Entrée en vigueur de la délibération approuvant un plan local d’urbanisme

Dans les communes couvertes par un schéma de cohérence territoriale (SCOT), la délibération approuvant un plan local d’urbanisme (PLU) entre en vigueur dès lors qu’elle a été publiée et transmise au représentant de l’État dans le département. Elle est exécutoire à compter de la date la plus tardive entre la publication et la transmission au représentant de l’État. 

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Plaine commune : publication de l’arrêté encadrant les loyers d’habitation

Un arrêté du 1er avril 2021 fixe les loyers de référence, les loyers de référence majorés et les loyers de référence minorés pour l’établissement public territorial Plaine Commune.

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Les contours de l’office du juge de l’exécution…[I]bis repetita[/I]

Sans contestation de mesures d’exécution forcées engagées en vertu du titre exécutoire dont l’exécution fait difficulté, le juge de l’exécution n’est pas compétent.

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Conséquences de l’annulation d’un retrait de port d’armes ayant justifié un licenciement

En raison de l’effet rétroactif s’attachant à l’annulation de la décision administrative retirant à un salarié l’autorisation de port d’arme nécessaire à l’exercice de ses fonctions, le licenciement du salarié motivé par cette décision est sans cause réelle et sérieuse. En revanche, le licenciement n’est pas nul dès lors qu’il n’a pas été prononcé par l’employeur en raison des convictions religieuses et des opinions politiques du salarié mais en raison d’un risque d’atteinte aux personnes qui – certes – s’est révélé ultérieurement infondé.

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Droit de passage : conditions d’exercice

L’exercice du droit de passage n’est pas subordonné au paiement préalable de l’indemnité de désenclavement.

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Droit de passage : conditions d’exercice

L’exercice du droit de passage n’est pas subordonné au paiement préalable de l’indemnité de désenclavement.

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Dessins et modèles : une brique de plus pour la jurisprudence LEGO

Par un arrêt du 24 mars 2021, le Tribunal de l’Union européenne a annulé la décision de la chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 10 avril 2019 déclarant nul le dessin ou modèle de la célèbre brique des jeux de construction Lego. Il rappelle à cette occasion ce qu’est une caractéristique exclusivement imposée par sa fonction technique.

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« De l’importance de la notification de l’acte de constitution »… ou non

Un arrêt rendu par la deuxième chambre civile le 4 juin 2020 avait conduit Me Romain Laffly à affirmer « l’importance de la notification de l’acte de constitution » en appel (Civ. 2e, 4 juin 2020, n° 19-12.959 P, Dalloz actualité, 22 juin 2020, obs. R. Laffly). Par un arrêt du 25 mars 2021, la même chambre intervient à nouveau à ce propos : elle fournit une « méthode » à l’appelant, non pas pour calculer des délais (v. R. Laffly, Délais pour conclure en appel : discours de la méthode de calcul, Dalloz actualité, 8 avr. 2021, à propos de Civ. 2e, 25 mars 2021, n° 19-20.636 P), mais pour notifier régulièrement ses conclusions en cas de difficulté relative à l’opposabilité de la constitution de l’intimé. La haute juridiction évite ici heureusement le rigorisme qu’on peut parfois lui reprocher (v. F. Kieffer, Signification à personne morale : excès de rigorisme injustifié de la Cour de cassation, Dalloz actualité, 7 avr. 2021, à propos de Civ. 2e, 4 févr. 2021, n° 19-25.271).

Notons également que l’arrêt est une nouvelle illustration d’un pouvoir récent que la Cour de cassation n’hésite plus à utiliser, à savoir celui de statuer au fond du litige sur le fondement de l’article L. 411-3, alinéa 2, du code de l’organisation judiciaire issu de la loi JXXI (v., sur ce pouvoir, Dalloz actualité, 2 févr. 2021, obs. C. Bléry).

L’exposé des faits ne facilite malheureusement pas la réception du « discours de la méthode » : il faut dès lors démêler les informations glanées au fil de l’arrêt (et corriger une erreur de date) pour comprendre la chronologie…

Le 10 octobre 2016, une association interjette appel, devant la cour d’appel de Colmar, d’un jugement rendu par un conseil de prud’hommes. L’intimée choisit un avocat parisien.

Le 28 novembre 2016 (et non 2018, comme indiqué par erreur), l’avocat de l’intimée remet sa constitution à la cour d’appel par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Il avise son confrère de sa constitution.

Le 10 janvier 2017, l’avocat de l’appelante adresse à l’avocat parisien ses premières conclusions d’appel, par fax ; en même temps, il les remet au greffe de la cour d’appel par RPVA.

Postérieurement au 10 février 2017 (date limite du délai de l’article 911), l’avocat de l’appelante fait signifier les premières conclusions à l’intimée.

Le 9 mars 2017, l’avocat de l’intimé adresse à la cour des conclusions (d’incident – ainsi qu’il ressort de la première branche du moyen annexé) par lettre recommandée avec avis de réception (LRAR).

Le conseiller de la mise en état, d’office, invite les parties à s’expliquer sur l’irrecevabilité de la constitution de l’avocat de l’intimée et sur l’irrecevabilité de ses conclusions (d’incident) en application de l’article 930-1 du code de procédure civile, dans sa rédaction alors applicable. À titre subsidiaire, au cas où sa constitution serait irrecevable, l’intimée soulève la caducité de la déclaration d’appel, faute pour l’association de lui avoir signifié ses premières conclusions d’appelante dans le délai prévu par l’article 911 du code de procédure civile.

Le 6 juillet 2017, le conseiller de la mise en état rend une ordonnance, par laquelle, d’une part, il déclare irrecevables la constitution de l’avocat de l’intimée du 28 novembre 2018 (sic) et ses conclusions datées du 9 mars 2017 et, d’autre part, il constate la caducité de la déclaration d’appel de l’association, le dessaisissement de la cour d’appel et que le jugement entrepris est définitif.

Le 9 janvier 2018, sur déféré, la cour d’appel de Colmar confirme l’ordonnance. Pour constater la caducité de la déclaration d’appel de l’association, l’arrêt retient que l’appelant n’a pas signifié en temps utile ses conclusions à l’intimée « bien qu’elle n’ait pas été destinataire d’un acte de constitution par voie électronique d’un avocat pour l’intimée, qu’elle ne justifie pas d’un avis électronique de réception d’un acte de constitution d’un avocat pour l’intimée et qu’elle ne peut prétendre que l’envoi de ses conclusions par fax à Me H…, avocat non constitué, le 10 janvier 2017, pourrait suppléer le défaut de signification de ses conclusions à [l’intimée] »…

L’association se pourvoit en cassation, son moyen étant divisé en cinq branches. La quatrième branche, la seule à laquelle répond la Cour de cassation, reproche à la cour d’appel une violation des articles 902, 906 et 901 du code de procédure civile, ensemble les droits de la défense : « lorsque l’avocat de l’appelant n’a reçu aucun avertissement du greffe l’informant d’un défaut de constitution et qu’au contraire, il a été avisé par l’avocat de l’intimée de sa constitution (hors RPVA s’agissant d’un confrère d’un barreau étranger à la cour d’appel), l’appelant est tenu de notifier ses écrits et ses pièces à cet avocat, régulièrement constitué à ses yeux, la signification à partie n’étant requise qu’à défaut de constitution du défendeur ».

La Cour de cassation casse, sans renvoi, l’arrêt de la cour d’appel pour violation des articles 908, 911 et 960 du code de procédure civile (et non des articles visés par le pourvoi), dont elle expose l’articulation (reproduite dans le chapô). Statuant au fond, elle infirme l’ordonnance du conseiller de la mise en état du 6 juillet 2017, dit n’y avoir lieu à caducité de la déclaration d’appel en application des articles 908 et 911 du code de procédure civile, dit recevables la constitution et les conclusions de l’intimée et dit que l’instance se poursuivra devant la cour d’appel de Colmar.

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 25 mars 2021, il s’agit de l’appel d’un jugement prud’homal. L’intimée a choisi, pour la représenter, un avocat d’un barreau extérieur au ressort de la cour d’appel où le procès se déroule. Cela n’est pas pour surprendre, puisque, si depuis le 1er août 2016, la procédure de l’appel en matière prud’homale est avec représentation obligatoire, il y a quelques particularités : l’avocat n’a pas le monopole de la représentation obligatoire, il la partage avec le défenseur syndical. Et il n’y a pas de territorialité juridique de la postulation (Cass., avis, 5 mai 2017, nos 17-70.005 P et 17-70.004 P, rendu en termes identiques, Dalloz actualité, 10 mai 2017, obs. C. Bléry). Cela a pu susciter des difficultés, en raison d’une territorialité technique du RPVA.

En effet, en procédure avec représentation obligatoire, l’article 930-1, qui s’applique aux procédures ordinaires et à jour fixe, prévoit qu’« à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique » (al. 1er) ; les alinéas 2 et 3 prévoient, eux, le retour au papier en cas de cause étrangère : l’acte est remis ou adressé par LRAR – alternative offerte depuis le décret du 6 mai 2017. Or le RPVA ne fonctionne actuellement qu’au sein d’une cour d’appel, donc un avocat extérieur ne peut se connecter (P. Gerbay et N. Gerbay, Guide du procès civil en appel, LexisNexis, 2020, n° 267), même si les choses évoluent. Par des arrêts inédits du 6 septembre 2018, la deuxième chambre civile a admis implicitement que cette territorialité technique est une cause étrangère : l’acte pouvait dès lors être remis au greffe, mais pas adressé par LRAR, compte tenu de l’état du droit au moment de la transmission ; plusieurs autres arrêts ont ensuite confirmé cette position (Civ. 2e, 6 sept. 2018, n° 17-18.698 NP, Gaz. Pal. 27 nov. 2018, p. 73, obs. C. Bléry ; 6 sept. 2018, n° 17-18.728 NP, Gaz. Pal. 27 nov. 2018, p. 75, obs. V. Orif). Cette jurisprudence s’applique aux avocats, et non au défenseur syndical, exclu de la CPVE (C. pr. civ., art. 930-2 et 3 ; adde C. Bléry, Droit et pratique de la procédure civile. Droits interne et de l’Union européenne, 10e éd., ss la dir de S. Guinchard, Dalloz Action, 2021/2022, n° 273.51 ; Rép. pr. civ., v° Communication électronique, par E. de Leiris, n° 95 ; J.-L. Gallet et E. de Leiris, La procédure civile devant la cour d’appel, 4e éd., LexisNexis, 2018, n° 507.

Ici, l’avocat parisien n’a pu remettre sa constitution par voie électronique à la cour d’appel de Colmar : du fait de cette cause étrangère, il a adressé sa constitution par LRAR (v. première branche du moyen)… La cour d’appel avait jugé que cet envoi était irrecevable, puisque non prévu par l’article 930-1 à l’époque de son envoi (v. la jur. préc.) : de fait, il est de jurisprudence constante que, lorsqu’un acte a été accompli selon une modalité autre que celle prescrite – dans les relations parties/juridiction –, la sanction est une fin de non-recevoir (C. Bléry, Droit et pratique de la procédure civile, op. cit., nos 272.225 et 273.51). En outre, l’auxiliaire de justice parisien a avisé son confrère de sa constitution autrement que par acte du palais (art. 671 s.) (par RPVA ou par un mode traditionnel), sans doute par courriel ou fax… alors que la technique n’empêche pas de notifier par voie électronique des actes entre avocats. Or l’article 960 prévoit qu’elle soit notifiée par voie de notification entre avocats à l’avocat de l’appelant. Il a été jugé qu’une transmission irrégulière est entachée d’une nullité de forme (Civ. 2e, 16 oct. 2014, n° 13-17.999 P, Dalloz actualité, 4 nov. 201, obs. M. Kebir ; D. 2015. 517, chron. T. Vasseur, E. de Leiris, H. Adida-Canac, D. Chauchis, N. Palle, L. Lazerges-Cousquer et N. Touati image ; JCP 2014. 1331, obs. C. Bléry et J.-P. Teboul ; P. Gerbay et N. Gerbay, Guide du procès civil en appel, op. cit., n° 1027). La cour d’appel a estimé que la constitution ainsi transmise était inopposable.

Dès lors – faute de constitution recevable et opposable –, la cour d’appel avait considéré que l’appelant aurait dû procéder comme lorsqu’il n’y a pas d’avocat constitué par l’intimé : il aurait dû signifier ses premières conclusions à la partie dans le délai de l’article 911, soit « dans le mois suivant l’expiration du délai de trois mois dont il dispose à compter de la déclaration d’appel pour remettre ses conclusions au greffe (art. 908) » (J.-L. Gallet et E. de Leiris, La procédure civile devant la cour d’appel, op. cit., n° 303).

La Cour de cassation ne statue pas sur la recevabilité de la constitution, admettant implicitement que la LRAR pouvait être utilisée en cas de cause étrangère avant 2017, par une application rétroactive du décret n° 2017-891 – c’est une nouveauté –, sans répondre aux deuxième et troisième branches du moyen qui évoquait cette possibilité.

En revanche, l’arrêt nous précise que l’absence de notification de la constitution conformément à l’article 960 a pour conséquence l’inopposabilité, s’agissant de relations entre plaideurs (et non, logiquement, l’irrecevabilité). Il ajoute aussi que le non-respect de la lettre de l’article 960 ne « bloque » pas la procédure, qu’au contraire « l’appelant dispose d’un choix :

soit il signifie ses conclusions directement à la partie, la constitution ne lui étant pas opposable faute d’avoir été régulièrement notifiée,
  soit il notifie les conclusions au confrère constitué » (C. Lhermitte, L’opposabilité de la constitution, GDL Avocats associés, le blog).

Ce n’est pas totalement nouveau : « en l’absence de notification par l’avocat de l’intimé de sa constitution à l’appelant, celui-ci est fondé à l’ignorer de sorte, par exemple, qu’il disposera du délai supplémentaire d’un mois, prévu par l’article 911 du code de procédure civile, pour signifier ses conclusions à cet intimé » (J.-L. Gallet et E. de Leiris, La procédure civile devant la cour d’appel, n° 304 : les auteurs citent Civ. 2e, 15 oct. 2015, n° 14-24.322 P, Dalloz actualité, 6 nov. 2015, obs. M. Kebir ; D. 2016. 449, obs. N. Fricero image ; ibid. 736, chron. H. Adida-Canac, T. Vasseur, E. de Leiris, G. Hénon, N. Palle, L. Lazerges-Cousquer et N. Touati image ; Gaz. Pal. 22 déc. 2015, p. 36, obs. C. Bléry). Ou encore « l’appelant qui n’a pas reçu de notification de la constitution d’un avocat par l’intimé, dans les conditions prévues par le dernier de ces textes, satisfait à l’obligation de notification de ses conclusions à l’intimé, prévue par les deux premiers textes, en lui signifiant ses conclusions dans le délai d’un mois, courant à compter de l’expiration du délai de trois mois prévu pour la remise de ses conclusions au greffe » (Civ. 2e, 4 juin 2020, n° 19-12.959, préc.).

Ici, l’appelant avait signifié à la partie ses premières conclusions après le dernier jour du délai de quatre mois de l’article 911, mais la signification était inutile puisqu’il avait notifié ses conclusions en temps utile (le dernier jour du délai de l’article 908) à son confrère qui était, contrairement à ce que disait la cour d’appel, constitué. Dès lors, la déclaration d’appel n’était pas caduque. Notons également que l’article 902, invoqué par le pourvoi, alors qu’il vise l’hypothèse d’un défaut de constitution d’avocat par l’intimé et la marche à suivre par l’appelant, était hors sujet ; ce n’était d’ailleurs pas le visa de l’arrêt d’appel… Les articles 906 et 901 étaient également hors de propos.

Rappelons, pour compléter,

• qu’une signification impose le recours à un acte d’huissier de justice, de sorte que l’envoi aux intimées de ses conclusions par l’appelant au moyen d’un courriel ne satisfaisait pas aux exigences de l’article 911 (Com. 17 mars 2021, n° 19-11.410 NP) ;

• qu’« en aucun cas, la notification des écritures ne doit être faite à l’avocat plaidant s’il n’assure pas la postulation ni à l’avocat de première instance qui ne serait pas encore constitué en appel et dont la constitution ultérieure ne régulariserait pas rétroactivement une notification mal dirigée (Civ. 2e, 27 févr. 2020, n° 19-10.849 P, Dalloz actualité, 15 avr. 2020, obs. R. Laffly ; D. 2020. 491 image ; JCP 2020. 26, obs. N. Gerbay) » (P. Gerbay et N. Gerbay, Guide du procès civil en appel, op. cit., p. 307 : « piège »).

Finalement, ce mot « piège » est sans doute celui qui caractérise le mieux la procédure d’appel… malheureusement pour les avocats et les justiciables.

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« De l’importance de la notification de l’acte de constitution »… ou non

La notification de l’acte de constitution d’avocat de l’intimé à l’appelant, en application de l’article 960 du code de procédure civile, tend à lui rendre cette constitution opposable. Il en résulte que, lorsque cette notification n’a pas été régulièrement faite, l’appelant satisfait à l’obligation de notification de ses conclusions à l’intimé, prévue par les articles 908 et 911, en lui signifiant ses conclusions. Il résulte, en outre, de l’article 911 que l’appelant satisfait également à cette obligation en les notifiant à l’avocat que celui-ci a constitué.

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Adieu ENA, bonjour ISP

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Le Sénat durcit le projet de loi confortant le respect des principes de la République

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L’omission sur des bulletins de vote aux élections municipales des deux candidats supplémentaires prévus à l’article L. 260 du code électoral n’entraîne pas la nullité de ces bulletins.

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Le licenciement d’un salarié en arrêt de travail en raison d’une maladie non professionnelle peut intervenir lorsque son absence prolongée ou ses absences répétées perturbent le bon fonctionnement de l’entreprise et rendent nécessaire son remplacement définitif. Ce remplacement doit intervenir à une date proche du licenciement ou dans un délai raisonnable. En cas de contestation, il appartient aux juges du fond d’apprécier souverainement si ce remplacement est intervenu dans un délai raisonnable, en tenant compte des spécificités de l’entreprise et de l’emploi concerné, ainsi que des démarches faites par l’employeur en vue d’un recrutement.

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Indignité du créancier d’aliments et décharge des frais d’obsèques

« Mauvais hoir se déshérite » ; mauvais père libère le fils. Ainsi pourrait-on compléter la célèbre maxime à la lumière de l’arrêt rendu ce 31 mars 2021 par la première chambre civile de la Cour de cassation.

Au décès de son frère, un homme avait chargé une société de pompes funèbres de procéder à l’organisation des funérailles. Le prix des prestations n’ayant pas été réglé, le prestataire assigna son client en paiement. Celui-ci appela en garantie son neveu, le fils du défunt, qui avait par ailleurs renoncé à la succession de son père. L’appel en garantie était sollicité sur le fondement des articles 205 et 371 du code civil. Selon le premier de ces textes, « les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin ». D’après le second, « l’enfant, à tout âge, doit honneur et respect à ses père et mère ».

Un jugement fut rendu en dernier ressort le 18 décembre 2019 par le tribunal d’instance de Châteauroux qui rejeta la demande d’appel en garantie aux motifs, d’une part, que les conditions de la subrogation légale n’étaient pas réunies (puisque l’oncle n’avait pas procédé au paiement des frais funéraires), d’autre part, que le défunt n’avait jamais cherché à entrer en contact avec son fils et ne s’était jamais occupé de lui. Les juges du fond semblaient ainsi réaliser une application post-mortem de l’exception d’indignité prévue à l’article 207 du code civil, selon lequel « quand le créancier aura lui-même manqué gravement à ses obligations envers le débiteur, le juge pourra décharger celui-ci de tout ou partie de la dette alimentaire ».

Le succombant forma un pourvoi en cassation. Les deux premières branches du moyen rappelaient fort justement que l’appel en garantie ne nécessite pas que le paiement ait été réalisé : il suffit qu’il doive intervenir en exécution de la condamnation principale susceptible d’être prononcée. La troisième branche arguait de l’article 806 du code civil selon lequel l’héritier qui renonce à la succession « est tenu à proportion de ses moyens au paiement des frais funéraires de l’ascendant ou du descendant à la succession duquel il renonce ». Selon la quatrième et dernière branche, l’application de l’article 371 du code civil n’est pas conditionnée à l’existence d’un lien affectif entre l’enfant et ses parents.

La Cour de cassation fut ainsi saisie d’une question de pur droit à laquelle elle n’avait encore jamais eu l’occasion de répondre : l’exception d’indignité prévue à l’article 207 du code civil s’applique-t-elle à l’obligation du descendant de contribuer aux frais funéraires ?

Les juges du droit répondent positivement et rejettent le moyen. Après avoir détaillé la teneur des articles 205, 207, 371 et 806 du code civil (§§ 4 à 7) la première chambre civile de la Cour de cassation réalise une « combinaison de ces textes » pour en déduire que « lorsque l’actif successoral ne permet pas de faire face aux frais d’obsèques, l’enfant doit, même s’il a renoncé à la succession, assumer la charge de ces frais, dans la proportion de ses ressources », avant d’ajouter : « Il peut toutefois en être déchargé en tout ou partie lorsque son ascendant a manqué gravement à ses obligations envers lui » (§ 8).

C’est donc « à bon droit » que les premiers juges ont énoncé que l’exception...

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Indignité du créancier d’aliments et décharge des frais d’obsèques

Lorsque l’actif successoral ne permet pas de faire face aux frais d’obsèques, l’enfant doit, même s’il a renoncé à la succession, assumer la charge de ces frais, dans la proportion de ses ressources. Il peut toutefois en être déchargé en tout ou partie lorsque son ascendant a manqué gravement à ses obligations envers lui.

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Possibilité de limiter la durée de l’aval de l’effet de commerce

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Continuité de la résidence habituelle pendant les périodes d’incarcération

Les périodes d’incarcération peuvent-elles être assimilées à des périodes de résidence habituelle en France au sens du 2° de l’article L. 511-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dès lors que la personne incarcérée ne peut plus être regardée comme résidant en France de son propre gré ?

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Les mesures d’instruction [I]in futurum[/I] à l’épreuve du droit à la preuve

Les mesures d’instruction in futurum de l’article 145 du code de procédure civile constituent un élément essentiel de la stratégie « préparatoire » du procès (X. Vuitton, Stratégie du contentieux. Théorie et méthode, LexisNexis, 2020, nos 193 s.). Elles poursuivent l’objectif d’assurer « l’information d’une partie qui, avant tout procès, s’interroge sur l’engagement ou non d’une procédure principale » (S. Amrani-Mekki et Y. Strickler, Procédure civile, PUF, coll. « Thémis », 2014, n° 294). Mais pour un demandeur indélicat, « la tentation peut être grande d’instrumentaliser » ces mesures (J.-F. Cesaro [dir.], « La preuve », étude in Rapport annuel de la Cour de cassation, 2012, p. 266) pour chercher, par des mesures à large spectre, à percer la confidentialité de certaines informations. Le texte prévient de tels détournements en conditionnant l’obtention des mesures préventives à leur caractère « légalement admissible » et à la démonstration d’un « motif légitime » de la part du demandeur (sur la pertinence de ces critères, v. S. Pierre-Maurice, Secret des affaires et mesures d’instruction in futurum, D. 2002. 3131 image). Malgré ce, les juges continuent d’être saisis de demandes d’investigations générales. C’est dans ce contexte que s’inscrit l’arrêt commenté.

En l’espèce, une société exploitant une station de radio sollicite en référé, sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, la désignation d’un expert avec pour mission de se faire remettre les questionnaires qu’un institut de sondage utilise pour effectuer ses mesures d’audience. Cette demande est rejetée par la cour d’appel de Paris (Paris, 11 déc. 2019, n° 19/08581). Les juges retiennent que « la mesure d’instruction vise, sous couvert de vérification des conditions des mesures d’audience, à la détermination de la méthodologie mise en œuvre par [l’institut de sondage] » alors qu’en substance la société demanderesse avait d’autres moyens de connaître le déroulement des enquêtes, de sorte que « la demande d’expertise s’analyse en réalité en une mesure d’investigation générale portant sur l’activité de l’institut de sondage ». Par ailleurs, la cour relève que la société a accès aux résultats d’audience et qu’elle ne les a pas contestés auprès des organismes compétents. Il en est déduit l’absence de motif légitime.

Le pourvoi en cassation formé contre l’arrêt contestait cette appréciation du caractère légalement admissible de la mesure sollicitée et du motif légitime. Il est rejeté. La deuxième chambre civile de la Cour de cassation affirme qu’« il résulte de l’article 145 du code de procédure civile que constituent des mesures légalement admissibles des mesures d’instruction circonscrites dans le temps et dans leur objet et proportionnées à l’objectif poursuivi » et qu’« il incombe, dès lors, au juge de vérifier si la mesure ordonnée était nécessaire à l’exercice du droit à la preuve du requérant et proportionnée aux intérêts antinomiques en présence ». Elle considère qu’en l’espèce, « la mesure ordonnée n’était pas nécessaire à l’exercice du droit à la preuve du requérant et était disproportionnée aux intérêts antinomiques en présence ».

L’arrêt, publié, rappelle ainsi l’interdiction d’ordonner des mesures d’investigation générales non circonscrites. Mais son apport est plus global. La Cour procède à une relecture de l’article 145 du code de procédure civile à l’aune du droit à la preuve. Cette relecture, à certains égards, pourrait constituer une réécriture du texte.

La relecture de l’article 145 à l’aune du droit à la preuve

La définition donnée des mesures d’instruction légalement admissibles permet à la Cour de cassation d’imposer au juge de procéder au contrôle de proportionnalité propre au droit à la preuve.

1. D’abord, la haute juridiction décide que les mesures légalement admissibles sont celles qui sont « circonscrites dans le temps et dans leur objet et proportionnées à l’objectif poursuivi ». Il s’agit là d’une confirmation. Il est admis de longue date qu’« une mesure générale d’investigation portant sur l’ensemble de l’activité [d’une société] et tendant à apprécier cette activité et à la comparer avec celle de sociétés ayant le même objet » ne se fonde pas sur un motif légitime au sens du texte (Civ. 2e, 7 janv. 1999, n° 97-10.831, Bull. civ. II, n° 3) et que pour être légalement admissibles, les mesures doivent être « circonscrites dans le temps et dans leur objet » (Civ. 2e, 21 mars 2019, n° 18-14.705, D. 2019. 2374, obs. Centre de droit de la concurrence Yves Serra image). Sont donc usuellement censurées les mesures d’instruction instituant une forme de « perquisition civile » (Civ. 2e, 5 janv. 2017, n° 15-27.526, RTD civ. 2017. 491, obs. N. Cayrol image). Il est également admis qu’en sus d’être circonscrite, la mesure d’instruction ne doit comporter aucune atteinte à une liberté fondamentale (Civ. 2e, 8 févr. 2006, n° 05-14.198, Bull. civ. II, n° 44 ; D. 2006. 532 image ; ibid. 2923, obs. Y. Picod, Y. Auguet, N. Dorandeu, M. Gomy, S. Robinne et V. Valette image ; ibid. 2007. 1901, obs. P. Delebecque, J.-D. Bretzner et T. Vasseur image ; 25 juin 2015, n° 14-16.435 ; 7 janv. 2016, n° 14-25.781, RTD civ. 2017. 487, obs. N. Cayrol image ; ibid. 491, obs. N. Cayrol image), ou à un secret protégé (pour le secret médical, v. Civ. 1re, 11 juin 2009, n° 08-12.742, Bull. civ. I, n° 128 ; D. 2009. 1760 image ; ibid. 2714, obs. P. Delebecque, J.-D. Bretzner et T. Vasseur image ; RTD civ. 2009. 695, obs. J. Hauser image), sous réserve d’un contrôle de proportionnalité (Civ. 1re, 22 juin 2017, n° 15-27.845 P, Dalloz actualité, 7 juill. 2017, obs. M. Kebir ; D. 2017. 1370 image ; ibid. 2444, obs. Centre de droit de la concurrence Yves Serra image ; Dalloz IP/IT 2017. 543, obs. O. de Maison Rouge image ; RTD civ. 2017. 661, obs. H. Barbier image).

2. Ensuite, la Cour en déduit que le juge doit « vérifier si la mesure ordonnée était nécessaire à l’exercice du droit à la preuve du requérant et proportionnée aux intérêts antinomiques en présence ». C’est au prix de ce contrôle, propre au droit à la preuve, que la mesure pourra être considérée comme proportionnée à l’objectif poursuivi.

Le rattachement du droit de solliciter des mesures d’instruction au droit à la preuve est fondé. Pour la doctrine, ce droit recouvre à la fois celui de « produire une preuve que l’on détient » mais aussi celui « d’obtenir une preuve que l’on ne détient pas » (v. ainsi E. Vergès, G. Vial et O. Leclerc, Droit de la preuve, PUF, coll. « Thémis », 2015, nos 276 et 279, précisant que le second est plus fragile que le premier), ce dernier renvoyant aux mesures d’instruction (A. Bergeaud-Wetterald, E. Bonis et Y. Capdepon, Procédure civile, Cujas, 2017, n° 566). Même si c’est la production de preuves qui alimente le plus la jurisprudence relative au droit à la preuve depuis sa consécration (Civ. 1re, 5 avr. 2012, n° 11-14.177, Bull. civ. I, n° 85 ; Dalloz actualité, 23 avr. 2012, obs. J. Marrocchella ; D. 2012. 1596 image, note G. Lardeux image ; ibid. 2826, obs. P. Delebecque, J.-D. Bretzner et I. Darret-Courgeon image ; ibid. 2013. 269, obs. N. Fricero image ; ibid. 457, obs. E. Dreyer image ; RTD civ. 2012. 506, obs. J. Hauser image ; v. dernièrement, Soc. 30 sept. 2020, n° 19-12.058 P, Dalloz actualité, 21 oct. 2020, obs. M. Peyronnet ; D. 2020. 2383 image, note C. Golhen image ; ibid. 2312, obs. S. Vernac et Y. Ferkane image ; ibid. 2021. 207, obs. J.-D. Bretzner et A. Aynès image ; JA 2021, n° 632, p. 38, étude M. Julien et J.-F. Paulin image ; Dr. soc. 2021. 14, étude P. Adam image ; RDT 2020. 753, obs. T. Kahn dit Cohen image ; ibid. 764, obs. C. Lhomond image ; Dalloz IP/IT 2021. 56, obs. G. Haas et M. Torelli image ; Légipresse 2020. 528 et les obs. image ; ibid. 2021. 57, étude G. Loiseau image), son invocation en matière de mesures d’instruction était aussi admis (v. ainsi Com. 5 juin 2019, n° 17-22.192 P, Dalloz actualité, 10 juill. 2019, obs. M. Kebir). Tout au plus pouvait-on douter de la reconnaissance de ce droit pour les mesures in futurum : en principe, le droit de prouver participe de l’effectivité de la défense quant à des prétentions sur le fond, lesquelles ne sont pas encore formulées lorsque le juge est saisi avant tout procès. Néanmoins, la preuve obtenue par le biais des mesures préventives est souvent nécessaire à la formulation des prétentions. L’extension du droit à la preuve à cette phase de procédure paraît donc opportune.

La référence à ce droit sert à justifier la mise en œuvre d’un contrôle de proportionnalité in concreto. En effet, le droit à la preuve a une valeur fondamentale : la Cour européenne des droits de l’homme reconnaît le droit de chaque partie de « présenter […] ses preuves » (CEDH 27 oct. 1993, n° 14448/88, Dombo Beheer BV c. Pays-Bas, § 34, AJDA 1994. 16, chron. J.-F. Flauss image) et utilise l’expression de droit à la preuve (CEDH 10 oct. 2006, n° 7508/02, LL c. France, § 40, D. 2006. 2692 image ; RTD civ. 2007. 95, obs. J. Hauser image). Il est donc possible d’admettre une preuve constituée en violation de certains principes ou droits fondamentaux de même valeur, telle la vie privée, à deux conditions : que la preuve soit « indispensable à l’exercice [du] droit à la preuve » et qu’elle soit « proportionnée aux intérêts antinomiques en présence », selon la formule consacrée (Civ. 1re, 5 avr. 2012, préc.) et qu’elle soit reprise, avec une substitution du mot « nécessaire » à celui d’« indispensable », dans le présent arrêt.

Avant l’arrêt commenté et un autre du même jour (Civ. 2e, 25 mars 2021, n° 19-20.156), la deuxième chambre civile appliquait le contrôle de proportionnalité sans l’énoncer aussi clairement (v. ainsi Civ. 2e, 11 mai 2017, n° 16-16.966). De fait, si la preuve se prête à une appréciation contextualisée de la proportionnalité (V. Vigneau, La proportionnalité dans la recherche de la preuve en matière civile, Justice Actualités déc. 2020, p. 54-59), la généralisation d’un tel contrôle in concreto en matière de mesures d’instruction in futurum n’est pas neutre : elle pourrait conduire à une réécriture du texte.

La réécriture de l’article 145 par le droit à la preuve ?

Pour dire que la cour d’appel a « légalement justifié sa décision », la Cour de cassation ne s’attache qu’à vérifier les conditions du contrôle de proportionnalité du droit à la preuve, escamotant ce faisant les critères légaux. Or les conditions de ce contrôle de proportionnalité sont porteuses de certaines transformations par rapport au texte tel qu’interprété jusqu’à présent.

1. D’abord, exiger une preuve « nécessaire » à l’exercice du droit à la preuve revient-il au même qu’une preuve « indispensable » comme dans la formule usuelle des autres chambres ? Une preuve indispensable revient à démontrer qu’aucune autre preuve à disposition du demandeur ne pouvait être produite (v. ainsi G. Lardeux, Le droit à la preuve : tentative de systématisation, RTD civ. 2017. 1 image, spéc. IA2). La carence d’une partie deviendrait une cause de rejet de la demande de mesure d’instruction. Or il était usuellement jugé que la carence d’une partie, visée à l’article 146, était inopérante s’agissant des mesures d’instruction préventives (Civ. 2e, 1er juin 1992, n° 90-20.884, Bull. civ. II, n° 160). Faudra-t-il donc désormais démontrer que la mesure sollicitée est la seule qui permette d’obtenir une preuve, au moins lorsqu’un droit fondamental est en cause ? On peut le penser car en l’espèce, la haute juridiction s’attache à relever que la demanderesse pouvait avoir connaissance des éléments qu’elle recherchait autrement. Les mesures préventives perdraient en autonomie (sur laquelle, v. S. Amrani-Mekki et Y. Strickler, op. cit.).

2. Ensuite, la condition d’une mesure « proportionnée aux intérêts antinomiques en présence » est riche. Elle recouvre l’idée admise de circonscription de la mesure destinée à limiter son caractère intrusif (V. Vigneau, art. préc., p. 56). Mais elle charrie aussi de nouveaux raisonnements qui introduisent une insécurité juridique (A. Aynès et X. Vuitton, Droit de la preuve, 2e éd., LexisNexis, coll. « Droit & professionnels », 2017, n° 164).

Par exemple, ne faudra-t-il pas apprécier, outre sa vraisemblance, l’importance du litige à venir ? Il est en effet parfois considéré que ce n’est que lorsque la preuve assure l’effectivité de droits fondamentaux que son administration au mépris d’un autre droit fondamental est proportionnée (en ce sens, v. V. Vigneau, art. préc., p. 56 ; contra et nuancée, G. Lardeux, art. préc., spéc. IB2). Cela obligerait le demandeur se heurtant à des secrets protégés à établir, dès l’instance en référé, que le litige au fond mettrait en jeu un de ses droits fondamentaux. Le droit aux mesures in futurum tiendrait alors davantage de l’article 13 de la Convention européenne que de son article 6.

En outre, si l’accent est mis sur les « intérêts antinomiques », que deviendront les obstacles reconnus en la matière ? Sous l’effet du contrôle de proportionnalité in concreto, la portée de certains secrets pourrait être dévitalisée (v. déjà, l’évolution du secret professionnel, G. Lardeux, Secrets professionnels et droit à la preuve : de l’opposition déclarée à la conciliation imposée, D. 2016. 96 image ; H. Barbier, Le secret professionnel rattrapé par le droit à la preuve ?, RTD civ. 2016. 128 image). Si les obstacles légaux sont traités comme des intérêts parmi d’autres, sera-t-il possible, par exemple dans le domaine des modes alternatifs de règlement des différends (MARD), au nom du droit à la preuve, de contraindre, par le biais de l’article 145, un médiateur à transmettre des informations couvertes par la confidentialité au-delà des exceptions légales ?

En conclusion, l’affirmation d’un droit aux mesures in futurum dérivé du droit à la preuve n’a pas encore livré toute sa portée : cette approche pourra soit contribuer au filtrage des demandes soit à leur expansion, sans que la prévisibilité des solutions en ressorte favorisée.

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Les mesures d’instruction [I]in futurum[/I] à l’épreuve du droit à la preuve

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L’article premier prévoit que les audiences pourront être filmées. Le Conseil d’État et la Cour de cassation ont été inclus.

L’article 2 encadre les enquêtes préliminaires, qui ne pourront excéder deux ans, avec possibilité de prolonger ce délai d’un an sur autorisation du procureur. Seules exceptions, les enquêtes concernant des crimes et délits commis en bande organisée dureront jusqu’à cinq ans. L’accès au dossier sera également possible un an après une audition libre, une garde à vue ou une perquisition ou si la personne a été publiquement présentée dans des médias comme coupable de faits faisant l’objet de l’enquête (sauf si la fuite provient d’elle ou si c’est une infraction en bande organisée).

L’article 3 traite du « du secret professionnel de la défense » et renforce la protection de l’avocat.

Les articles 6 et 7 portent sur le jugement des crimes. Les cours criminelles départementales sont généralisées et les règles des assises sont revues pour renforcer le rôle du jury populaire. Le projet de loi organique permettra à des avocats honoraires d’être assesseurs.

Les crédits automatiques de réduction de peine sont supprimés par l’article 9. En compensation, les juges pourront prononcer jusqu’à six mois de réduction de peines par an. Par ailleurs, pour les peines inférieures à deux ans, les trois derniers mois se feront automatiquement en « libération sous contrainte » «  sauf en cas d’impossibilité matérielle résultant de l’absence d’hébergement » et si le détenu a fait l’objet de sanction disciplinaire.

Les articles 11 et 12 traitent du travail en prison et créent un « contrat d’emploi pénitentiaire ». Un code pénitentiaire sera créé par ordonnances.

Le titre V porte sur la discipline des officiers publics ministériels. L’article 29 permettra l’exécution d’accord contresigné par les avocats sans homologation par un juge.

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Le pouvoir réglementaire n’aurait pas pu légalement, pour fixer les redevances du réseau 5G, tenir compte des conséquences pour certains candidats de la loi « anti-Huawei ».

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Sur le fond, le pourvoi articulait un moyen plus complexe. De fait, la motivation de la cour d’appel pour fonder le rejet de l’appel était pour le moins alambiqué. Les juges du fond avaient considéré l’appel irrecevable car l’appelant ne rapportait pas la preuve que le juge de la mise en état avait commis un excès de pouvoir. Ils avaient ajouté que « (…) seule la compétence du juge de la mise en état ayant fait débat et non pas la demande dont il était saisi qui excéderait ses pouvoirs, et que le juge de la mise en état ne s’est pas attribué un pouvoir qu’il n’avait pas mais a éventuellement exercé une compétence qu’il n’avait pas (…) ». Mais, pouvoir ou compétence, les juges du fond avaient bien relevé une impossibilité pour le juge de la mise en état d’écarter des débats les pièces litigieuses. L’irrecevabilité de l’appel consacrait donc bien un excès de pouvoir du juge de la mise en état. La Cour de cassation censure donc la décision et, statuant au fond conformément à l’article L. 411-3 du code de l’organisation judiciaire, annule l’ordonnance, ce qui a pour conséquence de rendre irrecevable la demande d’incident de communication de pièce qui avait été...

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Quelques précisions sur la contestation d’un avis d’inaptitude

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Condamnation du commissaire aux comptes pour révélation tardive de faits délictueux

La responsabilité civile d’un commissaire aux comptes est retenue pour avoir manqué à son obligation légale de vérification de la sincérité de la rémunération du dirigeant social. Il a, certes, révélé au procureur de la République les malversations commises par le dirigeant, mais beaucoup trop tard.

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Le juge est tenu de répondre aux demandes de rabat de la clôture

Les conclusions ou pièces produites quelques heures ou jours avant qu’est rendue l’ordonnance de clôture font l’objet d’une défiance justifiée. Certes, elles ne méconnaissent pas la règle du jeu posée par l’article 802 du code de procédure civile : selon ce texte, seules les conclusions ou pièces versées aux débats après que l’ordonnance est rendue doivent d’office être écartées des débats (Civ. 2e, 6 juin 2019, n° 18-20.063, AJDI 2019. 640 image ; Com. 18 sept. 2012, n° 11-17.546 P, D. 2012. 2240, obs. A. Lienhard image ; Civ. 1re, 11 juin 2008, n° 07-19.558 P, D. 2009. 53, obs. M. Douchy-Oudot image ; Civ. 2e, 12 mai 1980, n° 79-11.983 P). Pour autant, la production de « dernière heure » de nouveaux éléments risquent de priver les adversaires de toute possibilité d’y répondre avant que soit rendue l’ordonnance de clôture. Parce que le respect du contradictoire est en jeu, le juge se doit d’être particulièrement attentif aux réactions que peuvent susciter de telles productions chez les parties. Un arrêt rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 25 mars 2021 le rappelle à nouveau.

Alors que des conclusions avaient été signifiées la veille de l’ordonnance de clôture, l’adversaire avait déposé des conclusions en réplique cinq jours plus tard tout en prenant le soin de solliciter la révocation de l’ordonnance de clôture. Pour toute réponse, la cour d’appel s’est déterminée au regard des prétentions et moyens respectifs des parties après avoir visé la date de l’ordonnance de clôture. Saisie d’un pourvoi, la Cour de cassation a censuré l’arrêt rendu. Après avoir rappelé qu’il résulte des articles 455 et 783, alinéa 2, du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 (devenue art. 802, al. 3, à la suite de l’entrée en vigueur du décret), que « sont recevables les conclusions postérieures à l’ordonnance de clôture aux termes desquelles une partie en demande la révocation et qu’il appartient au juge qui en est saisi d’y répondre », la Cour de cassation juge qu’il...

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Chacun sait que l’ordonnance de clôture marque l’instant où le juge déclare l’instruction close et qu’à compter de ce moment, aucune conclusion ni aucune pièce ne peut plus être reçue. Lorsqu’une partie sollicite le rabat de la clôture, le juge est cependant tenu de répondre à sa demande…

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Recevabilité de la tierce opposition de l’actionnaire évincé par le plan de redressement

Le contentieux de la recevabilité de la tierce opposition du créancier contre les jugements rendus en matière de droit des entreprises en difficulté est récurrent. Entre pure technique procédurale et respect des impératifs de célérité liés au traitement de l’insolvabilité, les problématiques suscitées par cette voie de recours exceptionnelle sont nombreuses et l’arrêt sous commentaire en témoigne.

En l’espèce, une société anonyme (SA) a été mise en redressement judiciaire. L’un des associés a formé tierce opposition à l’arrêt rendu par une cour d’appel, le 30 novembre 2017, ayant adopté le plan de redressement de la société débitrice. Le 5 mars 2018, l’assemblée générale de la société a alors, conformément à ce plan, décidé la réduction du capital à zéro et l’augmentation de capital réservée à un unique actionnaire (C. com., art. L. 631-9-1).

Las, la tierce opposition de l’associé a été déclarée irrecevable en appel (Caen, 2e ch. civ., 20 sept. 2018, n° 16/4823, LEDEN nov. 2018, n° 111y4, p. 1, note F.-X. Lucas). Pour les juges du fond, les moyens invoqués par l’associé ont tous été soulevés par la société débitrice dans le cadre de l’instance ayant abouti à l’arrêt du 30 novembre 2017. Aussi ces moyens étaient-ils communs à tous les actionnaires et donc soutenus et défendus en tant que tels par la société débitrice. Il en est déduit que l’associé n’était donc pas le seul à pouvoir les invoquer et, qu’en conséquence, il ne s’agissait pas de moyens propres au sens des dispositions de l’article 583 du code de procédure civile.

L’associé a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.

Pour le demandeur, la représentation des associés par le représentant légal de la société est limitée aux hypothèses où l’atteinte aux droits ou au patrimoine des associés n’est que la conséquence indirecte de l’atteinte aux droits ou au patrimoine de la société. En revanche, l’atteinte à la qualité même d’actionnaire s’analyse en une atteinte directe aux droits ou au patrimoine de l’associé. Par conséquent, en décidant que l’associé avait été représenté, s’agissant de la perte de sa qualité d’associé et de son droit préférentiel de souscription, par le représentant légal, quand ces deux points s’analysaient en une atteinte directe à ses droits, les juges du fond auraient violé l’article 583 du code de procédure civile ainsi que l’article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme (Conv. EDH).

La Haute juridiction souscrit à l’argumentation et casse l’arrêt d’appel au seul visa de l’article 583 du code de procédure civile.

Pour la Cour de cassation, si en principe l’associé est représenté dans les litiges opposant la société à des tiers par le représentant légal de la société, il résulte de l’article 583 du code de procédure civile que l’associé est néanmoins recevable à former tierce opposition contre un jugement auquel la société a été partie s’il invoque une fraude à ses droits ou un moyen propre.

En l’espèce, l’atteinte à la qualité d’associé et au droit préférentiel de souscription s’analysait en un moyen propre, quand bien même l’ensemble des autres associés disposait d’un tel droit, de sorte que la tierce opposition ne pouvait être déclarée irrecevable.

L’arrêt ici rapporté constitue un changement de cap remarquable en matière de recevabilité d’une tierce opposition exercée par un associé d’une société en difficulté. Avant de s’intéresser à cet aspect de la décision, revenons d’abord sur les règles applicables en la matière.

L’article 583 du code de procédure civile dispose qu’est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, à la condition qu’elle n’ait été ni partie ni représentée au jugement qu’elle attaque. En revanche, la personne « représentée » au sens du texte précité retrouve le droit de former tierce opposition si elle invoque une fraude à ses droits ou des moyens qui lui sont propres (par ex., Com. 15 nov. 2017, n° 16-14.630, Bull. civ. IV, n° 154 ; D. 2017. 2366 image ; RTD com. 2018. 1024, obs. H. Poujade image).

Au demeurant, la détermination de la notion de moyens propres cristallise l’essentiel du contentieux relatif à l’exercice de la tierce opposition en procédure collective (par ex., Com. 21 oct. 2020, n° 18-23.749 NP ; Gaz. Pal. 12 janv. 2021, n° 394n4, p. 68, note T. Goujon-Béthan). Or, ces problématiques semblent accentuées lorsque le créancier en question revêt la qualité d’associé d’une société en difficulté.

Comme le rappelle la Cour de cassation, et bien que cela soit critiquable (D. Veaux et P. Veaux-Fournerie, Les surprises de la tierce opposition, in Mélanges Cosnard, Économica, 1990, p. 409), l’associé est représenté au sens de l’article 583 du code de procédure civile, dans les litiges opposant la société à des tiers, par le représentant légal de la société. Dès lors, en principe, un associé ne peut pas former de tierce opposition à un jugement auquel la personne morale a été partie (Com. 15 juill. 1975, n° 74-12.308, Bull. civ. IV, n° 207 ; 23 mai 2006, n° 04-20.149, Bull. civ. IV, n° 129 ; D. 2006. 1742, obs. A. Lienhard image ; RTD com. 2006. 618, obs. M.-H. Monsèrié-Bon image ; BJS oct. 2006, n° 10, p. 1173, note J.-F. Barbièri).

Cela étant, la jurisprudence, par un arrêt remarqué du 19 décembre 2006, a assoupli cette irrecevabilité de principe, sur le fondement du droit à l’accès au juge de l’article 6, § 1, de la Conv. EDH, en admettant qu’un associé de société civile puisse former tierce opposition à l’encontre d’un jugement d’ouverture d’une liquidation judiciaire (Com. 19 déc. 2006, n° 05-14.816, Bull. civ. IV, n° 254 ; D. 2007. 1321, obs. A. Lienhard image, note I. Orsini image ; Rev. sociétés 2007. 401, note T. Bonneau image ; BJS avr. 2007, n° 4, p. 466, note J. Vallansan et P. Cagnoli ; Gaz. Pal. 14 avr. 2007, n° 104, p. 24, note C. Lebel ; JCP 2007. II. 10076, note D. Cholet ; Dr. sociétés 2007/2. Comm. 24, note F.-X. Lucas).

Pris sur le fondement de la norme conventionnelle, cet assouplissement notable a ensuite été étendu à d’autres hypothèses. Ainsi la tierce opposition exercée par l’associé de société civile à l’encontre du jugement ayant fixé une créance dans une instance en paiement engagée contre la société avant l’ouverture de la liquidation judiciaire (Com. 26 mai 2010, n° 09-14.241 NP, D. 2010. 1415, obs. A. Lienhard image ; Rev. sociétés 2010. 406, obs. P. Roussel Galle image ; RTD com. 2010. 567, obs. M.-H. Monsèrié-Bon image ; BJS oct. 2010, n° 10, p. 839, note O. Staes ; JCP E 2010. 1861, note R. Perrot ; Rev. proc. coll. 2010/5, comm. 194, note C. Lebel ; Act. proc. coll. 2010/12, n° 180, note L. Fin-Langer) ou encore à l’encontre d’une décision condamnant la société in bonis à un paiement (Civ. 3e, 6 oct. 2010, n° 08-20.959, Bull. civ. III, n° 180 ; D. 2010. 2361, obs. A. Lienhard image ; AJDI 2011. 227 image, obs. F. de La Vaissière image ; BJS févr. 2011, n° 2, p. 120, § 61, note F.-X. Lucas ; JCP E 2010. 2026, note S. Reifegerste) a-t-elle été jugée recevable.

Les arrêts précités sont spécifiques à plusieurs égards. D’une part, la Cour de cassation n’y affirme pas que l’associé est un tiers « non représenté » par la société débitrice, pas plus qu’il n’est fait référence à la notion de « moyens propres » de l’article 583 du code de procédure civile permettant à un créancier ou à un ayant cause d’exercer la tierce opposition. D’autre part, et au contraire, il y est, à chaque fois, affirmé que le droit d’agir de l’associé de société civile est fondé sur le droit à l’accès au juge de l’article 6, § 1, de la Conv. EDH.

La question de la portée de ces décisions demeurait entière avec notamment l’interrogation de savoir si l’assouplissement des conditions de recevabilité de la tierce opposition, sur le fondement du droit à l’accès au juge, pouvait s’étendre à tous les associés, et ce, peu important la forme de la société. À cet égard, l’arrêt « fondateur » du 19 décembre 2006 faisait référence à la charge indéfinie des dettes sociales de l’associé de société civile, comme si le caractère illimité ou limité de l’obligation aux dettes sociales était le critère permettant d’apprécier la violation du droit à l’accès au juge résultant de la fermeture de la tierce opposition (I. Orsini, L’associé de la société civile et le droit au juge, D. 2007. 1321 image).

Partant, nous comprenons que la tierce opposition ait été reconnue à l’associé de société civile, lequel a une responsabilité financière indéfinie à proportion de sa part dans le capital social (C. civ., art. 1857). L’intérêt particulier de cet associé à voir la société perdurer et, par conséquent, à maintenir l’écran de la personnalité morale est particulièrement prégnant. Dans la même veine, il ne fait pas de doute que ce qui a été jugé concernant l’associé de société civile puisse l’être pareillement à propos d’un associé d’une société en nom collectif (SNC) (C. com., art. L. 221-1) ou d’un membre d’un groupement d’intérêt économique (GIE) (C. com., art. L. 251-6), car ils ont, tous deux, une responsabilité illimitée.

En revanche, beaucoup plus délicate était la question de savoir si la solution se transposait à un associé dont la responsabilité était limitée. A priori, la réponse était négative, comme en témoignent deux arrêts rendus par la chambre commerciale de la Cour de cassation, au sein desquels il avait été conclu à l’irrecevabilité de la tierce opposition formée par l’associé d’une société à responsabilité limitée (SARL) (Com. 7 févr. 2012, n° 10-26.626, Bull. civ. IV, n° 30 ; D. 2012. 494, obs. A. Lienhard image ; 21 janv. 2014, n° 12-28.259 NP).

L’arrêt commenté se détache de ces deux précédents en estimant l’actionnaire d’une SA recevable à former tierce opposition à l’encontre d’un jugement arrêtant un plan de redressement.

La solution est d’autant plus intéressante que la recevabilité de l’associé ne semble pas ici dépendre d’une violation du droit à l’accès au juge, mais se déduit, plus classiquement, de la présence d’un moyen propre au sens de l’article 583 du code de procédure civile permettant aux créanciers et autres ayant causes de former tierce opposition.

Nous nous permettons cette remarque, car l’arrêt d’appel est cassé au visa de l’unique article 583 du code de procédure civile, là où le pourvoi du demandeur indiquait également une violation de l’article 6, § 1, de la Conv. EDH. Évidemment, notre propos n’est pas de dire que les considérations relatives à l’accès au juge de l’associé sont absentes des inspirations de la présente décision. En revanche, nous trouvons que le fait de se départir des considérations conventionnelles confère à la matière une plus grande logique.

Comme nous l’avons vu, la recevabilité de la tierce opposition de l’associé s’appréciait en fonction de l’ampleur de la violation du droit à l’accès au juge relativement aux risques encourus au sein de la société concernée. Las, pris à la lettre, ce critère confinait l’associé d’une société où les risques sont limités à l’irrecevabilité de la tierce opposition.

Cette distinction selon le risque supporté par l’associé est contestable. En réalité, seules comptent les conséquences patrimoniales de la décision que l’associé entend critiquer, et ce, indépendamment de l’étendue de son engagement au sein de la société. Or, s’il est vrai que l’associé de société civile voit sa situation s’aggraver en cas d’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire, il n’en demeure pas moins que le jugement d’adoption d’un plan qui annulerait, comme en l’espèce, les titres d’un actionnaire en supprimant son droit préférentiel de souscription, est tout aussi grave du point de vue de l’associé. Ce dernier est exclu de la société, ce qui va l’obliger à contribuer aux pertes immédiatement. Dans cette optique, il nous semble logique que l’actionnaire puisse critiquer le jugement l’expropriant de la société. Or, en l’espèce, si l’actionnaire a qualité pour former tierce opposition contre le jugement arrêtant le plan, c’est qu’il se prévaut d’un moyen propre au sens de l’article 583 du code de procédure civile.

En extrapolant la décision et en la généralisant quelque peu, la lettre de l’article 583 du code de procédure civile nous paraît plus à même de régler les questions de la recevabilité d’un associé à former une tierce opposition, et ce, quelle que soit la forme sociale. Certes, la notion de moyens propres a des défauts, mais elle confère une grille de lecture à la matière, probablement plus malléable que peut l’être le risque de violation du droit à l’accès au juge au regard du degré d’engagement de l’associé. Au demeurant, si le droit à l’accès au juge est respecté, c’est que l’associé concerné a pu faire entendre sa voix en se prévalant d’un moyen propre, lequel peut exister, quel que soit le degré de responsabilité de l’associé. Toutefois, il est permis de regretter que le caractère artificiel de la représentation de l’associé par le dirigeant à l’instance concernée n’ait pas été mis en avant (déjà en ce sens, F.-X. Lucas, note ss. Com. 19 déc. 2006, n° 05-14.816, Bull. civ. IV, n° 254 ; BJS févr. 2007, éditorial), car exiger de l’associé la preuve d’un moyen propre pour exercer la tierce opposition, c’est d’abord reconnaître que ce dernier n’est pas véritablement un tiers à la société, du moins une personne « non représentée », au sens de l’article 583 du code de procédure civile.

En dernier lieu, relevons qu’en l’espèce l’existence d’un moyen propre permettant à l’actionnaire de former tierce opposition peut être discuté. En effet, il pourrait être soutenu que le fait de se prévaloir de la perte d’un droit préférentiel de souscription n’est pas un moyen propre à l’associé dans la mesure où il serait commun à l’ensemble des actionnaires. Or, le moyen propre peut être défini comme un moyen personnel à l’intéressé que lui seul peut faire valoir (F. Pérochon, Entreprises en difficulté, 10e éd., LGDJ, 2014, n° 547) et la Cour de cassation estime qu’il s’agit d’un moyen distinct de ceux pouvant être invoqués par les autres créanciers (Com. 1er juill. 2020, n° 18-23.884 NP,  Gaz. Pal., 13 oct. 2020, n° 388x3, p. 71, note T. Goujon-Béthan). À la suite du commentateur de l’arrêt d’appel attaqué, nous pensons que cet argument porte peu puisque rien n’empêche qu’un moyen propre soit commun à plusieurs parties, pourvu qu’il ne soit pas commun à tous les créanciers (F.-X. Lucas, note ss. Caen, 2e ch. civ., 20 sept. 2018, n° 16/4823, préc.). En l’occurrence, l’actionnaire évincé par le plan a des moyens à faire valoir qui lui sont propres, puisqu’il souffre de l’expropriation que sa tierce opposition vise à contester.

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Recevabilité de la tierce opposition de l’actionnaire évincé par le plan de redressement

Si l’associé est, en principe, représenté, dans les litiges opposant la société à des tiers, par le représentant légal de la société, il est néanmoins recevable à former tierce opposition contre un jugement auquel celle-ci a été partie s’il invoque notamment un moyen propre. Tel est le cas d’un associé prétendant que le plan de redressement de la société porte atteinte à sa qualité d’associé et à son droit préférentiel de souscription, et ce, peu important que les autres associés disposaient du même droit.

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Recevabilité de la tierce opposition de l’actionnaire évincé par le plan de redressement

Si l’associé est, en principe, représenté, dans les litiges opposant la société à des tiers, par le représentant légal de la société, il est néanmoins recevable à former tierce opposition contre un jugement auquel celle-ci a été partie s’il invoque notamment un moyen propre. Tel est le cas d’un associé prétendant que le plan de redressement de la société porte atteinte à sa qualité d’associé et à son droit préférentiel de souscription, et ce, peu important que les autres associés disposaient du même droit.

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Application de la réforme de l’article 55 du décret de 1967 aux procédures en cours : oui, mais…

Les dispositions réformées de l’article 55 du décret du 17 mars 1967 par le décret du 27 juin 2019 s’appliquent aux procédures en cours, mais pas aux actes déjà accomplis. 

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Encore une QPC pour l’hospitalisation sans consentement

Décidément, les questions prioritaires de constitutionnalité sont une préoccupation saisonnière pour l’hospitalisation sans consentement. Au printemps 2020, nous avions commenté la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC ) par la première chambre civile de la Cour de cassation (Civ. 1re, 5 mars 2020, n° 19-40.039, Dalloz actualité, 15 avr. 2020, obs. C. Hélaine). Cette transmission allait, quelques mois plus tard, aboutir à l’abrogation de plusieurs textes concernant l’isolement et la contention dans le code de la santé publique (CSP). Au mois de décembre dernier, toujours dans ces colonnes, nous commentions le dispositif pris en six mois de réflexion pour pallier l’abrogation des textes concernés (Loi n° 2020-1576 du 14 déc. 2020, de financement de la sécurité sociale pour 2021, Dalloz actualité, 12 janv. 2021, obs. C. Hélaine).

Voici que se représente une question prioritaire de constitutionnalité ainsi formulée devant le tribunal judiciaire de Versailles : « Les dispositions de l’article 84 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour l’année 2021 sont-elles compatibles avec les normes constitutionnelles en vigueur et plus particulièrement les articles 34, alinéa 20, et 66 de la Constitution ? ». Le juge des libertés et de la détention avait transmis la question à la Cour de cassation comme les textes le permettent.

En rappelant que « Nul ne peut être arbitrairement détenu » et dans son deuxième alinéa que « l’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi », l’article 66 de la Constitution du 4 octobre 1958 (la Constitution) vient directement entrer en collision avec ces mesures délicates que représentent l’isolement et la contention ; mesures coercitives qui s’ajoutent à celle qui en sert de support, l’hospitalisation sans consentement elle-même. La collision perdure suffisamment pour que la question soit encore d’actualité, au moins pour valider le dispositif retenu a posteriori.

La première chambre civile de la Cour de cassation a décidé de transmettre la question au Conseil constitutionnel car elle présente un caractère sérieux. Notons que ce caractère sérieux n’existe que pour le volet concernant l’article 66 de la Constitution. Pour la compatibilité avec l’article 34, alinéa 20, la Cour de cassation rappelle le principe selon lequel « la procédure d’adoption d’une loi ne peut être invoquée à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité ». C’est une solution constante que nous ne commenterons pas (Rép. droit civil, v° Lois et règlements, par V. Lasserre, n° 178).

Que retenir d’une telle décision de transmission du volet concernant l’article 66 ?

Première question : quel état des lieux ayant généré cette QPC ?

L’article 84 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 accorde déjà une place importante, bien que nouvelle, au contrôle du JLD. Mais il est vrai que l’isolement et la contention ne débutent qu’après l’avis d’un psychiatre qui ne s’accompagne pas de celui du juge dans un premier temps. Le nouvel article L. 3222-5-1 du CSP rappelle que ce sont « des pratiques de dernier recours » et qu’elles doivent être prises « pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui ». Voici donc deux conditions cumulatives qui sont déjà prises en considération des droits de la personne internée sans consentement et, ce faisant, de sa liberté. Ces deux conditions ont vocation à limiter ces mesures au strict nécessaire. La pratique se révèle toutefois infiniment plus complexe.

Il faut bien avouer que les juristes doivent ici comprendre les psychiatres et les praticiens hospitaliers qui font face à des patients parfois particulièrement dangereux que ce soit pour eux-mêmes ou pour les praticiens les encadrant. L’hospitalisation sans consentement n’est pas un seul territoire de droit, il est au confluent de la médecine psychiatrique et du droit des libertés individuelles. Il ne faut donc pas faire une analyse seulement juridique de la situation ; elle serait probablement fausse et inadaptée. C’est précisément pour cette raison que le contrôle du juge ne débute qu’après un renouvellement des mesures et non ab initio.

Une analyse croisée laisse donc tout de même suggérer de l’équilibre du mécanisme retenu entre possibilités des praticiens et réponse judiciaire. Mais est-ce suffisant pour les libertés individuelles dont le juge est le garant ? La question se discute car il est vrai que le JLD n’intervient qu’après l’écoulement d’un certain temps. Pour rappel, le système est le suivant tel qu’il résulte de la loi de financement de la sécurité sociale précédemment commentée dans nos colonnes :

en ce qui concerne l’isolement, la mesure peut être répétée jusqu’à atteindre quarante-huit heures au maximum quand l’état de santé du patient le nécessite ; en ce qui concerne la contention, la mesure ne peut intervenir que pour une durée plus courte, six heures renouvelables jusqu’à atteindre vingt-quatre heures.

Une fois ces seuils dépassés, l’information au JLD est nécessaire et celui-ci peut se saisir d’office pour mettre fin à la mesure. Quand le majeur interné ou une personne de son entourage souhaite saisir le JLD, celui-ci a vingt-quatre heures pour rendre sa décision. La réponse judiciaire débute donc à ce moment précis.

Toute l’interrogation peut donc se résumer à la pertinence du système proposé eu égard à la norme constitutionnelle. Le résultat peut s’avérer brumeux. Nous tenterons de dégager quelques réflexions avant la décision QPC.

Seconde question : quel résultat envisageable ?

Une abrogation reste évidemment toujours possible. Mais une lecture attentive de la décision n° 2020-844 QPC du 19 juin 2020 « M. Éric G. » qui avait abrogé l’ancien système nous permet de comprendre le raisonnement du Conseil : « Or, si le législateur a prévu que le recours à l’isolement et à la contention ne peut être décidé par un psychiatre que pour une durée limitée, il n’a pas fixé cette limite ni prévu les conditions dans lesquelles au-delà d’une certaine durée, le maintien de ces mesures est soumis au contrôle du juge judiciaire. Il s’ensuit qu’aucune disposition législative ne soumet le maintien à l’isolement ou sous contention à une juridiction judiciaire dans des conditions répondant aux exigences de l’article 66 de la Constitution » (nous soulignons).

Le droit positif s’est pourvu d’une disposition légale – l’article L. 3222-5-1 du CSP nouveau – et cette partie au moins du raisonnement ne devrait plus pouvoir être maintenue avec le dispositif actuel. Reste à savoir si le tout peut être suffisant eu égard à l’article 66. L’interprétation de la suite de la décision peut être davantage sujette à discussion sur ce point. En réalité, ce n’est pas l’absence de contrôle du JLD qui posait problème mais l’inexistence de divers paliers légaux qui, une fois dépassés, enclencherait une réponse judiciaire où le juge devrait autoriser le maintien ou la mainlevée de l’isolement et de la contention. Si la réponse judiciaire est désormais prévue, reste donc à déterminer s’il n’est pas saisi trop tardivement de la question ; c’est du moins tout l’enjeu du caractère sérieux soulevé par la Cour de cassation.

Il ne faut pas oublier que la charge de travail des JLD est particulièrement importante et la vérification des mesures d’isolement et de contention s’ajoutent à ce constat. Certes nécessaire, l’addition se révélera d’autant plus délicate à gérer si le mécanisme retenu est abrogé à nouveau. Il faudra alors refaire ce qui a déjà été refait. L’abrogation théoriquement possible devrait en tout état de cause être accompagnée d’un report dans le temps des effets de l’abrogation comme dans la décision de juin 2020. Boileau disait bien dans l’Art Poétique « Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage, Polissez-le sans cesse, et le repolissez, Ajoutez quelquefois, et souvent effacez ». Rien n’est donc impossible ! Mais il reste toutefois important de souligner que le mécanisme paraît, en l’état, cohérent compte tenu des enjeux complexes de la question. Trop durcir le mécanisme pourrait risquer de rendre le travail des équipes médicales plus difficile qu’il ne l’est aujourd’hui.

Affaire à suivre.

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Encore une QPC pour l’hospitalisation sans consentement

Bis repetita ! La Cour de cassation transmet à nouveau une question prioritaire de constitutionnalité au sujet des soins psychiatriques sous contrainte. Cette fois-ci, c’est le mécanisme issu de la réforme de décembre dernier qui est sous le feu des projecteurs. 

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Des propositions pour lutter contre l’augmentation des agressions d’élus

Alors que les agressions d’élus se multiplient, la commission des lois de l’Assemblée nationale a créé une mission destinée à identifier les difficultés concrètes auxquelles font face les élus municipaux dans ce domaine. Les conclusions de cette mission sur les entraves opposées à l’exercice des pouvoirs de police des élus municipaux ont été présentées par les députés Philippe Gosselin et Naïma Moutchou, co-rapporteurs.

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Le relatif délai pour déférer une ordonnance de mise en état lorsque la procédure est sans représentation obligatoire

Par déclaration du 21 septembre 2015, un employeur fait appel d’un jugement rendu par le conseil de prud’hommes l’ayant condamné au profit du salarié.

Le magistrat chargé d’instruire l’affaire établit un calendrier, dont les parties sont avisées, pour la remise des conclusions et des pièces, et prévoyant en outre une date d’audience. Il était prévu qu’à défaut de respecter ce calendrier, l’affaire serait radiée ou l’appel considéré comme non soutenu, et que la dispense de présentation à l’audience était permise dans l’hypothèse du respect du calendrier.

Le 14 avril 2016, date de l’audience, le magistrat chargé d’instruire l’affaire a, par ordonnance, déclaré l’appel non soutenu et confirmé le jugement.

Ce n’est que le 1er juin 2016 que l’appelant défèrera l’ordonnance à la cour, laquelle a déclaré le déféré irrecevable, pour tardiveté.

L’arrêt sur déféré est soumis à la censure de la Cour de cassation, le précédent pourvoi contre l’ordonnance ayant été déclaré irrecevable dès lors qu’un déféré était ouvert.

La Cour de cassation casse l’arrêt sur déféré, et en profite pour opportunément annuler l’ordonnance.

Le déféré, un acte de procédure qui ne créé pas une instance autonome

Ce n’est évidemment pas la raison de la publication de cet arrêt, mais il n’est pas inutile de reprendre cette précision, déjà connue (Civ. 2e, 11 janv. 2018, n° 16-23.992, Bull. civ. II, n° 3 ; Dalloz actualité, 22 janv. 2018, obs. A. Danet ; D. 2018. 121 image ; ibid. 692, obs. N. Fricero image ; RTD civ. 2018. 479, obs. P. Théry image ; 4 juin 2020, n° 18-23.248, D. 2021. 543, obs. N. Fricero image), selon laquelle « le déféré est un acte de la procédure d’appel qui s’inscrit dans le déroulement de cette procédure et n’ouvre pas une instance autonome ».

Le déféré n’est pas une voie de recours mais un acte de procédure, ce que l’on va commencer à savoir, même si cela semble encore bien souvent ignoré. Mais comme enseigner c’est répéter, nous ne pouvons que saluer la répétition.

Il n’introduit pas une instance autonome, de sorte qu’il serait opportun que les cours d’appel, même si cela peut avoir un intérêt au regard des statistiques, cessent d’attribuer des numéros de RG au déféré formé et de supprimer le précédent RG attribué à l’instance au fond. Cela est source de complications inutiles, et ne répond nullement à une quelconque exigence du code.

Le déféré et… le déféré

Lorsqu’est évoqué le déféré, le praticien pense immédiatement à celui de l’article 916.

Pourtant, en l’espèce, ce n’est pas de lui dont il est question.

S’il s’agit de l’appel...

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Le relatif délai pour déférer une ordonnance de mise en état lorsque la procédure est sans représentation obligatoire

Lorsque la procédure est sans représentation obligatoire par avocat, le délai de quinze jours laissé à la partie pour déférer une ordonnance rendue par le magistrat chargé d’instruire l’affaire ne peut courir, dans l’hypothèse où la partie ou son représentant n’a pas été informé de la date à laquelle l’ordonnance sera rendue, que du jour où l’ordonnance est portée à la connaissance de la partie ou de son représentant.
La partie n’ayant pas comparu à l’audience, et dès lors qu’il ne ressortait pas de l’ordonnance que la date de son prononcé avait été portée à la connaissance des parties, le déféré effectué dans le délai de quinze jours de la notification de l’ordonnance est recevable.

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Précisions sur l’effet interruptif de prescription attaché à la déclaration de créance

Un créancier inscrit à qui est inopposable la déclaration d’insaisissabilité d’un immeuble appartenant à son débiteur, et qui peut donc faire procéder à la vente sur saisie de cet immeuble, a également la faculté de déclarer sa créance au passif de la procédure collective du débiteur. S’il fait usage de cette faculté, il bénéficie de l’effet interruptif de prescription attaché à sa déclaration de créance, cet effet interruptif se prolongeant en principe jusqu’à la date de la décision ayant statué sur la demande d’admission, dès lors que ce créancier n’est pas dans l’impossibilité d’agir sur l’immeuble. Toutefois, lorsqu’aucune décision n’a statué sur cette demande d’admission, l’effet interruptif de prescription attaché à la déclaration de créance se prolonge jusqu’à la clôture de la procédure collective.

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Précisions sur le régime douanier des marchandises en retour

Le fait qu’une société ait, par le passé, bénéficié du régime de perfectionnement passif ne la rendait pas inéligible au régime dit des marchandises en retour pour des opérations similaires.

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Inaptitude : précision sur la motivation en cas d’impossibilité de reclassement

L’obligation de faire connaître les motifs s’opposant au reclassement en cas d’impossibilité de proposer au salarié un autre emploi ne s’applique pas lorsque l’employeur a proposé un emploi dans les conditions prévues et que le salarié l’a refusé.

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La période laissée aux entreprises pour documenter l’analyse d’impact de leurs traitements de données prendra fin le 24 mai 2021. Cette procédure est requise en particulier pour trois types de traitements de données concernant les ressources humaines. Mais l’avocat spécialisé Éric Barbry se veut rassurant : rien de compliqué dans l’accomplissement de ces formalités.

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Le colocataire solidaire sortant ne saurait être condamné à verser une somme au bailleur au titre de la remise en état des lieux, dès lors que la créance de celui-ci est née après l’expiration de l’obligation solidaire.

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Vacances de printemps et confinement

Rendez-vous lundi 26 avril.

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Vacances de printemps et confinement

Avant d’aborder les nombreux dossiers qui vont rythmer cette fin de quinquennat, la rédaction de Dalloz actualité profite d’une semaine de « vacances unifiées » pour savourer pleinement le confinement printanier. Retour lundi 26 avril.

À très vite.

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Estimation d’un bien exproprié revendu ultérieurement par l’expropriant : renvoi de QPC

L’article L. 322-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, qui ne prend pas en compte des changements de valeur d’un bien destiné à être revendu par l’expropriant, lui permettant de bénéficier d’une plus-value certaine, est susceptible, en l’absence d’une indemnisation spécifique de l’exproprié, de porter atteinte à son droit de propriété.

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Effet dévolutif et déclaration d’appel, tout a déjà changé

Sans égard aux conclusions de l’appelant, il résulte de l’article 562 du code de procédure civile, qui définit le contour de l’effet dévolutif de l’appel, qu’en l’absence d’énonciation expresse des chefs de jugement critiqués dans la déclaration d’appel qui sollicite seulement la réformation, la cour d’appel n’est saisie d’aucun litige et n’a pas à confirmer la décision attaquée.

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IRL : + 0,09 % au 1[SUP]er[/SUP] trimestre 2021

L’IRL augmente de 0,09 % au 1er trimestre 2021.

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Limite de responsabilité du propriétaire d’un navire de plaisance : consécration du cumul des plafonds

En ce qui concerne la limite de responsabilité du propriétaire d’un navire de plaisance, si le montant du premier plafond (créances pour lésions corporelles) est insuffisant pour régler la totalité de l’indemnité due à la victime de lésions corporelles, le solde de cette indemnité est, dans la limite du second plafond (autres créances), payé en concurrence avec les autres créances ou en totalité s’il n’existe pas d’autres créances. 

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  1345 lectures

Précisions sur l’appréciation de la proportionnalité du cautionnement

Pour apprécier la proportionnalité de l’engagement d’une caution au regard de ses biens et revenus, les biens, quoique grevés de sûretés, lui appartenant doivent être pris en compte, leur valeur étant appréciée en en déduisant le montant de la dette dont le paiement est garanti par ladite sûreté, évalué au jour de l’engagement de la caution.

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Précisions sur l’appréciation de la proportionnalité du cautionnement

Pour apprécier la proportionnalité de l’engagement d’une caution au regard de ses biens et revenus, les biens, quoique grevés de sûretés, lui appartenant doivent être pris en compte, leur valeur étant appréciée en en déduisant le montant de la dette dont le paiement est garanti par ladite sûreté, évalué au jour de l’engagement de la caution.

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  1480 lectures

Chaufferie de la Défense : « Je pense que le tribunal a honte de cette procédure, qui est indigne »

Une procédure de corruption du marché public du chauffage et de la climatisation dans le quartier de la Défense, dont les faits remontent à plus de vingt ans, avait été intégralement annulée, à la surprise générale, le 11 janvier dernier. Vendredi 16 avril, la procédure passait devant la cour d’appel de Versailles. La décision sera rendue le 15 septembre.

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  1361 lectures

Il est permis de poursuivre l’exécution d’une concession attribuée sans mise en concurrence

En l’absence de circonstances particulières, la méconnaissance des règles de publicité et de mise en concurrence n’est pas susceptible d’entacher un contrat d’un vice d’une gravité de nature à faire obstacle à la poursuite de l’exécution d’une concession.

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  1296 lectures

Les justificatifs des dépenses d’un organisme de droit privé chargé d’une mission de service public peuvent être communicables

Dans une décision rendue le 13 avril 2021, le Conseil d’État a complété la liste des documents comptables dont il est possible de solliciter la communication de la part d’un organisme privé chargé d’une mission de service public, au titre de la législation relative aux accès aux documents administratifs.

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  1343 lectures

Péremption : entre droit commun et régime dérogatoire, difficile de s’y retrouver !

À défaut d’un texte spécial subordonnant l’application de l’article 386 du code de procédure civile à une injonction particulière du juge, la péremption est constatée lorsque les parties n’ont accompli aucune diligence dans un délai de deux ans, quand bien même le juge n’en aurait pas mis à leur charge.

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  1518 lectures

L’irrecevabilité d’une demande de fixation de créance devant le juge du fond n’équivaut pas au rejet de la créance

Le juge du fond qui statue dans une instance en cours reprise conformément à l’article L. 622-22 du code de commerce ne fait pas application de l’article L. 624-2 du même code. Il en résulte que la décision par laquelle ce juge déclare irrecevable la demande d’un créancier tendant à la fixation du montant de sa créance ne constitue pas une décision de rejet de cette créance entraînant, dès lors, l’extinction de celle-ci. Par conséquent, la créance n’étant pas éteinte, le créancier conserve son droit de poursuite contre les associés de la société civile débitrice.

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  1440 lectures

Contestation de la qualité des travaux : pas de réception tacite

L’absence de réception tacite peut être déduite des contestations constantes de la qualité des travaux exécutés et de la demande d’une expertise judiciaire pour établir les manquements de l’entrepreneur, nonobstant la prise de possession et le paiement des premières factures. 

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Lutte contre la contrefaçon en ligne, réforme de l’audiovisuel : nouveau projet de loi

Le projet de loi relatif à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique consacre la création de l’ARCOM, fusion de la HADOPI et du CSA, renforce la lutte contre la contrefaçon sur internet, prévoit des mesures spécifiques contre le piratage sportif et protège la cession des œuvres cinématographiques et audiovisuelles. Son examen au Parlement débutera le 18 mai.

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Successions internationales : action en réduction et compétence du juge

La Cour de cassation se prononce pour la première fois sur la compétence internationale des juridictions françaises en cas d’action en réduction exercée par les héritiers réservataires contre le donataire d’un immeuble situé en France.

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  1521 lectures

Le pari aventureux d’Éric Dupond-Moretti sur les réductions de peine

La suppression des crédits automatiques de réduction de peine est l’une des mesures phares du projet de loi Dupond-Moretti. Une réforme qui suscite beaucoup d’interrogations. Va-t-elle complexifier inutilement le droit de l’exécution des peines et augmenter le nombre de détenus ? Le ministère de la Justice s’en défend. Mais son pari est hasardeux. Explications.

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  1405 lectures

Pas de fermeture immédiate des locaux situés à la frontière franco-italienne

Pour le juge des référés du Conseil d’État, les conditions dans lesquelles sont retenus provisoirement dans les locaux de la police à la frontière franco-italienne, des ressortissants des pays tiers à l’Union européenne, faisant l’objet d’un refus d’entrée en France en attente de leur réacheminement vers l’Italie, ne révèlent pas, en l’état de l’instruction, une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales de nature à justifier la fermeture immédiate de ces locaux de mise à l’abri et de rétention. 

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  1217 lectures

Assurance dommage ouvrage et désordres réservés

Les désordres réservés à la réception et non réparés au titre de la garantie de parfait achèvement peuvent relever sous certaines condition de l’article L. 242-1, alinéa 8, du code des assurances.

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  1749 lectures

Conservation des données : la Cour constitutionnelle belge donne sa lecture

Contrairement au Conseil d’État, la Cour constitutionnelle belge estime que l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne La Quadrature du net impose aux États de renoncer, pour l’essentiel, à la conservation généralisée et indifférenciée des données de connexion.

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  1312 lectures

Retour sur les caractéristiques essentielles du crédit à la consommation

Le montant de l’échéance qui figure dans l’encadré au titre des informations sur les caractéristiques essentielles du contrat de crédit n’inclut pas le coût mensuel de l’assurance souscrite par l’emprunteur accessoirement à ce contrat.

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  1421 lectures

Vice caché et chaîne de contrats

Dans les rapports entre le vendeur intermédiaire et l’acquéreur final, la prescription du premier dans ses rapports avec le fabricant importe peu. En respectant les délais de l’article 1648 du code civil et de l’article L. 110-4 du code de commerce, l’action en vices cachés reste parfaitement ouverte aux acquéreurs finaux contre leur propre vendeur.

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Concentrations d’entreprises : la Commission européenne accepte le premier « renvoi de l’article 22 »

Pour la première fois, la Commission va examiner une opération de concentration qui n’est pas soumise à l’obligation de notification au regard des seuils nationaux de chiffres d’affaires.

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Absence de prescription des discriminations continuant à produire leurs effets

N’est pas prescrite la discrimination s’étant poursuivie tout au long de la carrière de la salariée en termes d’évolution professionnelle, tant salariale que personnelle, et dont il résulte que les faits sur lesquels se fonde la salariée n’ont pas cessé de produire leurs effets avant la période non atteinte par la prescription.

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Projet de loi pour la confiance dans l’institution judiciaire : exécution des peines et du travail en détention

Le projet de loi pour la confiance dans l’institution judiciaire, présenté le 14 avril 2021 en conseil des ministres par le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti, contient plusieurs dispositions relatives à l’exécution des peines et au service public pénitentiaire.

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  1275 lectures

Élection au traitement préférentiel de la créance de cotisation foncière des entreprises

Pour la Cour de cassation, la cotisation foncière des entreprises, calculée à partir de la valeur locative des biens immobiliers soumis à la taxe foncière que les entreprises utilisent pour leur activité professionnelle, constitue, pour les structures qui y sont assujetties, une obligation légale et est inhérente à l’activité poursuivie après le jugement d’ouverture et entre, par conséquent, dans la catégorie des créances postérieures éligibles au traitement préférentiel.

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Régulation du courtage de l’assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement

Les courtiers en assurance, en opérations de banque et en services de paiement ont dorénavant l’obligation d’adhérer à une association professionnelle, chargée d’établir les règles applicables à la profession, agréée par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

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Un projet de loi pour renforcer l’arsenal antiterroriste et les pouvoirs du renseignement

Un nouveau projet de loi, présenté hier au conseil des ministres, contient différentes dispositions sur les terroristes sortants de prison et les mesures administratives de contrôles prévues par la loi qui a succédé à l’état d’urgence. Plusieurs articles vont également renforcer les pouvoirs du renseignement. Détails.

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L’état d’urgence sanitaire encore prolongé

En dépit d’une dénomination qui sous-entend une nouvelle phase, le projet de loi relatif à la gestion de la sortie de crise sanitaire prévoit avant toute chose de prolonger l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 31 octobre 2021.

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L’état d’urgence sanitaire presque prolongé

Si sa dénomination insiste sur une nouvelle phase, le projet de loi relatif à la gestion de la sortie de crise sanitaire met en place, jusqu’au 31 octobre 2021, un régime qui comporte de nombreux traits communs avec l’état d’urgence sanitaire. Il prévoit d’ailleurs que le gouvernement pourrait le rétablir dans certaines zones, l’intervention du Parlement n’étant requise qu’au bout de deux mois si moins de 10 % de la population est concernée.

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Imprescriptibilité de l’action en expulsion d’un occupant sans droit ni titre

L’action en expulsion d’un occupant sans droit ni titre, fondée sur le droit de propriété, constitue une action en revendication qui n’est pas susceptible de prescription.

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Imprescriptibilité de l’action en expulsion d’un occupant sans droit ni titre

L’action en expulsion d’un occupant sans droit ni titre, fondée sur le droit de propriété, constitue une action en revendication qui n’est pas susceptible de prescription.

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Première étape vers une représentation et un dialogue social au sein des plateformes

Première pierre au processus de structuration d’une représentation et d’un dialogue social au sein des plateformes, l’ordonnance n° 2021-484 du 21 avril 2021 relative aux modalités de représentation des travailleurs indépendants recourant pour leur activité aux plateformes et aux conditions d’exercice de cette représentation a été publiée.

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Requête en suspicion légitime : pas de fumée sans feu

La seule circonstance pour une juridiction de fixer à une même audience des affaires mettant en cause une même partie, mais portant sur des litiges différents, et de se prononcer sur celles-ci n’est pas de nature à porter atteinte à son impartialité.

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Inopposabilité du principe d’impartialité des juridictions à l’autorité de poursuite

Si le principe d’impartialité des juridictions est applicable à l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), ce principe, juge le Conseil d’État, « ne peut être opposé à l’autorité assurant les fonctions de poursuite, qui n’est pas appelée à décider d’une éventuelle sanction ».

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Transfert de contrat : précision sur l’application d’un PSE en cours d’élaboration

Si un PSE ne peut s’appliquer à un salarié dont le contrat a été rompu avant son adoption, le salarié qui a été privé du bénéfice de ses dispositions en raison des conditions de son licenciement est toutefois fondé à en demander réparation.

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Suspicion légitime: portée du renvoi dans le cadre d’une procédure collective

En cas de renvoi pour suspicion légitime ordonné au cours d’une instance en résolution d’un plan de redressement et en ouverture d’une liquidation judiciaire pour survenance de la cessation des paiements pendant l’exécution du plan, seules sont réputées non avenues les décisions de la juridiction dessaisie qui remplissent les critères posés par le troisième alinéa de l’article 347 du code de procédure civile et ont été rendues à l’occasion de cette instance. 

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Suspicion légitime: portée du renvoi dans le cadre d’une procédure collective

En cas de renvoi pour suspicion légitime ordonné au cours d’une instance en résolution d’un plan de redressement et en ouverture d’une liquidation judiciaire pour survenance de la cessation des paiements pendant l’exécution du plan, seules sont réputées non avenues les décisions de la juridiction dessaisie qui remplissent les critères posés par le troisième alinéa de l’article 347 du code de procédure civile et ont été rendues à l’occasion de cette instance. 

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Précisions sur le lieu de réunion d’une assemblée et sur la révocation d’un gérant de SARL

Une assemblée des associés de SARL, tenue en dehors de son siège social, ne peut être annulée que pour un abus de droit. Par ailleurs, la révocation de l’un de ses gérants peut être décidée par le seul associé détenant plus de la moitié des parts sociales.

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Créances contre l’indivision : attention au point de départ de la prescription

Lorsqu’un indivisaire a payé seul les échéances de l’emprunt afférant à l’immeuble indivis, il peut en demander le paiement sur l’actif avant le partage. C’est le paiement de chaque échéance de l’emprunt bancaire qui fait naître la créance contre l’indivision et qui sert de point de départ à la prescription, laquelle s’opère selon les modalités du droit commun.

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Bail commercial et covid-19 : le droit et l’équité

Si le locataire restaurateur empêché d’exploiter du fait de la réglementation covid doit continuer à verser ses loyers, la demande de règlement des intérêts et pénalités contractuelles de retard relève de l’appréciation des juges du fond.

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Bail commercial et covid-19 : le droit et l’équité

Si le locataire restaurateur empêché d’exploiter du fait de la réglementation covid doit continuer à verser ses loyers, la demande de règlement des intérêts et pénalités contractuelles de retard relève de l’appréciation des juges du fond.

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Florence Aubenas, [I]L’Inconnu de la poste[/I]

Dans cet ouvrage qui compte parmi les modèles du genre judiciaire, Florence Aubenas propose, au terme d’un parcours qui mène des lieux du crime aux ramifications impressionnantes du dossier d’instruction, une passionnante enquête autour d’un meurtre sordide.

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L’exception de jeu, le casino et le protocole de règlement

L’exception de jeu de l’article 1965 du code civil ne génère pas beaucoup de contentieux devant la Cour de cassation. Aussi, chaque arrêt rendu à ce sujet intéresse assurément la doctrine. Si le texte dispose que « la loi n’accorde aucune action pour une dette du jeu ou pour le paiement d’un pari », la jurisprudence en a précisé les contours. La plupart du temps, les discussions gravitent autour de chèques impayés notamment dans des casinos (P. Le Tourneau et C. Bloch [dir.], Droit de la responsabilité et des contrats, Dalloz Action, 2021-2022, n° 2123.51). L’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 8 avril 2021 est l’un de ces arrêts non publiés au Bulletin qui permet de déterminer les frontières exactes de l’exception de jeu. Rappelons-en brièvement les faits pour comprendre l’enjeu de la question.

Un joueur fréquente un casino de la Côte d’Azur entre 2010 et 2012. Toutefois, plusieurs chèques émis par le client sont retournés par la banque pour défaut de provision. Le casino et le joueur concluent alors un contrat en vue du règlement de la coquette somme de 170 000 €, qui correspond aux chèques impayés. Un an et demi plus tard, le joueur n’a pas exécuté ce protocole. Le casino assigne ainsi son cocontractant en exécution du protocole et en dommages-intérêts. Le client invoque l’exception de jeu de l’article 1965 du code civil pour refuser de payer le moindre centime. Le tribunal de grande instance de Grasse fait droit à la demande du casino, mis à part en ce qui concerne les dommages-intérêts. Le client interjette alors appel. La cour d’appel d’Aix-en-Provence infirme le jugement entrepris car il y voit une cause illicite puisque les chèques impayés étaient émis pour couvrir l’avance consentie par le casino. Le protocole ne peut donc pas être exécuté, faute de cause licite. Le casino se pourvoit alors en cassation en regrettant l’application de l’exception de jeu de l’article 1965 du code civil et en mettant particulièrement en avant la conclusion d’un protocole avec le client. Compte tenu de ce lien contractuel, le casino pensait pouvoir faire échec à l’exception de jeu.

Le pourvoi est rejeté. Nous allons essayer de comprendre pourquoi.

Une solution constante : le chèque impayé et l’alimentation du jeu

Le client d’un casino réglementé par les pouvoirs publics ne peut, en tout état de cause, pas se prévaloir de l’article 1965 du code civil sauf si le casino a prêté des deniers au client pour « alimenter le jeu ». Cette solution provient d’une position désormais bien connue de la première chambre civile de la Cour de cassation, citée d’ailleurs dans l’arrêt commenté aujourd’hui (Civ. 1re, 30 juin 1998, n° 96-17.789, Bull. civ. I, n° 229 ; D. 1999. 112 image, obs. R. Libchaber image ; 20 juill. 1988, n° 86-18.995, Bull. civ. I, n° 257). Dans son commentaire, M. Libchaber note que cette décision « reflète en effet la crainte très actuelle de l’endettement – particulièrement redoutable dans le cas du jeu, où il se constitue sans laisser au joueur de contrepartie matérielle –, mais ne déresponsabilise pas pour autant les joueurs en les traitant en incapables ». En somme, tout dépend si le joueur à – lors de l’émission du chèque – les deniers nécessaires pour honorer la somme inscrite. Si ce n’est pas le cas, le casino alimente alors le jeu en prêtant des deniers.

Dans tout casino, chaque client peut jouer grâce à son lot de jetons (voire de plaques), ces éléments représentant une certaine valeur monétaire. Une fois que le lot de jetons est écoulé, le client peut raisonnablement se dire qu’il doit soit retirer de l’argent pour reprendre des jetons ou des plaques mais il peut également s’arrêter de jouer faute de liquidités. Le casino qui avance volontairement des deniers à un joueur endetté ne peut donc pas poursuivre le remboursement desdites sommes compte tenu de la jurisprudence de 1998 (v. Rép. civ., v° Jeu – Pari, par F. Guerchoun, n° 73). L’exception de jeu trouve alors une application dynamique où il peut être difficile de savoir quand le casino fait réellement une avance. Cette question probatoire suscite des difficultés devant les juges du fond. 

L’arrêt commenté aujourd’hui commence par confirmer cette position tout en la confrontant à l’originalité de l’espèce, notamment eu égard à la transaction.

Le truchement du protocole transactionnel

Dans l’affaire du 8 avril 2021, l’originalité tient à l’acte conclu entre le casino et son client infortuné aux tables de jeu. Les deux parties étaient liées par un contrat et on pouvait raisonnablement se demander si l’article 1965 du code civil pouvait trouver application en pareille situation. C’était d’ailleurs le terrain d’élection des moyens présentés à la Cour de cassation par le casino. Mais il n’en est finalement rien. La Cour de cassation refuse ce raisonnement et rappelle dans une motivation développée les contours de l’arrêt de 1998. Le travail de la cour d’appel d’Aix-en-Provence était minutieux puisque les juges avaient pu détecter que les chèques impayés n’avaient pas été émis en paiement de jetons mais pour couvrir les avances consenties par le casino. On retrouve alors les traits caractéristiques du domaine de l’exception de jeu en matière de chèques impayés. Le casino perd alors tout recours.

Mais il restait toujours ce contrat conclu entre le casino et le client. La lecture de l’arrêt d’appel est ici utile puisqu’on y apprend que, pour se défaire du lien obligatoire, la cour d’appel a pu juger que « la cause du protocole n’étant pas licite, le casino doit être débouté de sa demande en paiement » (nous soulignons). On comprend aisément que la cause illicite est étroitement liée avec l’exception de jeu de l’article 1965 du code civil. Le contrat étant lié à l’avance pour « alimenter le jeu », son motif impulsif et déterminant n’est pas licite. En ce sens, la solution s’inscrit dans la droite lignée tant de la lettre de l’article 1965 que de la jurisprudence nuancée de 1998.

La force obligatoire des contrats y est ici sacrifiée sur l’autel de la cause, désormais sur le contenu licite et certain depuis l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. Mais ce sacrifice se comprend eu égard aux risques générés par la pratique des casinos d’accorder des avances à des clients endettés par le jeu. Le joueur en question dans l’arrêt du 8 avril 2021 se décrivait lui-même devant la cour d’appel comme un « joueur compulsif », ce qu’avait noté l’arrêt d’appel du 2 mai 2019 dans l’exposé des faits. Il n’en reste pas moins que la solution est très sévère pour ces établissements autorisés par la loi. L’exception de jeu les prive de tout recours en exécution d’une telle transaction.

L’article 1965 du code civil n’est donc pas l’un des articles oubliés, inadaptés ou vieillissants du code civil. Il demeure parfaitement utilisable en dépit de la conclusion d’un protocole transactionnel.

Prudence, donc, aux avances consenties aux clients infortunés !

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L’exception de jeu, le casino et le protocole de règlement

La Cour de cassation rappelle l’importance de ce que l’on appelle l’exception de jeu. La loi n’accordant aucune action pour les dettes de jeu, un casino ne peut pas se prévaloir d’un protocole de règlement de chèques impayés de l’un de ses clients pour les avances que l’établissement a pu faire pendant le jeu au client déjà endetté.

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Chronique d’arbitrage : où va le contrôle étatique de l’arbitrage international ?

La présente chronique sera une nouvelle fois très riche. Pour autant, aucune décision ne nous a paru suffisamment importante pour être mise particulièrement en lumière. Cela ne veut pas dire qu’elles ne sont pas nombreuses à mériter un examen approfondi. Ainsi, pour n’en citer que les principales, on ne peut pas passer à côté de l’arrêt Rusoro (Civ. 1re, 31 mars 2021, n° 19-11.551), qui fait suite à un arrêt d’appel très discuté qui avait accepté de contrôler une question de prescription sur le fondement de la compétence ; de l’arrêt Oschadbank (Paris, 5-16, 30 mars 2021, n° 19/04161), qui annule une sentence, sur le fondement d’une incompétence ratione temporis ; de l’arrêt DS Construction (Paris, 5-16, 23 mars 2021, n° 18/05756), qui annule également une sentence pour irrégularité de la constitution du tribunal ; de l’arrêt LERCO (Paris, 5-16, 23 févr. 2021, n° 18/03068), qui refuse d’annuler une sentence pour un défaut de révélation ; du jugement d’incompétence dans l’action en responsabilité contre l’un des arbitres de l’affaire Volkswagen (TJ Paris, 31 mars 2021, n° 19/00795, Dalloz actualité, à paraître, obs. P. Capelle). Ainsi, nous reviendrons successivement sur le principe de compétence-compétence, sur les pouvoirs du juge d’appui, sur les recours contre la sentence, sur la responsabilité des acteurs de l’arbitrage et enfin sur les interactions entre l’arbitrage et l’Union européenne.

Puisqu’aucun arrêt n’est à l’honneur, nous nous permettrons quelques remarques liminaires.

Premièrement, dans la précédente chronique, nous avions indiqué que le pôle 1 - chambre 1 (1-1), anciennement compétent pour l’arbitrage, était transformé en pôle 3 - chambre 5 (3-5). Si la transformation de la chambre est définitive, il semble que la compétence de cette dernière pour les litiges relatifs à l’arbitrage ne soit que temporaire. D’après ce que nous comprenons, mais rien ne semble clair, l’arbitrage interne et l’arbitrage international seront tous deux de la compétence de la 5-16, mais différemment composée. Il y aurait donc, d’une part, les magistrats de l’ancienne 1-1 qui connaîtront de l’arbitrage interne pour la 5-16 et, d’autre part, les magistrats initialement affectés à la 5-16, qui continueront à traiter de l’arbitrage international. Autrement dit, une chambre, mais deux formations différentes, pour l’arbitrage. En tout cas, on trouve déjà une décision de la formation « interne » rendue par le 5-16 (Paris, 5-16, 16 mars 2021, n° 19/03195, Mateou). Suite au prochain épisode !

Deuxièmement, et c’est tout à fait remarquable, aussi bien d’un point de vue doctrinal que pratique, la 5-16 est en train de réinventer le maniement des sources du droit. De nombreuses décisions donnent lieu à l’utilisation, au sein de la motivation de la cour, de sources diverses. Il est vrai que l’on n’arrive pas encore à identifier la valeur précise que la cour donne à la source utilisée : droit dur, droit souple, simple source d’inspiration. Pour ne donner que quelques exemples, la cour fait mention, dans les arrêts de cette seule livraison, de décisions du Tribunal fédéral Suisse et de la High Court de justice de Londres (Paris, 5-16, 30 mars 2021, n° 19/04161, Oschadbank), des IBA Rules sur les conflits d’intérêts (Paris, 5-16, 23 févr. 2021, n° 18/03068, LERCO), des usages du commerce international (Paris, 3-5, 2 mars 2021, n° 18/16891, Rotana), de la loi type CNUDCI sur la passation des marchés publics (Paris, 5-16, 13 avr. 2021, n° 18/09809, AD Trade), des travaux de la Commission de droit international des Nations unies et de la position adoptée par certains États adhérents à un traité lors d’instances arbitrales (Paris, 5-16, 23 mars 2021, n° 18/05756, DS Construction). D’un point de vue doctrinal, il faudra observer le poids de ces sources dans le raisonnement de la cour. À première vue, il n’est pas décisif, mais pas non plus insignifiant. D’un point de vue pratique, cette appréhension de nouvelles sources pourrait modifier l’approche des plaideurs dans l’exercice de leur recours, en les invitant à proposer une argumentation fondée sur ces règles. Néanmoins, on n’explique pas l’absence, dans cette révolution des sources, de la jurisprudence arbitrale. En effet, aucun arrêt, en particulier pour les recours liés au droit des investissements, n’y fait référence. Pourtant, il s’agit d’une source majeure de ce droit. Reste à savoir si ce n’est que partie remise où s’il y a là un véritable positionnement de la cour.

Troisièmement, et c’est plus inquiétant, il convient de constater que les annulations en matière internationale se multiplient (v. déjà J. Jourdan-Marques, Chronique d’arbitrage : compétence et corruption – le recours en annulation à rude épreuve, Dalloz actualité, 24 déc. 2020). On en dénombre déjà quatre depuis le début de l’année 2021, certaines partielles, d’autres totales (Paris, 5-16, 30 mars 2021, n° 19/04161, Oschadbank ; 23 févr. 2021, n° 18/03068, LERCO ; 23 mars 2021, n° 18/05756, DS Construction ; Paris, 3-5, 19 janv. 2021, n° 18/04465, Hop !, Dalloz actualité, 22 févr. 2021, obs. J. Jourdan-Marques ; il faut également ajouter un refus d’exequatur partiel, v. Paris, 5-16, 13 avr. 2021, n° 18/17862, Ferrovial ; et une annulation d’une sentence interne, v. Paris, 5-16, 13 avr. 2021, n° 18/27764, Brezillon). En réalité, toutes ne se valent pas, certaines annulations pour des motifs techniques sont difficilement discutables. Si l’on prend un peu de recul, il nous semble qu’il existe deux courants opposés. L’un, plus exigeant à l’encontre de l’arbitrage, reflète un recul dans le libéralisme de la jurisprudence ; l’autre, indulgent à l’égard des arbitres, refuse presque systématiquement d’annuler les sentences en cas de manquement à l’obligation de révélation. Ce n’est pas le moindre des paradoxes que d’observer ces deux mouvements se croiser.

D’un côté donc, il y a plus d’annulations. Celles-ci sont particulièrement visibles lorsque les recours impliquent des États, et plus précisément lorsque l’examen donne lieu à l’interprétation d’un traité d’investissements. C’est le cas dans les arrêts Oschadbank et DS Construction. C’était déjà le cas, il y a quelque temps, dans l’arrêt Garcia (Paris, 3 juin 2020, n° 19/03588, Garcia, Dalloz actualité, 15 janv. 2021, obs. J. Jourdan-Marques) et, malgré sa cassation, dans l’arrêt Rusoro (Paris, 29 janv. 2019, n° 16/20822, Dalloz actualité, 28 janv. 2020, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2019. 2435, obs. T. Clay image ; JDI 2020. 199, note H. Ascencio ; Gaz. Pal. 2019, n° 24, p. 21, obs. D. Bensaude ; Cah. arb. 2019. 87, note T. Portwood et R. Dethomas ; Rev. arb. 2019. 250, note M. Audit ; ibid. 584, note M. Laazouzi). Et l’on attend encore – très fébrilement et sans grand espoir – l’arrêt Komstroy (actuellement devant la Cour de justice à la suite de la question préjudicielle, v. Paris, 24 sept. 2019, n° 18/14721, Dalloz actualité, 29 oct. 2019, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2019. 2435, obs. T. Clayhttp://RECUEIL/CHRON/2019/3813 ; Gaz. Pal. 2019, n° 40, p. 22, obs. D. Bensaude ; Rev. arb. 2020. 816, note C. Fouchard ; JDI 2020. 983, note M. Audit). Faut-il y voir une hostilité de principe à l’arbitrage d’investissements ou une faveur à l’égard des États ? Difficile à dire, si ce n’est qu’il est certain que la cour ne retient pas une approche très extensive de la compétence des tribunaux arbitraux dans ces affaires. En tout état de cause, il ne fait pas très bon avoir un siège à Paris lorsque l’on est investisseur.

Toutefois, l’explication pourrait être ailleurs. L’autre grand sujet actuel est celui de l’ordre public international. Là aussi, on sait que la jurisprudence est encline, en particulier en matière de corruption, à annuler les sentences (Paris, 17 nov. 2020, n° 18/02568, Sorelec, Dalloz actualité, 15 janv. 2021, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2020. 2484, obs. T. Clay image ; Paris, 28 mai 2019, n° 16/11182, Alstom, Dalloz actualité, 28 janv. 2020, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2019. 1956, obs. L. d’Avout, S. Bollée et E. Farnoux image ; ibid. 2435, obs. T. Clay image ; RTD com. 2020. 283, obs. E. Loquin image ; Rev. arb. 2019. 850, note E. Gaillard ; 10 avr. 2018, n° 16/11182, D. 2018. 1934, obs. L. d’Avout et S. Bollée image ; ibid. 2448, obs. T. Clay image ; RTD com. 2020. 283, obs. E. Loquin image ; Rev. arb. 2018. 574, note E. Gaillard ; Cah. arb. 465, note A. Pinna). Or s’il y a bien un point commun entre l’examen de la compétence et celui de la corruption, c’est l’intensité du contrôle. Dans les deux cas, et l’on pourra discuter des heures sur la nature des mots, la cour d’appel tranche le moyen sans aucun égard pour la décision du tribunal arbitral. Dit autrement, elle révise (au fond ou sur la compétence). Si la décision est identique, tant mieux ; si elle ne l’est pas, l’annulation est immédiate. On en veut d’ailleurs pour preuve que, dans les deux cas, les parties peuvent produire devant le juge de nouveaux moyens, de nouvelles preuves, de nouvelles pièces. Autrement dit, pour ces cas d’ouverture, on glisse du recours en annulation vers l’appel (sur cette idée, v. M. de Fontmichel, note ss Civ. 1re, 2 déc. 2020, JDI, à paraître). Il y a sans doute des aspects positifs dans cette évolution (le contrôle approfondi de l’ordre public n’était-il pas réclamé par tous ?). Néanmoins, les aspects négatifs sont flagrants. D’abord, en matière d’arbitrage d’investissements, cela revient à donner le dernier mot sur l’interprétation de traités bilatéraux auxquels la France est étrangère au juge français. Ensuite, il est évident que le juge français n’est pas aussi bien outillé qu’un tribunal arbitral pour trancher ces questions. Pour l’anecdote, dans l’affaire Oschadbank, le requérant reprochait au tribunal d’avoir violé sa mission en ne passant qu’une minute par page sur les 9 500 pages que comptait le dossier. Nul doute qu’après sa victoire devant la cour d’appel, il n’ira pas faire le même reproche à cette dernière. Il n’en demeure pas moins que la question est réelle : malgré les moyens pharaoniques (pour la justice française) dont dispose la 5-16, peut-elle assurer un travail équivalent à celui réalisé par un tribunal arbitral ? Ce n’est pas lui faire injure que d’en douter.

D’un autre côté, et cela sème complètement le doute, il existe un autre mouvement, presque bienveillant à l’égard des arbitres. Il n’y a pas eu, et sauf erreur de notre part, depuis le début de l’année 2020, d’annulation pour manquement à l’obligation de révélation (la dernière en date étant probablement celle de l’affaire Volkswagen, v. Civ. 1re, 3 oct. 2019, n° 18-15.756, Dalloz actualité, 12 déc. 2019, obs. C. Debourg ; ibid. 29 oct. 2019, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2019. 2435, obs. T. Clay image ; RTD com. 2020. 297, obs. E. Loquin image ; JCP 2019. 2329, § 3, obs. C. Seraglini). Pourtant, ce ne sont pas les occasions qui manquent : Dommo (25 févr. 2020, Dommo, nos 19/07575 et 19/15816 à 19/15819, Dalloz actualité, 27 avr. 2020, obs. C. Debourg ; ibid., 15 janv. 2021, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2020. 2484, obs. T. Clay image ; JCP 2020. 870, note M. de Fontmichel ; Rev. arb. 2020. 501, note L. Jaeger ; Procédures 2020, n° 6, p. 23, obs. L. Weiller), Vidatel (Paris, 5-16, 26 janv. 2021, n° 19/10666, Vidatel, Dalloz actualité, 22 févr. 2021, obs. J. Jourdan-Marques), Hop ! (Paris, 3-5, 19 janv. 2021, n° 18/04465, Hop !, préc.), Soletanche (Paris, 1-1, 15 déc. 2020, n° 18/14864, Soletanche, Dalloz actualité, 22 févr. 2021, obs. J. Jourdan-Marques), CWT (Paris, 3-5, 12 janv. 2021, n° 17/07290, CWT, Dalloz actualité, 22 févr. 2021, obs. J. Jourdan-Marques) et aujourd’hui LERCO (Paris, 5-16, 23 févr. 2021, n° 18/03068, LERCO, avec notre commentaire critique infra), sont des affaires dans lesquelles des manquements à l’obligation de révélation sont invoqués. Toutes en réchappent, alors que certains griefs sont critiques. Finalement, en dix ans, la jurisprudence sur l’obligation de révélation aura oscillé tel un pendule. Faiblement exigeante dans la première décennie du XXIe siècle, elle aura fait la bascule avec le premier arrêt Tecnimont et revient finalement, aujourd’hui, à sa position initiale. Obtenir l’annulation d’une sentence pour un manquement à l’obligation de révélation devient un chemin semé d’embûches, parsemé d’obligations de curiosité, de réactions et la nécessité d’apporter la preuve d’un doute raisonnable. Laissant ainsi, par la même occasion, se propager autant de pratiques délétères pour la confiance des parties dans l’arbitrage.

Il faut bien avouer que ce mouvement qui se dessine ne correspond pas nécessairement à l’arbitrage dont nous rêvons. À titre personnel, sans doute très naïvement, nous aurions tendance à préférer un droit exigeant avec les arbitres sur la révélation, mais confiant, sans être complaisant, dans leur capacité à prendre les bonnes décisions, que ce soit sur la compétence ou sur l’ordre public international. Ce n’est pas le chemin actuellement emprunté. Il faut faire avec.

I. Le principe de compétence-compétence

Le principe compétence-compétence, comme toujours, donne lieu à des difficultés d’application. Pour rappel, l’effet négatif, prévu à l’article 1448 du code de procédure civile, impose aux juridictions étatiques de se dessaisir du litige lorsque le litige relève d’une convention d’arbitrage. La mise en œuvre de cette disposition nécessite de distinguer deux situations : celle où le tribunal est déjà saisi et celle où il ne l’est pas.

A. Le tribunal est déjà saisi

Les hypothèses où le tribunal arbitral est déjà saisi sont rares en jurisprudence. C’est le cas dans un arrêt soumis à la Cour de cassation (Civ. 1re, 17 mars 2021, n° 20-14.360, Bouaziz). Le litige porte initialement sur la fixation de valeurs des parties sociales d’une société. À la suite du décès d’un des actionnaires, un coactionnaire saisit les juridictions françaises à l’encontre d’un autre coactionnaire et des héritiers du défunt. Les défendeurs soulèvent une exception d’incompétence au profit d’un tribunal arbitral rabbinique et des juridictions israéliennes (v. F.-X. Licari, L’arbitrage rabbinique, entre droit talmudique et droit des nations, Rev. arb. 2013. 57). L’exception d’incompétence fondée à la fois sur la compétence d’un tribunal arbitral et d’une juridiction étatique a sans aucun doute semé le trouble dans les débats (Versailles, 28 janv. 2020, n° 19/02799). La cour d’appel avait donc réalisé un examen approfondi des modalités de saisine de la juridiction étrangère et de la sienne et avait conclu à sa compétence, du fait de la différence de parties et de prétentions entre les deux actions. L’arrêt est cassé, au visa de l’article 1448 du code de procédure civile. La cour rappelle que dès lors qu’est alléguée la saisine antérieure d’un tribunal arbitral, la compétence du juge français ne peut être examinée qu’au regard des conditions limitatives prévues par cet article (en réalité, l’article 1448 du code de procédure civile ne prévoit aucune condition lorsque le tribunal arbitral est déjà saisi). Ce que n’avait pas fait la cour d’appel, en s’interrogeant sur les parties et les prétentions dans les deux instances.

La solution n’est pas étonnante : un tel examen par la cour d’appel de sa propre compétence est réalisé en violation du principe compétence-compétence. Il est cependant très intéressant de constater que la Cour de cassation relève d’office l’article 1448 du code de procédure civile. À la lecture de l’arrêt d’appel et du pourvoi, le débat était placé uniquement sur le terrain de la litispendance. Pourtant, la Cour de cassation juge habituellement que le principe compétence-compétence ne peut pas être relevé d’office par le juge (Civ. 1re, 19 déc. 2018, n° 17-28.233, Dalloz actualité, 6 mars 2019, obs. J. Jourdan-Marques). On peut avancer deux explications pour justifier une telle différence de traitement : soit, d’une part, le juge ne peut pas relever d’office l’article 1448 du code de procédure civile lorsque le tribunal arbitral n’est pas encore saisi, mais il peut et doit le faire lorsqu’il l’est ; soit, d’autre part, la Cour s’est retrouvée dans l’impossibilité de trancher le pourvoi au regard de la question de la litispendance et a préféré relever d’office le fondement adéquat.

B. Le tribunal n’est pas encore saisi

Lorsque le tribunal n’est pas encore saisi, l’article 1448 du code de procédure civile limite l’examen du juge étatique aux seules hypothèses d’inapplicabilité et de nullité manifestes de la clause. Malheureusement, c’est souvent bien au-delà que le juge réalise son examen. Ainsi, la cour d’appel de Colmar (Colmar, 22 mars 2021, n° 18/03474) écarte la clause compromissoire en faisant prévaloir une clause attributive de juridiction et en considérant que certaines demandes sont délictuelles. Une telle motivation contrevient à l’effet négatif et est susceptible d’entraîner la cassation. En revanche, de son côté, la cour d’appel de Versailles accepte de renvoyer les parties à l’arbitrage, même à l’égard de parties intervenantes à une convention de garantie de passif (Versailles, 4 mars 2021, n° 19/03431).

II. Les pouvoirs du juge d’appui

Dans une affaire GBO (Paris, 5-16, 6 avr. 2021, n° 20/13048), les parties s’opposaient sur la participation forcée à l’arbitrage d’une tierce partie. Le tribunal arbitral a fait droit, en raison d’une acceptation tacite, à la demande d’extension de la clause compromissoire et a autorisé la partie à faire citer le tiers afin qu’il participe à la procédure arbitrale. Sans doute confrontée au refus de ce tiers de participer à la procédure, la partie a saisi le juge d’appui aux fins d’obtenir une décision enjoignant au tiers de participer à la procédure arbitrale. Le juge d’appui a déclaré la demande irrecevable.

La première question qui se posait à la cour d’appel était de savoir si elle pouvait connaître d’un recours contre cette décision du juge d’appui. L’article 1460 du code de procédure civile énonce en effet que « le juge d’appui statue par ordonnance non susceptible de recours ». Il est toutefois classiquement admis que l’appel-nullité est possible contre la décision en cas d’excès de pouvoir. À ce titre, la cour énonce que « l’appel-nullité reste ouvert, à titre exceptionnel, afin de faire censurer un excès de pouvoir de son auteur ou la violation d’un principe fondamental de procédure ». Le lecteur ne manquera pas d’être surpris par cette référence à la violation d’un principe fondamental de procédure. Il est jugé avec constance qu’un tel grief n’est pas de nature à ouvrir la voie de l’appel-nullité (Cass., ch., mixte, 28 janv. 2005, n° 02-19.153, D. 2005. 386, obs. V. Avena-Robardet image ; ibid. 2006. 545, obs. P. Julien et N. Fricero image ; AJDI 2005. 414 image ; Gaz. Pal. 2005, n° 65, p. 9, avis M. Domingo ; Procédures 2005, n° 4, p. 14, obs. R. Perrot ; Dr. et patr. 2006, n° 144, p. 102, note S. Amrani-Mekki ; Paris, 20 oct. 2020, n° 19/05231, ITOC, Dalloz actualité, 15 janv. 2021, obs. J. Jourdan-Marques ; Paris, 26 févr. 2020, n° 19/22834, Dalloz actualité, 4 mai 2020, obs. J. Jourdan-Marques ; Gaz. Pal. 2020, n° 26, p. 36, obs. D. Bensaude). Ceci étant, cette divergence ne prête pas à conséquence, dès lors qu’un « excès de pouvoir négatif » est ici reproché au juge d’appui, à savoir un refus d’exercer son pouvoir. Le recours est donc recevable.

La seconde question est de savoir si le juge commet un excès de pouvoir en refusant d’enjoindre au tiers de participer à la procédure arbitrale. La réponse est négative. Pour la cour, « la demande soumise au juge d’appui portait sur une injonction relevant de la compétence du tribunal arbitral et non du juge d’appui ». Autrement dit, ce n’est pas une difficulté relative à la contestation du tribunal arbitral (pour une appréciation identique sur les pouvoirs du juge d’appui, v. TJ Paris, ord., 16 avr. 2021, n° 21/50115, commentaire lors de la prochaine chronique). La cour ajoute, à très juste titre, que « la défaillance de la partie qui conteste une telle extension ne devrait alors pas être traitée différemment de la défaillance de la partie qui a signé la clause d’arbitrage et qui n’empêche pas en principe l’instance arbitrale de se dérouler ». Ainsi, après la décision du tribunal arbitral, le tiers n’est plus un tiers ; il est une partie. Sa non-participation n’est rien d’autre qu’une non-comparution devant le tribunal arbitral. Elle ne fait pas obstacle à ce qu’une sentence soit rendue. En définitive, la participation de cette partie à l’arbitrage est une question de compétence, tranchée par le tribunal et susceptible d’un contrôle par le juge de l’annulation. Son défaut de comparution ne peut être contourné.

III. Les recours contre la sentence

A. Aspects procéduraux du recours

Les aspects procéduraux du recours en annulation peuvent devenir particulièrement complexes à apprécier dès lors qu’ils combinent les difficultés relatives à une procédure d’appel et celles relatives à un recours contre une sentence arbitrale. Autant dire que l’on est en plein dans le champ de mines pour les parties non averties (l’expression est de J. Paulsson, L’exécution des sentences arbitrales en dépit d’une annulation en fonction d’un critère local (ACL), Bull. CCI 1998, p. 14, spéc. p. 14). À cet égard, on signalera simplement que la Cour européenne des droits de l’homme a été saisie d’une requête (req. n° 15567/20) sur une éventuelle (et très improbable) atteinte au droit d’accès à un tribunal et à un recours effectif à cause de l’obligation faite aux parties de saisir le juge du recours par la voie électronique (Civ. 2e, 26 sept. 2019, n° 18-14.708, Dalloz actualité, 2 oct. 2019, obs. C. Bléry ; ibid., 28 janv. 2020, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2019. 1891 image ; ibid. 2435, obs. T. Clay image ; JCP 2019. 2072, note L. Weiller ; Gaz. Pal. 2019, n° 40, p. 25, obs. D. Bensaude ; Procédures 2019, n° 12, p. 23, obs. L. Weiller ; JCP E 2019, n° 50, p. 45, note P. Casson).

1. La recevabilité de l’appel

La réforme du 13 janvier 2011 a opéré un renversement majeur en arbitrage interne : alors que le principe était celui d’un appel ouvert, sauf volonté contraire des parties, il est désormais celui d’un appel fermé, sauf volonté contraire des parties (C. pr. civ., art. 1489). Si cette solution permet d’aligner la règle sur la pratique la plus répandue, elle ne manquera pas de surprendre dans certains domaines. C’est précisément le cas en matière « d’arbitrage médical », où l’on peut douter que les victimes aient véritablement conscience de la portée de leur acceptation. Malheureusement, dès lors que la qualification d’arbitrage est retenue, le juge n’a d’autres choix que de constater que, faute d’accord contraire, l’appel n’est pas ouvert (Bastia, 17 févr. 2021, n° 18/00385). La question se posait d’une conversion de l’appel en recours en annulation. Si la cour s’interdit de substituer une voie de recours à une autre, on constate néanmoins qu’elle examine les griefs au fond. D’une certaine façon, la cour rejette ensemble la prétention sur la recevabilité et le bien-fondé. Si, d’un point de vue de la rigueur juridique, la méthode n’est pas satisfaisante, elle permet aussi, d’un point de vue pratique, de montrer au requérant que son recours ne pouvait pas prospérer…

En revanche, un autre arrêt juge l’appel recevable, par un motif qui interpelle (Paris, 5-16, 16 mars 2021, n° 19/03195, Mateou). En l’espèce, l’appelant ne produisait pas la convention d’arbitrage et l’intimé n’était pas comparant. Impossible donc de savoir si les parties s’étaient accordées sur un appel. Pourtant, la cour énonce qu’il « ressort du dispositif de la sentence que la voie de l’appel est ouverte ». En conséquence, l’appel est jugé recevable. On est un peu étonné par cette portée accordée à la sentence, alors qu’il n’appartient pas à l’arbitre de déterminer les voies de recours. La cour n’aurait-elle pas dû, particulièrement en l’absence de l’intimé, exiger la preuve de la convention d’arbitrage pour accueillir l’appel ? La question mérite d’être posée.

2. La concentration des prétentions

Dans l’arrêt Ukravtodor (Paris, 5-16, 9 mars 2021, n° 18/21326), la question se posait de la recevabilité d’un élément soumis à la discussion après le premier jeu de conclusion. En effet, l’article 910-4 du code de procédure civile énonce qu’« à peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond ».

Pour que le principe de concentration s’applique au premier jeu de conclusions, il faut que l’élément puisse être qualifié de prétention. Lors d’un recours en annulation (ou contre l’ordonnance d’exequatur), il n’y a qu’une seule prétention : l’annulation de la sentence (ou celle de l’ordonnance d’exequatur). Les moyens ultérieurs au soutien de cette prétention sont recevables, nonobstant cette obligation de concentration. Cela vaut, naturellement, pour un nouveau grief invoqué au soutien d’un cas d’ouverture, mais aussi, pour un cas d’ouverture supplémentaire qui serait présenté postérieurement. En clair, si une partie a invoqué uniquement un grief tiré de l’incompétence du tribunal (art. 1520, 1°) du fait de la nullité de la clause dans son premier jeu de conclusions, il peut, ultérieurement, invoquer un autre grief tiré de ce même cas d’ouverture (par exemple l’inapplicabilité de la clause), et un grief relevant d’un autre cas d’ouverture (par exemple, un manquement lié à l’obligation de révélation, fondé sur l’art. 1520, 2°). C’est ce que dit l’arrêt d’appel dans cette affaire, puisqu’il retient que « le paragraphe litigieux n’est pas une prétention nouvelle, mais un élément de discussion supplémentaire qui vient au soutien du moyen en annulation fondé sur la violation de l’ordre public international ». On soulignera particulièrement que le cas d’ouverture relatif à l’ordre public international est bien qualifié de « moyen », et pas de prétention.

La question peut également se poser pour certains arguments du défendeur au recours. En effet, la jurisprudence a une interprétation souple de la notion de prétention, au point d’y inclure des moyens de défense (Civ. 1re, 4 mars 2021, n° 19-15.695). Pour autant, les moyens de défense, s’ils peuvent être des prétentions, ne sont pas des prétentions au fond. Ainsi, les fins de non-recevoir, pour ne citer qu’elles, ne sont pas soumises à ce principe de concentration.

3. La renonciation aux irrégularités

a. Les modalités de la renonciation

L’arrêt DS Construction (Paris, 5-16, 23 mars 2021, n° 18/05756) apporte deux précisions intéressantes sur les modalités de la renonciation.

D’abord, il soulève une interrogation. En énonçant qu’« aux termes de l’article 1466 du code de procédure civile, applicable en matière d’arbitrage international et en l’espèce, dès lors que le siège de l’arbitrage litigieux a été fixé à Paris », il invite à se demander si la renonciation prévue par le code de procédure civile ne s’appliquerait pas lorsque le siège n’est pas fixé en France. Il en va d’ailleurs de même de l’arrêt Grenwich, qui retient, pour appliquer l’article 1466, que, pour « les parties ayant choisi Paris (France) en tant que siège de l’arbitrage, la loi française est applicable à la procédure » (Paris, 5-16, 16 févr. 2021, n° 18/16695). Ces formules sont, à notre connaissance, nouvelles. Il conviendra d’y être attentif et de s’assurer qu’elles ne conduisent pas le juge à écarter la renonciation lorsque la sentence n’a pas été rendue en France, ce qui nous paraîtrait discutable.

Ensuite, et c’est là encore particulièrement intéressant, l’arrêt DS Construction ne limite pas la renonciation au demandeur au recours. En principe, ce moyen est invoqué pour faire échec à un grief formulé par l’auteur du recours à l’encontre de la sentence arbitrale. Il s’agit donc de préserver la sentence. Dans cette affaire, la cour accepte la situation inverse : le grief présenté par le demandeur au recours est recevable parce que le défendeur a renoncé à se prévaloir de l’irrégularité pendant l’instance. Autrement dit, l’irrecevabilité est irrecevable.

Dans les faits, le litige opposait la société DS Construction, demandeur, à la Libye, défendeur. Alors que des difficultés de constitution du tribunal arbitral ont émaillé la procédure, il a été demandé à celui-ci de trancher par une sentence la question de la régularité de sa constitution en application du règlement CNUDCI de 1976. Lors de cette instance, la société DS construction n’a pas soulevé de fin de non-recevoir tirée de l’abus de droit ou du défaut d’intérêt à agir de la Libye pour contester la constitution. Pour la cour d’appel, il en résulte que DS Construction n’est plus recevable à invoquer ces fins de non-recevoir devant le juge de l’annulation pour faire échec au recours formé par la Libye.

Sur le papier, la solution peut se prévaloir de l’article 1466 du code de procédure civile, qui ne distingue pas selon que les irrégularités soient invoquées par le demandeur ou le défendeur au recours. Il n’en demeure pas moins qu’une telle solution devrait s’accompagner d’une véritable révolution dans la façon de mener une procédure arbitrale. En effet, il ne s’agit plus simplement de protéger ses droits en tant que potentiel demandeur à un recours ; il s’agit également de les préserver en tant que futur défendeur à un recours. Une application trop stricte pourrait conduire le défendeur à voir ses moyens de défense considérablement diminués lors du recours. En effet, la distinction entre une irrégularité – susceptible de renonciation – et un moyen de défense – en particulier une fin de non-recevoir ou une exception de procédure – est loin d’être évidente. Là encore, il faudra observer attentivement les évolutions d’une telle jurisprudence et adapter son comportement durant les procédures arbitrales.

b. La portée de la renonciation

Lors d’une chronique récente, on évoquait, sans cacher notre désaccord, la décision rendue par la Cour de cassation dans l’affaire Schooner (Civ. 1re, 2 déc. 2020, n° 19-15.396, Schooner, Dalloz actualité, 15 janv. 2021, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2020. 2456 image ; Procédures 2021, n° 2, p. 24, obs. L. Weiller). Il aura fallu peu de temps pour que les effets corrosifs de cette jurisprudence se fassent ressentir (v. déjà, reprenant l’attendu, mais en dehors d’une question de compétence, Paris, 5-16, 26 janv. 2021, n° 19/10666, Vidatel, préc.). Désormais, il convient de distinguer deux choses : la renonciation à un cas d’ouverture du recours et la renonciation à un grief. L’arrêt Schooner de la Cour de cassation n’a pas modifié la question de la renonciation à un cas d’ouverture, qui avait été fixée dans l’arrêt d’appel (Paris, 2 avr. 2019, n° 16/24358, Dalloz actualité, 17 avr. 2019, obs. J. Jourdan-Marques ; Cah. arb. 2019. 751, note C. Crepet Daigremont).

Sur la renonciation à un cas d’ouverture, la solution est régulièrement reprise : l’article 1466 du code de procédure civile « ne vise pas les seules irrégularités procédurales mais tous les griefs qui constituent des cas d’ouverture du recours en annulation des sentences, à l’exception des moyens fondés sur l’article 1520, 5°, du code de procédure civile et tirés de ce que la reconnaissance ou l’exécution de la sentence violerait l’ordre public international » (Paris, 5-16, 16 févr. 2021, n° 18/16695, Grenwich). Les parties sont susceptibles de renoncer à n’importe quel cas d’ouverture, sauf l’ordre public international (et plus précisément, l’ordre public international substantiel de direction ; pour l’exclusion de l’ordre public de protection et procédural, v. Paris, 14 mai 2019, n° 16/16502, Dalloz actualité, 28 janv. 2020, obs. J. Jourdan-Marques). L’arrêt Schooner ne modifie pas cette solution.

Toutefois, la renonciation ne concerne pas que les cas d’ouverture ; elle concerne aussi les griefs. L’arrêt Grenwich reprend cette solution, en rappelant qu’elle « vise des griefs précisément et concrètement articulés et non des catégories de moyens ». C’est cette solution qui est remise en cause en matière de compétence par l’arrêt du 2 décembre 2020. Cette faculté d’invoquer de nouveaux moyens et arguments et nouvelles pièces est conditionnée à la contestation de la compétence préalable du tribunal arbitral. Autrement dit, si la compétence a été discutée, le débat peut évoluer devant le juge du recours ; en revanche, s’il n’a pas eu lieu, les parties ont renoncé à invoquer tous moyens sur la compétence. Dans deux arrêts successifs, la cour d’appel reprend à son compte la solution de la Cour de cassation et l’applique immédiatement, accueillant ainsi pour son examen de la compétence de nouveaux moyens.

C’est le cas, premièrement, dans l’arrêt Oschadbank (Paris, 5-16, 30 mars 2021, n° 19/04161), où la cour énonce que, « lorsque la compétence a été débattue devant les arbitres, les parties ne sont pas privées du droit d’invoquer sur cette question, devant le juge de l’annulation, de nouveaux moyens et arguments et à faire état, à cet effet, de nouveaux éléments de preuve, dès lors qu’il n’est pas possible d’induire du fait qu’un argument n’ait pas été précédemment évoqué devant le tribunal arbitral l’acceptation de sa compétence par l’autre partie ». Cela dit, les faits étaient un peu particuliers, puisque le défendeur à l’arbitrage n’avait pas participé à la procédure arbitrale, mais avait, dans un courrier adressé au tribunal arbitral, exposé qu’il ne reconnaissait pas sa compétence. Aussi, l’admission des moyens pouvait autant se fonder sur le défaut de comparution que sur la jurisprudence Schooner.

C’est également le cas, deuxièmement, dans l’arrêt Ukravtodor (Paris, 5-16, 9 mars 2021, n° 18/21326). Cette fois, le défendeur a bien comparu devant le tribunal arbitral. Il suffit pour la cour de constater que la compétence a été contestée pour autoriser la partie à faire valoir de nouveaux moyens. Elle énonce qu’« il ressort de ce qui précède que la compétence ayant été débattue devant les arbitres, Ukravtodor, qui ne change pas de position procédurale, est recevable, à soutenir le moyen d’annulation tiré de l’incompétence du tribunal arbitral devant le juge de l’annulation en faisant valoir des faits et des moyens nouveaux ». Ainsi, la sentence est susceptible d’être annulée pour un motif qui n’a pas été préalablement discuté devant lui. La priorité du tribunal arbitral est purement et simplement ignorée. Les parties sont d’autant moins incitées à présenter l’ensemble de leurs arguments devant le tribunal arbitral que l’estoppel est écarté, la cour estimant qu’il « ne se confond pas avec la mauvaise foi ». Ainsi, les spécificités du recours en annulation sont gommées, celui-ci étant relégué au rang d’appel voie d’achèvement, où les parties peuvent librement discuter de nouveaux moyens.

B. Aspects substantiels du recours

1. La compétence

a. La distinction compétence et recevabilité

La Cour de cassation a rendu le 31 mars 2021 (Civ. 1re, 31 mars 2021, n° 19-11.551, D. 2021. 704 image) une décision qu’on ne peut que saluer, tant on l’appelait de nos vœux. Dans une affaire Rusoro (Paris, 29 janv. 2019, n° 16/20822, Dalloz actualité, 28 janv. 2020, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2019. 2435, obs. T. Clay image ; JDI 2020. 199, note H. Ascencio ; Gaz. Pal. 2019, n° 24, p. 21, obs. D. Bensaude ; Cah. arb. 2019. 87, note T. Portwood et R. Dethomas ; Rev. arb. 2019. 250, note M. Audit ; ibid. 584, note M. Laazouzi), la cour d’appel avait accepté d’examiner, sous couvert de compétence ratione temporis, une question relative à la prescription. Ce faisant, elle mettait à mal la distinction entre les questions de compétence, soumises au contrôle du juge du recours, et les questions de recevabilité, exclues de son examen. Pour être plus précis, la cour d’appel n’envisageait pas de contrôler les questions de recevabilité. Plus subtilement, elle jouait sur la qualification de ce moyen, pour qualifier de compétence ce qui aurait dû être qualifié de recevabilité et faire entrer le grief dans le cadre de son examen. Autrement dit, c’est la catégorie « compétence » qui était déformée.

Cette voie d’eau dans la notion de compétence commençait déjà à produire ses effets, puisque la cour d’appel avait implicitement déclaré recevable une question relative au non-respect d’une clause amiable de règlement des différends (Paris, 1er déc. 2020, n° 19/08691, Qatar c. Keppel Seghers Engineering Singapore, Dalloz actualité, 15 janv. 2021, obs. J. Jourdan-Marques). Le risque était qu’à moyen terme, les questions de recevabilité soient finalement qualifiées de compétence et soumises au contrôle a posteriori du juge étatique.

L’arrêt est cassé, précisément sur ce motif. La Cour de cassation énonce que « le délai de prescription prévu au paragraphe 3, d), de l’article XII de l’accord ne constitue pas une exception d’incompétence, mais une question relative à la recevabilité des demandes, qui ne relève pas de l’article 1520, 1°, du code de procédure civile ». Ce faisant, la Cour accepte de contrôler la qualification réalisée par le juge d’appel. Elle requalifie l’argument en question de « prescription ». Forte de cette requalification, la Cour juge logiquement, en privant la cour d’appel d’une appréciation souveraine, qu’il s’agit d’une question de recevabilité et non de compétence. En conséquence, elle redonne à la catégorie compétence sa forme initiale en supprimant l’excroissance occasionnée par l’arrêt d’appel.

Est-ce à dire qu’il n’existe pas, en matière d’arbitrage, de problématiques liées au champ d’application ratione temporis ? La réponse semble devoir être négative, comme l’illustre l’arrêt Oschadbank (v. infra). Néanmoins, la distinction doit être rigoureusement réalisée entre ce qui relève du champ d’application de la convention d’arbitrage et ce qui relève de la recevabilité de la prétention.

b. L’examen de la compétence

• La compétence fondée sur un TBI

Dans l’arrêt Oschadbank (Paris, 5-16, 30 mars 2021, n° 19/04161), la cour commence sa motivation par souligner que « seule la volonté commune des parties a le pouvoir d’investir l’arbitre de son pouvoir juridictionnel, lequel se confond en matière d’arbitrage avec sa compétence ». Cette assimilation de la compétence au pouvoir ne manquera pas d’attirer l’œil de la doctrine, d’autant qu’elle a déjà été discutée (M. Boucaron-Nardetto, Le principe compétence-compétence en droit de l’arbitrage, préf. J.-B. Racine, PUAM, 2013, nos 359 s.).

Elle a cependant peu d’importance dans l’affaire, qui consiste pour l’essentiel à déterminer le champ d’application temporel d’un traité bilatéral Russie-Ukraine, sur lequel le tribunal arbitral avait fondé sa compétence. Dans l’affaire Rusoro, qui vient d’être évoquée, la cour d’appel avait tenté d’assimiler une question de prescription à une problématique de champ d’application temporel. Dans l’affaire Oschadbank, le débat est d’une autre nature puisque l’article 12 du traité stipule que « le présent accord s’applique à tous les investissements réalisés par les investisseurs d’une partie contractante sur le territoire de l’autre partie contractante à compter du 1er janvier 1992 » (« This Agreement shall apply to all investments made by the investors of one Contracting Party in the territory of the other Contracting Party as of 1 January 1992 »). Il s’agit d’une véritable condition temporelle d’application du traité.

L’examen de cette clause fera sans aucun doute l’objet d’analyses érudites par les spécialistes du droit des investissements. Nous nous limiterons donc à quelques remarques sur le raisonnement de la cour qui l’amène à annuler la sentence arbitrale. La principale critique que nous pouvons formuler à l’encontre de l’arrêt, mais elle est capitale, réside dans la motivation du paragraphe 83. La cour y énonce que « les termes de l’article 12 précité sont suffisamment clairs pour considérer qu’il détermine le champ d’application temporel du traité et qu’il n’ouvre droit à une protection tant substantielle que procédurale qu’aux seuls investissements qui ont été réalisés à compter du 1er janvier 1992 de sorte qu’en sont nécessairement exclus ceux qui l’ont été antérieurement ». Autrement dit, la cour distingue les investissements antérieurs et les investissements postérieurs au 1er janvier 1992 et exclut les premiers du champ d’application du traité, quand bien même ils perdurent après cette date butoir. La cour appuie sa motivation en soulignant « qu’interpréter cet article 12 comme pouvant inclure les investissements, qui bien que réalisés avant le 1er janvier 1992 perdurent après cette date, serait manifestement contraire au sens ordinaire de cette disposition et reviendrait à priver celle-ci de son objet et de son but ». Ce faisant, la cour abuse du raisonnement a contrario. Les limites de cette technique d’interprétation sont mises en lumière depuis longtemps, la doctrine signalant que « le raisonnement a contrario est très dangereux, car il ne procure aucune certitude » (B. Starck, H. Roland et L. Boyer, Introduction au droit, 5e éd., Litec, 2000). La cour n’échappe pas à cet écueil. Certes, le traité indique qu’il s’applique aux investissements postérieurs au 1er janvier 1992. En revanche, il est silencieux sur les investissements antérieurs. Or les investissements antérieurs sont, au moins, de deux ordres : ceux achevés avant cette date et ceux qui perdurent après l’entrée en vigueur du traité. Exclure les premiers du bénéfice du traité par une interprétation a contrario peut s’entendre, exclure les seconds par la même interprétation n’a absolument rien d’évident, contrairement à ce que prétend la cour. Pour appuyer son analyse, la cour utilise les travaux préparatoires du traité, qui sont plus convaincants, sans être décisifs. En somme, la motivation de la cour pour annuler la sentence aurait mérité d’être approfondie. On regrette particulièrement que la jurisprudence arbitrale sur le champ d’application ratione temporis des traités bilatéraux d’investissements ne soit pas convoquée, alors qu’il est fait référence à des décisions étatiques étrangères.

• La transmission de la clause compromissoire

La transmission de la clause compromissoire est une question classique de l’arbitrage international. Elle pose deux questions : celle de l’application de la clause au nouveau titulaire de l’obligation et celle de son application à l’ancien titulaire de l’obligation. Ces deux questions ont fait l’objet de décisions dans la période récente.

La première hypothèse était présentée à la cour dans un arrêt Rotana (Paris, 3-5, 2 mars 2021, n° 18/16891). La cour énonce simplement que « la clause compromissoire s’impose à toute partie venant aux droits de l’un des contractants ». Il est vrai que cette situation ne présente pas véritablement de discussions. Elle figure d’ailleurs à l’article 2061 du code civil : « La clause compromissoire doit avoir été acceptée par la partie à laquelle on l’oppose, à moins que celle-ci n’ait succédé aux droits et obligations de la partie qui l’a initialement acceptée ». La difficulté peut porter sur la caractérisation d’une véritable succession entre deux parties. Néanmoins, une fois ce point tranché, il ne fait aucun doute que la clause est transmise, comme c’est le cas dans cet arrêt.

La seconde situation, plus complexe, était soumise à la cour dans l’affaire Ukravtodor (Paris, 5-16, 9 mars 2021, n° 18/21326). Le défendeur à l’arbitrage rejetait la compétence du tribunal arbitral, au motif que le demandeur avait cédé le contrat contenant la clause compromissoire. Le plus souvent, on est habitué à ce que la question de l’application de la clause se pose à l’égard du cessionnaire. Il est beaucoup plus rare qu’elle se pose à l’égard du cédant.

La cour commence par rappeler la règle matérielle issue de l’arrêt Dalico (Civ. 1re, 20 déc. 1993, n° 91-16.828, Rev. crit. DIP 1994. 663, note P. Mayer image ; RTD com. 1994. 254, obs. J.-C. Dubarry et E. Loquin image ; Rev. arb. 1994. 116, note H. Gaudemet-Tallon ; JDI 1994. 432, note E. Gaillard), mais dans une formulation légèrement modifiée : « Selon une règle matérielle du droit de l’arbitrage international, la clause compromissoire est juridiquement indépendante du contrat principal qui la contient ou s’y réfère. À condition qu’aucune disposition impérative du droit français ou d’ordre public international ne soit affectée, son existence ou sa validité dépend uniquement de l’intention commune des parties sans qu’il soit nécessaire de se référer à un droit national ». Cette formulation ne semble cependant pas présenter d’évolution majeure.

Ensuite, concernant le cas plus précis de la cession de contrat, la cour énonce qu’« indépendamment du fait que le contrat contenant la clause d’arbitrage ait été cédé ou non avant l’introduction de la procédure arbitrale, il convient de vérifier l’existence et la portée du consentement des parties à l’arbitrage pour permettre au tribunal arbitral de connaître du différend et ce faisant l’aptitude du tribunal arbitral à connaître de l’affaire, ce qui revient à en apprécier la compétence ». La transmission du contrat n’a donc pas d’effet sur la compétence du tribunal, qui s’examine au regard du seul consentement initial à la clause. La cour précise sa pensée en ajoutant que « la clause d’arbitrage, particulièrement en matière internationale lorsqu’elle est insérée dans un contrat mettant en jeu les intérêts du commerce international, présente une autonomie juridique excluant qu’elle puisse être affectée tant par une éventuelle invalidité du contrat que par la transmission de ce contrat ». Cette motivation ne manquera pas de susciter la discussion. Prise à la lettre, elle signifie que la clause n’est pas transmise quand bien même le contrat est transmis. C’est pourtant tout l’inverse qui est préconisé depuis deux décennies. Dans les arrêts Banque Worms (Civ. 1re, 5 janv. 1999, n° 96-20.202, D. 1999. 31 image ; Rev. crit. DIP 1999. 536, note E. Pataut image ; Rev. arb. 2000. 85, note D. Cohen ; Gaz. Pal. 2000, n° 287, p. 11, obs. E. du Rusquec) et Banque générale de commerce (Civ. 1re, 19 oct. 1999, n° 97-13.253, Rev. arb. 2000. 85, note D. Cohen), la Cour de cassation avait énoncé, dans des termes identiques, que « la clause d’arbitrage international, valable par le seul effet de la volonté des contractants, est transmise au cessionnaire avec la créance, telle que cette créance existe dans les rapports entre le cédant et le débiteur cédé ».

Comment concilier, d’une part, une clause qui est transmise à l’égard du cessionnaire avec la cession et, d’autre part, une clause qui n’est pas affectée par la transmission à l’égard du cédant ? C’est qu’en réalité, le terme de transmission, s’il est adapté à l’obligation principale, ne l’est pas pour la clause compromissoire. La clause n’est pas transmise ; elle prolifère. C’est un processus équivalent à la mitose, qui correspond à la division d’une cellule mère en deux cellules filles strictement identiques génétiquement : lors de la transmission de l’obligation, la clause compromissoire se divise en deux et lie aussi bien le cédant au cédé que le cessionnaire au cédé (dans le même sens : F.-X. Train, Arbitrage et action directe : à propos de l’arrêt ABS du 27 mars 2007, Cah. arb. 2007, n° 3, p. 6). Ainsi, les arbitres sont mis en mesure de juger les litiges entre les premiers ou entre les seconds, et notamment de trancher la question de la cession du contrat. C’est précisément ce que juge la cour, qui énonce que le tribunal arbitral a « compétence pour connaître du litige opposant ces deux sociétés, nonobstant la question de la cession des contrats […], qui au demeurant est contestée en l’espèce et relève d’un débat au fond qu’il appartient au tribunal arbitral de trancher […], et qui en tout état de cause n’efface pas la volonté commune […] de soumettre tous les litiges liés aux contrats à l’arbitrage ».

• L’extension de la clause

L’arrêt Rotana (Paris, 3-5, 2 mars 2021, n° 18/16891) est l’occasion de revenir sur la question de l’extension de la clause compromissoire à un tiers non-signataire. La cour énonce que, « selon les usages du commerce international, la clause compromissoire insérée dans un contrat international a une validité et une efficacité propres qui commandent d’en étendre l’application aux parties directement impliquées dans la négociation, la conclusion, l’exécution et/ou la résiliation du contrat ». La formule est intéressante. Elle est reprise d’un précédent arrêt (Paris, 16 oct. 2018, n° 16/18843, Rev. arb. 2019. 884, note S. Willaume). Elle illustre toutefois, comme le révélait déjà le commentateur de l’arrêt de 2018, les difficultés de la jurisprudence à se fixer sur une règle précise en matière d’extension de la clause. Trois règles semblent cohabiter. La première, la plus exigeante, requiert de la part du tiers la connaissance et l’acceptation de la clause, fût-elle présumée (Paris, 23 juin 2020, n° 17/22943, Kout Food Group, Dalloz actualité, 15 janv. 2021, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2020. 2484, obs. T. Clay image ; Cah. Arb. 2020. 61, note P. Rosher ; Rev. arb. 2020. 701, note E. Gaillard ; JDI 2021. 153, note J.-B. Racine). La deuxième, intermédiaire, requiert simplement la connaissance, mais pas l’acceptation de la clause (Paris, 26 nov. 2019, n° 18/20873, Axa France IARD, Dalloz actualité, 28 janv. 2020, obs. J. Jourdan-Marques ; Paris, 26 févr. 2013, n° 11/17961, Rev. arb. 2014. 82, note P. Duprey et C. Fouchard). La troisième, la plus libérale, ne fait référence, comme dans le présent arrêt, ni à la connaissance ni à l’acceptation (Civ. 1re, 27 mars 2007, n° 04-20.842, D. 2007. 2077, obs. X. Delpech image, note S. Bollée image ; ibid. 2008. 180, obs. T. Clay image ; Rev. crit. DIP 2007. 798, note F. Jault-Seseke image ; RTD civ. 2008. 541, obs. P. Théry image ; RTD com. 2007. 677, obs. E. Loquin image ; Rev. arb. 2007. 785, note J. El-Ahdab ; JDI 2007. 968, note C. Legros ; LPA 2007, n° 192, note F. Parsy ; JCP 2007. II. 10118, note C. Golhen ; ibid. I. 168, § 11, obs. C. Seraglini ; ibid. I. 200, § 11, obs. Y.-M. Serinet ; LPA 2007, n° 160, note A. Malan ; Gaz. Pal. 21-22 nov. 2007. 6, note F.-X. Train ; CCC 2007. 166, note L. Leveneur). Reste que, comme le signale François-Xavier Train, ces différences n’ont sans doute qu’une portée formelle (F.-X. Train, L’extension de la clause compromissoire. Chronique des années 2012-2017, Rev. arb. 2017. 389, n° 13). Il n’en demeure pas moins qu’une règle unique serait sans doute préférable, notamment pour permettre aux arbitres de s’appuyer sur les bons critères pour juger en faveur de l’extension de la clause.

En l’espèce, la preuve de l’implication du tiers est rapportée, la cour considérant que celui-ci a joué un « rôle actif dans l’exécution et la résiliation du contrat […] au-delà du simple contrôle qu’elle pouvait exercer sur sa filiale ».

• La convention d’arbitrage et le droit du travail

C’est une question particulièrement intéressante sur les relations entre arbitrage et droit du travail, mais qui devrait rester assez rare, qui était posée à la cour d’appel de Versailles (Versailles, 9 mars 2021, n° 19/05333, Gan Yael). Une relation de travail unissait un employeur et son salarié. Elle s’est terminée par le licenciement du salarié. Toutefois, avant le licenciement, un compromis d’arbitrage a été conclu entre l’employeur et le salarié pour résoudre des difficultés relatives à des primes et des arriérés de salaires. Une sentence arbitrale a été rendue par un tribunal arbitral rabbinique. L’annulation de la sentence est demandée, sur le fondement des dispositions du code du travail qui donne au conseil de prud’hommes une compétence exclusive et d’ordre public. Il y a une triple spécificité dans ce litige : premièrement, la compétence arbitrale résulte d’un compromis ; deuxièmement, le litige est tranché avant le licenciement du salarié ; troisièmement, c’est l’employeur qui demande l’annulation de la sentence.

La sentence est annulée. La cour énonce que « le caractère exclusif et d’ordre public de la compétence du conseil de prud’hommes résulte de ce texte et s’impose quelle que soit la partie qui s’en prévaut ». Elle ajoute que « le litige ne pouvait faire l’objet d’une convention d’arbitrage en raison de la matière et que la chambre arbitrale rabbinique ne pouvait retenir sa compétence sans heurter la règle de compétence d’ordre public issue des dispositions du code du travail, dès lors que les parties étant encore liées par un contrat de travail ».

Le débat est naturellement complexifié par le déroulement de l’arbitrage pendant la durée du contrat de travail. Il n’en demeure pas moins que, en principe, les litiges résultant d’un tel contrat ne sont pas inarbitrables. C’est la clause compromissoire qui est stigmatisée, pas le recours à l’arbitrage. Faut-il étendre l’interdiction à un compromis conclu pendant l’exécution du contrat ? On peut en douter. On peut d’autant plus en douter que l’annulation est ici demandée par l’employeur. Fallait-il permettre à ce dernier de s’en prévaloir, et y voir une nullité absolue ? Ce n’est pas nécessairement la logique de la prohibition de la clause compromissoire en droit positif. Ainsi, l’article 2061 du code civil permet seulement à la partie qui n’a pas contracté dans le cadre de son activité professionnelle de ne pas se la voir opposée. C’est aussi la solution retenue pour le contrat de travail international (Soc. 16 févr. 1999, n° 96-40.643, Bull. civ. V, n° 78 ; D. 1999. 74 image ; Dr. soc. 1999. 632, obs. M.-A. Moreau image ; Rev. crit. DIP 1999. 745, note F. Jault-Seseke image ; Rev. arb. 1999. 290 [1re esp.], note M.-A. Moreau ; JCP E 1999. 1685, note P. Coursier ; ibid. 748, obs. F. Taquet ; Gaz. Pal. 2000. Somm. 699 [1re esp.], obs. M.-L. Niboyet ; LPA 2000, n° 158, p. 4 [1re esp.], obs. F. Jault-Seseke ; J. Pelissier, A. Lyon-Caen, A. Jeammaud et E. Dockes, Les grands arrêts de droit du travail, 3e éd., Dalloz, 2004., n° 26). La protection contre le recours à l’arbitrage est donc, en principe, unilatérale.

• L’interprétation de la clause

Le plus souvent, le juge annule des sentences où le tribunal arbitral s’est déclaré à tort compétent. Il est en revanche beaucoup plus rare que l’annulation soit prononcée contre une sentence d’incompétence. C’est pourtant le cas dans l’arrêt LERCO (Paris, 5-16, 23 févr. 2021, n° 18/03068). La cour retient l’interprétation différente de la clause. Il s’agissait de savoir si certaines demandes extracontractuelles relevaient du champ d’application de la clause. Réponse négative pour le tribunal arbitral, positive pour la cour d’appel. La sentence est annulée partiellement sur ce point.

2. La constitution du tribunal arbitral

a. Le respect des règles de constitution du tribunal arbitral

L’annulation de la sentence arbitrale dans l’affaire DS Construction c. Libye (Paris, 5-16, 23 mars 2021, n° 18/05756) devrait faire grand bruit. La société DS Construction a investi en Libye et, à la suite d’un litige avec l’État, lui a adressé une notification de différend, en application des dispositions de l’accord sur la promotion, la protection et la garantie des investissements entre les États membres de l’Organisation de la Conférence islamique (ci-après « le Traité de l’OCI »), auquel la Libye est partie. Face au refus du défendeur de désigner un arbitre, le demandeur a saisi le secrétaire général de l’OCI afin qu’il procède à cette désignation. Le secrétaire général de l’OCI n’a pas répondu à la demande de désignation. Confrontée à ce silence, la société DS Construction a saisi le secrétaire général de la Cour permanente d’arbitrage (ci-après « la CPA ») afin que celle-ci procède à la désignation d’un arbitre pour le compte de l’État de Libye, en se fondant sur les dispositions du règlement d’arbitrage de la CNUDCI. Malgré les protestations du défendeur, le secrétaire général de la CPA a accepté de désigner un arbitre. Finalement, les parties se sont accordées pour que la question de la régularité de la constitution du tribunal arbitral soit tranchée par ce dernier. Le tribunal arbitral a rendu une sentence partielle sur la question préliminaire relative à la régularité de sa constitution, aux termes de laquelle il a rejeté l’objection de l’État de Libye. C’est cette sentence qui est soumise à la cour d’appel.

En substance, le débat porte sur la faculté de saisir le secrétaire général de la CPA pour faire désigner un arbitre, sur le fondement du règlement d’arbitrage CNUDCI, alors que le Traité de l’OCI ne prévoit pas cette faculté. Pour justifier ce choix, la société DS Construction se prévaut d’une clause de la nation la plus favorisée contenue dans le Traité de l’OCI et permettant de bénéficier d’un traité bilatéral conclu entre la Libye et l’Autriche.

L’arrêt soulève d’intéressantes questions relatives au droit des investissements. Nous en laisserons le commentaire aux spécialistes. Nous signalerons simplement que la cour n’écarte pas totalement qu’une disposition procédurale puisse entrer dans le champ d’une clause de la nation la plus favorisée. Elle énonce qu’« il ne peut être écarté d’emblée la possibilité pour une clause NPF d’inclure l’importation de procédure de règlement des différends alors que le “traitement” d’un investisseur peut potentiellement inclure non seulement le bénéfice d’un droit substantiel mais aussi le bénéfice d’un traitement procédural garantissant un dispositif de règlement des différends adapté à l’objet et au but du Traité ». En cela, elle semble prendre ses distances avec un autre arrêt, à l’occasion duquel elle avait exclu plus fermement que l’investisseur puisse se prévaloir de la clause de la nation la plus favorisée pour bénéficier de la clause d’arbitrage contenue dans un autre traité (Paris, 25 juin 2019, n° 17/06430, Dalloz actualité, 28 janv. 2020, obs. J. Jourdan-Marques). Elle refuse toutefois au requérant le bénéfice de cette clause, au motif qu’« il ne peut donc être considéré que les parties au Traité, ayant expressément prévu un dispositif ad hoc de règlement des litiges, aient entendu permettre le recours à des règlements de procédure externes, à tout le moins en l’absence d’accord de chacune des parties au litige ». Ainsi, parce que les parties au traité ont prévu des dispositions sur le règlement des litiges, le bénéfice de la clause NPF est écarté. En conséquence, il y a une violation du Traité de l’OPI par le recours au secrétaire général de la CPA.

Cela dit, une question demeure : que peut faire une partie lorsque l’autorité de nomination refuse de désigner un arbitre à la place du défendeur ? La cour énonce que « la constitution du tribunal arbitral en dehors des conditions prévues par le Traité OCI et contre la volonté de l’une des parties ne peut être justifiée par l’absence de démonstration par l’autre partie de la faculté pour l’une d’elles de saisir un juge d’appui alors qu’il appartenait à la société DS Construction d’engager les procédures adéquates tendant le cas échéant à saisir un juge d’appui afin de faire trancher la difficulté de constitution du tribunal, ce qu’elle n’a nullement fait, de sorte qu’elle ne peut s’en remettre à de simples considérations hypothétiques quant aux chances de succès d’une telle action pour s’en dispenser ». Ce faisant, elle répond à une objection de DS Construction, qui entendait faire peser sur la Libye la charge de la preuve de la faculté de saisir un juge d’appui. La cour s’y refuse. La difficulté, dans la présente affaire, réside dans l’absence de siège de l’arbitrage prévu par le Traité de l’OCI. En l’espèce, Paris a été désigné comme siège par une ordonnance de procédure du tribunal arbitral. Autrement dit, le requérant n’avait pas, avant cette date, de juge d’appui à saisir. Après l’annulation, le requérant n’aura toujours pas de juge d’appui à saisir, l’ordonnance de procédure étant anéantie avec la sentence. Cela dit, le demandeur avait toujours la possibilité de se prévaloir du fameux article 1505, 4°, du code de procédure civile, pour saisir le juge d’appui français. C’est sans doute ce qu’avait en tête la cour en écartant le moyen.

Pour autant, on sait que le juge français, à travers la jurisprudence NIOC (Civ. 1re, 1er févr. 2005, n° 01-13.742, NIOC, D. 2005. 2727 image, note S. Hotte image ; ibid. 3050, obs. T. Clay image ; Rev. crit. DIP 2006. 140, note T. Clay image ; RTD com. 2005. 266, obs. E. Loquin image ; Rev. arb. 2005. 693, note H. Muir Watt ; Gaz. Pal. 27-28 mai 2005, p. 3, obs. S. Lazareff ; ibid. 2005, n° 147, p. 37, note F.-X. Train), reprise par l’article 1505, 4°, du code de procédure civile, se présente comme un « bon samaritain » de l’arbitrage (P. Fouchard, E. Gaillard et B. Goldman, Traité de l’arbitrage commercial international, Litec, 1996, n° 838). Ce faisant, le droit positif français accepte que les parties s’émancipent des règles normalement applicables à leur litige pour aller chercher le soutien d’un tiers, le juge d’appui français, et obtenir la constitution du tribunal arbitral. Faut-il que le juge d’appui français soit le seul bon samaritain de l’arbitrage au monde ? Des parties qui saisiraient le juge d’appui français seraient-elles absoutes de la violation des règles applicables à la clause, là où toute autre saisine conduirait à une implacable annulation de la sentence ? Naturellement, on pourra toujours arguer qu’il convient, dans une telle hypothèse, de préférer un juge étatique. On peut néanmoins se demander si, dans l’esprit de la jurisprudence NIOC, la cour n’aurait pas pu valider la désignation par une autre autorité de nomination aussi vénérable que la CPA. On peut penser que, dans un esprit de faveur à l’arbitrage qui a longtemps animé les juridictions françaises, la solution était à la portée de la cour.

b. L’indépendance et l’impartialité

Les arrêts Grenwich (Paris, 5-16, 16 févr. 2021, n° 18/16695) et Rotana (Paris, 3-5, 2 mars 2021, n° 18/16891) rappellent que l’indépendance et l’impartialité du tribunal arbitral peuvent être examinées indépendamment de la révélation. En toute logique, il convient d’adapter le raisonnement à cette argumentation. Les indices d’un défaut d’indépendance ou d’impartialité peuvent notamment figurer dans la sentence, mais la cour ne peut contrôler la motivation du tribunal arbitral.

À cet égard, l’arrêt Grenwich juge logiquement que, lorsque les parties se prévalent d’un manquement illustré par la rédaction de la sentence, elles ne peuvent y avoir renoncé. Il convient donc de distinguer selon les indices présentés au juge : antérieurs à la reddition de la sentence, ils doivent faire l’objet d’une contestation devant le tribunal arbitral (par exemple s’il s’agit de propos tenus lors de l’audience) ; postérieurs à la reddition, ils peuvent être présentés pour la première fois devant le juge de l’annulation.

Surtout, dans les deux arrêts, la cour propose deux nouvelles grilles d’appréciation, l’une pour l’indépendance, l’autre pour l’impartialité. Pour la première, la cour énonce que « l’appréciation d’un défaut d’indépendance d’un arbitre procède d’une approche objective consistant à caractériser des facteurs précis et vérifiables externes à l’arbitre susceptibles d’affecter sa liberté de jugement, tels que des liens personnels, professionnels et/ou économiques avec l’une des parties ». Pour la seconde, elle retient que « l’impartialité de l’arbitre suppose l’absence de préjugés ou de partis pris susceptibles d’affecter le jugement de l’arbitre, lesquels peuvent résulter de multiples facteurs tels que la nationalité de l’arbitre, son environnement social, culturel ou juridique. Toutefois, pour être pris en compte, ces éléments doivent créer, dans l’esprit des parties, un doute raisonnable sur son impartialité de telle sorte que l’appréciation de ce défaut doit procéder d’une démarche objective ».

Plus que des définitions des notions d’indépendance et d’impartialité, la cour pose par ces arrêts des éléments de régime (v. égal., sur l’impartialité, Paris, 17 déc. 2019, n° 17/23073, Laser, Dalloz actualité, 6 avr. 2020, obs. W. Brillat-Capello ; Dalloz actualité, 27 févr. 2020, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2020. 2484, obs. T. Clay image). On peut se réjouir de cette démarche. Les éléments visés feront sans aucun doute l’objet de discussions et seront soumis à l’épreuve des faits. Il est délicat, à ce stade, d’en faire une analyse critique.

Dans les deux affaires, le requérant se prévalait d’éléments de motivation pour établir le défaut d’indépendance et d’impartialité de l’arbitre. En théorie, il est tout à fait possible d’obtenir gain de cause de cette façon, d’autant que la jurisprudence judiciaire admet que le défaut d’impartialité peut être caractérisé par une reproduction intégrale des conclusions d’une partie au titre de la motivation (Civ. 3e, 18 nov. 2009, n° 08-18.029, Procédures 2010, n° 1, p. 18, obs. B. Rolland ; Annales des loyers 2010. 936, obs. F. Bérenger) ou encore dans une motivation vexatoire à l’égard des parties (Civ. 2e, 14 sept. 2006, n° 04-20.524, D. 2006. 2346 image ; ibid. 2007. 896, chron. V. Vigneau image ; AJDI 2006. 932 image, obs. F. Bérenger image ; Procédures 2006, n° 11, p. 14, obs. R. Perrot ; JCP 2006. 2177, note R. Kessous). Les deux recours sont néanmoins rejetés. La cour précise, dans l’arrêt Grenwich, que, « si un tel doute peut le cas échéant résulter de la sentence elle-même, encore faut-il, dès lors que le contenu de la motivation de la sentence arbitrale échappe au contrôle du juge de l’annulation, que ce doute soit fondé sur des éléments précis quant à la structure de la sentence ou ses termes mêmes, qui laisseraient supposer que l’attitude de l’arbitre a été partiale ou à tout le moins seraient de nature à donner le sentiment qu’elle l’a été ». Il est en effet logique qu’une sentence qui tranche en faveur d’une partie au détriment d’une autre contienne des éléments d’appréciation sur les faits qui sont nécessaires à la motivation, sans pour autant refléter une quelconque partialité. Dans ce cadre, il n’y a rien de choquant à ce que l’arbitre s’appuie sur certaines pièces au détriment d’autres et retienne l’argumentation de l’une des parties plutôt que de l’autre. La cour se refuse logiquement d’entrer dans le débat, afin de ne pas réviser la sentence au fond.

c. La révélation

Alors que l’on s’est interrogé il y a seulement deux mois sur une éventuelle révolution dont l’arrêt Vidatel serait à l’origine (J. Jourdan-Marques, Chronique d’arbitrage : la révélation encore révolutionnée ?, Dalloz actualité, 22 févr. 2021), l’arrêt LERCO semble rebattre à nouveau les cartes (Paris, 5-16, 23 févr. 2021, n° 18/03068, D. 2018. 2448, obs. T. Clay image). Il faut donc jouer au jeu des sept différences pour retrouver son chemin.

Rappelons d’abord les faits. Deux arbitrages ont lieu séparément. On trouve deux demandeurs différents (un par procédure), mais un défendeur identique. Les demandeurs sont représentés par le même cabinet d’avocats, tout comme le défendeur. Dans les deux procédures, le défendeur désigne le même arbitre. Le demandeur s’y oppose dans la seconde procédure, ce qui conduit la Chambre de commerce internationale (CCI) à ne pas confirmer l’arbitre pour celle-ci. Seule la sentence rendue dans la première procédure nous intéresse. Dans le cadre de celle-ci, l’arbitre a révélé avoir été désigné en qualité de coarbitre par le cabinet d’avocats du défendeur six fois en dix-huit ans. Les trois dernières désignations correspondaient à des dossiers dont le montant en litige excédait le milliard (d’euros ou de dollars). Néanmoins, le cœur du litige concerne une désignation postérieure. En effet, pendant le déroulement de l’instance (qui aura duré trois ans), l’arbitre a été une nouvelle fois désigné par le même cabinet d’avocats. Cette fois, il ne l’a pas révélé. C’est ce défaut de révélation, que la partie adverse a découvert postérieurement, qui fonde le recours en annulation.

L’arrêt LERCO semble piocher aussi bien dans l’arrêt Vidatel que dans l’arrêt Dommo (Paris, 25 févr. 2020, Dommo, préc.). La principale différence entre ces deux derniers arrêts tenait dans la consécration, par l’arrêt Vidatel, d’une catégorie de circonstances « réputées objectives », « mettant l’arbitre ou le cabinet d’avocats auquel il appartient en lien direct, soit avec l’une des parties, soit avec une société filiale de cette partie ». Pour de telles circonstances, la cour semblait écarter l’exigence d’apporter la preuve d’un « doute raisonnable ». Autrement dit, à l’issue de l’arrêt Vidatel, on semblait se diriger vers deux catégories de liens : les liens directs, devant être révélés et donnant lieu, à défaut, à l’annulation de la sentence ; les liens indirects, ne devant pas être révélés sauf lorsqu’ils étaient de nature à caractériser un doute raisonnable sur l’indépendance.

Cette distinction a totalement disparu de l’arrêt LERCO. La cour reprend une formule déjà utilisée dans Dommo – mais écartée dans Vidatel – selon laquelle « il convient à cet égard de rappeler que la non-révélation par l’arbitre d’informations ne suffit pas à caractériser un défaut d’indépendance ou d’impartialité. Encore faut-il que ces éléments soient de nature à provoquer dans l’esprit des parties un doute raisonnable quant à l’impartialité et à l’indépendance de l’arbitre, c’est-à-dire un doute qui peut naître chez une personne placée dans la même situation et ayant accès aux mêmes éléments d’information raisonnablement accessibles ». Il n’est plus question de circonstances objectives pour lesquelles la partie est dispensée d’apporter la preuve du doute raisonnable. L’annulation de la sentence est, comme cela était le cas dans Dommo et depuis l’arrêt Tecso (Civ. 1re, 10 oct. 2012, n° 11-20.299, Sté Neoelectra Group c. Sté Tecso, Dalloz actualité, 19 oct. 2012, obs. X. Delpech ; D. 2012. 2458, obs. X. Delpech image ; ibid. 2991, obs. T. Clay image ; Rev. crit. DIP 2013. 678, note C. Chalas image ; RTD com. 2013. 481, obs. E. Loquin image ; Rev. arb. 2013. 129, note C. Jarrosson ; JCP 2012. Act. 1127, obs. M. Henry ; ibid. 2012. Doctr. 1268, note B. Le Bars ; ibid. 2012. Doctr. 1354, § 1er, obs. C. Seraglini ; Procédures 2012. Comm. 354, note L. Weiller), de nouveau conditionnée à la preuve systématique d’un doute raisonnable.

Cette analyse est corroborée par le fait que la cour, dans l’arrêt LERCO, reprend à nouveau la distinction entre les liens directs et indirects de l’arrêt Vidatel, mais y voit un élément de preuve du doute raisonnable : « Ainsi, un potentiel conflit d’intérêts dans la personne de l’arbitre, qui peut être soit direct parce qu’il concerne un lien avec une partie ou son conseil, soit indirect parce qu’il vise un lien d’un arbitre avec un tiers intéressé à l’arbitrage, ou encore un lien entre le cabinet d’un arbitre avec une partie ou un tiers intéressé, peut caractériser un doute ». Il n’est plus question de dispenser les parties de la preuve du doute raisonnable en cas de lien direct, mais d’établir un doute raisonnable par la preuve d’un lien direct. On revient, en réalité, à la logique de l’arrêt Dommo.

Toutefois, le lecteur averti pourrait être tenté de dire qu’il n’y a aucune différence entre les deux. N’est-ce pas identique de dire que, en présence d’un lien direct, les parties sont dispensées de la preuve du doute raisonnable ou que la preuve du doute raisonnable peut être rapportée par la preuve d’un lien direct ? La réponse serait positive si un lien direct entraîne immédiatement la caractérisation d’un doute raisonnable ; elle serait négative si un lien direct est insuffisant à caractériser un tel doute raisonnable.

Les faits de l’espèce apportent la réponse à cette question. On le rappelle, le lien non révélé concerne une nouvelle désignation d’arbitre par le même cabinet d’avocats. Ce lien est direct, aussi bien au sens de l’arrêt LERCO que de l’arrêt Vidatel, puisqu’il s’agit d’un lien entre l’arbitre et « une partie ou son conseil ». Suffit-il à caractériser un doute raisonnable ? La réponse est négative – elle l’est d’autant plus que le moyen est rejeté. Il y a donc bien une différence entre l’arrêt Vidatel, qui envisageait une annulation automatique pour des liens directs et l’arrêt LERCO, qui exige à nouveau la preuve d’un doute raisonnable.

Peut-on expliquer une telle différence ? Il n’est pas totalement exclu, mais nous n’y mettrions pas notre main à couper, que la différence de régime entre Vidatel et LERCO soit liée à la date à laquelle l’arbitre a été désigné. En effet, dans l’arrêt LERCO, l’arbitre a été désigné en 2014, alors qu’ils l’ont été en 2016 dans l’affaire Vidatel. La différence se situe dans la publication, dans ce laps de temps, de la fameuse « Guidance Note on conflict disclosures by arbitrators », qui date du 23 février 2016. Alors que cette note est au cœur du raisonnement dans l’arrêt Vidatel, elle est absente dans l’arrêt LERCO. Cela pourrait s’expliquer par la nomination antérieure des arbitres dans cette seconde affaire. Plutôt que de fonder son raisonnement sur la note, l’arrêt LERCO retient – avec une normativité incertaine – les IBA Guidelines. Pour autant, si cette différence temporelle explique une différence de fondement, on peine à comprendre pourquoi elle justifierait une telle différence de régime. Sauf à considérer, ce qui n’est pas totalement exclu, que la publication de la note et sa communication systématique aux arbitres ont accru l’obligation de révélation de ces derniers. Ce sur quoi nous serions particulièrement favorables.

Reste que l’on est dans l’incertitude. Difficile de savoir si la différence entre les deux arrêts s’explique par une nouvelle évolution dans la position de la cour ou par une différence de fondement justifiée par une chronologie distincte. En tout état de cause, comme nous l’avions déjà souhaité pour l’arrêt Vidatel, il est important que la solution se stabilise.

Qu’en est-il, enfin, de l’application factuelle de ces critères ? On l’a dit, l’existence d’un lien direct non révélé entre l’arbitre et le cabinet d’une des parties n’est pas suffisante pour emporter l’annulation de la sentence. Il convient d’apporter la preuve d’un doute raisonnable. Pour la cour, cette preuve n’est pas rapportée. Elle motive sa décision par de multiples arguments. Pour l’essentiel, elle compare le nombre de nominations de l’arbitre (22 au total) et le nombre de nominations par le cabinet (6 au total, mais l’arrêt évoque également le chiffre de 9…), auquel elle ajoute le nombre d’arbitrages dans le cabinet en question (chiffre variant de 57 en 2014 à 105 en 2017). Elle en déduit qu’il ressort de ces éléments que les « neuf désignations [de l’arbitre] par le cabinet […] sur une période de vingt et un ans ne sont ni exclusives, ni systématiques, ni même fréquentes au regard du nombre d’affaires d’arbitrage suivies par le cabinet ». Enfin, la cour ajoute – et c’est peut-être l’argument le plus convaincant – que la nouvelle désignation a eu lieu le 21 décembre 2017 et la sentence a été rendue le 4 janvier 2018 et avait déjà été adressée à la CCI depuis le 28 novembre 2017. On reste néanmoins perplexe, pour ne pas dire plus, face à cette argumentation.

D’une part, et il faut le dire fermement, un arbitre ne peut pas se dispenser pendant l’arbitrage de révéler une nouvelle désignation par le cabinet d’une des parties au litige. Comme cela est dit et répété, en arbitrage, ce ne sont pas les parties qui choisissent les arbitres, mais les conseils. Une nouvelle désignation compte. Une nouvelle désignation doit faire l’objet d’une révélation aux parties pendant le premier arbitrage, qui doivent pouvoir s’exprimer dessus. Une nouvelle désignation non révélée devrait constituer, en elle-même, un doute raisonnable.

D’autre part, le raisonnement tel qu’il est mené soulève de sérieuses interrogations d’un point de vue probatoire. En effet, il est tenu comme si les éléments produits étaient exhaustifs. En réalité, dès lors que l’arbitrage est confidentiel, ils ne constituent potentiellement que la face émergée de l’iceberg. Ce qui a pu être prouvé, c’est que l’arbitre a bénéficié d’une désignation supplémentaire pendant le déroulement de l’arbitrage. Est-ce la seule ? Impossible à dire. Ce qui est certain, c’est qu’elle crée un doute, et plus précisément un doute raisonnable. Juger l’inverse revient à mettre le requérant face à une preuve impossible : comment établir qu’il y a des nominations supplémentaires, alors que ces informations sont secrètes ? Face à une telle situation, certaines parties pourraient être tentées de recourir à des mesures d’instruction beaucoup plus invasives et contraignantes contre les arbitres et les parties ou les conseils, voire l’institution. Puisque la preuve est insuffisante, et que les richesses de l’Internet ne permettent pas d’en savoir plus, pourquoi ne pas tenter un coup de force en usant de procédures judiciaires pour obtenir la preuve manquante ? Il ne nous semble pas que l’arbitrage gagnerait à suivre cette voie.

En définitive, il convient d’avoir une approche « raisonnable » du doute raisonnable. Tant que l’on accepte que le débat se limite aux seules informations – parcellaires – appréhendées par le requérant, il convient d’admettre que la difficulté d’accès à la preuve justifie une appréciation extensive du doute raisonnable. À cet égard, une désignation pendant l’arbitrage est constitutive d’un tel doute. À l’inverse, si l’on veut dépasser le pur raisonnement hypothétique et se rapprocher du débat exhaustif, il faut s’attendre à ce que les parties aient recours à de nouveaux moyens d’investigations. Le témoignage des arbitres, déjà réclamé par une partie de la doctrine, pourrait constituer une piste intéressante (v. J. Jourdan-Marques, Le contrôle étatique des sentences arbitrales internationales, LGDJ, coll. « Bibliothèque de droit privé », 2017, n° 160, préf. T. Clay, nos 268 s. ; v. égal., sur cette question, A. Pinna et A. Barrier, L’arbitre et le recours en annulation contre la sentence qu’il a rendue. Approche critique du droit français à la lumière du droit comparé, Cah. arb. 2012. 295).

3. Le respect par le tribunal arbitral de sa mission

Contrairement à l’article 1492, 6°, du code de procédure, l’article 1520 ne prévoit pas de cas d’ouverture relatif à l’absence de date sur la sentence. Malgré une obligation de préciser cette date par la loi tunisienne, loi du siège de l’arbitrage, il ne s’agit pas d’un motif pour s’opposer à l’exequatur de la sentence au titre du respect par le tribunal arbitral de sa mission (Paris, 5-16, 13 avr. 2021, n° 18/17862, Ferrovial).

En revanche, le même arrêt accepte de contrôler l’existence d’une motivation sur le fondement de l’article 1520, 3°, du code de procédure civile. On sait que cette question est assez complexe à cerner depuis quelque temps (v. nos interrogations ss Paris, 1er déc. 2020, n° 17/22735, Tecnimont, Dalloz actualité, 22 févr. 2021, obs. J. Jourdan-Marques). Elle refuse ici l’exequatur pour une prétention – prise isolément –, celle-ci n’ayant fait l’objet d’aucune motivation.

Toujours dans le même arrêt, le requérant reprochait au tribunal arbitral d’avoir statué à deux reprises ultra petita. Si la cour reconnaît que le tribunal a évoqué les points querellés dans sa motivation, elle constate à l’inverse que le tribunal arbitral n’a retenu aucune condamnation sur ces points dans son dispositif. L’on voit ici l’intérêt pour un tribunal arbitral de concentrer sa décision dans un dispositif, ce qui permet aisément de s’assurer – pour lui, mais aussi pour les parties et la cour – du respect de sa mission.

Dans une autre affaire, en matière interne, la cour avait à statuer sur une question de délai (Paris, 5-16, 13 avr. 2021, n° 18/27764, Brezillon). Elle commence par signaler que le grief tiré de l’expiration du délai relève de la mission de l’arbitre. Ce n’est pas la première fois que la cour juge ainsi en matière interne (Paris, 18 juin 2013, n° 12/00480, D. 2013. 2936, obs. T. Clay image ; Rev. arb. 2013. 1028, note T. Bernard), mais elle ne l’a pas encore fait, à notre connaissance, en matière internationale (pour l’utilisation du 1°, v. Paris, 28 févr. 2017, n° 15/18655, Rev. arb. 2017. Somm. 338 ; 27 nov. 2018, n° 17/01628, Dalloz actualité, 24 déc. 2018, obs. J. Jourdan-Marques). Surtout, et l’on peut accueillir positivement cette souplesse, la cour accepte d’examiner le moyen alors même qu’il était invoqué sur le fondement du 1°. La sentence est annulée, l’arbitre ayant laissé expirer le délai : alors qu’il devait rendre sa sentence le 30 septembre, il l’a rendue le 15 octobre, avec des protestations déjà formulées par l’une des parties sur l’expiration du délai. La sentence ne pouvait en réchapper.

4. La contradiction

L’arrêt Grenwich soulève une intéressante question de classification des griefs au sein des cas d’ouverture du recours (Paris, 5-16, 16 févr. 2021, n° 18/16695, Grenwich). Durant la procédure, une partie avait contesté, dans un courrier adressé au tribunal arbitral, l’exigence d’un témoignage écrit imposé à un des témoins. La cour relève que le courrier « ne s’appuie pas sur le respect du principe de la contradiction pour fonder cette contestation, mais plus précisément sur les due process and procedural fairness requirements ce qui peut être traduit non pas comme le principe de la contradiction comme le fait la société Grenwich dans la traduction libre qu’elle produit, mais comme le respect du principe du procès équitable, qui pourrait le cas échéant relever d’un moyen fondé sur la violation de l’article 1520-5° du code de procédure civile, tiré de la méconnaissance de l’ordre public international, dont la cour n’est cependant pas saisie ». Ainsi, parce que, pendant la procédure arbitrale, la partie a invoqué le due process, mais pas le « contradictoire », elle aurait ainsi renoncé à se prévaloir du cas d’ouverture prévu à l’article 1520, 4°, du code de procédure civile.

La solution est triplement excessive. Premièrement, il est particulièrement hasardeux de rechercher la traduction qui aurait dû être utilisée pour « contradictoire » dans une procédure en langue anglaise. Refuser de voir dans les due process and procedural fairness requirements un équivalent confine au juridisme. En outre, il convient de rappeler que le contradictoire est bien une composante du procès équitable. Comme le signale particulièrement bien la doctrine, « ces garanties s’expriment en effet sous la forme générale du droit à un procès équitable, dans lequel le principe des droits de la défense occupe une place fondamentale, lui dont le noyau central est constitué par le principe de la contradiction » (C. Chainais, F. Ferrand, L. Mayer et S. Guinchard, Procédure civile. Droit commun et spécial du procès civil, MARD et arbitrage, 35e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2020, n° 788). Deuxièmement, la jurisprudence a depuis longtemps une vision souple de l’article 1520, 4°, du code de procédure civile et n’hésite pas à viser ce fondement pour des questions d’accès au juge (Paris, 17 nov. 2011, n° 09/24158, Licensing Projects SL c. Pirelli & C. SPA, D. 2011. 3023, obs. T. Clay image ; RTD com. 2012. 530, obs. E. Loquin image ; JDI 2012. 41, note X. Boucobza et Y.-M. Serinet ; Cah. arb. 2012. 159, note D. Cohen ; LPA 2012, n° 142, p. 11, obs. M. de Fontmichel ; Rev. arb. 2012. 392, comm. F.-X. Train, p. 267) ou d’égalité des armes (Paris, 21 févr. 2017, n° 15/01650, D. 2017. 2054, obs. L. d’Avout et S. Bollée image ; ibid. 2559, obs. T. Clay image ; RTD com. 2019. 42, obs. E. Loquin image ; ibid. 2020. 283, obs. E. Loquin image ; Rev. arb. 2017. 915, note S. Bollée et M. Audit ; JCP 2017. Doctr. 1326, obs. C. Seraglini ; Cah. arb. 2017. 668, note B. Poulain ; ASA 2017. 551, note L.-C. Delanoy ; 28 juin 2016, n° 15/03504, Rev. arb. 2016. 1157, note J. Barbet ; Gaz. Pal. 2016, n° 40, p. 37, obs. D. Bensaude). Elle a même déjà examiné le principe du procès équitable au visa de l’article 1520, 4°, du code de procédure civile (Paris, 2 avr. 2019, n° 16/24358, Schooner, préc.). Dès lors, on comprend mal cette rigueur nouvelle. Troisièmement, quand bien même il faudrait désormais examiner le procès équitable sur le fondement de l’article 1520, 5°, du code de procédure civile, rien dans le code n’interdit au juge de substituer le bon fondement (ce qu’elle fait d’ailleurs dans un autre arrêt de la présente livraison, v. Paris, 5-16, 13 avr. 2021, n° 18/27764, Brezillon). Au final, on comprend d’autant moins ce pointillisme procédural que la cour, finalement, ne s’y arrête pas et constate, de façon beaucoup plus convaincante, que la partie n’a pas émis d’autres réserves et qu’elle a, au contraire, reconnu que le contradictoire avait été parfaitement respecté.

L’arrêt AD Trade apporte une précision intéressante sur la question du contradictoire (Paris, 5-16, 13 avr. 2021, n° 18/09809). Dans l’exercice de son pouvoir modérateur d’une clause pénale excessive, le tribunal peut retenir le taux qu’il souhaite, sans être tenu par les propositions de modération proposées par les parties. Il faut, en revanche, et logiquement, que les parties lui aient demandé de faire usage de ce pouvoir. Par ailleurs, l’exercice de ce pouvoir modérateur ne revient pas à usurper des pouvoirs d’amiable compositeur. Il convient, pour éviter toute ambiguïté, de ne pas faire mention de l’équité, mais simplement de préciser que l’arbitre use de son pouvoir de modération.

5. L’ordre public

a. La fraude procédurale

Problématique récurrente ces dernières années, la fraude procédurale est à nouveau au cœur des débats dans l’arrêt Rotana (Paris, 3-5, 2 mars 2021, n° 18/16891). L’approche est d’ailleurs très intéressante. Il était reproché à une partie d’avoir dissimulé une pièce à l’occasion d’une procédure de production de documents devant le tribunal arbitral. La question est simple : une telle dissimulation est-elle constitutive d’une fraude procédurale ? La réponse se trouve dans la définition de la fraude procédurale, rappelée par la cour, qui envisage l’hypothèse où « des pièces intéressant la solution du litige [ont] été frauduleusement dissimulées aux arbitres ». Néanmoins, et c’est logique, il ne suffit pas d’établir l’absence de production du document ; encore faut-il apporter la preuve d’une fraude. La cour s’appuie sur deux éléments pour rejeter le recours : d’une part, il n’est pas établi que la partie, qui n’était pas l’auteur du document, en avait été destinataire à la date de la production ; d’autre part, et de façon beaucoup plus substantielle, la cour juge que la pièce n’aurait pas été décisive. Il semble donc que deux critères se dégagent : l’annulation de la sentence est encourue en l’absence de production d’un document à l’occasion d’une telle procédure s’il est établi que la partie l’avait en sa possession et que la pièce aurait été décisive pour la résolution du litige.

b. L’omission de statuer

On enseigne classiquement que l’omission de statuer n’est pas un motif d’annulation, dès lors qu’il est possible de saisir à nouveau le tribunal arbitral de la prétention non jugée. Afin de contourner cet obstacle, une partie a eu la bonne idée de se prévaloir d’une atteinte à l’accès au juge et de demander l’annulation de la sentence sur le fondement de l’ordre public international (Paris, 3-5, 2 mars 2021, n° 18/16891, Rotana). Il est remarquable que si l’arrêt rejette le moyen, elle le fasse sur le fond et non sur la recevabilité. Autrement dit, l’omission de statuer peut être examinée par le juge de l’annulation sur le fondement de l’accès au juge à travers l’article 1520, 5°, du code de procédure civile. Encore faut-il que la preuve d’une privation de l’accès au juge soit apportée, ce qui n’est pas le cas si le juge constate que les prétentions ont été rejetées par l’arbitre.

c. Les procédures collectives

On sait que la procédure collective perturbe l’arbitrage. Le non-respect de certaines règles est susceptible de porter atteinte à l’ordre public international (v. sur cette question P. Ancel, Arbitrage et procédures collectives, Rev. arb. 1983. 275 ; Arbitrage et procédures collectives après la loi du 25 janvier 1985, Rev. arb. 1987. 127 ; P. Fouchard, Arbitrage et faillite, Rev. arb. 1998. 471). Qu’en est-il lorsque la procédure collective est ouverte à l’étranger ? Pour la cour d’appel (Paris, 3-5, 2 mars 2021, n° 18/16891, Rotana), l’effet d’une procédure collective prononcée à l’étranger est réduit si la décision n’est pas revêtue de l’exequatur. Elle énonce que « le contrôle exercé par le juge de l’annulation pour la défense de l’ordre public international s’attache seulement à examiner si l’exécution des dispositions prises par le tribunal arbitral heurte de manière manifeste, effective et concrète les principes et valeurs compris dans l’ordre public international. Or la procédure de liquidation […] ouverte aux Îles Caïmans n’ayant, en dehors de tout exequatur, que des effets limités à la désignation des organes de la procédure, les sentences arbitrales, même à admettre que l’arbitre aurait omis de statuer sur la demande des liquidateurs de restitution de biens appartenant à la débitrice, ne portent pas une atteinte manifeste, effective et concrète, au principe de l’égalité des créanciers ». Autrement dit, la prise en compte d’une procédure collective née à l’étranger dépend de la reconnaissance de la décision en France.

d. Les lois de police étrangères

Dans une importante affaire AD Trade (Paris, 5-16, 13 avr. 2021, n° 18/09809), la République de Guinée invoquait, pour tenter d’obtenir l’annulation de la sentence arbitrale, son droit interne qu’elle espérait voir revêtir la qualification de loi de police étrangère faisant partie de l’ordre public international français. On le sait, la jurisprudence admet une telle hypothèse depuis l’arrêt MK Group (Paris, 16 janv. 2018, n° 15/21703, D. 2018. 1635 image, note M. Audit image ; ibid. 966, obs. S. Clavel et F. Jault-Seseke image ; ibid. 1934, obs. L. d’Avout et S. Bollée image ; ibid. 2448, obs. T. Clay image ; RTD com. 2020. 283, obs. E. Loquin image ; Rev. arb. 2018. 401, note S. Lemaire ; JDI 2018. Comm. 12, note S. Bollée ; ibid. Comm. 13, note E. Gaillard). Ce n’est toutefois pas à n’importe quelle condition.

D’abord, la cour rappelle son office en matière d’ordre public international : « le juge de l’annulation est le juge de la sentence pour admettre ou refuser son insertion dans l’ordre juridique français et non juge de l’affaire pour laquelle les parties ont conclu une convention d’arbitrage. Son contrôle n’a donc pas pour objet de vérifier que des stipulations contractuelles ont été correctement exécutées ou des dispositions légales correctement appliquées, mais seulement de s’assurer, dans le cadre du contrôle du respect de l’article 1520, 5°, du code de procédure civile, qu’il ne résulte pas de la reconnaissance ou de l’exécution de la sentence une violation manifeste, effective et concrète de l’ordre public international ».

Ensuite, elle examine la violation invoquée. Il s’agit de dispositions du code des marchés publics. Elle signale, et cela mérite d’être noté, que « la République de Guinée ne peut invoquer devant le juge de l’annulation la violation de sa propre législation pour se délier de ses engagements contractuels étant observé que le défaut d’approbation des contrats n’est pas imputable à la société AD Trade ». Nul doute qu’une telle exclusion ne fera pas l’unanimité. Elle nous semble néanmoins salutaire. De la même manière qu’un État ne peut se prévaloir de son droit interne pour échapper à l’arbitrage, il ne peut se prévaloir de son droit interne pour échapper à un contrat qu’il a conclu. Cela dit, il faut bien admettre que la solution pourra paraître parfois incohérente. Ainsi, en matière de corruption, il est admis que le non-respect des dispositions relatives à l’attribution des marchés publics est un indice particulièrement révélateur (en dernier lieu Paris, 17 nov. 2020, n° 18/02568, Sorelec, préc.). De plus, on sait pertinemment que lorsque les juridictions administratives auront à connaître de situations équivalentes concernant une personne publique française, elles ne se priveront pas de sanctionner tout écart aux procédures de marchés publics.

Quoi qu’il en soit, la cour ne rejette pas le moyen sur ce seul argument. Elle vérifie également que la loi de police étrangère intègre l’ordre public international. Elle rappelle que la « seule méconnaissance d’une loi de police étrangère ne peut conduire en elle-même à l’annulation d’une sentence arbitrale. Elle ne peut y conduire que si cette loi de police protège une valeur ou un principe dont l’ordre public français lui-même ne saurait souffrir la méconnaissance, même dans un contexte international. Ce n’est que dans cette mesure que des lois de police étrangères peuvent être regardées comme relevant de l’ordre public international français ». Si la formule est différente, elle semble rejoindre les principes posés par MK Group. Pour écarter une telle qualification, la cour retient que la formalité invoquée – une approbation ministérielle – ne trouve pas son équivalent en droit français et n’est aucunement imposée par la loi type CNUDCI sur la passation des marchés publics, laquelle est censée refléter le consensus international en la matière. Il en résulte que la loi de police étrangère n’est pas comprise dans l’ordre public international français ni dans un éventuel ordre public transnational. 

e. Les mesures d’embargo

Toujours dans l’affaire AD Trade (Paris, 5-16, 13 avr. 2021, n° 18/09809), le requérant invoquait les mesures européennes d’embargo dont il faisait l’objet. La cour constate la recevabilité du moyen, quand bien même il n’a pas été invoqué devant le tribunal arbitral. La solution est conforme à la jurisprudence sur la renonciation, qui est écartée en présence d’un grief relatif à l’ordre public international (v. supra). On notera néanmoins l’exercice d’équilibriste auquel se livre le requérant, en se prévalant des mesures d’embargo dont il est la cible. On peut se demander s’il est opportun de permettre à un État de retourner à son profit des mesures de sanctions internationales dont il est l’objet pour se délier de ses engagements contractuels.

La cour reconnaît immédiatement que des mesures européennes d’embargo appartiennent à l’ordre public international. Elle avait déjà jugé ainsi dans une autre affaire récente (Paris, 3 juin 2020, n° 19/07261, TCM, Dalloz actualité, 29 juill. 2020, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2020. 1970, obs. S. Bollée ; ibid. 2484, obs. T. Clay image ; RDC 2020, n° 4, p. 60, note M. Laazouzi). Toutefois, et c’est fondamental, la cour ajoute que la conformité à l’ordre public international « s’apprécie au moment où il statue sur celle-ci et non à la date à laquelle elle a été rendue, ni a fortiori à la date des faits à l’origine de l’affaire ». Autrement dit, il convient que les mesures d’embargo soient encore en vigueur à la date à laquelle le juge statue. Il s’agit ici du principe d’actualité de l’ordre public international (Civ. 22 mars 1944, Chemins de fer portugais c. Ash, Rev. crit. DIP 1946, note J.-P. Niboyet ; S. 1945. I. 77 ; D. 1944. 145, note J.-P. Niboyet). La cour ajoute dans une formule remarquable qu’« il y a dès lors lieu de prendre en compte l’évolution de la situation internationale et des valeurs communément admises par la communauté internationale pour apprécier si l’insertion d’une sentence dans l’ordre juridique interne est conforme à l’ordre public international, et ce sans préjudice des actions en responsabilité le cas échéant civile ou pénale qui pourraient être diligentées à l’encontre des personnes qui enfreignent les mesures d’embargo au moment où elles étaient toujours en vigueur ». Or la cour constate que les mesures d’embargo à l’encontre de la République de Guinée ont été levées en 2014. Elle en conclut qu’« à ce jour, ces mesures d’embargo ne font plus partie de l’ordre public international français ».

Cette mise en application du principe d’actualité de l’ordre public international devrait être suffisante à rejeter le grief. Pourtant, et cela devient malheureusement trop courant, la cour cherche à consolider sa décision en établissant également que le matériel prévu par le contrat ne tombe pas sous le coup des mesures, en examinant le champ d’application matériel de la loi d’embargo. Si la cour rejette le moyen sur ce point, cette surabondance de motivation nuit à la qualité de la décision. D’une part, il suffit qu’une partie de la motivation soit moins convaincante que d’autres pour que l’ensemble de la décision soit fragilisé. D’autre part, d’un point de vue procédural, une telle logique ne pourra plus être suivie dès lors que, désormais, les questions de recevabilité doivent être traitées par le conseiller de la mise en état sur le fondement de l’article 789, 6°, du code de procédure civile. Or la question de l’actualité de l’ordre public international relève de la recevabilité du moyen, alors que le champ d’application relève du bien-fondé (on précisera que, quand bien même l’article 789 permet au conseiller de la mise en état de renvoyer la question à la formation de jugement, il n’autorise pas à joindre l’incident au fond. En effet, il énonce que « le juge de la mise en état renvoie l’affaire devant la formation de jugement, le cas échéant sans clore l’instruction, pour qu’elle statue sur cette question de fond et sur cette fin de non-recevoir ». On doit sans doute comprendre qu’il n’est pas permis de traiter la fin de non-recevoir dans la décision au fond, mais obligatoirement dans une décision distincte).

IV. La responsabilité des acteurs de l’arbitrage

La présente livraison donne l’occasion de revenir sur plusieurs décisions relatives à la responsabilité. Comme les parties sont toujours très créatives, on a la chance de pouvoir évoquer la responsabilité des arbitres, des conseils, des centres d’arbitrages et des administrateurs d’une société.

A. La responsabilité de l’arbitre

C’est la question de la responsabilité de l’arbitre qui a donné lieu à la décision la plus intéressante. L’action en responsabilité est engagée à la suite de l’annulation de la sentence dans l’affaire Volkswagen (Civ. 1re, 3 oct. 2019, n° 18-15.756, Dalloz actualité, 12 déc. 2019, obs. C. Debourg ; ibid. 29 oct. 2019, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2019. 2435, obs. T. Clay image ; RTD com. 2020. 297, obs. E. Loquin image ; JCP 2019. 2329, § 3, obs. C. Seraglini ; pour l’arrêt d’appel, v. Paris, 27 mars 2018, n° 16/09386, D. 2018. 2448, obs. T. Clay image ; Rev. arb. 2019. 522 [1re esp.], note L.-C. Delanoy ; Gaz. Pal. 2018, n° 27, p. 19, obs. D. Bensaude). L’une des parties a saisi le tribunal judiciaire de Paris d’une action contre l’arbitre ayant failli à son obligation de révélation. La décision rendue par le tribunal judiciaire (TJ Paris, 31 mars 2021, n° 19/00795, Dalloz actualité, à paraître, obs. P. Capelle) sera très commentée. On signalera d’ailleurs qu’elle fait l’objet d’un communiqué de presse de la part du tribunal. Le 19 avril 2021, c’est une décision du juge d’appui qui a également fait l’objet d’un tel communiqué (TJ Paris, ord., 16 avr. 2021, n° 21/50115, commentaire lors de la prochaine chronique). Par ces deux communiqués successifs, le tribunal judiciaire de Paris semble vouloir faire de l’arbitrage un outil de communication. S’agit-il d’une volonté de s’inscrire comme un « acteur de l’arbitrage », alors que la cour d’appel accapare toute la lumière depuis quelques années ? On peut le penser, d’autant que les communiqués du tribunal judiciaire de Paris sont rares et en principe réservés à des affaires très médiatiques. Il faudra garder un œil sur cette tendance.

Sur la présente affaire, le tribunal judiciaire se déclare incompétent (on s’interroge, sans bien comprendre, sur la raison pour laquelle il ne s’agit pas d’une ordonnance du juge de la mise en état). Deux questions sont successivement traitées : d’une part, celle de l’application du règlement n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 (Bruxelles I bis) et, d’autre part, celle du critère de compétence.

Sur la première question, il s’agit de savoir si l’exclusion de l’arbitrage prévue par l’article 1er, 2, d), du règlement s’applique à une action en responsabilité contre l’arbitre. Après avoir examiné les arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne Marc Rich (CJUE 25 juill. 1991, aff. C-190/89, Rev. crit. DIP 1993. 310, note P. Mayer image ; Rev. arb. 1991. 677, note D. Hascher ; JDI 1992. 488, note A. Huet) et West Tankers (CJCE 10 févr. 2009, aff. C-185/07, D. 2009. 981 image, note C. Kessedjian image ; ibid. 2384, obs. L. d’Avout et S. Bollée image ; ibid. 2959, obs. T. Clay image ; ibid. 2010. 1585, obs. P. Courbe et F. Jault-Seseke image ; Rev. crit. DIP 2009. 373, note H. Muir Watt image ; RTD civ. 2009. 357, obs. P. Théry image ; RTD com. 2009. 482, obs. A. Marmisse-d’Abbadie d’Arrast image ; ibid. 644, obs. P. Delebecque image ; ibid. 2010. 529, obs. E. Loquin image ; JDI 2009. 1285, note B. Audit ; Rev. arb. 2009. 413, note S. Bollée ; JCP 2009, n° 227, note P. Callé ; JCP E 2009, n° 1973, note C. Legros ; Gaz. Pal. 2009. 20, note A. Mourre et A. Vagenheim ; ibid. 2010. 21, obs. M. Nicolella ; ibid. p. 8, obs. L. Salvini ; LPA 2009. 32, note S. Clavel ; Europe 2009, comm. n° 176, par L. Idot), le tribunal judiciaire énonce que « le présent litige a pour objet, une action en responsabilité contractuelle de l’arbitre fondée sur des manquements de M. G… à ses obligations contractuelles découlant du contrat d’arbitre conclu avec la société S… et la société A…. Il s’ensuit que, ne portant pas sur la constitution du tribunal arbitral, la convention d’arbitrage, ou la sentence arbitrale, il n’entre pas dans le champ de l’exclusion posée par l’article 1, § 2, sous d), du règlement (UE) n° 1215/2012 et que, dès lors, le choix de la juridiction compétente pour connaître de la présente action doit être déterminé selon les règles énoncées par ce texte ».

La question est débattue depuis longtemps en doctrine. Il est souvent considéré que le droit européen ne devrait pas être applicable à cette question, au regard de l’exclusion prévue (T. Clay, L’arbitre, préf. P. Fouchard, Dalloz, coll. « Nouvelle bibliothèque de thèses , 2001, n° 1010 s.), mais les avis restent partagés (pour un résumé des débats, v. L. Jandard, La relation entre l’arbitre et les parties. Critique du contrat d’arbitre, thèse ss la dir. de F.-X. Train, 2018, nos 265 s.). En réalité, si notre préférence va pour une exclusion de tout ce qui touche à l’arbitrage du champ d’application du règlement, on peine à imaginer la Cour de justice juger ainsi après l’arrêt West Tankers. Il est aussi vrai que la question est sans doute moins sensible – même si elle le reste – et elle ne devrait pas donner lieu à une levée de boucliers.

La deuxième question devrait en revanche susciter beaucoup plus de discussion, car la réponse apportée est loin d’être évidente et paraît même modérément convaincante. Il s’agit de déterminer le facteur de rattachement pour identifier la juridiction compétente. Le règlement Bruxelles I bis est donc applicable. Premièrement, le domicile du défendeur – l’arbitre – est un facteur pertinent, en application de l’article 4 du règlement. Néanmoins, l’arbitre n’est pas domicilié en France, ce qui invite, dans un deuxième temps, à s’intéresser aux compétences spéciales prévues par le règlement. À cet égard, les litigants s’accordent pour qualifier le contrat d’arbitre de contrat de prestation de services, ce qui permet l’application pour appliquer l’article 7, § 1, b), du règlement. Reste à déterminer quel est « le lieu d’un État membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis ».

La doctrine enseigne de façon tout à fait classique que ce lieu est le siège de l’arbitrage (T. Clay, Le siège de l’arbitrage international entre ordem et progresso, Cah. arb. 2011, p. 21, n° 43). Telle n’est pourtant pas la solution retenue par le tribunal. Celui-ci considère que ce lieu est « fictif » et que la commune intention des parties n’a pas pu être « de faire du lieu de l’arbitrage celui du lieu d’exécution effective de l’arbitrage ». Il nous semble excessif de dire que le rattachement par le siège est fictif. Il n’est pas physique, mais il n’est pas pour autant fictif. Ce rattachement est juridique. Il est impossible de nier les conséquences juridiques d’un tel choix, notamment quant à l’exercice des voies de recours. Comme le disait déjà Philippe Fouchard, le siège « permet de localiser la relation juridique nouée entre l’arbitre et les parties, entre les parties et le centre d’arbitrage, et entre l’arbitre et le centre d’arbitrage » (P. Fouchard, Suggestions pour accroître l’efficacité internationale des sentences arbitrales, Rev. arb. 1998. 653., n° 38).

Plutôt que de retenir le siège comme facteur de rattachement, le tribunal recherche le « lieu dans lequel le défendeur a effectivement réalisé, de manière prépondérante, sa prestation intellectuelle d’arbitre ». Fort de plusieurs éléments, notamment le lieu de résidence, le lieu de déroulement des réunions entre les arbitres (on notera d’ailleurs qu’une attestation est produite par l’un des arbitres) et le lieu des audiences, le tribunal retient que le lieu d’exécution des prestations est situé en Allemagne. C’est la raison pour laquelle il se déclare incompétent (on notera la condamnation, au passage, à un article 700 à hauteur de 100 000 €, ce qui paraît un poil excessif pour une exception de compétence qui, à tout le moins, ne coulait pas de source).

La solution retenue par le tribunal paraît difficilement reproductible. À considérer que le siège ne soit pas pertinent pour déterminer le tribunal compétent pour connaître de l’action en responsabilité, le recours à ce faisceau d’indices pourrait mettre fréquemment les juridictions dans l’impossibilité d’aboutir à une solution. En effet, en l’espèce, tous les indices convergeaient vers l’Allemagne, notamment du fait du domicile de tous les arbitres. Pour autant, dans un tribunal arbitral différent, avec des arbitres résidents dans plusieurs pays, la solution deviendrait moins évidente. Elle le deviendra d’autant moins si le processus de dématérialisation des procédures poursuit son chemin. Il pourrait devenir impossible de localiser le lieu de la prestation intellectuelle, sauf à le confondre avec le lieu de domiciliation de l’arbitre et à accepter que la prestation soit réalisée dans autant de lieux qu’il n’y a d’arbitres. Pour cette raison, le choix du siège paraissait plus adapté pour la mise en œuvre de l’article 7 du Règlement Bruxelles I bis.

B. La responsabilité des conseils

Dans l’affaire Chripimarc (Paris, 4-13, 31 mars 2021, n° 18/08337), une partie recherchait la responsabilité de son ancien conseil. La faute reprochée au conseil était de ne pas avoir informé le client de la présence d’une clause compromissoire dans un contrat de bail. En conséquence, pour voir constater l’acquisition de la clause résolutoire, la partie avait saisi le juge des référés. Ce dernier s’est déclaré incompétent pour connaître de la prétention. Il a donc fallu saisir un tribunal arbitral pour obtenir gain de cause. En définitive, plus de peur que de mal, pour une solution favorable obtenue avec un simple retard. Toutefois, le client ne l’entend pas de cette oreille. Pour la cour d’appel, qui a déjà statué sur ce point dans un précédent arrêt, la faute est établie : « en n’attirant pas l’attention […] sur la difficulté que soulevait la présence dans le contrat de bail d’une clause compromissoire générale, préalablement à la saisine du juge des référés, et donc en ne l’informant pas du risque pris en faisant le choix de la juridiction étatique, il ne l’avait pas mise en mesure de prendre une décision éclairée sur la position à adopter au regard de cette clause ». Sur ce point, la solution n’est pas étonnante : l’omission par un conseil de signaler la présence d’une clause compromissoire dans un contrat et la saisine d’un juge incompétent sans l’avis du client paraît effectivement constitutive d’une faute.

Reste la question du préjudice. Le requérant faisait valoir une perte de chance de percevoir des loyers à cause du défaut d’information du conseil. La cour rejette néanmoins ce préjudice, au motif que la chance supposée perdue n’est qu’hypothétique (la motivation n’est pas tout à fait claire). En revanche, elle accepte de réparer le préjudice lié aux frais de l’instance en référé et une partie des frais de conseils pour cette procédure.

C. La responsabilité du centre d’arbitrage

L’affaire Garoubé n’en finit pas (Paris, 5-16, 23 mars 2021, n° 18/14817). Elle donne lieu, en appel, à une action en responsabilité contre la CCI. Les griefs formulés à l’encontre de l’institution sont variés. Pour rejeter l’action, la cour retient d’abord la présence de la clause limitative de responsabilité dans le règlement d’arbitrage. Loin de constater l’existence d’une faute lourde ou dolosive, nécessaire pour faire échec à la clause, la cour n’identifie aucune faute de la part de l’institution.

D. La responsabilité des administrateurs

Voilà une idée innovante ! Celle de l’action ut singuli des actionnaires contre les administrateurs ayant décidé d’engager une procédure d’arbitrage (Versailles, 11 févr. 2021, n° 18/08096, Nehlig). Toutefois, l’affaire était ambitieuse puisque l’arbitrage avait été gagné. Néanmoins, les requérants faisaient valoir que le montant des frais (conseils et arbitrage) était supérieur à la créance recouvrée. En réalité, l’opération réalisée par la cour montre l’inverse. Cela dit, la question posée est loin d’être inintéressante : quid d’une action perdue ou d’une action dont le résultat n’est pas à la hauteur des espérances et devient négatif à cause des frais engagés ? Le préjudice sera alors réel. Restera à savoir si une faute de gestion peut être reprochée aux administrateurs.

V. Arbitrage et Union européenne

Avis de tempête sur l’arbitrage. Alors que la cour de justice rendra prochainement sa décision dans l’affaire Komstroy c. Moldavie, à la suite du renvoi préjudiciel de la cour d’appel de Paris (Paris, 24 sept. 2019, n° 18/14721, préc.), on peut d’ores et déjà lire les conclusions de l’avocat général dans cette affaire (concl. du 3 mars 2021, aff. C-741/19). Nous n’en dirons que quelques mots, mais ces conclusions ne feront que renforcer la fébrilité du praticien dans l’attente du couperet européen.

L’avocat général rend son avis, pour l’essentiel, sur deux choses : d’une part, la faculté pour la Cour de justice de l’Union européenne de se prononcer sur la question préjudicielle qui lui est posée et, d’autre part, sur l’interprétation du Traité sur la charte de l’énergie (TCE). La seconde question est plus technique et ne retiendra pas notre attention (mais retiendra celle des commentateurs en droit des investissements). Nous dirons donc seulement quelques mots sur la première. En prévenant le lecteur : il est préférable de ne pas être cardiaque pour lire ce qui va suivre et il convient de se tenir à distance des objets fragiles.

Rappelons un point important, avant tout commentaire : l’Union européenne est partie au TCE. Apparemment, ce point a complètement échappé à l’avocat général.

Tout d’abord, l’avocat général s’interroge sur la faculté pour la Cour d’interpréter le TCE dans le cadre d’un litige extérieur à l’Union européenne. L’avis de l’avocat est assez laconique sur ce point et se limite à retenir que l’Union a intérêt à ce que les dispositions reçoivent une interprétation uniforme. Il n’y a rien d’étonnant à cette position. On notera néanmoins qu’elle a vocation à interdire à tout tribunal arbitral d’exprimer une opinion dissidente par rapport à la Cour. Mais on pouvait s’y attendre.

Ensuite, et c’est là l’essentiel, l’avocat général invite la Cour à aller beaucoup plus loin. En effet, il ne se contente pas de constater la compétence de la Cour et de l’inviter ensuite à interpréter le TCE conformément à la question posée par la cour d’appel de Paris. Il en profite pour proposer à la cour de se prononcer sur « l’applicabilité des dispositions du TCE dans l’ordre juridique de l’Union », et plus particulièrement de son article 26 prévoyant le recours à l’arbitrage (§ 46 s.). C’est à cette occasion que l’on peut constater l’effet délétère de la jurisprudence Achmea (CJUE 6 mars 2018, aff. C-284/16, Dalloz actualité, 4 avr. 2018, obs. F. Mélin ; AJDA 2018. 1026, chron. P. Bonneville, E. Broussy, H. Cassagnabère et C. Gänser image ; D. 2018. 2005 image, note Veronika Korom image ; ibid. 1934, obs. L. d’Avout et S. Bollée image ; ibid. 2448, obs. T. Clay image ; Rev. crit. DIP 2018. 616, note E. Gaillard image ; RTD eur. 2018. 597, étude J. Cazala image ; ibid. 649, obs. Alan Hervé image ; ibid. 2019. 464, obs. L. Coutron image ; Rev. arb. 2018. 424, note S. Lemaire ; Procédures 2018. Comm. 143, obs. C. Nourissat ; JDI 2018. 903, note Y. Nouvel ; JDI 2019. 271, note B. Rémy). L’ambition de l’avocat général est simple : « Il est donc nécessaire de vérifier si les dispositions matérielles du TCE peuvent, dans le sillage de l’arrêt Achmea, être jugées incompatibles avec le droit de l’Union et, ainsi, inapplicables au sein de son ordre juridique » (§ 49).

Le raisonnement suivi est alors relativement simple et prévisible. En synthèse, l’avis retient qu’il n’est pas admis que « les États membres puissent soustraire au système juridictionnel de l’Union, par l’intermédiaire d’un engagement international, de façon systématique, un ensemble de litiges portant sur l’interprétation ou l’application du droit de l’Union » (§ 62), ajoutant, sans doute fièrement, que « c’est précisément parce qu’il est admis et reconnu, dans l’ordre juridique de l’Union, que les États membres respectent un ensemble de valeurs et de droits, au titre desquels l’État de droit et le droit à un recours effectif énoncé, qu’il est également garanti que les investisseurs des États membres sont, de façon certaine, suffisamment protégés dans l’ordre juridique de l’Union, de sorte qu’il n’est pas nécessaire de recourir à un système extérieur aux systèmes juridictionnels des États membres » (§ 65).

En réalité, on pourrait se contenter d’opiner du chef et d’y voir là une simple redite d’Achmea. Et d’ailleurs, quand bien même nos réserves à l’encontre de ce dernier sont immenses, on peut admettre qu’il s’agit d’une confrontation entre, d’une part, le droit de l’Union et, d’autre part, des accords entre États auxquels l’Union n’est pas partie.

C’est cependant sur ce point qu’apparaît la différence entre Achmea et Komstroy. L’Union européenne est partie au TCE ! L’avocat général est donc en train de porter un jugement de valeur sur un traité multilatéral conclu entre l’Union, des États membres et des États non membres en se prévalant du droit de l’Union. Il invite la Cour à mettre l’Union dans une situation de violation de ses engagements internationaux au motif de préservation de son propre droit. Du point de vue de la hiérarchie des normes, cela revient tout simplement à prôner la supériorité du droit de l’Union sur les engagements internationaux de l’Union.

La limite d’un tel raisonnement nous semble plus politique que juridique. En suivant ce raisonnement, l’avocat général consacre une forme de « constitutionnalisation » du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Or il est naturel que l’Union soit jalouse de sa constitution, comme les États membres le sont de la leur. Mais cela conduit à oublier que le droit de l’Union a lui-même une nature conventionnelle. Comment justifier la supériorité du droit européen sur la constitution des États membres si le droit européen se refuse, de son côté, à reconnaître la supériorité de ses propres engagements internationaux ?

En somme, il y a un vrai danger pour la Cour de justice à suivre l’avocat général dans ce raisonnement. Si c’est le cas, l’arrêt Komstroy ira bien plus loin que l’arrêt Achmea. À suivre !

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 SYMBOLE GRIS