabilité des propos

Se posait ensuite la question de l’imputabilité des propos et de la qualité d’éditrice de la magistrate, au sens de l’article 42 de la loi du 29 juillet 1881. En effet, la responsabilité dite « en cascade », qui édicte une responsabilité à la charge, notamment, du directeur de la publication et de l’éditeur, se double, en matière d’infractions commises par affichage, de la recherche de la participation personnelle du prévenu à la conception, la réalisation, la publication ou la diffusion du support de l’injure.

La cour note qu’il n’est pas établi que la création du « Mur des cons » soit issue d’une décision collective prise par les instances du Syndicat de la magistrature ni que l’appelante y ait personnellement participé. Toutefois, le syndicat a accepté que ses adhérents confectionnent le panneau en cause sur un mur de ses locaux, en mettant celui-ci à leur disposition et en leur fournissant ainsi les moyens du placardage. La cour ajoute que la juge mise en cause était la présidente du Syndicat de la magistrature en avril 2013, date de la mise en ligne de la vidéo. Elle était poursuivie en qualité de représentante du syndicat et non à titre personnel, et a bien eu la volonté – tout au moins la conscience – de rendre l’affichage public. Ainsi, la magistrate est considérée comme éditrice au sens de l’article 42 de la loi du 29 juillet 1881.

Le caractère injurieux des propos

Enfin se posait la question du caractère injurieux du propos incriminé.

La qualification de ce substantif a fait l’objet d’analyses différentes par la jurisprudence, en fonction des éléments du contexte entourant sa profération, son exposition ou sa publication. La cour confirme ici le caractère injurieux du mot « con » employé dans ce contexte. Elle relève que, même si l’apposition des photographies épinglées sur le mur a pu être une forme d’exutoire pour les juges, pour protester contre des attaques dont ils avaient fait l’objet, et même si les prises de position publiques des personnes représentées étaient davantage dénoncées que les personnes elles-mêmes, les motifs de ces affichages n’ont pu être démontrés. L’injure visait donc bien les personnes représentées sans faire référence à un fait précis ni à un débat d’idées que pourrait légitimer une liberté d’expression accrue en matière syndicale. La cour ajoute que la conscience d’employer un terme injurieux caractérise l’élément intentionnel du délit.

Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a déclaré la magistrate coupable d’injure publique. La cour confirme le montant de la peine fixée à 500 € avec sursis. Le requérant, qui s’était constitué partie civile, se voit en outre allouer une somme de 5 000 € de dommages-intérêts.

Dans cette affaire, le Rassemblement national et Robert Ménard, lequel figurait également parmi les personnalités « épinglées » sur le Mur des cons, avaient également fait appel après avoir été déboutés en première instance. La cour confirme, par deux arrêts distincts en date du 19 décembre 2019 (nos 19/01410 et 19/01382), les décisions des premiers juges ayant déclaré recevables les constitutions de partie civile du parti et de l’homme politique, mais les infirme en ce qu’ils ont débouté ces derniers de leurs demandes. La cour retient, à l’inverse du tribunal, que la partie civile a, de façon suffisamment claire, poursuivi l’affichage exposé dans le local syndical par une plainte avec constitution de partie civile régulière. La magistrate est condamnée à verser à chacun des requérants 1 € de dommages-intérêts.

Ces trois arrêts ne sont pas définitifs et ont fait l’objet d’un pourvoi.

Affaire du « Mur des cons » : condamnation pour injure publique confirmée en appel

Par un arrêt du 19 décembre 2019, la cour d’appel de Paris a confirmé la condamnation pour injure publique de la présidente du Syndicat national de la magistrature dans les locaux duquel avait été affiché un panneau intitulé « Mur des cons », filmé par un journaliste venu interviewer la magistrate, avant d’être diffusé sur internet.

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Incidence d’une fusion-absorption sur le contenu de la BDES

Aux termes des articles L. 2323-8 et R. 2323-1-5 du code du travail, alors applicables, les informations figurant dans la base de données économiques et sociales portent sur l’année en cours, sur les deux années précédentes et intègrent des perspectives sur les trois années suivantes. Il en résulte que, dans le cas d’une opération de fusion, les informations fournies doivent porter, sauf impossibilité pour l’employeur de se les procurer, sur les entreprises parties à l’opération de fusion, pour les années visées aux articles précités.

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Le protocole additionnel à la charte européenne de l’autonomie locale enfin ratifié

L’Assemblée nationale a adopté, le 16 janvier dernier, sans modification, le projet de loi de ratification du protocole additionnel à la charte européenne de l’autonomie locale.

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Droit à l’erreur des collectivités : le Sénat persiste

Le Sénat a adopté, en dépit de l’opposition du gouvernement, une proposition de loi créant un droit à l’erreur pour les collectivités territoriales dans leurs relations avec les administrations et les organismes de sécurité sociale.

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La clause d’exclusion des biens professionnels du calcul de la créance de participation constitue un avantage matrimonial prenant effet à la dissolution du régime matrimonial qui est révoqué de plein droit par le divorce en application de l’article 265 du code civil.

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La désignation des membres d’une CSSCT, que sa mise en place soit obligatoire ou conventionnelle, résulte d’un vote des membres du CSE à la majorité des voix des membres présents lors du vote, sans qu’il soit besoin d’une résolution préalable fixant les modalités de l’élection.

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En cas d’inexécution par le débiteur des mesures recommandées homologuées, le créancier ne recouvre le droit de pratiquer des mesures d’exécution que dans le cas où il est mis fin au plan soit par une décision du juge statuant en matière de surendettement soit par l’effet d’une clause résolutoire prévue par ces mesures ou par l’ordonnance les homologuant.

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Rencontre premier ministre-avocats : Édouard Philippe se félicite, Christiane Féral-Schuhl déplore

Les sons de cloche de la rencontre entre le premier ministre et les instances de la profession d’avocat, avec la garde des Sceaux et le secrétaire d’État chargé des retraites, qui s’est déroulée hier à 19 heures, ne sont pas accordés.

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Rencontre premier ministre-avocats : Édouard Philippe se félicite, Christiane Féral-Schuhl déplore

Les sons de cloche de la rencontre entre le premier ministre et les instances de la profession d’avocat, avec la garde des Sceaux et le secrétaire d’État chargé des retraites, qui s’est déroulée hier à 19 heures, ne sont pas accordés.

De son côté, Matignon – qui a réaffirmé dans un communiqué de presse que tous les régimes intégreraient le régime universel – s’est « félicité du travail réalisé cette semaine par les représentants de la profession avec les ministres pour établir un état des lieux objectif de l’impact de la réforme proposée par le gouvernement pour les avocats ». Des rendez-vous qui ont permis, selon le premier ministre, de « montrer que les avocats pourront bénéficier, avec le système universel, de pensions plus élevées que dans leur régime actuel ».

Le gouvernement s’engage par ailleurs à modifier le calcul de l’assiette de cotisations sociales, « afin de compenser toute hausse de cotisation liée au système universel jusqu’en 2029, au travers d’un abattement de 30 % comme le prévoit la réforme pour l’ensemble des travailleurs indépendants ». Les réunions techniques devront continuer, Édouard Philippe recevra, quant à lui, les avocats le 2 février prochain.

Interrogée ce matin par Sud Radio, la présidente du Conseil national des barreaux, Christiane Féral-Schuhl, a estimé que « la réunion avec le premier ministre n’a pas permis d’avancer, on nous demande de quitter un dispositif qui fonctionne bien pour le flou du régime universel. Nous n’avons pas obtenu les garanties que nous souhaitions, il y a beaucoup d’éléments flous dans le régime universel. La réunion d’hier soir a confirmé que les avocats ont parfaitement raison de s’inquiéter de ce projet de réforme ». Les deux camps évoluent « dans des mondes parallèles », a-t-elle twitté hier soir.

Le CNB se réunit en assemblée générale extraordinaire samedi 25 janvier.

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De quelques précisions sur le principe de réparation intégrale

Par principe, ni l’indemnisation du préjudice d’agrément ni celle du préjudice esthétique permanent n’interdisent à la victime de formuler une demande tendant à être indemnisée du coût d’une prothèse de sport et d’une prothèse esthétique.

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De quelques précisions sur le principe de réparation intégrale

En l’espèce, la victime d’un accident de la circulation ayant conduit à son amputation de la jambe gauche avait été indemnisée de l’ensemble de ses préjudices, exception faite du renouvellement des frais d’appareillage pour lesquels le magistrat avait sursis à statuer.

Lors de la liquidation du poste réservé, la victime sollicitait, notamment, l’indemnisation du coût d’une prothèse esthétique et de celui d’une prothèse de sport. La cour d’appel l’avait déboutée de ces deux demandes motif pris de ce qu’elle avait déjà été indemnisée de son préjudice esthétique permanent et de son préjudice d’agrément.

Sur pourvoi de la victime et au visa de l’article 1240 du code civil et du principe de réparation intégrale, la Haute cour casse l’arrêt critiqué. Concernant le préjudice esthétique, la Cour de cassation relève que « la réparation du préjudice esthétique permanent, de nature extra-patrimoniale et consistant en l’altération de l’apparence physique de la victime, ne saurait exclure par principe le droit à l’indemnisation de dépenses de santé futures destinées à acquérir et à renouveler une prothèse esthétique, ces deux chefs de préjudice étant distincts. » Dans la même veine, elle poursuit, concernant le préjudice d’agrément en indiquant que « la réparation du préjudice d’agrément, de nature...

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Articulation entre accord de groupe et accords d’entreprise sous l’empire de la règle de faveur

Les juges du fond ayant caractérisé que les dispositions de l’accord de groupe étaient globalement plus favorables à l’ensemble des salariés du groupe que celles des accords d’entreprise, la renonciation à certains avantages étant compensée par les engagements de maintien de l’emploi, la cour d’appel a pu en déduire qu’en vertu du principe de faveur, il convenait d’appliquer l’accord de groupe.

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Exception de procédure et défense au fond dans le contexte de l’hospitalisation forcée

La Cour de cassation continue de préciser le régime juridique des soins psychiatriques sans consentement que nous avons déjà évoqué dernièrement dans ces colonnes (v. Civ. 1re, 4 déc. 2019, n° 18-50.073 ; 5 déc. 2019, n° 19-22.930 et n° 19-21.127, Dalloz actualité, 20 déc. 2019, obs. N. Peterkaibid., 9 janv. 2019, obs. C. Hélaine). Là encore, l’arrêt se place sur le terrain procédural en jouant notamment sur la distinction entre défense au fond et exception de procédure en préférant la première sur la seconde. On sait que cette qualification précise emporte des conséquences importantes parce qu’elle peut être présentée « en tout état de cause » ; ce qui n’est pas le cas de l’exception de procédure laquelle doit être invoquée in limine litis. À titre incident, rappelons également que le pourvoi dirigé contre le directeur de l’établissement est rejeté. Ce dernier reste avisé de la procédure mais il n’est pas partie à celle-ci. La Cour de cassation rejette donc logiquement le pourvoi en relevant d’office ce moyen sur le fondement de l’article 1015 du code de procédure civile. Ceci ne constitue certainement pas le point névralgique de la solution mais la précision reste utile pour la pratique. L’apport essentiel de l’arrêt réside dans la nullité tirée du certificat médical servant de fondement à la mesure. 

Les faits sont, une nouvelle fois, très classiques dans le contentieux de l’hospitalisation forcée. En l’espèce, une personne placée en garde à vue le 1er août 2019 est examinée par un médecin psychiatre. Le rapport d’expertise décrit des troubles psychiatriques sévères qui sont susceptibles de porter atteinte de façon grave à l’ordre public (décompensation d’une structure sensitive, type paranoïa de Kretschmer). L’individu est donc admis en soins psychiatriques sans consentement. Accueilli dans un établissement de soins après l’arrêté d’admission, l’intéressé saisit le juge de la liberté et des détentions (JLD) aux fins de mainlevée de la mesure d’hospitalisation. Le préfet saisit également le JLD aux fins de continuation de cette mesure. Devant le premier président de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, l’individu admis en soins psychiatriques argue toutefois un moyen inédit en invoquant l’irrégularité du certificat médical. Celui-ci serait nul car dressé par un médecin de l’établissement d’accueil contrairement à ce que prévoit l’article L. 3213-1 du code de la santé publique. Le psychiatre doit, en effet, exercer dans un autre établissement. Le premier président déclare irrecevable le moyen car la nullité tirée du certificat serait une exception de procédure, laquelle devrait être donc invoquée in limine litis. C’est précisément sur ce point que la Cour de cassation prononce la cassation pour violation de la loi. Pour elle, la nullité du certificat médical ne peut être qu’une défense au fond invocable « en tout état de cause » et non une exception de procédure devant être soulevée in limine litis. Voici une solution intéressante tant du point de vue de la procédure civile que du droit des personnes.

Sous le prisme de la procédure civile, la distinction entre exception de procédure et défense au fond reste cruciale. Certes, les deux notions partagent une nature commune puisqu’il s’agit de moyens de défense. Mais il faut les « distinguer soigneusement » (S. Guinchard, F. Ferrand, C. Chainais et L. Mayer, Procédure civile, 34e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2018, p. 283, n° 363) car leur régime diffère. La défense au fond présente une certaine singularité par rapport à l’exception de procédure ou, a fortiori, à la fin de non-recevoir, puisqu’elle « attaque de front » la prétention du demandeur (v. Rép. pr. civ., v° Défenses, exceptions, fins de non-recevoir, par I. Pétel-Teyssié, n° 10). Or, ici, tout le contentieux se cristallisait autour de la nullité du certificat médical, et c’est précisément sur ce point que le raisonnement de l’ordonnance du premier président de la cour d’appel est critiqué. En précisant que la nullité du certificat ne peut pas être une exception de procédure, la Cour de cassation rappelle ainsi le lien que ce document entretient avec la demande de placement dans l’établissement psychiatrique. Tout ceci peut laisser songeur tant le certificat médical partage des liens importants avec la procédure de placement. La confusion entre défense au fond et exception de procédure reste donc largement permise. Mais, sous l’angle de la procédure civile, la solution doit être accueillie avec bienveillance car elle permet de restituer l’exacte qualification des défenses au fond. Le certificat médical n’est pas un acte de procédure et c’est seulement les exceptions éponymes qui doivent être invoquées in limine litis. Il n’existe nulle particularité ici de la procédure judiciaire pour connaître des mesures de soins psychiatriques prononcées en application du code de la santé publique. Le code de procédure civile leur est applicable et ainsi la distinction entre exception de procédure et défense au fond doit être respectée. C’est au stade du droit des personnes que cette qualification revêt peut-être la conséquence la plus patente.

Du point de vue du droit des personnes, la solution continue de préciser le régime de l’hospitalisation sans consentement. Chemin faisant, la Cour de cassation s’inscrit dans une quête constante de l’équilibre entre droits de la personne placée et protection de l’ordre public.

L’article L. 3213-1 du code de la santé publique exige, certes, de dresser un certificat médical mais la condition d’extériorité doit être respectée. Le médecin psychiatre ne doit pas faire partie de l’établissement d’accueil où sera placé l’intéressé. Or ce dernier fonde précisément la nullité dudit certificat sur ce hiatus : le document nécessaire a bel et bien été dressé mais par un des médecins de l’hôpital psychiatrique dans lequel le placement intervient. Or la condition d’extériorité permet d’assurer l’absence d’arbitraire dans la procédure de placement sans consentement (sur ce point, v. Civ. 1re, 5 déc. 2019, n° 19-22.930, préc.). En préférant la qualification de défense au fond à celle d’exception de procédure, la haute juridiction invite à une défense plus aisée. On comprend alors une certaine souplesse dans les qualifications juridiques, notamment ici de procédure civile, pour rétablir le curseur entre les droits de l’intéressé et la protection de l’ordre public (sur ce point, v. M. Primevert, Le contrôle du juge sur les soins psychiatriques sans consentement, JCP G 2013. 625). Certes, la condition d’extériorité aurait pu être arguée directement devant le juge des libertés et de la détention mais la présentation du moyen devant le premier président de la cour d’appel ne doit pas être mise en défaut par son seul caractère inédit. La procédure civile sert ici les droits de l’individu sujet de la mesure qui doit pouvoir utiliser cette nullité. Solution heureuse et bienveillante, il faudra toutefois probablement éviter un dévoiement de ces moyens de défense, lesquels ne peuvent pas se résumer aux seules défenses au fond.

Exception de procédure et défense au fond dans le contexte de l’hospitalisation forcée

La nullité tirée du certificat médical servant de fondement à une mesure d’hospitalisation forcée doit être analysée comme une défense au fond, invocable en tout état de cause. Encourt donc la cassation l’ordonnance du premier président de la cour d’appel qui l’analyse comme une exception de procédure invocable seulement in limine litis.

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Grève des avocats : les demandes de mise en liberté en masse, « un usage dévoyé de la procédure »

Les avocats, en grève depuis quatre semaines contre le projet de réforme des retraites, utilisent divers moyens de contestation : grève des audiences et des permanences, fermeture des cabinets mais aussi dépôt en masse de demandes de mise en liberté (DML) à l’égard des mis en examen placés en détention provisoire.

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Une proposition de loi sur la sécurité privée et les polices municipales

Le groupe LREM vient de déposer une proposition de loi « vers une sécurité globale », centrée sur les polices municipales et la sécurité privée. Composé de vingt-neuf articles, le texte reprend les propositions les plus consensuelles du rapport déposé en septembre 2018 par les députés LREM Alice Thourot et Jean-Michel Fauvergue.

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Une proposition de loi sur la sécurité privée et les polices municipales

Alors qu’un livre blanc sur la sécurité, préalable à une loi d’orientation, est annoncé pour mars, le groupe LREM a déposé sa proposition de loi. Le texte concrétise plusieurs propositions du rapport Thourot-Fauvergue, même les plus polémiques, comme l’armement par défaut des policiers municipaux (v. Dalloz actualité, 14 sept. 2018, obs. M.-C. de Montecler) n’ont pas été reprises.

Renforcement et mutualisation des agents de police muncipale et des ASVP

Les premiers articles visent à favoriser la mutualisation des polices municipales entre communes. Les agents de police municipale pourront constater les contraventions routières sur les communes voisines ayant signé une convention locale de sécurité routière (art. 3).

Les policiers municipaux pourront constater les délits de conduite sans permis ou sans assurance (art. 10) et intervenir en cas d’ivresse publique (art. 11). L’article 6 étend les possibilités d’inspection visuelle des bagages à d’autres types de manifestations. Par ailleurs, les policiers municipaux pourront adresser directement leurs procès-verbaux aux procureurs de la République, sans passer par un officier de police judiciaire (art. 6).

L’article 4 prévoit des dispositions sur la formation. Les gardiens de police municipale pourront aussi être contraints de rester dans la commune ayant pris en charge leur formation pour une durée de trois à cinq ans.

Le texte institutionnalise et encadre le statut des agents de surveillance de la voie publique (ASVP), qui se sont développés ces dernières années (art. 5). Sept mille agents, qui n’ont actuellement pas de cadre précis, relèveraient de ce statut. Ils pourront constater des contraventions par une liste fixée par décret. De manière expérimentale, ces ASVP (ainsi que les gardes champêtres) pourront utiliser des caméras-piétons.

Renforcement des pouvoirs des agents de sécurité privée

Le texte prévoit une nouvelle extension des pouvoirs des agents de sécurité privée : le préfet pourra les autoriser pour intervenir aux abords immédiats des espaces qu’ils gardent (art. 19). L’article 20 crée un nouveau statut d’« agent privé de sécurité assermenté ». Ils pourront constater par procès-verbaux des infractions, listées par décret, avec un préjudice inférieur à 200 €.

Comme le préconisait le rapport, la proposition de loi vise à assainir le secteur et interdire la sous-traitance en cascade (art. 12). Les sociétés de sécurité privée devront présenter des garanties financières (art. 14). Les entreprises spécialisées dans les dispositifs de sécurité électronique, dans le conseil sur la sécurité ou dans la fourniture de services de sécurité à l’étranger seront également soumises au contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS). Le texte impose une plus grande publicité des condamnations prononcées par le CNAPS (art. 13) et des parlementaires y siégeront.

L’article 16 étend, de manière expérimentale, le CDD de mission aux agents de sécurité privée : une personne pourra être employée pendant la durée d’un contrat plutôt que pour une période fixe.

Les agents étrangers devront justifier d’une résidence régulière en France depuis cinq ans et d’une maîtrise du français (art. 15). Le même article précise les condamnations incompatibles avec l’exercice d’une activité de sécurité privée (crime ou délit relevant des livres II à IV bis du code pénal). Il y aura un uniforme identique à l’ensemble la profession (art. 18).

L’article 17 vise à prévoir une circonstance aggravante pour les agressions commises contre une « personne chargée d’une mission privée de sécurité dans l’exercice ou du fait de ses fonctions ». Il incrimine aussi spécifiquement les menaces contre ces agents (mais pas l’outrage et la rébellion, comme le préconisait le rapport).

En fin de texte, l’article 27 prévoit que les bailleurs et les sociétés de gardiennage pourront installer des systèmes de vidéosurveillance devant leurs bâtiments (comme les commerçants). Enfin, un policier ou un gendarme portant son arme hors service ne pourra plus se voir interdire l’accès à un établissement recevant du public (art. 28).

Interruption de la prescription : extension d’une action à une autre

En l’espèce, un salarié de la société Dunlop Tires France, puis de la société Dunlop Tires Amiens venant aux droits de la première, déclare le 17 mars 2008 une maladie professionnelle qui est prise en charge par la caisse primaire d’assurance maladie de la Somme. Son état ayant été déclaré consolidé le 28 juillet 2009, il saisit le 26 avril 2011 la caisse d’une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de la société Dunlop Tires Amiens. Après un procès-verbal de non-conciliation établi le 7 septembre 2011, le salarié saisit le 31 juillet 2013 la juridiction de la sécurité sociale d’une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de la société Dunlop Tires France. La cour d’appel juge cependant l’action prescrite, le salarié n’ayant engagé son action contre la société Dunlop Tires France que le 31 juillet 2013. Certes, précisent les juges du fond, le salarié a bien agi contre la société Dunlop Tires Amiens, mais cette requête adressée à la caisse primaire d’assurance maladie le 26 avril 2011 n’a pu interrompre la prescription à l’encontre de la société Dunlop Tires France à laquelle elle n’est pas opposable, ces sociétés étant des entités distinctes. Le salarié forme un pourvoi en cassation qui conduit à la censure de l’arrêt rendu par la cour d’appel : les deux actions en reconnaissance de la faute inexcusable engagées successivement par la victime procédant du même fait dommageable, la prescription avait été interrompue à compter du 26 avril 2011.

Par cet arrêt, la Cour de cassation confirme sa jurisprudence en matière de prescription en présence d’une pluralité d’actions successives (Civ. 1re, 9 mai 2019, n° 18-14.736, Dalloz actualité, 4 juin 2019 obs. J.-D. Pellier ; D. 2019. 1046 image ; RTD civ. 2019. 590, obs. H. Barbier image ; RTD com. 2019. 749, obs. B. Bouloc image). Dans l’hypothèse où ces actions sont fondées sur les mêmes faits et tendent au même but, alors la prescription peut exceptionnellement s’étendre d’une action à une autre (Civ. 2e, 3 févr. 2011, n° 09-17.213, RTD civ. 2011. 387, obs. R. Perrot image). Cette jurisprudence est remarquable à plus d’un titre. D’une part, elle écarte le principe de l’indépendance juridique des personnes physiques ou morales. Sans qu’elles soient représentées entre elles, des personnes juridiques distinctes peuvent se voir...

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Attribution de compétences matérielles supplémentaires de chambres de proximité

Une série de décisions des 15 et 16 janvier 2020 portant attribution de compétences matérielles supplémentaires de chambres de proximité a été publiée au Bulletin officiel du ministère de la Justice du 24 janvier 2020.

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Précisions sur la procédure devant le juge de l’expropriation

La Cour de cassation indique que la détermination de la date de référence servant à la fixation du prix d’acquisition relève de l’appréciation souveraine du juge du fond. Elle précise par ailleurs que le délai de deux mois ouvert à l’intimé pour former appel incident court à compter de la notification des conclusions d’appelant réalisée par le greffe, et non par l’appelant lui-même.

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Comment calculer le délai de remise des conclusions pour l’avocat hors ressort de la cour d’appel ?

Le 2 février 2018, l’avocat d’une société interjette appel d’un jugement du conseil de prud’hommes par lettre recommandée avec accusé de réception, laquelle est réceptionnée par le greffe de la cour d’appel de Rouen le 5 février 2018. L’avocat de la société conclut le 4 mai 2018 et le conseiller de la mise en état prononce la caducité de la déclaration d’appel. Sur déféré, la cour d’appel confirme l’ordonnance en relevant que le point de départ du délai de l’appelant pour conclure court à compter de la date de l’envoi de la déclaration d’appel et non de son enregistrement. La société forme un pourvoi en avançant qu’en cas de déclaration d’appel faite par lettre recommandée avec accusé de réception, cette remise est constituée par la réception de la lettre par le greffe et la deuxième chambre civile le rejette motif pris « que c’est à bon droit que la cour d’appel a retenu que le délai de trois mois dont dispose l’appelant pour remettre ses conclusions au greffe court, lorsque la déclaration d’appel est établie sur support papier et qu’elle est adressée au greffe par lettre recommandée avec accusé de réception, du jour de l’expédition de cette lettre ».

Bien qu’elle rende un arrêt destiné à une très large publication, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, par ce seul attendu pour écarter le pourvoi, ne précise aucun fondement juridique mais chacun aura compris le visa implicite des alinéas 2 et 3 de l’article 930-1 du code de procédure civile : « Lorsqu’un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l’accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe ou lui est adressé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. En ce cas, la déclaration d’appel est remise ou adressée au greffe en autant d’exemplaires qu’il y a de parties destinataires, plus deux. La remise est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier sur chaque exemplaire, dont l’un est immédiatement restitué. Lorsque la déclaration d’appel est faite par voie postale, le greffe enregistre l’acte à la date figurant sur le cachet du bureau d’émission et adresse à l’appelant un récépissé par tout moyen ».

Une nouvelle fois, c’est la dualité d’intervention de l’avocat et du défenseur syndical devant les chambres sociales des cours d’appel qui se trouve indirectement à l’origine de la difficulté rencontrée par un avocat hors ressort de la cour d’appel et qui avait fait le choix de ne pas solliciter l’intervention d’un confrère comme postulant. Si la procédure avec représentation obligatoire s’applique depuis le 1er août 2016 en cas d’appel des décisions du conseil de prud’hommes, et que l’on part du postulat que le fait de se trouver hors ressort d’une cour d’appel pourrait constituer une cause étrangère à celui qui l’accomplit – ce qui est loin d’être évident pour certaines cours –, il est cependant admis que « les règles de la postulation prévues aux articles 5 et 5-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée ne s’appliquent pas devant les cours d’appel statuant en matière prud’homale, consécutivement à la mise en place de la procédure avec représentation obligatoire » (Cass., avis, 5 mai 2017, n° 17-70.004 et 17-70.005, Dalloz actualité, 10 mai 2017, obs. C. Bléry). Mais ce qui a l’apparence de la souplesse est au contraire source de difficultés procédurales dans le calcul des délais d’appel et de notification des actes à la juridiction, sans même évoquer celle relative à la notification des conclusions entre avocats ou défenseurs syndicaux, encore bien supérieure.

Comment alors relever appel puisque l’avocat hors ressort ne peut, en l’état de la communication électronique, saisir la juridiction par le réseau privé virtuel des avocats (RPVA) ? Si, antérieur au 1er septembre 2017, l’appel nécessitait exclusivement une remise par voie papier à peine de caducité, c’est-à-dire par tradition manuelle à l’exclusion de la lettre recommandée avec accusé de réception (Soc. 15 mai 2019, n° 17-31.800, Dalloz actualité, 25 juin 2019, obs. R. Laffly), l’appel de l’avocat extérieur au ressort de la cour de Rouen était postérieur à l’entrée en vigueur du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, de sorte que ce procédé était bien autorisé par le nouvel article 930-1, alinéa 2.

Commençait alors une simple opération d’arithmétique juridique : calculer correctement le délai de trois mois de remise des conclusions au greffe. Et les choses ne sont pas si simples. En effet, après avoir rappelé que le point de départ du délai imparti par l’article 908 du code de procédure civile à l’appelant pour conclure courait à compter de la remise au greffe de la déclaration d’appel par RPVA, et non de l’édition par le greffe du fichier récapitulatif reprenant les données du message de l’appelant (Civ. 2e, 6 déc. 2018, n° 17-27.206, Dalloz actualité, 16 janv. 2019, obs. C. Bléry ; D. 2019. 555, obs. N. Fricero image ; JCP G 11 févr. 2019, obs. R. Laffly), la Cour de cassation doit revenir sur cette problématique en cas d’appel d’un jugement du conseil de prud’hommes fait par lettre recommandée. La solution est finalement la même : le point de départ du délai de trois mois démarre à compter de l’émission de l’acte d’appel, c’est-à-dire de l’envoi de la lettre recommandée. Ainsi, lorsque l’appel est formé par RPVA, c’est la date d’émission qu’il convient de prendre en compte (et non celle de son enregistrement par le greffe qui peut être ultérieure) et c’est encore celle d’émission lorsque l’appel peut être effectué par lettre recommandée avec accusé de réception (et non celle de sa réception par le greffe nécessairement ultérieure).

L’esprit de célérité qui présidait à l’adoption des décrets Magendie, souvent invoqué par la Cour de cassation elle-même lorsqu’elle tranche en faveur d’une thèse plutôt que d’une autre, n’a pas été rappelé en l’espèce, pas plus que les textes qui devaient conduire à une telle interprétation permettant de calculer le point de départ de l’article 908. Or, pour le calcul des dates de notification ou de signification, le principe d’expédition ou d’émission, plutôt que celui de réception, prévaut à l’égard de celui qui notifie l’acte. L’article 668 du code de procédure civile est clair : « Sous réserve de l’article 647-1, la date de la notification par voie postale est, à l’égard de celui qui y procède, celle de l’expédition et, à l’égard de celui à qui elle est faite, la date de la réception de la lettre » et c’est la solution retenue. D’ailleurs, l’alinéa 3 de l’article 930-1 précise que, « lorsque la déclaration d’appel est faite par voie postale, le greffe enregistre l’acte à la date figurant sur le cachet du bureau d’émission et adresse à l’appelant un récépissé par tout moyen ». Ainsi, si l’avocat de l’appelant pouvait relever appel jusqu’à la limite de son délai d’un mois à compter de la notification du jugement du conseil de prud’hommes faite à son client, sans égard à sa réception par le greffe de la cour d’appel, c’était ce même délai qu’il convenait de prendre en compte pour conclure. Ce qui demande à l’avocat hors ressort d’anticiper un minimum sur l’expiration de ce délai prévu à peine de caducité de sa déclaration d’appel puisque ses conclusions doivent être effectivement remises au greffe dans ce délai. En effet, l’article 908 du code de procédure dispose bien qu’« à peine de caducité de la déclaration d’appel, relevée d’office, l’appelant dispose d’un délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel pour remettre ses conclusions au greffe », levant l’ambiguïté de l’ancienne version qui précisait seulement que l’appelant disposait d’un délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel pour conclure. Et l’article 908 s’applique à l’avocat du ressort comme à celui hors ressort de la cour d’appel.

Dans le cas soumis à la Cour de cassation, l’appel avait été formé le 2 février 2018, le délai pour remettre ses conclusions au greffe expirait donc le 2 mai 2018, tandis que l’avocat de l’appelant les avait remises seulement le 4 mai, soit avec deux jours de retard. Mais on sait depuis longtemps que la procédure d’appel est souvent affaire de quelques jours.

Inaptitude : méconnaissance de l’obligation de saisir la commission de reclassement prévue par la convention collective

La méconnaissance de l’obligation conventionnelle de saisir une commission de reclassement associée à la recherche d’un reclassement au bénéfice du salarié susceptible d’être déclaré définitivement inapte à son emploi par le médecin du travail n’est pas de nature à priver le licenciement pour inaptitude de cause réelle et sérieuse.

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[I]Marriage Story[/I]

Dans un film exceptionnel et excellemment joué par Scarlett Johansson et Adam Driver, Noah Baumbach livre la chronique d’une séparation difficile jusqu’au prononcé du divorce, se déroulant dans le cadre du système judiciaire californien.

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[I]Marriage Story[/I]

Présenté à la Mostra de Venise, sorti au tout début du mois de décembre dernier sur Netflix, qui s’est chargé de sa production, ce qui en limite malheureusement la diffusion, Marriage Story est un film exceptionnel en tous points. C’est sans doute l’un des meilleurs tributs payés, ces dernières années, par le cinéma américain à la figure du couple, un couple en déliquescence, un couple qui se déchire, et qui se retrouve, par touches, comme par une sorte de pointillisme affectif. Il y a du tragique dans cette figure, et quelque chose de grandiose dans la façon de mettre en scène, comme le fait Noah Baumbach, les rapports difficiles entre Nicole et Charlie Barber, admirablement incarnés par Scarlett Johansson et Adam Driver, tous deux au meilleur de leur jeu. Les deux acteurs constituent l’un de ces duos contemporains que l’on ne risque pas d’oublier, à l’image de celui constitué par Leonardo DiCaprio et Kate Winslet, dans Les Noces rebelles, de Sam Mendes. Dans Marriage Story, les personnages principaux sont eux-mêmes dans le monde du théâtre. Lui est un metteur en scène new-yorkais dont la célébrité tend à s’asseoir. Elle est actrice, probablement l’âme de sa troupe, que l’on voit comme une petite famille et au sein de laquelle tout départ se vit comme un déchirement. Et précisément, Nicole s’en va, de son couple comme du théâtre. Elle retourne à Los Angeles, d’où elle était originaire, ayant décroché un rôle dans une série. Elle se sépare de Charlie et emmène avec elle leur fils unique Henry. Nicole se réinsère dans sa vie d’avant, assez facilement. Tel est, en substance, le point de départ de ce film qui n’en finit pas d’enchanter la critique.

Marriage Story est un film de l’entre-deux. Entre deux époques, d’abord. Il s’agit ici d’analyser le temps d’après, cette période qui va de la décision de se séparer au prononcé du divorce, c’est-à-dire qui mène du fait au droit. Le divorce, aux États-Unis comme en France, n’est pas instantané. À défaut de cohabiter, il faut au moins coexister. Film entre deux lieux, ensuite. La séparation est en effet physique, Charlie étant sans cesse entre New York et Los Angeles, soucieux tout à la fois de voir son fils et de mener à bien la pièce qu’il est en train de monter à Broadway. Entre deux personnes, enfin. Car le film est la chronique d’un face à face, entre Nicole, qui s’installe dans sa vie nouvelle, et Charlie, qui se raccroche à l’ancienne sans voir, au moins au début, qu’elle n’est plus qu’un souvenir, peut-être une chimère. Et c’est là, dans cet antagonisme très fort, qu’intervient la perspective juridique avec laquelle on peut aborder ce film. Marriage Story plonge au cœur du système judiciaire californien, pour ce qui a trait au droit de la famille, ce qui est somme toute assez rare dans le cinéma contemporain. Et une première impression se dégage, lorsque l’on voit s’opposer les avocats de chacun des époux : le divorce est quelque chose qui se gagne. Il y aura nécessairement, semble-t-il, un perdant. Ce n’était pourtant pas l’approche initialement retenue par les époux Barber. Les choses devaient se dérouler sans accroc. Mais un glissement s’opère, à compter du moment où Nicole prend fort justement un avocat pour représenter ses intérêts, ce qui surprend Charlie. Était-ce la bonne personne ? C’est une autre question. Il demeure que les époux Barber deviennent un case. Le droit s’engouffre ; une audience se tient. Des négociations se déroulent. Les enjeux ? Le sort de Henry, bien sûr. Mais surgissent aussi les prétentions financières, qu’il faut trancher.

Les avocats, dans ce film, sont particulièrement intéressants. Ils sont identiques, issus des mêmes clubs, et fréquentent les mêmes galas de charité. À la ville, ils se sourient. Au palais, ils s’affrontent virulemment. D’ailleurs, les choix de Charlie, pour le représenter, sont très significatifs. Au fur et à mesure que son attitude évolue, il change d’avocat. Au début, il semble subir le divorce, dans ce qu’il a de juridique, plus préoccupé par la séparation et ses conséquences concrètes, avec ses va-et-vient constants entre New York et Los Angeles. Puis, cette passivité première – sans doute liée aux chimères qu’il nourrissait initialement – se transforme en une posture plus agressive, rebelle à l’idée de concession. Tandis que son premier défenseur était conciliant et enclin à transiger, le second est offensif, à l’image de son contradicteur. Et, progressivement, le divorce échappe au couple. L’appareil judiciaire, avec ses représentants, s’occupe de l’affaire. En revanche, il reste toujours la séparation, magistralement jouée, admirablement filmée.

 

Marriage Story, Noah Baumbach, 2019.
Disponible en VOD

Ordonnance « copropriété » : projet de loi de ratification

Lors du Conseil des ministres qui s’est tenu le 15 janvier, la garde des Sceaux, ministre de la Justice, la ministre de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et le ministre auprès de la ministre de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement, ont présenté un projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis (concernant cette ordonnance, V.

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La domanialité privée d’un immeuble à usage de bureau est tenace

Le Conseil d’État tire les conséquences de l’appartenance au domaine privé par détermination de la loi des immeubles de bureaux appartenant à une personne publique. 

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Un décret prévoyant l’expérimentation de l’encadrement des loyers par voie préfectorale sur le territoire de la commune de Lille est paru au Journal officiel du 24 janvier.

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Le 16 janvier 2020, la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation a adopté, en réunion plénière, le rapport d’information intitulé « Les collectivités locales engagées au service de nos ruralités ».

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Droit international privé dans les relations franco-camerounaises

La France et le Cameroun sont liés par un Accord de coopération en matière de justice signé le 21 février 1974, qui prévoit notamment des dispositions en matière d’exequatur.

Par son article 34, il retient ainsi qu’« en matière civile, sociale ou commerciale, les décisions contentieuses ou gracieuses rendues par une juridiction siégeant en France ou au Cameroun sont reconnues de plein droit sur le territoire de l’autre État si elles réunissent les conditions suivantes :
a) les parties ont été régulièrement citées, représentées ou déclarées défaillantes ;
b) le litige entre les mêmes parties, fondé sur les mêmes faits et ayant le même objet :
- n’est pas pendant devant une juridiction de l’État requis, ou
- n’a pas donné lieu à une décisions rendue dans l’État requis, ou
- n’a pas donné lieu à une décision rendue dans un État et réunissant les conditions nécessaires à son exequatur dans l’État requis ;
c) la décision, d’après la loi de l’État ou elle a été rendue, ne peut plus faire l’objet d’un recours ou d’un pourvoi en cassation ;
d) la décision émane d’une juridiction compétente d’après les règles de conflit de l’État requis sauf renonciation de la partie intéressée ;
e) la décision n’est pas contraire à une décision judiciaire prononcée dans cet État et possédant à son égard l’autorité de la chose jugée ;
f) elle ne contient rien de contraire à l’ordre public de l’État ou elle est invoquée ou aux principes de droit public...

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Droit international privé dans les relations franco-camerounaises

La Cour de cassation se prononce, par deux arrêts du 15 janvier 2020, sur la mise en œuvre de l’Accord franco-camerounais de coopération en matière de justice du 21 février 1974, à propos de différents aspects de droit international privé.

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L’inopposabilité confirmée de la nullité à la victime : à bon assureur, salut !

Après avoir longtemps résisté à la réception de l’inopposabilité aux victimes de la nullité d’une police pour fausse déclaration intentionnelle, ce n’est que très récemment, et sous l’impulsion de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), que la Cour de cassation a réalisé un considérable revirement interne, a fortiori très attendu et donc applaudi (Civ. 2e, 29 août 2019, n° 18-14.768, Dalloz actualité, 20 sept. 2019, obs. R. Bigot).

Par une seconde décision sur la question, rendue le 16 janvier 2020, la deuxième chambre civile persiste et signe, non pour une fausse déclaration initiale, mais pour un défaut de déclaration d’un élément de nature à changer l’opinion du risque par l’assureur en cours de contrat. Naturellement, on applaudit à nouveau. L’arrêt apporte, en outre, une précision importante, sur la répartition de la charge indemnitaire entre l’assurance et le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO). Il est heureux que la Cour de cassation ne suive pas toujours la mode lancée par les assureurs – consistant à transférer, partiellement ou totalement, la prise en charge de risques vers la solidarité – et ne vide pas d’une partie de sa substance l’obligation de couverture et de garantie due par l’assurance privée.

La haute juridiction arrête ainsi le jeu de vases communicants vers le fonds de garantie, que l’assurance a tendance à exploiter pour améliorer ses bonis. L’analyse économique du droit conforterait sûrement une telle décision.

Tout d’abord, le marché de l’assurance automobile culmine à 22,1 milliards en 2018 d’euros (Fédération française de l’assurance, Rapport 2018, p. 14). Or, lorsqu’un marché n’est pas rentable, les acteurs de l’assurance ont tendance à s’en retirer, ce qui ne semble pas être le cas des nombreux acteurs se partageant le « gros gâteau » de l’automobile.

Rappelons ensuite que le marché de l’assurance automobile a été rendu obligatoire dès 1958 (D. Noguéro, Assurances et véhicules connectés. Regard de l’universitaire français, actes du colloque « Nouvelles technologies et mutations de l’assurance », 5 déc. 2018, Le Mans Université, Dalloz IP/IT 2019. 597 image s., spéc. p. 598), ce qui en fait depuis cette date une rente à vie pour les assureurs.

Enfin, lors des travaux parlementaires à l’initiative de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 dite PACTE, il a été mis en avant, en faveur de l’adoption du nouvel article L. 211-7-1 du code des assurances consacrant la jurisprudence récente, que cette adoption permettrait de faire bénéficier le FGAO d’une baisse annuelle de charge estimée à 15 millions d’euros et représenterait donc, corrélativement, une augmentation annuelle de 15 millions d’euros pour les assureurs, ce qui semble n’être qu’une goutte d’eau dans l’océan des 22 milliards de primes qu’ils récoltent chaque année. L’amendement ayant permis son adoption a souligné que « l’intervention du fonds de garantie automobile (en France, le fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages [FGAO]), conçue comme « une mesure de dernier recours » selon la CJUE, est uniquement prévue dans le cas où les dommages ont été causés par un véhicule pour lequel il n’existe aucun contrat d’assurance » (amendement n° 879 présenté en première lecture au Sénat le 25 janvier 2019).

Cette disposition, qui résulte d’un amendement, vise selon ses auteurs à mettre en conformité le code des assurances avec le droit de l’Union européenne.

À l’origine de l’affaire commentée, une conductrice a souscrit un contrat d’assurance automobile auprès d’un assureur le 6 juillet 2011. Trois ans plus tard, l’automobiliste a provoqué un accident en abandonnant sur une voie ferrée son véhicule qui a été percuté par un train, occasionnant à celui-ci des dommages matériels importants. Lors de cet accident survenu le 19 juillet 2014 précisément, la « chauffarde » circulait en état d’ébriété. L’assureur a notifié à la souscriptrice, le 20 avril 2015, la nullité du contrat pour défaut de déclaration d’un élément de nature à changer l’opinion du risque par l’assureur en cours de contrat, à savoir sa condamnation pénale pour conduite sous l’empire d’un état alcoolique intervenue le 22 mai 2013.

Après avoir indemnisé la victime – la SNCF –, l’assureur a assigné la souscriptrice de la police en paiement d’une somme de 1 425 203,32 €. Il a aussi demandé que la décision soit déclarée opposable au FGAO. Ce dernier est intervenu volontairement à l’instance. La cour d’appel de Besançon, par un arrêt du 10 juillet 2018, a mis hors de cause le FGAO. La société d’assurance s’est pourvue en cassation.

Dans un arrêt du 16 janvier 2020, la deuxième chambre civile a rejeté le pourvoi formé par l’assureur. Ses motifs sont que « la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit (20 juill. 2017, aff. C-287/16) que l’article 3, paragraphe 1, de la directive 72/166/CEE du Conseil, du 24 avril 1972, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs, et au contrôle de l’obligation d’assurer cette responsabilité, et l’article 2, paragraphe 1, de la deuxième directive 84/5/CEE du Conseil, du 30 décembre 1983, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale qui aurait pour effet que soit opposable aux tiers victimes, dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, la nullité d’un contrat d’assurance de responsabilité civile automobile résultant de fausses déclarations initiales du preneur d’assurance en ce qui concerne l’identité du propriétaire et du conducteur habituel du véhicule concerné ou de la circonstance que la personne pour laquelle ou au nom de laquelle ce contrat d’assurance est conclu n’avait pas d’intérêt économique à la conclusion dudit contrat ».

La deuxième chambre civile en a déduit que la nullité édictée par l’article L. 113-8 du code des assurances, tel qu’interprété à la lumière de la directive 2009/103/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 septembre 2009, concernant l’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs et le contrôle de l’obligation d’assurer cette responsabilité, qui a abrogé et codifié les directives susvisées, n’est pas opposable aux victimes d’un accident de la circulation ou à leurs ayants droit.

La haute juridiction a alors rappelé qu’aux termes de l’article R. 421-18 du code des assurances, lorsqu’un contrat d’assurance a été souscrit pour garantir les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile découlant de l’emploi du véhicule qui a causé des dommages, le FGAO ne peut être appelé à indemniser la victime ou ses ayants droit qu’en cas de nullité du contrat, de suspension du contrat ou de la garantie, de non-assurance ou d’assurance partielle, opposables à la victime ou à ses ayants droit.

Il en résulte, selon la Cour de cassation, que, la nullité, pour fausse déclaration intentionnelle, du contrat d’assurance conclu par la souscriptrice étant inopposable à la victime, le FGAO ne pouvait être appelé à prendre en charge tout ou partie de l’indemnité versée par l’assureur et a, à bon droit, été mis hors de cause dans l’instance engagée par ce dernier à l’encontre de son assurée.

Six mois plus tôt, la deuxième chambre civile avait déclaré, pour la première fois, inopposable aux victimes d’un accident de la circulation ou à leurs ayants droit la nullité du contrat d’assurance prévue à l’article L. 113-8 du code des assurances, en présence d’une fausse déclaration intentionnelle, en amont de la souscription, du risque par l’assuré. Après une longue attente des victimes, elle renversait ainsi une solution bien acquise en droit français (Civ. 2e, 29 août 2019, n° 18-14.768, préc.).

Précisément, la haute juridiction a retenu que la nullité d’un contrat d’assurance de responsabilité civile automobile édictée par l’article L. 113-8 du code des assurances n’est pas opposable aux victimes d’un accident de la circulation ou à leurs ayants droit, lorsqu’elle résulte de fausses déclarations initiales du preneur d’assurance en ce qui concerne l’identité du propriétaire et du conducteur habituel du véhicule concerné ou de la circonstance que la personne pour laquelle ou au nom de laquelle ce contrat d’assurance est conclu n’avait pas d’intérêt économique à la conclusion de ce contrat (R. Bigot, art. préc.).

Puis, ce début d’année 2020, la Cour de cassation a confirmé l’inopposabilité de la nullité du contrat d’assurance de responsabilité civile automobile, pour défaut de déclaration d’un élément de nature à changer l’opinion du risque par l’assureur en cours de contrat, à la victime. Elle a apporté une précision importante quant à la répartition de la charge entre débiteurs institutionnels d’indemnités.

En visant à nouveau l’article L. 113-8 du code des assurances et la directive dédiée à la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs, la Cour de cassation a ainsi admis la position du fonds de garantie, lequel s’est prévalu de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’argument aux termes duquel les nullités d’un contrat d’assurance en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle à la souscription, ou en cas de non-déclaration en cours de contrat, sont inopposables aux tiers victimes, de sorte que l’assureur doit prendre en charge les préjudices subis par les tiers victimes et exercer son recours à l’encontre de l’auteur responsable, et ce sans intervention du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages. En l’occurrence, l’entreprise d’assurance n’a pas opposé la nullité du contrat d’assurance à la victime, la SNCF, qu’elle a indemnisée. Son action étant une action récursoire à l’encontre de son assuré, elle ne pouvait être confondue avec l’action de l’assureur du tiers victime subrogé dans les droits de son propre assuré. Dès lors, le Fonds de garantie qui n’a pas vocation à intervenir dans le cadre d’une action récursoire devait, en l’espèce, être mis hors de cause.

Par ailleurs, le code des assurances n’étant plus conforme au droit européen, ce qui exposait les autorités françaises à une procédure en manquement, le législateur a dernièrement décidé de mettre en conformité le droit français des assurances à la jurisprudence de la CJUE. Il s’agissait d’éviter la multiplication du contentieux entre les assureurs et le FGAO et de sécuriser, dans le domaine de l’assurance automobile, les effets de la nullité d’un contrat d’assurance vis-à-vis des victimes d’accidents de la circulation, tout en contribuant à la pérennité financière des missions de solidarité nationale confiées par le législateur au FGAO.

À cet effet, l’article L. 211-7-1 créé par la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 (art. 209) dite PACTE dispose désormais que « la nullité d’un contrat d’assurance souscrit au titre de l’article L. 211-1 n’est pas opposable aux victimes ou aux ayants droit des victimes des dommages nés d’un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ainsi que ses remorques ou semi-remorques.

Dans une telle hypothèse, l’assureur qui garantit la responsabilité civile du fait de ce véhicule, de cette remorque ou de cette semi-remorque est tenu d’indemniser les victimes de l’accident ou leurs ayants droit. L’assureur est subrogé dans les droits que possède le créancier de l’indemnité contre la personne responsable de l’accident, à concurrence du montant des sommes qu’il a versées.

Un décret en Conseil d’État fixe les autres exceptions de garantie qui ne sont pas opposables aux victimes ou à leurs ayants droit ».

Dès lors, pour les accidents postérieurs à l’entrée en vigueur de la loi PACTE, la règle issue de la jurisprudence récente figure dorénavant à l’article L. 211-7-1 du code des assurances.

Si cette solution est d’une saine logique, on peut toutefois regretter qu’elle ne concerne que l’assurance automobile, les autres catégories d’assurances n’étant pas visées. En contrepartie, c’est une bonne nouvelle pour les assureurs qui n’ont pas à s’inquiéter : les incidences financières sont, comme on l’a vu précédemment, ainsi restreintes et donc très faibles à leur égard.

Les victimes ou leurs ayants droit seront désormais indemnisés par l’assureur du véhicule ayant causé l’accident selon les règles de droit commun fixées par la loi « Badinter » du 5 juillet 1985, non plus par le FGAO. Dès lors qu’ils ne pourront plus opposer la nullité pour fausse déclaration, cela représente pour les assureurs automobiles une augmentation annuelle de charges estimée à 15 millions d’euros seulement, sur 22 milliards de primes collectées chaque année – insistons.

En attendant, sauf à ce que le législateur repense, notamment, la responsabilité et la causalité (R. Bigot et A. Charpentier, Repenser la responsabilité et la causalité, Risques n° 120, déc. 2019, p. 123-128), puis la répartition des charges, et corrélativement des primes, il est important que la juridiction suprême rappelle le rôle et les obligations imparties à chacun, qui pourrait être source d’un nouveau proverbe : « à bon assureur, salut ! ».

L’inopposabilité confirmée de la nullité à la victime : à bon assureur, salut !

La nullité, pour fausse déclaration intentionnelle, du contrat d’assurance automobile conclu par un souscripteur étant, depuis un revirement de jurisprudence récent, inopposable à la victime ou ses ayants droit, le FGAO ne peut être appelé à prendre en charge tout ou partie de l’indemnité versée par l’assureur.

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L’Agence française vient de publier un guide pratique des « vérifications anticorruption » dans le cadre d’opération de fusion-acquisition.

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Tension sur la procédure parlementaire du projet de loi retraites

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Réforme des retraites : les projets de loi sur les rails

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TASCOM : règles d’assujettissement et application du taux réduit

Saisi d’un litige portant sur une demande de décharge de cotisation de taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM), le Conseil d’État précise les règles d’assujettissement des établissements pratiquant à la fois le commerce de détail et le commerce de gros.

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La République se vit à visage découvert, le maintien de l’ordre aussi

En l’état du droit positif, les fonctionnaires de police ou militaires de la gendarmerie appartenant aux services et unités engagés en opération de maintien de l’ordre ne peuvent, au cours de ces opérations, dissimuler leur visage, notamment par le port d’une cagoule.

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Injonction de payer européenne et clauses abusives

Par un arrêt du 19 décembre 2019, la Cour de justice de l’Union européenne se prononce sur l’étendue de l’office du juge dans la procédure européenne d’injonction de payer.

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Droit de visite médiatisé à l’égard d’un enfant placé : premières applications de l’article 1199-3 du c. pr. civ.

Les arrêts rendus le 15 janvier 2020 par la première chambre civile de la Cour de cassation, l’un de rejet sur ce point (arrêt n° 27, n° 18-25.313), l’autre de cassation (arrêt n° 28, n° 18-25.894), mettent en œuvre, pour la première fois à notre connaissance, l’article 1199-3 du code de procédure civile, issu du décret n° 2017-1572 du 15 novembre 2017 (sur lequel, L. Gebler, Encadrement du droit de visite des parents de l’enfant placé, AJ fam. 2017. 614 image ; A. Denizot, L’organisation insouciante des visites en présence d’un tiers, RTD civ. 2018. 230 image). À cette occasion, les juges de la Haute Cour, combinant l’article précité avec l’article 375-7 du code civil, se prononcent sur l’office du juge des enfants dans le domaine sensible du droit de visite médiatisé des parents dont l’enfant fait l’objet d’une mesure de placement au titre de l’assistance éducative.

Si les désordres familiaux ayant entraîné le déclenchement de la mesure éducative étaient évidemment propres à chaque espèce, les conséquences juridiques avaient un point commun : dans les deux cas, les enfants avaient été placés hors du milieu familial et le juge des enfants avait opté pour un droit de visite médiatisé (en alternance avec un « droit de visite libre » dans le premier arrêt, arrêt n° 27, v. infra). Dans les deux affaires, il s’agissait de savoir si le juge des enfants avait rempli son office dans la détermination des modalités d’exercice de ce droit, ce qui était contesté par les mères des enfants, demanderesses au pourvoi dans les deux procédures.

La question de la fixation des modalités d’exercice du droit de visite des parents à l’égard d’un enfant placé – et donc retiré à ses parents – en raison du danger qu’il court est une question hautement sensible (en ce sens, T. Fossier, Les droits des parents en cas de placement éducatif, AJ fam. 2007. 60 image). Ce droit de visite traduit en effet à la fois symboliquement et concrètement le maintien des attributs de l’autorité parentale qui continue d’être exercée par les parents (C. civ., art. 375-7, al. 1er : « Les père et mère de l’enfant bénéficiant d’une mesure d’assistance éducative continuent à exercer tous les attributs de l’autorité parentale qui ne sont pas inconciliables avec cette mesure ») et on sait que le législateur accorde une grande importance au maintien des liens entre l’enfant placé et sa famille (en ce sens, not., F. Terré, C. Goldie-Genicon et D. Fenouillet, Droit de la famille, Dalloz, coll. « Précis », 9e éd., Dalloz 2018, spéc. § 1047 ; S. Bernigaud in P. Murat (dir.), Droit de la famille, Dalloz Action, 2016, spéc. §§ 242-263).

Ce maintien repose essentiellement sur l’article 375-7 du code civil. Depuis la loi de 2016 relative à la protection de l’enfant (Loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 ; sur laquelle, v. A. Denizot, Définition de l’inceste : peut mieux faire !, RTD civ. 2016. 462 image), cet article dispose dans son alinéa 4 que « S’il a été nécessaire de confier l’enfant à une personne ou un établissement, ses parents conservent un droit de correspondance ainsi qu’un droit de visite et d’hébergement. Le juge en fixe les modalités […]. Il peut également, par décision spécialement motivée, imposer que le droit de visite du ou des parents ne peut être exercé qu’en présence d’un tiers qu’il désigne lorsque l’enfant est confié à une personne ou qui est désigné par l’établissement ou le service à qui l’enfant est confié. Les modalités d’organisation de la visite en présence d’un tiers sont précisées par décret en Conseil d’État ». Le code civil renvoie ainsi indirectement à l’article 1199-3 du code de procédure civile créé en application dudit décret et qui dispose : « La fréquence du droit de visite en présence d’un tiers est fixée dans la décision judiciaire sauf à ce que, sous le contrôle du juge, les conditions d’exercice de ce droit soient laissées à une détermination conjointe entre le ou les parents et la personne, le service ou l’établissement à qui l’enfant est confié » (que nous désignerons ci-après, pour plus de commodité, sous les termes de « gardien de l’enfant »).

La question est donc celle de l’articulation du principe selon lequel le juge des enfants « fixe les modalités » du droit de visite accordé aux parents d’un enfant placé et les dispositions spéciales prévues lorsqu’un tel droit de visite doit être exercé en présence d’un tiers.

Le principe selon lequel le juge fixe les modalités du droit de visite des parents lorsque l’enfant est placé est ancien. Toutefois, certains juges ont été tentés de déléguer au gardien de l’enfant l’organisation du droit de visite, souvent dans le but de donner souplesse et adaptabilité à la solution à mettre en place en même temps que cela limitait les allers-retours devant le juge (sur ces pratiques, v. J. Hauser, obs. sous Civ. 1re, 13 oct. 1998, n° 98-05.008, RTD civ. 1999. 75 image ; M. Huyette, note sous Civ. 1re, 13 oct. 1998, D. 1999. 123 image ; J. Massip, note sous Civ. 1re, 13 oct. 1998, Defrénois 1999. 309). La Cour de cassation a donc dû affirmer qu’une telle délégation n’était pas acceptable car le juge méconnaissait ainsi l’étendue de ses pouvoirs (v. not., Civ. 1re, 13 oct. 1998, no 98-05.008, Defrénois 1999. 309, obs. Massip ; Dr. fam. 1998, no 168, note Murat). Pour autant, le contentieux ne s’est pas tari. Du reste, dans le premier arrêt (arrêt n° 27, préc.), la Cour de cassation a encore été obligée de rappeler que le juge ne pouvait pas fixer, en faveur de la mère, un « droit de visite libre », « dont les modalités seront fixées en concertation entre celle-ci et le service auquel les enfants sont confiés ». Sur ce point, elle casse donc l’arrêt d’appel pour violation de l’article 375-7, alinéas 4 et 5 au motif qu’il incombait au juge de définir la périodicité du droit de visite simple et qu’en prévoyant un droit de visite « libre », la cour d’appel avait méconnu l’étendue de ses pouvoirs. La solution, classique donc, n’appelle pas de plus amples développements à ce stade. Elle permet en revanche de mettre en perspective la différence avec l’hypothèse de la mise en place d’un droit de visite médiatisé qui était au cœur des deux arrêts.

L’intérêt des arrêts sous examen réside en effet dans le contrôle effectué par la Cour de cassation sur la répartition des pouvoirs entre le juge des enfants et le gardien de l’enfant quant aux modalités d’organisation de la visite en présence d’un tiers.
Il semble résulter de l’article 1199-3 du code de procédure civile précité que, lorsque le droit de visite est prévu en présence d’un tiers, le principe est que le juge fixe la fréquence de ces visites à moins qu’il ne délègue (même si le mot peut fâcher) l’ensemble des modalités de l’organisation de ce droit au gardien de l’enfant en collaboration avec le parent concerné et sous son contrôle. On pourrait y voir une hiérarchie, une préférence du législateur pour la fixation de la fréquence des visites par le juge. La mise en œuvre de l’article par la Cour de cassation semble plutôt faire état d’une simple alternative. Revenons sur les deux branches de celle-ci.

En ce qui concerne la fixation de la fréquence des visites par le juge, les commentateurs du décret ont pu souligner qu’elle semblait n’être qu’une modalité minimale qui n’excluait pas que le juge puisse fixer d’autres éléments (en ce sens, L. Gebler, Encadrement du droit de visite des parents de l’enfant placé, AJ fam. 2017. 614 image). Sur cet aspect, les arrêts sous examen ne nous éclairent guère. En effet, dans les deux cas, les juges du fond avaient opté pour une délégation totale de la fixation des modalités de la visite, sous le contrôle du juge des enfants. Il faudra attendre d’autres décisions pour en savoir un peu plus.

En ce qui concerne l’autre branche de l’alternative posée par le texte, qui prévoit donc que, « sous le contrôle du juge, les conditions d’exercice de ce droit soient laissées à une détermination conjointe entre le ou les parents » et le gardien de l’enfant, les arrêts sont plus intéressants.

Dans le premier arrêt (arrêt n° 27, préc.), le juge des enfants avait décidé d’un « droit de visite médiatisé dont les modalités seront fixées en concertation entre le service auquel les enfants sont confiés et la mère ». Or, pour critiquer l’arrêt d’appel, cette dernière fondait clairement son pourvoi sur la jurisprudence constante rappelée plus haut et rendue sur le fondement de l’article 375-7 du code civil. Elle soutenait en effet que la cour d’appel avait méconnu l’étendue de ses pouvoirs au regard de cet article en ne déterminant pas elle-même la nature et la fréquence du droit visite médiatisé qu’elle avait ordonné. Or, la Cour de cassation, après avoir rappelé les textes des articles 375-7, alinéa 4, du code civil et 1199-3 du code de procédure civile, estime que le moyen n’est pas fondé au motif qu’en accordant à Mme C. « un droit de visite médiatisé, dont ils ont prévu que les modalités, notamment la périodicité, seraient déterminées selon l’accord des parties, et dit qu’il en serait référé au juge en cas de difficulté, la cour d’appel a fait l’exacte application des textes susvisés ».

Il en ressort clairement que, selon la Cour de cassation et conformément aux articles visés, deux situations doivent être distinguées. Soit le droit de visite s’exerce sans la présence d’un tiers et le juge doit en fixer les modalités d’exercice (C. civ., art. 375-7, al. 4) ou à tout le moins la nature et la fréquence (C. civ., art. 375-7, al. 5) : c’est ce qui vaut à l’arrêt d’appel la cassation concernant le droit de visite simple qui ne saurait être « libre » (v. supra). Soit le droit de visite est médiatisé et le juge peut déléguer, sous son contrôle, son entier pouvoir d’organisation des visites au gardien de l’enfant… sous réserve toutefois d’un accord entre ce dernier et le parent bénéficiaire du droit de visite. C’est là l’apport du second arrêt.

En effet, dans le second arrêt (arrêt n° 28, préc.), le juge des enfants avait accordé aux deux parents « un droit de visite médiatisé qui s’exercera sous le contrôle du service gardien, sauf à en référer au juge en cas de difficultés ». Ici, non seulement le juge des enfants n’avait pas fixé la périodicité du droit de visite mais il avait confié la fixation de ces modalités, certes sous son contrôle, au seul gardien de l’enfant sans la subordonner à un accord entre ce dernier et les parents bénéficiaires. Aucune des branches de l’alternative posée par l’article 1199-3 du code de procédure civile n’était ainsi remplie. La cassation était donc inévitable. Au visa, là encore, des articles 375-7, alinéa 4, du code civil et 1199-3 du code de procédure civile, la Cour de cassation affirme « Qu’en statuant ainsi, alors qu’il incombait au juge de définir la périodicité du droit de visite accordé, ou de s’en remettre, sous son contrôle, à une détermination conjointe des conditions d’exercice de ce droit entre les parents et le service à qui les enfants étaient confiés, la cour d’appel a méconnu l’étendue de ses pouvoirs et violé les textes susvisés ».

Ainsi, on peut conclure que ces arrêts font une stricte application des textes et notamment de l’article 1199-3 du code de procédure civile. Il est du reste heureux que la Cour de cassation veille à ce que le juge ne se dessaisisse de son pouvoir/devoir de fixer les modalités du droit de visite médiatisé qu’il ordonne, uniquement dans l’hypothèse où le gardien de l’enfant et les parents bénéficiaires parviennent à se mettre d’accord, ce qui laisse espérer une solution souple et adaptée aux besoins de l’enfant et aux contraintes de chacun. La large diffusion (FS-P+B+I) promise à ces deux arrêts démontre sans doute la volonté pédagogique de la Cour de cassation qui entend bien faire respecter une exacte répartition des rôles dans ce domaine si sensible.

Droit de visite médiatisé à l’égard d’un enfant placé : premières applications de l’article 1199-3 du c. pr. civ.

La Cour de cassation, appliquant pour la première fois l’article 1199-3 du code de la procédure civile, s’est prononcée sur la répartition des rôles entre le juge des enfants et le gardien de l’enfant quant aux modalités d’organisation d’un droit de visite médiatisé sur un enfant placé au titre de l’assistance éducative.

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La loi applicable à l’action directe en matière non contractuelle contre un assureur

L’action directe, découverte très tôt en France dans le domaine de l’assurance, est déjà source de difficultés lorsqu’elle est confrontée au droit interne. À ce titre, Madame Abravanel-Jolly explique que depuis l’intervention de la loi n° 2007-1774 du 17 décembre 2007 « l’action directe est une action légale, conférée à la victime afin de lui permettre d’agir directement contre l’assureur. On la nomme également action directe légale, pour bien la différencier de l’action directe contractuelle octroyée au bénéficiaire d’une stipulation pour autrui […]. À l’origine, l’article L. 124-3 du code des assurances ne faisait pas référence à l’action directe. Le texte original faisait uniquement référence à un principe d’affectation en vertu duquel l’indemnité devait être affectée à la victime, et c’est la jurisprudence qui en a déduit l’existence d’une action directe dans un arrêt de principe du 28 mars 1939 » (S. Abravanel-Jolly, Droit des assurances, 3e éd., Ellipses, 2020, n° 83 7; V. aussi, P.-G. Marly, Droit des assurances, Dalloz, 2013, n° 247, qui cite un arrêt plus ancien : Civ. 14 juin 1926, DP 1927. I. 57, note L. Josserand et rapp. A. Collin ; S. 1927.1.25, note C. Esmein ; Lamy Assurances 2020, n° 1584 ; Adde Y. Avril, Chapitre II. Le recours contentieux ; Section 1. L’action directe de la victime contre l’assureur, in R. Bigot et A. Cayol (dir.), Le droit des assurances en tableaux, Ellipses, 2020, à paraître).

Le fameux arrêt de la chambre civile en date du 28 mars 1939 révèle la dualité de l’action directe. Elle prend naissance dans le « droit à la réparation de la victime pour le préjudice dont l’assuré est reconnu responsable ; il s’agit d’une action distincte de l’action en responsabilité elle-même. Pour autant, l’assureur n’est tenu vis-à-vis de la victime que dans la limite du contrat d’assurance RC. Sachant que, à l’évidence, l’action directe n’est plus recevable en cas de substitution légale du débiteur de la dette de responsabilité. Au demeurant, la jurisprudence met en évidence les deux facettes de l’action directe : un fondement légal issu du droit à réparation de la victime, mais dont l’exercice est limité par le contrat d’assurance » (ibid.).

La décision originelle énonçait ainsi que « si l’action de la victime d’un accident contre l’assureur est subordonnée à l’existence d’une convention passée entre ce dernier et l’auteur de l’accident et ne peut s’exercer que dans ses limites, elle trouve, en vertu de la loi, son fondement dans le droit à réparation du préjudice causé par l’accident dont l’assuré est reconnu responsable » (Civ. 28 mars 1939, D. 1939. I. 68, note M. Picard).

Il est souligné, à propos de ce principe, que la jurisprudence française « est si constante et ferme qu’il devient rare de rencontrer des arrêts réitérant ce principe, connu de tous et critiqué par personne » (B. Beignier et S. Ben Hadj Yahia, Droit des assurances, 3e éd., LGDJ, Lextenso éd., 2018, p. 749, n° 754, in fine : citant Civ. 1re, 22 juill. 1986, RGAT 1986. 595, note G. Viney), avant de reconnaître que « le droit québécois est moins hésitant : Le montant de l’assurance est affecté exclusivement au paiement des tiers lésés » (C. civ. Q, art. 2500) » (ibid.).

Lorsqu’elle s’inscrit dans le droit international privé de l’Union européenne, le terrain de jeu de l’action directe y est davantage piégé, dans la mesure où il s’agit d’une notion européenne qui amène à considérer l’ensemble du régime, avec l’autonomie des notions-régimes en particulier (F. Mailhé, Entre Icare et Minotaure, les notions autonomes du droit international privé de l’Union, in Le droit à l’épreuve des siècles et des frontières, Mélanges en l’honneur du Professeur Bertrand Ancel, LGDJ, Lextenso éd., 2018, p. 1137 s., spéc. p. 1161).

Bien plus restrictivement, la décision commentée rendue par la première chambre civile de la Cour de cassation le 18 décembre 2019 (Civ. 1re, 18 déc. 2019, FS-P+B+I, nos 18-14.827 et 18-18.709) vise le règlement (CE) n° 864/2007 du Parlement et du Conseil du 11 juillet 2007 (JOUE du 31 juill.) sur la loi applicable aux obligations non contractuelles dit Rome II.

Dans une perspective historique préalable, en France, la seule jurisprudence traitait auparavant de la question de la loi applicable en matière de responsabilité civile extracontractuelle. On sait ainsi de longue date qu’à l’occasion d’un litige international, la victime d’un accident survenu en France est recevable à exercer, contre l’assureur étranger de l’auteur de cet accident, l’action directe que la loi lui confère dans un intérêt d’ordre public (Req. 24 févr. 1936, DP 1936. 1. 49, note R. Savatier ; RGAT 1936. 558, note M. Picard ; L. Perdrix, comm. sous art. L. 124-3, Code des assurances. Code de la mutualité, Dalloz, 25e éd., 2019, p. 292 ; B. Beignier et J.-M. Do Carmo Silva (dir.), Code des assurances, 13e éd., LexisNexis, 2019, sous art. L. 124-3, p. 347, n° 13). Il a été subtilement mis en lumière que « ce n’est plus ici simplement l’ordre public qui vient s’infiltrer dans le contrat, c’est ce dernier qui en est réduit à l’état d’instrument du premier. Ainsi comprend-on, non seulement, qu’une police d’assurance ne peut contenir de clause entravant cette action, mais également que les règles de conflits de lois admises par le droit international privé français se verront écartées, au nom de l’ordre public, si jamais leur solution venait à désigner une loi étrangère ignorante du procédé » (B. Beignier et S. Ben Hadj Yahia, op. cit., p. 749, n° 755).

Par la suite, le champ du droit commun, façonné par la jurisprudence, a été restreint par l’entrée en vigueur de deux conventions internationales, en premier lieu celle du 4 mai 1971 sur la loi applicable aux accidents de la circulation routière, en second lieu celle du 2 octobre 1973 sur la loi applicable à la responsabilité du fait des produits, puis par le droit international privé du droit de l’Union européenne qui n’a avancé que progressivement. Les règles dégagées en matière de conflits de juridictions ont ainsi généré un phénomène de communautarisation du droit international privé.

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et son ancêtre la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) ont d’abord rendu des décisions relatives à la matière délictuelle en rapport avec l’application de la Convention de Bruxelles de 1968 sur la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale et, plus tard, du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000, dit Bruxelles I, et du règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012, dit Bruxelles I refondu. Cette jurisprudence n’a pas manqué « d’avoir des répercussions sur la construction prétorienne alors applicable en France dans le domaine des conflits de lois. Une nouvelle étape du phénomène a été franchie avec l’adoption du règlement » dit Rome II (H. Slim, Responsabilité civile délictuelle en droit international privé, J.-Cl. Resp. civ. assur., fasc. 255, 2016, n° 1 ; Comp. P. Pailler, Manuel de droit européen des assurances, Bruylant, coll. « Droit de l’Union européenne », 2019 ; J. Knetsch, La réparation du dommage extracontractuel en droit international privé, in Le droit à l’épreuve des siècles et des frontières, Mélanges en l’honneur du Professeur Bertrand Ancel, LGDJ, Lextenso éd., 2018, p. 979 s).

En effet, le règlement Rome II sur la loi applicable aux obligations non contractuelles est empreint d’un caractère « universel », tout comme l’est son grand frère, le règlement (CE) n° 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, dit Rome I. En d’autres termes, « même si la loi à laquelle conduit la mise en œuvre dudit règlement n’est pas celle d’un État membre, elle doit être appliquée par le juge de l’État membre saisi du litige (Règl. Rome II, art. 3). Le règlement Rome II constitue donc le droit commun des États membres de l’Union européenne dans le domaine qu’il régit » (H. Slim, op. cit., n° 2).

Globalement, le règlement Rome II constitue le droit commun et écarte ainsi le droit commun français. Toutefois, le règlement Rome II n’a pas un champ d’application général. Sur le reliquat, la compétence est celle du droit national dit alors résiduel.
Une première application de ce règlement Rome II a été faite par la Cour de cassation, dans un arrêt du 24 janvier 2018. Il s’agissait déjà d’un contrat pour la livraison et l’installation en France, par une société – étrangère – allemande et assurée en Allemagne, de panneaux photovoltaïques. La Cour de cassation avait ainsi retenu que l’article 18 du Règlement Rome II n’est applicable qu’aux actions directes exercées contre les assureurs de personnes devant réparation en raison d’une obligation non contractuelle, autrement dite délictuelle ou extracontractuelle (Civ. 1re, 24 janv. 2018, n° 17-10.959, inédit, D. 2018. 966, obs. S. Clavel et F. Jault-Seseke image ; ibid. 1934, obs. L. d’Avout et S. Bollée image).

Une seconde application de ce règlement Rome II a été réalisée par la Cour de cassation, dans un arrêt du 18 décembre 2019, pour ce qui a trait à la loi applicable à l’action directe en matière non contractuelle contre un assureur (Civ. 1re, 18 déc. 2019, FS-P+B+I, n° 18-14.827 et 18-18.709).

En l’espèce, le propriétaire d’une maison a commandé à une société la réalisation d’une installation photovoltaïque, avec pose en toiture de son habitation de panneaux solaires fabriqués par une société hollandaise et équipés d’un boîtier de connexion d’une autre société hollandaise. Un échauffement de ce composant ayant provoqué l’incendie de l’immeuble, l’acquéreur de l’installation et son assureur ont assigné la société de couverture et son assureur (MAAF), en indemnisation de son préjudice.

La MAAF a appelé en garantie la société d’assurance de la société fabricante des panneaux, ainsi que l’assureur de la société fabricante du boîtier de connexion.
Un jugement a condamné la MAAF sous la garantie solidaire des deux autres assureurs à payer diverses sommes à l’acquéreur et à son propre assureur en réparation du préjudice subi. Par un arrêt partiellement confirmatif du 6 février 2018, la cour d’appel de Limoges a limité aux sommes de 31 627 € et 261 149 €, le montant des indemnités dont l’assureur de la société fabricante du boîtier de connexion doit la garantir, in solidum avec l’assureur de la société fabricante des panneaux et a décidé que l’assureur de la société fabricante du boîtier de connexion prendra ces sommes en charge dans les limites de la proratisation prévue par le droit néerlandais applicable à la police d’assurance pour le cas où le total des indemnités dues aux victimes du sinistre sériel excéderait le plafond de 1 250 000 € de la garantie souscrite, et dans la limite de ce plafond.

L’assureur de la société de couverture a formé un pourvoi en cassation. La première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 18 décembre 2019, l’a principalement rejeté (Civ. 1re, 18 déc. 2019, FS-P+B+I, n° 18-14.827 et 18-18.709).

La Haute juridiction a d’abord retenu « que si, en application de l’article 18 du Règlement (CE) n° 864/2007 du Parlement Européen et du Conseil du 11 juillet 2007 (« Rome II »), en matière non contractuelle, la personne lésée peut agir directement contre l’assureur de la personne devant réparation si la loi applicable à l’obligation non contractuelle, déterminée conformément à l’article 4 du règlement ou la loi applicable au contrat d’assurance le prévoit, le régime juridique de l’assurance est soumis à la loi de ce contrat ; que la cour d’appel a décidé, à bon droit, que, si la MAAF pouvait exercer l’action directe, admise par la loi française, loi du lieu de survenance du dommage, elle pouvait se voir opposer la loi néerlandaise à laquelle le contrat d’assurance était soumis, en ce que celle-ci prévoit, en cas de sinistres sériels, une indemnisation des victimes au prorata de l’importance du préjudice subi, dans la limite du plafond de la garantie souscrite par l’assuré » (ibid.).

Elle a ensuite jugé « qu’il ne résulte ni de l’arrêt ni des conclusions de la MAAF que celle-ci ait soutenu que la loi néerlandaise aurait pour effet de vider de sa substance l’action directe de la victime admise par la loi française » (ibid.).

La première chambre civile a encore motivé sa décision en relevant « que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’interprétation de la loi néerlandaise, dont il n’est pas prétendu qu’elle en aurait dénaturé la teneur, que la cour d’appel qui n’avait pas à s’expliquer sur les moyens de preuve qu’elle décidait d’écarter, a estimé que la proratisation de l’indemnisation en cas de dépassement du plafond de garantie en présence de sinistres sériels, prévue à l’article 7:954, alinéa 5, du code civil néerlandais, en matière de dommages corporels, s’appliquait également aux dommages matériels » (ibid.).

La Cour de cassation a enfin décidé « qu’en fixant le montant des indemnités dont la société Allianz devait garantie à la MAAF et en précisant que Allianz ne prendrait en charge ces indemnités que dans les limites de la proratisation prévue par le droit néerlandais et du plafond de garantie stipulé dans la police, la cour d’appel a nécessairement considéré, répondant, par-là même, aux moyens prétendument délaissés, que la question de la détermination finale du montant de la contribution d’Allianz ne constituait pas un incident d’exécution mais concernait le fond du droit à indemnité de la victime » (ibid.).

Dès lors, la victime se trouve dans une meilleure situation en matière d’action directe non contractuelle, puisque l’article 18 du règlement Rome II lui confère le droit d’agir « directement contre l’assureur de la personne devant réparation si la loi applicable à l’obligation non-contractuelle ou la loi applicable au contrat d’assurance le prévoit » (Règl. Rome II, art. 18). Avec les rattachements alternatifs qu’elle envisage, cette règle innove au regard de celle qui était en vigueur avant l’adoption du règlement qui certes présentait l’avantage, « lorsque le délit était commis en France, d’offrir à la victime une action directe contre l’assureur alors que la loi étrangère régissant le contrat d’assurance pouvait l’ignorer. Mais, à l’inverse, lorsque la loi du lieu du délit (par hypothèse étrangère) ignorait une telle action directe, la victime française pouvait se trouver, au moins sur ce terrain, défavorisée, puisqu’elle ne pouvait atteindre l’assureur que par la voie oblique avec le risque de venir en concours sur l’indemnité d’assurance avec les autres créanciers de l’assuré. L’article 18 du règlement Rome II instaure par conséquent une règle nettement plus favorable à la victime que celle issue auparavant du droit prétorien » (H. Slim, op. cit., n° 54).

En 2015, la Cour de justice de l’Union européenne a affirmé que l’article 18 du règlement Rome II « doit être interprété en ce sens qu’il permet, dans une situation telle que celle au principal, l’exercice, par une personne lésée, d’une action directe contre l’assureur de la personne devant réparation, lorsqu’une telle action est prévue par la loi applicable à l’obligation non contractuelle, indépendamment de ce qui est prévu par la loi applicable au contrat d’assurance choisie par les parties à ce contrat » (CJUE 9 sept. 2015, aff. C-240/14, Eleonore Prüller-Frey c/ 
Norbert Brodnig, Axa Versicherung AG, D. 2015. 1838 image ; ibid. 2016. 1045, obs. H. Gaudemet-Tallon et F. Jault-Seseke image ; RTD eur. 2016. 664, obs. L. Grard image). La victime
retrouvait ainsi meilleure fortune en pouvant multiplier les possibilités d’action directe. La CJUE a ainsi rappelé le sens de la règle : non seulement un droit d’action est indépendant, mais il convient de bien effectuer la distinction entre ce droit d’action directe et les limites qu’on peut lui opposer. Quant à savoir dans quelles mesures cela peut fonctionner, l’analyse relève d’une autre étude que ces brèves observations.

Peu de temps après cette décision de 2015 émanant de la CJUE, et en amont de l’affaire commentée, la doctrine avait indiqué que « s’il s’applique clairement à la question de l’existence de l’action directe, l’article 18 du règlement Rome II ne précise pas la loi qui régit cette action, notamment l’étendue des obligations de l’assureur. Celles-ci devraient donc rester dans le giron de la loi régissant le contrat d’assurance, laquelle est d’ailleurs la seule dont l’assureur est susceptible de prévoir l’application » (H. Slim, op. cit., n° 54).

Avec l’arrêt du 18 décembre 2019, la Haute juridiction française s’est parfaitement inscrite dans les prédictions voire recommandations de la doctrine. Les magistrats du quai de l’horloge ont en effet maintenu le régime de l’assurance dans le giron de la loi régissant la police. A cet effet, ils ont affirmé que si, en application de l’article 18 du Règlement Rome II, « en matière non contractuelle, la personne lésée peut agir directement contre l’assureur de la personne devant réparation si la loi applicable à l’obligation non contractuelle, déterminée conformément à l’article 4 du règlement ou la loi applicable au contrat d’assurance le prévoit, le régime juridique de l’assurance est soumis à la loi de ce contrat » (Civ. 1re, 18 déc. 2019, FS-P+B+I, n° 18-14.827 et 18-18.709).

Dès lors, en ce qui concerne le régime juridique de l’action, « à savoir l’étendue de la garantie due par l’assureur et les moyens de défense que ce dernier peut apposer, c’est la loi de la police d’assurance qui s’applique. La juridiction française saisie doit appliquer le contrat dans toute sa plénitude. L’enjeu est de taille pour le tiers lésé qui ne peut plus se prévaloir des règles protectrices du droit national des assurances de responsabilité. À titre d’illustration, il ne pourra plus exciper des articles R. 124-1 à R. 124-4 du code des assurances et, notamment, des dispositions relatives à la déchéance ou à la durée minimale de la garantie subséquente, etc. » (B. Beignier et J.-M. Do Carmo Silva (dir.), Code des assurances 2019, 13e éd., LexisNexis, 2019, sous art. L. 124-3, p. 347, n° 12). En définitive, le régime juridique de l’assurance, « notamment la détermination des exceptions que peut opposer l’assureur, est soumis à la loi du contrat » (Y. Lambert-Faivre et L. Leveneur, Droit des assurances, Dalloz, 14e éd., 2017, n° 775).

On observe toutefois une forme d’harmonisation dans les motifs puisqu’en 2015 la Cour de cassation avait étendu la règle de l’article 18 du règlement Rome II aux victimes de dommages contractuels, avec une formule quasi-identique : « la personne lésée peut agir directement contre l’assureur de la personne devant réparation si la loi applicable à l’obligation contractuelle ou la loi applicable au contrat d’assurance le prévoit » (Civ. 1re, 9 sept. 2015, n° 14-22.794, D. 2015. 1846 image ; ibid. 2016. 1045, obs. H. Gaudemet-Tallon et F. Jault-Seseke image ; ibid. 1161, obs. M. Bacache, D. Noguéro, L. Grynbaum et P. Pierre image ; ibid. 2025, obs. L. d’Avout et S. Bollée image ; AJCA 2015. 472, obs. L. Perdrix image ; Rev. crit. DIP 2016. 119, note S. Corneloup image ; RTD com. 2016. 590, obs. P. Delebecque image ; JCP 2015. 1163, note V. Heuzé ; RGDA 2015. 499, note V. Heuzé ; JCP 2015. 991, note F. Mailhé ; RCA 2015, n° 331 ; ibid. étude 12, note N. Ciron ; v. aussi L. Grynbaum (dir.), Assurances, Droit & pratique, L’Argus de l’assurance éd., 6e éd., 2019/2020, n° 3125). Il s’agissait de deux sociétés françaises ayant assigné une société et son assureur allemands devant le tribunal de commerce de Rodez, où leur semi-remorque, récemment réparé par la société allemande, avait en effet pris feu. Les défendeurs avaient soulevé l’incompétence du tribunal français.

D’une part, l’action directe d’une victime ayant subi un dommage en France, si elle est possible d’après la loi désignée par les règles de conflit du for, est prise en compte par l’article 11, § 2, du règlement Bruxelles I. Ce dernier retient que les dispositions des articles 8, 9 et 10 sont applicables en cas d’action directe intentée par la victime contre l’assureur, lorsque l’action directe est possible. Ce texte a été refondu par le règlement (CE) n° 1215/2012, en conservant le contenu de l’ancien article 11 du règlement Bruxelles I. Le règlement de 2012 n’est cependant applicable qu’aux actions judiciaires intentées, aux actes authentiques dressés ou enregistrés formellement ou aux transactions judiciaires approuvées ou conclues à compter du 10 janvier 2015 (art. 66). D’autre part, en ce qui concerne l’assurance de responsabilité, c’est au règlement dit Rome II qu’il convient désormais de se référer.

La dissymétrie des nouveaux textes européens a semble-t-il incités les juges « à faire une nouvelle fois œuvre normative pour étendre la solution de l’article 18 aux victimes de dommages contractuels. Dans une matière aussi lourde d’enjeux que celle des assurances, peut-être aurait-il fallu interroger la Cour de justice sur ce nouveau problème relatif à l’action directe. On peut sans doute approuver l’opportunité de la solution retenue au fond toutefois : l’assureur qui doit anticiper l’environnement juridique des délits de son assuré devrait a fortiori pouvoir anticiper celui des contrats que ce dernier conclut » (Civ. 1re, 9 sept. 2015, n° 14-22.794, JCP 2015. 991, note F. Mailhé).

Certes, cette décision de 2015 avait été rendue sous le visa des articles 9, 10 et 11 du règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000, ensemble l’article 3 du code civil, qu’avait violés la cour d’appel qui, pour rejeter l’exception d’incompétence territoriale soulevée par les sociétés allemandes, avait retenu que le principe de l’applicabilité de l’action directe se trouve régi par la loi du lieu où le fait dommageable s’est produit (Civ. 1re, 9 sept. 2015, n° 14-22.794, Dalloz actualité, 21 sept. 2015, obs. F. Mélin ; adde L. Perdrix, comm. sous art. L. 124-3, Code des assurances. Code de la mutualité, Dalloz, 25e éd., 2019, p. 292 ; B. Beignier et J.-M. Do Carmo Silva (dir.), Code des assurances 2019, 13e éd., LexisNexis, sous art. L. 124-3, p. 347, n° 13). On peut s’interroger quant à savoir si la Cour de cassation souhaitait, depuis 2018, revenir sur l’arrêt de 2015.

L’arrêt du 24 janvier 2018, qui était dans une configuration similaire en matière de conflit de lois mais non de conflit de juridictions (Civ. 1re, 24 janv. 2018, n° 17-10.959, inédit, préc.), pourrait avoir remis en cause cette jurisprudence. Cependant, puisque les domaines demeurent différents, on ne peut pas en être certain.

D’aucuns avaient vu un revirement dans l’arrêt du 9 septembre 2015, s’inquiétant que « cette fois, si la seconde possibilité doit être approuvée, la première demeure critiquée » (J. Bigot (dir.), J. Kullmann et L. Mayaux, Traité de droit des assurances, t. 5, Les assurances de dommages, préf. G. Durry, LGDJ, Lextenso éd., 2017, p. 708, n° 1721). D’autres ont admis que « dans le silence de la Convention de Rome, et face au champ expressément limité de Rome II, la Cour de cassation se trouvait dans une impasse. Il lui a fallu faire preuve d’une ingéniosité qui confine, il faut l’avouer, à un certain forçage des textes. Cassant l’arrêt d’appel qui s’était fondé sur la loi du délit, la Cour s’est en effet placée « en matière de responsabilité contractuelle » (ce qui est au moins confus puisqu’il s’agissait de qualifier l’action directe elle-même) et a visé, avec le règlement Bruxelles I, l’article 3 du code civil (alors qu’il aurait assurément fallu appliquer la Convention de Rome à ce « contrat »).

Puis, posant une nouvelle règle de conflit de lois ad hoc, elle a reproduit purement et simplement celle de l’article 18 précitée en transformant l’expression « obligation non contractuelle » en « obligation contractuelle » ! » (JCP 2015. 991, note F. Mailhé).
Pour l’explication, c’est dans une jurisprudence de 2000, antérieure aux textes européens, que la formule employée en 2015 « en matière de responsabilité contractuelle » trouve son origine. Avant l’entrée en vigueur du règlement Rome II, la Cour de cassation avait admis que si l’action directe de la victime contre l’assureur du responsable est régie, en matière de responsabilité contractuelle comme en matière de responsabilité quasi délictuelle, par la loi du lieu du dommage, le régime juridique de l’assurance est soumis à la loi du contrat, notamment en ce qui concerne les exceptions opposables par l’assureur (Civ. 1re, 20 déc. 2000, n° 98-15.546 et n° 98-16.103, Rev. crit. DIP 2001. 682, note V. Heuzé image ; RTD com. 2001. 504, obs. B. Bouloc image ; ibid. 1057, obs. P. Delebecque image ; RCA 2001, n° 132 ; JCP 2001. I. 338, obs. G. Viney ; RGDA 2001. 330, note J. Landel ; ibid. 1065, note V. Heuzé ; Droit et patr., juin 2001, p. 122, obs. J. Monéger). Elle reconnaissait, en d’autres termes, que « seule la recevabilité de l’action directe contre l’assureur était soumise à la loi du délit, les obligations qui incombent à l’assureur relèvent uniquement de la loi applicable au contrat d’assurance » (H. Slim, op. cit., n° 54).

La doctrine avait vivement remis en question cette solution, car elle « n’avait aucun sens : ainsi, et par exemple, il est évidemment déraisonnable de prétendre demander à la loi italienne, du lieu du fait dommageable, si elle accorde à la victime l’action directe que définissent les droits français ou allemand, quand ce sont eux qui régissent le contrat d’assurance. Mais la solution était au surplus injustifiable du point de vue des intérêts de la victime dans tous les cas où la loi du lieu du fait dommageable lui refuse le bénéfice d’une action qui est pourtant prévue par la loi du contrat d’assurance » (V. Heuzé, Rev. crit. DIP 2001. 682 image).

Dorénavant, le principe est unique pour retenir la loi applicable à l’action directe contre un assureur. Qu’il s’agisse de la matière contractuelle ou de la matière non contractuelle, le régime de l’action directe, est dans tous les cas soumis à la loi du contrat d’assurance.

La loi applicable à l’action directe en matière non contractuelle contre un assureur

Si, en application du règlement Rome II, en matière non contractuelle, la victime peut agir directement contre l’assureur du responsable si la loi applicable, à l’obligation non contractuelle ou au contrat d’assurance, le prévoit, le régime juridique de l’assurance est soumis à la loi de ce contrat.

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Nullité pour insanité d’esprit et curatelle : quelle articulation ?

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Nullité pour insanité d’esprit et curatelle : quelle articulation ?

En l’espèce, un individu souscrivait un contrat d’assurance sur la vie le 12 février 2005. Il signait, le 17 juin 2010, un premier avenant modifiant la clause bénéficiaire. Le 9 novembre 2010 il était placé sous le régime de la curatelle simple puis, le 8 janvier 2012, sous celui de la curatelle renforcée. Le 15 septembre 2014, dans un nouvel avenant au contrat, il modifiait une seconde fois la clause bénéficiaire en étant assisté de son curateur. Il décédait le 18 décembre 2014.

Sur requête de sa veuve, et en application du principe selon lequel pour faire un acte valable, il faut être sain d’esprit, le tribunal prononçait la nullité du premier avenant. En revanche, cette juridiction estimait que le second avenant était valide. En effet, les juges du fond observaient que le titulaire du contrat avait, en 2014, modifié la clause bénéficiaire par l’intermédiaire de son curateur qui avait daté et signé l’avenant. En outre, ils constataient qu’aucun manquement du curateur à ses obligations, consistant à s’assurer de la volonté du majeur protégé et de l’adéquation de sa demande avec la protection de ses intérêts, n’était relevé. Rappelons qu’en principe, pour éviter des difficultés de preuve, l’action en nullité pour insanité d’esprit ne peut pas être intentée après la mort de l’auteur de l’acte critiqué. Ce n’est que dans des cas exceptionnels que l’action post mortem est admise par le législateur. L’article 414-2, 3°, du code civil n’autorise en effet...

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CEDH : la France condamnée pour ses prisons indignes

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), par un arrêt du 30 janvier, a condamné la France pour les conditions inhumaines et dégradantes de ses établissements pénitentiaires et le non-respect du droit à un recours effectif pour faire cesser ces atteintes.

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Retour dans la commune de Férel

La Cour de cassation se prononce ici, principalement, sur une question discutée depuis longtemps concernant l’interprétation de l’article 2 de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative aux conditions d’interruption de la prescription quadriennale.

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Des malfaiteurs ont profité de la faveur de la nuit pour cambrioler un restaurant guadeloupéen. La police ainsi que des connaissances du propriétaire de l’établissement se lancent à leur poursuite. Malheureusement, un agent de la police confond ces derniers avec les malfaiteurs et tire sur l’un d’eux, qui subit de graves préjudices.

La victime principale ainsi que sa mère et son frère saisissent la Commission d’indemnisation des victimes d’infraction (CIVI) qui ouvre le droit à une indemnité pour chacun d’eux. Le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI) procède au paiement et se retourne, ainsi que l’article 706-11 du code de procédure pénale le lui autorise, contre l’agent judiciaire de l’État. En effet, ce dernier représente l’État en défense dans les domaines des accidents causés par ses agents (v. Rép. pr. civ., v° Agent judiciaire de l’État, par J.-P. Besson et J. Amouroux). Les sommes en jeu sont importantes puisque la CIVI a évalué le montant total des préjudices subis par les trois victimes à 1 849 649,58 €.

Le tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre a toutefois déclaré l’action de la FGTI irrecevable car prescrite. Celui-ci a donc interjeté appel de ce jugement et la cour d’appel de Basse-Terre a fait droit à sa demande. Elle a par ailleurs reconnu la responsabilité de l’État et l’a condamné à payer la somme demandée.

L’agent judiciaire de l’État a formé un pourvoi en cassation. Sur les trois moyens invoqués, seuls le deuxième, qui se rapporte à la prescription de l’action, et le troisième, qui soulève la question de la responsabilité de l’État, seront analysés par la Cour de cassation. Il fallait donc déterminer si le délai quadriennal de l’action amorcé par le FGTI avait été interrompu et si la responsabilité sans faute de l’État pour rupture d’égalité devant les charges publiques pouvait être retenue.

À ces questions, la Cour de cassation donne sa réponse sous la forme d’un rejet des deux moyens retenus.

Sur la prescription de l’action attachée à la loi du 31 décembre 1968

L’article premier de cette loi prévoit un délai de quatre ans au terme duquel se prescrivent, au profit de l’État, les créances qui n’ont pas été payées à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Les premiers juges ont ainsi considéré que le point de départ du délai correspondait au 1er janvier suivant le paiement, par le FGTI, des premières indemnités aux victimes et qu’il s’était écoulé quatre ans sans que rien ne soit venu interrompre la prescription. L’article 2 de la loi précitée prévoit pourtant plusieurs cas interruptifs de la prescription. On peut lire, au sous-alinéa deux du premier alinéa que la prescription est interrompue par « tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l’existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l’auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l’administration qui aura finalement la charge du règlement n’est pas partie à l’instance ». Dans cette affaire, il y a eu un tel recours matérialisé par la plainte et la constitution de partie civile des demandeurs devant le juge d’instruction. Cependant, le tribunal a considéré que la constitution de partie civile ayant été faite devant ce juge et non devant la personne publique responsable, cela ne correspondait pas à un cas d’ouverture de l’interruption de la prescription. La cour d’appel, dont la décision a été confirmée par la Cour de cassation, a considéré, au contraire, qu’il était indifférent que le recours ait été formé devant le juge d’instruction et en l’absence de l’agent judiciaire de l’État.

La question des conditions de l’interruption de l’action quadriennale de la loi de 1968 est ancienne. Elle a pour origine le changement qui a eu lieu entre l’ancien système issu d’une loi de 1831 et le nouveau crée par la loi de 1968 qui avait pour objectif « la préservation des deniers publics et la stabilisation de l’administration débitrice par la clôture rapide des budgets publics » (F. Lombard, Recours juridictionnel : les conditions d’interruption de la prescription quadriennale, AJDA 2017. 1845 image). Le point d’orgue des difficultés relatives à l’interprétation de cette loi est sans doute le célèbre arrêt Commune de Férel du Conseil d’État (CE 24 juin 1977, req. n° 96584, Lebon image). Dans celui-ci, la haute juridiction administrative subordonne l’interruption du délai de prescription du sous-alinéa 2 de l’article 2 de la loi de 1968 à la mise en cause d’une collectivité publique. S’en est suivi un important débat sur la pérennité de cette jurisprudence. Pour une partie de la doctrine, la solution adoptée en 1977 a été abandonnée dans un arrêt du 27 octobre 2006 (CE 27 oct. 2006, req. n° 246931, Dalloz actualité, 5 nov. 2006, obs. B. Lapouille ; Lebon avec les concl. image ; AJDA 2006. 2389 image, chron. C. Landais et F. Lenica image) qui ne subordonnerait désormais la reconnaissance de l’effet interruptif « qu’à la seule la condition que la plainte porte sur une créance susceptible, d’une manière ou d’une autre, d’être mise à la charge d’une collectivité publique » (C. Landais et F. Lenica, art. préc.). Cependant, pour d’autres, dont Olivier Henrard qui rapportera sur une décision du 10 mars 2017 (dans laquelle il est jugé que le sous-alinéa 2 de la loi subordonne l’interruption du délai de la prescription quadriennale en cas de recours juridictionnel à la mise en cause d’une collectivité publique, v. CE 10 mars 2017, req. n° 404841, Dalloz actualité, 16 mars 2017, obs. D. Poupeau ; Lebon image ; AJDA 2017. 550 image ; ibid. 1845 image, note F. Lombard image) il s’agit d’une mauvaise interprétation de l’arrêt. Selon lui, le sous-alinéa 2 de l’article 2 de la loi de 1968 doit être interprété au regard des autres sous-alinéas mentionnant la présence d’une collectivité publique. Il faut donc nécessairement qu’un recours soit dirigé contre une administration pour interrompre la prescription. Ce qui est indifférent, ce n’est pas la présence d’une administration, c’est la nature de cette administration. Pour le rapporteur, la lecture des travaux préparatoires de la loi encourage cette interprétation tout comme celle de l’ancien article 2244 du code civil, qui exige que, pour interrompre la prescription ainsi que les délais pour agir, une citation en justice, même en référé, un commandement ou une saisie doivent être signifiés à celui qu’on veut empêcher de prescrire (Civ. 3e, 23 mai 2013, n° 12-14.901, Dalloz actualité, 14 juin 2013, obs. M. Kebir ; D. 2013. 2123, obs. B. Mallet-Bricout et N. Reboul-Maupin image, cité in O. Henrard, concl. sous CE 10 mars 2017, req. n° 404841, préc.). Ce n’est pourtant pas à cette interprétation que semble se rallier la Cour de cassation dans cet arrêt du 16 janvier 2020. La deuxième chambre civile explique que « c’est à bon droit que la cour d’appel a jugé qu’il était indifférent que l’agent judiciaire de l’État n’ait pas été partie à l’information judiciaire ni au procès correctionnel » et que « la constitution de partie civile à l’occasion de cette procédure avait bien interrompu la prescription de l’action en responsabilité contre l’État ».

Il serait toutefois bien audacieux de présager de la portée de cette décision et l’on peut regretter l’insuffisance de motivation de la Cour de cassation (v. les travaux de réflexion sur la réforme interne de l’institution ; v. aussi, P. Deumier, Motivation enrichie : bilan et perspectives, D. 2017. 1783 image ou encore C. Jamin, Le Grand Inquisiteur à la Cour de cassation, AJDA 2018. 393 image) qui confère pourtant, à la décision, ses lettres de noblesse (F-P+B+I). Il y a, en effet, une certaine continuité dans la jurisprudence administrative concernant l’existence d’une plainte avec constitution de partie civile. Dans plusieurs décisions, le Conseil d’État (CE 27 oct. 2006, req. n° 246931, préc. ; 26 mai 2010, req. n° 306617, Lebon image ; AJDA 2010. 1061 image ; 17 mars 2014, req. n° 356577, Dalloz actualité, 27 mars 2014, obs. M.-C. de Montecler ;  Lebon image ; AJDA 2014. 657 image ; v. aussi CE 11 avr. 2008, req. n° 294767, Dalloz actualité, 23 avr. 2008, obs. C. Faivre ; Lebon image ; AJDA 2008. 781 image) a considéré que, dans ce cas, la mise en cause de l’administration était inutile et que la plainte avec constitution de partie civile suffisait à interrompre la prescription quadriennale. Mais cela ne suffit sans doute pas à dire que le principe posé dans la jurisprudence Commune de Ferel est dépassé. La Cour de cassation se contentant de se rallier à l’analyse du Conseil d’État concernant les plaintes qui, lorsqu’elles impliquent une volonté de mettre en jeu l’administration, ne nécessitent pas de la part du créancier qu’il mette directement en cause cette dernière.

Sur la responsabilité de l’État pour rupture d’égalité. Le troisième moyen du pourvoi pose moins de difficultés. L’agent judiciaire de l’État remettait en cause le bien-fondé du recours subrogatoire du FGTI prévu à l’article 706-11 du code de procédure pénale en expliquant que la faute qui est reprochée à l’État (rupture d’égalité devant les charges publiques) est sans rapport avec la faute pénale (le coup de feu de l’agent de police) qui a permis à la victime de s’adresser à la CIVI pour obtenir réparation. L’agent judiciaire semble oublier que le lien entre la faute pénale et le fondement juridique invoqué pour engager la responsabilité de la personne poursuivie n’est pas exigé (v. Rép. pr. civ., v° Responsabilités encourues pour fonctionnement défectueux du service public de la justice, par S. Guinchard, n° 56). Dit autrement, il importe peu que le FGTI ait agi contre l’agent judiciaire de l’État sur le fondement d’une responsabilité sans faute alors que la CIVI a ouvert le droit à indemnisation des victimes à la suite de la reconnaissance de la responsabilité de l’agent de police sur le fondement d’une faute pénale. L’absence d’identité des causes juridiques ne peut valoir que lorsqu’il n’existe vraiment aucun rapport entre la responsabilité de l’État et la faute ayant ouvert le droit à indemnisation par la CIVI ou que les responsabilités trouvent leur origine dans des faits générateurs différents (Civ. 2e, 5 juill. 2006, n° 05-13.606, Dalloz jurisprudence). La Cour de cassation le rappelle bien ici : il n’y a qu’un seul fait générateur qui réside dans le coup de feu tiré par l’agent de police et la responsabilité de l’État a un lien de causalité avec ce coup de feu.

De la distinction entre prescription et forclusion dans le contentieux de la filiation

Dans la situation où un titre est corroboré par une possession d’état ayant duré au moins cinq ans, nul ne peut attaquer la filiation ainsi établie conformément à l’article 333, alinéa 2, du code civil. Ce délai est préfix, i.e. un délai de forclusion insusceptible de suspension puisque non soumis au titre XXe du livre III du code civil. Les éléments constitutifs d’une possession d’état sont des éléments laissés à l’appréciation souveraine des juges du fond. Doit donc être rejeté le pourvoi qui arguait de la suspension du délai de cinq ans de l’article 333, alinéa 2. 

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De la distinction entre prescription et forclusion dans le contentieux de la filiation

1. Voici une solution montrant l’emprise du temps sur le droit de la filiation. L’arrêt en date du 15 janvier 2020 rappelle la distinction entre prescription et forclusion dans le contentieux familial. En l’espèce, les faits trouvent comme point de départ une action en contestation de maternité d’enfants nés à l’étranger. En appel, la personne ayant engagé l’action initialement se voit déboutée car le délai de forclusion de l’article 333, alinéa 2, était écoulé. La demanderesse souhaitait, toutefois, voir reconnaître un empêchement à agir ce qui aurait entraîné une suspension de l’écoulement du temps juridique. Le raisonnement de la Cour de cassation est clair : le rejet du pourvoi résulte de la nature du délai de forclusion insusceptible de suspension. La possession d’état ayant été appréciée souverainement par les juges du fond, le spectre de la cassation paraissait bien lointain. Cette solution invite à quelques précisions sur la nature du délai et sur le rôle de la possession d’état en tant que révélateur de la vérité sociologique.

2. L’article 333, alinéa 2, du code civil édicte-t-il un délai de prescription ou un délai de forclusion ? La Cour de cassation rappelle un arrêt précédent dans sa motivation : c’est la seconde branche de l’option qui doit être préférée (Civ. 1re, 1er févr. 2017, n° 15-27.245, D. 2017. 298 image ; ibid. 599, chron. I. Guyon-Renard image ; ibid. 729, obs. F. Granet-Lambrechts image ; ibid. 2018. 528, obs. F. Granet-Lambrechts image ; ibid. 641, obs. M. Douchy-Oudot image ; ibid. 1664, obs. P. Bonfils et A. Gouttenoire image ; AJ fam. 2017. 203, obs. J. Houssier image ; RTD civ. 2017. 363, obs. J. Hauser image)....

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Retraite des avocats : les amendements ont été déposés par les instances de la profession

Le Conseil national des barreaux et l’ordre des avocats de Paris ont transmis une première liasse d’amendements – un peu moins d’une vingtaine – au projet de loi de réforme dont l’examen débute lundi 3 février.

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Pratiques déloyales croisées sur le marché de la pizza en livraison et à emporter

Sur le marché français de la vente à emporter et de la livraison de pizzas, deux concurrents s’opposent vivement depuis plusieurs années. Speed Rabbit Pizza (ci-après la société SRP), qui a subi une baisse significative de son chiffre d’affaires en raison de la fermeture d’une trentaine de points de vente, impute effectivement ses difficultés aux pratiques illicites de la société Domino’s Pizza France (ci-après la société DPF). Elle reproche à cette enseigne, exclusivement exploitée sous forme de franchise, d’accorder à ces franchisés des avantages illicites comme des délais de paiement anormalement longs, des prêts contrevenant au monopole bancaire, des effacements de dettes ou encore des possibilités de racheter les fonds à vil prix.

Avant de porter l’affaire devant la juridiction commerciale, le dirigeant de la société SRP, M. K…, a exprimé publiquement son mécontentement. Dès 2010, à l’occasion d’un salon professionnel sur la franchise, il s’est permis de diffuser un quizz invitant à choisir, parmi plusieurs concurrents sur le marché considéré, celui qui pratique « des délais de paiement très largement supérieurs à la loi, preuve de la faible rentabilité du concept ». Puis, parallèlement à son action judiciaire, M. K… a vertement critiqué, sur Twitter et Amazon, un ouvrage dans lequel il est écrit que les produits de la société DPF sont frais alors que beaucoup d’entre eux seraient en réalité « décongelés ». En 2013, le dirigeant a également affirmé sur son blog que de nombreuses pratiques illicites imputables à la société DPF étaient couvertes par la presse, la politique et la justice.

Ces propos ont justifié que, devant la juridiction de première instance alors saisie par la société SRP d’une action en concurrence déloyale à l’encontre de la société DPF, cette dernière agisse de son côté en dénigrement à l’encontre de la demanderesse. C’est d’ailleurs cette prétention reconventionnelle qui a emporté la conviction du tribunal de commerce de Paris qui, dans un jugement du 7 juillet 2014, a condamné la société SRP à verser 2 300 000 € de dommages-intérêts au bénéfice de la société Domino’s pour dénigrement, procédure abusive et désorganisation de réseau. Observons que la condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile est également particulièrement élevée puisqu’elle s’élève à 500 000 €. En appel, les demandes de la société Speed Rabbit sont à nouveau rejetées dans leur ensemble, même si la cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 25 octobre 2017, diminue le montant des dommages-intérêts alloués pour dénigrement à la somme de 500 000 €.

Cette décision est contestée par le présent recours et notons que deux autres arrêts font l’objet de pourvois à l’initiative de franchisés de la société SRP. Fondée sur de nombreux moyens, l’action invite la haute juridiction à se positionner sur deux axes : la réalité des comportements illicites imputés à la société DPF et la caractérisation du dénigrement que cette dernière estime avoir subi.

La réalité des comportements illicites constitutifs d’une concurrence déloyale

La Cour de cassation demande à la juridiction d’appel de revoir sa copie sur la question de l’existence de pratiques illicites imputables à la société Domino’s. Elle reproche plus particulièrement aux juges du fond de ne pas avoir pris en considération les pièces versées en cause d’appel par la société SRP dans l’appréciation de l’existence de l’octroi de délais de paiement anormalement longs et de ne pas avoir recherché « si les facilités de paiement en cause ne revêtaient pas la qualification de prêts prohibés par l’article L. 511-5 du code monétaire et financier, sans pouvoir entrer dans la dérogation prévue par l’article L. 511-7, I, 3°, du même code ». Il semble que la Cour de cassation reproche sa méthodologie à la cour d’appel, cette dernière ayant déduit de l’absence d’effet des pratiques éventuellement critiquées le défaut de déloyauté contrairement à ce que la jurisprudence pertinente exige. Le cadre principiel exclut effectivement cette façon de raisonner. Une action en concurrence déloyale est bien fondée dès lors qu’elle repose sur la démonstration d’un comportement fautif à l’origine d’un préjudice, comportement fautif qui peut trouver son origine dans l’inobservation d’une réglementation appliquée par les entreprises concurrentes (Com. 19 juin 2001, n° 99-15.411, Bull. civ. IV, n° 123 ; D. 2001. 2824 image, obs. E. Chevrier image). Ainsi, si des réglementations ont été violées par la société DPF, cette violation est à l’origine d’un trouble commercial préjudiciable. Il convenait donc de se positionner sur le terrain de la réalité des pratiques illicites plutôt sur celui de leurs effets.

Concernant les délais de paiement illicites, la cour d’appel s’est contentée de relever qu’en l’absence de lien systématique entre l’existence de cette pratique et la présence d’un point de vente concurrent de la société SRP dans les zones de chalandise en cause, aucune stratégie d’éviction imputable à la société DPF ne pouvait être retenue. C’est pour cette raison que la cassation est encourue. Il lui faudra, lors du second examen, vérifier si la société DPF a effectivement violé les dispositions de l’article L. 441-6-8 du code de commerce au détriment de ses concurrents.

Concernant l’octroi illicite de prêts, la cour d’appel retient que les prêts litigieux ne sont pas illicites car ils ont été accordés à titre onéreux et qu’ils ne présentent pas de caractère anormal dès lors que seules des facilités financières ont été octroyées en application de l’exception au monopole des établissements financiers à ses franchisés avec lesquels elle entretient un lien capitalistique (exception prévue dans C. mon. fin., art. L. 511-7 I, 3° : une société est autorisée à « procéder à des opérations de trésorerie avec des sociétés ayant avec elle, directement ou indirectement, des liens de capital conférant à l’une des entreprises liées un pouvoir de contrôle effectif sur les autres »). La cour observe par motifs adoptés que la société DPF étant la seule à approvisionner à titre exclusif ses franchisés en denrées, il lui est permis d’accorder en contrepartie de cette exclusivité des facilités de paiement. Or, à nouveau, la Cour de cassation reproche aux juges du fond de ne pas avoir vérifié si, en l’espèce, les facilités ne sont pas en réalité des prêts qui n’entrent pas dans le cadre de la dérogation. La cour d’appel de renvoi aura donc à rechercher si les facilités financières litigieuses ont été accordées à titre habituel et auprès de plusieurs franchisés (v., sur ce point, Com. 8 mars 2017, n° 15-25.491, Dalloz jurisprudence) et, dans l’affirmative, si la société DPF détient effectivement un pouvoir de contrôle sur ces franchisés compte tenu de sa participation dans le capital des franchisés concernés lui permettant de se prévaloir d’une dérogation.

Si l’une ou l’autre de ces deux pratiques devait être qualifiée d’illicite, alors une situation de concurrence déloyale pourrait en être déduite dès lors que la société concurrente aura nécessairement subi un préjudice en appliquant des dispositions légales volontairement ignorées par la société DPF. C’est en tout cas ce que semble affirmer la Cour de cassation, reprenant sur ce point une jurisprudence constante (v. réc. Com. 11 janv. 2017, n° 15-18.669, Légipresse 2017. 64 et les obs. image), en affirmant que, dès lors qu’« il s’infère nécessairement un préjudice d’un acte de concurrence déloyale », la cour d’appel aurait dû rechercher « si l’octroi de délais de paiement illicites et de prêts en méconnaissance du monopole bancaire n’avait pas pour effet d’avantager déloyalement les franchisés de la société DPF au détriment des franchisés de la société SRP, et ainsi de porter atteinte à la rentabilité et à l’attractivité du réseau concurrent ».

La caractérisation d’un dénigrement

La Cour de cassation confirme en revanche le raisonnement de la cour d’appel, qui a retenu à l’encontre de la société SRP un comportement dénigrant. La demanderesse contestait la qualification de dénigrement car les propos litigieux ne concernent que la société SRP et non ses produits ou ses services de sorte que seule la diffamation pouvait être retenue à son encontre. Il a effectivement été jugé que, si des propos jettent le discrédit uniquement sur une personne morale déterminée, y compris lorsque ceux-ci rejaillissent sur l’activité de cette dernière, alors seule une action en diffamation est ouverte (v. sur ce point Com. 7 mars 2018, n° 17-12.027, D. 2019. 216, obs. E. Dreyer image ; Légipresse 2018. 249 et les obs. image). A contrario, le dénigrement peut être retenu sur le fondement de l’article 1382 du code civil (actuel art. 1240) s’il porte sur les produits ou services d’une entreprise (Com. 26 sept. 2018, n° 17-15.502, Dalloz jurisprudence).

La question ne porte donc ni sur le caractère public ni sur le caractère avéré des propos litigieux mais sur leur objet. Or, comme le souligne la Cour de cassation, les juges du fond ont logiquement déduit des termes du dirigeant de la société SRP, selon lesquels les produits alimentaires de la société DPF n’étaient pas frais mais congelés, mais également de ceux selon lesquels les services rendus par la tête de réseau à ses franchisés étaient illicites l’existence d’un dénigrement. En dehors des propos visant les produits servant à la fabrication des pizzas, qui auraient suffi à emporter la qualification de dénigrement au profit de celle de diffamation, on retiendra de cette décision que les « produits ou services » d’une entreprise sont, dans le cadre d’une action en dénigrement, aussi bien ceux destinés aux utilisateurs finals de l’enseigne (consommateurs) que ceux profitant aux membres du réseau (franchisés).

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Commet une faute disciplinaire le représentant syndical qui, au cours d’une réunion du comité technique tient des propos « particulièrement irrespectueux et agressifs » à l’égard de son supérieur hiérarchique.

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Un décret n° 2020-57 du 29 janvier 2020 modifie la partie réglementaire du code des juridictions financières (CJF). Outre quelques dispositions statutaires, il revoit divers points de procédure.

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Recours pour excès de pouvoir contre l’ordonnance de radiation

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Deux appelants voient leur appel radié pour défaut d’exécution de la décision de première instance par application de l’article 526 du code de procédure civile. Aucun déféré n’étant possible contre cette mesure d’administration judiciaire, ils forment alors un recours contre l’ordonnance afin de voir constaté l’excès de pouvoir du Conseiller de la mise en état. Mais la cour d’appel d’Aix-en-Provence le juge irrecevable dès lors que la mesure de radiation du rôle, prise en application de l’article 526 du code de procédure civile, est une mesure d’administration judiciaire, sans aucun caractère juridictionnel et sans aucune incidence sur le lien d’instance qui subsiste. Au visa des articles 526, 537 et 916 du code de procédure civile, ensemble l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la Cour de cassation accueille le pourvoi, casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt et renvoie les parties à nouveau devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence autrement composée dès lors « Qu’en statuant ainsi, alors qu’il était allégué que la radiation de l’affaire procédait d’une méconnaissance par le conseiller de la mise en état de l’étendue de ses pouvoirs, dès lors que le jugement attaqué n’était pas assorti de l’exécution provisoire à l’égard de Monsieur Bandachowicz, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

Cet arrêt de la deuxième chambre civile, destiné à une large publication, qui autorise un recours-nullité contre une mesure d’administration judiciaire est-il un revirement ? Disons-le d’emblée, pas véritablement, mais la solution dégagée, audacieuse, doit être saluée.

Les praticiens savent en effet que si, en cas d’absence de voie de recours, toute décision peut faire l’objet d’un recours-nullité immédiat si le juge a commis un excès de pouvoir, ils savent aussi (sans doute un...

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Si un administré est en principe libre de choisir le mode de communication d’un document administratif, il en est différemment lorsque le document est déjà mis à sa disposition sur un espace numérique personnel. 

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