L’article L. 290-1 du code de la construction et de l’habitation, qui soumet à peine de nullité la conclusion d’une promesse de vente d’une validité supérieure à dix-huit mois à la forme de l’acte authentique, édicte une règle d’intérêt privé. Dès lors, la nullité ne peut être invoquée que par le promettant, seul protégé par la règle, et non le bénéficiaire.
L’article L. 290-1 du code de la construction et de l’habitation, qui soumet à peine de nullité la conclusion d’une promesse de vente d’une validité supérieure à dix-huit mois à la forme de l’acte authentique, édicte une règle d’intérêt privé. Dès lors, la nullité ne peut être invoquée que par le promettant, seul protégé par la règle, et non le bénéficiaire.
Défaut faute de comparaître et défaut faute d’accomplir les actes
Maîtresses dans la conduite de l’instance, les parties n’en sont pas moins tenues par les charges qui leur incombent. En effet, il leur appartient d’accomplir les actes de la procédure dans les formes et délais requis (C. pr. civ., art. 2). En pratique, l’une des parties peut manquer à ce devoir de diligence. Parmi les manquements possibles, il en est un que le code de procédure nomme « défaut de comparution » (C. pr. civ., art. 467-469). En réalité, ce manquement recouvre deux réalités bien distinctes. La première consiste en un défaut de comparution stricto sensu : sans motif légitime, une partie ne comparaît pas (C. pr. civ., art. 468, 472). La seconde consiste en un simple défaut d’accomplissement : une partie comparaît, mais omet de réaliser un acte de la procédure dans le délai requis (C. pr. civ., art. 469). Distinctes, ces violations de la légalité procédurale n’en sont pas moins susceptibles d’être sanctionnées de la même façon par la caducité de la citation (sur cette sanction et les alternatives possibles, J.-Cl. pr. civ., fasc. 800-30, par N. Fricero, nos 28 s. ; Rép. pr. civ., v° Caducité, par P. Callé, nos 11 s). Dans l’hypothèse où cette sanction est prononcée à l’égard d’un demandeur n’ayant pas comparu pour un motif légitime, l’alinéa 2 de l’article 468 du code de procédure civile lui permet de demander que soit rapportée la déclaration de caducité. Mais cette précaution prévue par le Code à propos du défaut faute de comparaître, peut-elle être étendue au défaut faute d’accomplir ? C’est à cette question que répond l’arrêt commenté, offrant par la même occasion un rare exemple d’un « recours restauré ».
Ce qui est contradictoire ne peut faire l’objet d’un recours en rétractation
En l’espèce, un salarié licencié par sa société saisit un conseil de prud’hommes afin de contester son licenciement. La citation est déclarée caduque par la juridiction sur le fondement de l’article 469 du code de procédure civile. Le salarié ayant sollicité que ce jugement soit rapporté, le conseil de prud’hommes a, par un second jugement, dit que la notification du jugement visait l’article 468 du code de procédure civile et renvoyé l’affaire à une audience ultérieure afin qu’elle soit jugée. Dénonçant une forme de resaisine d’une action dont la juridiction s’était pourtant dessaisie, son employeur forme un « appel-nullité » contre le second jugement.
Ici, un bref rappel s’impose. Pour obtenir la nullité d’un jugement, le demandeur doit veiller à emprunter les voies de recours prévues par la loi (« voies de nullité n’ont lieu contre les jugements » ; C. pr. civ., art. 460). Or il est des dispositions qui limitent le droit de former un recours, en le différant ou même en le supprimant. En ces cas, les voies à emprunter se trouvent donc fermées privant le justiciable de la possibilité de dénoncer l’irrégularité du jugement. Soucieuse de préserver le droit fondamental à un recours de nature juridictionnelle, la Cour de cassation n’hésite pas à rétablir, sous réserve de la réunion de strictes conditions, une voie de recours dénommé recours-nullité (plus justement qualifié de « recours restauré » par la doctrine, en ce sens P. Cagnoli, Essai d’analyse processuel du droit des entreprises en difficulté, préf. T. Le Bars, LGDJ, coll. « Bibliothèque de droit privé », t. 368, 2002, nos 476 s. ; adde, Rép. pr. civ., v° Appel, par F. Ferrand, n° 376). Parmi ces conditions, il en est une difficile à démontrer : l’existence d’un excès de pouvoir affectant la décision non susceptible de recours.
Dans l’arrêt commenté, les juges du fond ont précisément déclaré irrecevable un appel-nullité en ce que la preuve d’un tel vice grave n’était pas rapportée. Faisant grief à l’arrêt, la société a formé un pourvoi en cassation. Elle reproche aux juges du fond d’avoir, sur le fondement de l’article 17 du code de procédure civile, accepté de rapporter la déclaration de caducité de la citation pour défaut faute d’accomplissement. Or le jugement sanctionnant le demandeur pour son manque de diligence était pourtant contradictoire. Ainsi, en se ressaisissant après s’être déclaré définitivement dessaisi, sans nouvelle assignation et sans autorisation expresse de la loi, le conseil de prud’hommes a excédé ses pouvoirs. Partant, la cour d’appel a commis un excès de pouvoir négatif en ne sanctionnant pas un tel excès.
L’argument convainc la Cour de cassation. Au visa des articles 17, 407 et 469 du code de procédure civile, ensemble les principes régissant l’excès de pouvoir, elle affirme que le pouvoir accordé au juge, en cas d’erreur, de rétracter sa décision prononçant la caducité d’une citation lui est seulement reconnu lorsque cette décision a été prise à l’insu du demandeur. Dit autrement, ce qui est contradictoire ne peut faire l’objet d’un recours en rétractation ! Tel est le cas du jugement de caducité qui sanctionne le demandeur s’étant abstenu, après avoir comparu, d’accomplir les actes de la procédure dans les délais requis. En rapportant sa première décision de caducité sur le fondement de l’article 469, le conseil de prud’hommes a donc commis un excès de pouvoir qui justifie de restaurer un recours pour y mettre fin. Cette solution apparaît justifiée, tant au regard de la qualification d’excès de pouvoir que de son refus d’offrir au demandeur non diligent un recours en rétractation en cas de défaut faute d’accomplir.
L’existence d’un vice grave affectant la décision
Avec d’autres, il faut bien reconnaître que la détermination des contours précis de la notion d’excès de pouvoir « soulève des difficultés insurmontables » (J.-Cl. pr. civ., fasc. 1000-25, par N. Fricero, spéc. n° 23). Il existe toutefois quelques certitudes. La violation des règles de procédure ne constitue pas en principe des hypothèses d’excès de pouvoir (Cass., ch. mixte, 28 janv. 2005, n° 02-19.153, D. 2005. 386, obs. V. Avena-Robardet ; ibid. 2006. 545, obs. P. Julien et N. Fricero ; AJDI 2005. 414 ; Procédures 2005. Comm. 87, obs. R. Perrot ; Dr. et patr. 2006. 103, obs. S. Amrani-Mekki). À l’inverse, en est un le juge qui s’arroge un pouvoir dont il est privé par la loi (Rép. pr. civ., v° Appel, par F. Ferrand, nos 384 s.). Or n’est-ce pas ce que fait le conseil de prud’hommes en rapportant une déclaration de caducité pour défaut faute d’accomplissement, alors que le code de procédure réserve ce recours en rétractation au seul défaut faute de comparaître ? La Cour de cassation répond positivement à cette question. Finalement, ce n’est pas tant la qualification d’excès de pouvoir qui interroge ici, mais plutôt le choix de la Cour de cassation de réserver ce recours au seul défaut faute de comparaître. À y regarder de plus près, ce choix se justifie pleinement.
Deux types de défauts, deux principes en jeu
Ces deux manquements mettent en jeu des principes différents (C. Chainais, F. Ferrand, L. Mayer et F. Ferrand, Procédure civile. Droit commun et spécial du procès civil, MARD et arbitrage, 35e éd., Dalloz, 2020, n° 459, p. 375-376). Tandis que le défaut faute de comparaître menace le principe de la contradiction, le défaut faute d’accomplir un acte concerne le seul principe d’initiative et la crainte de voir l’instance paralysée par une partie malintentionnée. En toute logique, ces deux manquements n’appellent pas les mêmes précautions. Il est proprement inconcevable qu’un demandeur qui n’a pu comparaître en raison d’un motif légitime ne dispose pas d’un moyen de s’élever contre la caducité de la citation qui peut en résulter. C’est pour cela que l’article 468, alinéa 2, prévoit un remède à la sanction injustement prononcée, remède qui permet précisément de rétablir le contradictoire jusque là menacé. À l’inverse, après avoir comparu, le demandeur ayant omis d’accomplir un acte de procédure dans le délai requis n’a aucune raison de disposer d’un recours en rétractation contre la déclaration de caducité qu’il vient de subir. En effet, en ce qu’elle n’a pas été prise à son insu, elle constitue une décision pleinement contradictoire. Elle pourra toujours être rapportée par le juge qui l’a rendue, mais il faudra démontrer une erreur au sens de l’article 407 du code de procédure civile.
Au mois de mai 2013, une personne a subi une intervention chirurgicale à visée exclusivement esthétique, à savoir un lifting cervico-facial. Malheureusement, à cette occasion, elle a développé une infection nosocomiale très virulente dont elle est décédée le 26 mai 2013.
Le 13 juin 2013, les proches de la victime ont assigné en référé la clinique, les médecins, ainsi que la caisse primaire d’assurance maladie aux fins de voir organiser une expertise et d’obtenir le paiement d’une indemnité provisionnelle. Par ordonnance du 17 juin 2013, le juge des référés a fait droit à la demande d’expertise médicale, mais a rejeté la demande de provision. Les proches de la victime ont ensuite assigné au fond, le 20 juillet 2015, la clinique, les médecins, l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) et la CPAM en indemnisation de leurs préjudices.
Suivant jugement du 9 juin 2016, le tribunal de grande instance de Nîmes a notamment rejeté les demandes indemnitaires formulées à l’encontre de la clinique et condamné l’ONIAM au paiement de diverses sommes en réparation des préjudices subis.
La cour d’appel de Nîmes, par arrêt du 25 octobre 2018, a infirmé la décision de première instance et a jugé que l’indemnisation des préjudices subis était à la charge de la clinique.
Cette dernière a formé un pourvoi principal en cassation fondé sur deux moyens. Elle faisait valoir, d’une part, que la cour d’appel aurait violé l’article 70, II, de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014. Selon elle, l’article L. 1142-3-1, I, du code de la santé publique, excluant le dispositif de réparation des préjudices subis par les patients au titre de la solidarité nationale pour les demandes d’indemnisation de dommages imputables à des actes dépourvus de finalité thérapeutique, n’était pas applicable dès lors que la première demande d’indemnisation des proches de la victime avait été formulée antérieurement à la date d’entrée en vigueur du texte. D’autre part, la clinique soutenait que l’ONIAM n’avait formé aucune demande à son encontre de sorte que la cour d’appel avait statué extra petita, violant ainsi notamment l’article 954 du code de procédure civile.
Deux questions sont ainsi posées à la Cour de cassation.
Les proches de la victime avaient-il formulé, par la saisine du juge des référés, une demande d’indemnisation antérieure au 31 décembre 2014, permettant ainsi d’exclure l’application de l’article L. 1142-3-1, I, du code de la santé publique ?
En l’absence de demande formée par l’ONIAM à l’encontre de la clinique, les juges du fond pouvaient-ils condamner cette dernière au paiement des dommages et intérêts en réparation des préjudices subis par la victime et ses proches ?
Finalement, la question de la charge de l’indemnisation des dommages résultant d’une infection nosocomiale a soulevé des interrogations de nature procédurale relatives, d’une part, à l’application dans le temps de l’article L. 1142-3-1, I, du code de la santé publique et, d’autre part, à l’étendue de la saisine de la cour d’appel.
L’application dans le temps de l’article L. 1142-3-1, I, du code de la santé publique. L’article 70 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 a introduit au sein de l’article L. 1142-3-1 du code de la santé publique une limitation au dispositif de réparation des préjudices subis par les patients au titre de la solidarité nationale. Sont ainsi exclues du champ d’application de ce dispositif, les « demandes d’indemnisation de dommages imputables à des actes dépourvus de finalité préventive, diagnostique, thérapeutique ou reconstructrice, y compris dans leur phase préparatoire ou de suivi ». Cette restriction vise principalement à évincer du champ de l’indemnisation par la solidarité nationale les « dommages, même graves, consécutifs à des actes relevant de pure convenance personnelle » (M. Olivier Véran, député, Rapport fait au nom de la Commission des affaires sociales sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, t. II, « Assurance maladie », 16 oct. 2014, spéc. art. 50 du projet de loi). Ainsi, l’indemnisation des dommages résultant d’une infection nosocomiale contractée à l’occasion d’un acte de chirurgie à visée exclusivement esthétique ne peut plus relever de la solidarité nationale.
Toutefois, l’article 70, II, de la loi du 22 décembre 2014 prévoit que les dispositions de l’article L. 1142-3-1 ne sont applicables qu’aux demandes d’indemnisation postérieures au 31 décembre 2014. Il s’agissait donc, en l’espèce, de fixer la date de la demande d’indemnisation afin de déterminer le régime correspondant. En effet, pour les demandes antérieures au 31 décembre 2014, seul était applicable l’article L. 1142-1 du code de la santé publique, lequel prévoit une indemnisation par la solidarité nationale lorsque les dommages consécutifs à une infection nosocomiale sont d’une certaine gravité. En l’espèce, la patiente étant décédée, l’ONIAM aurait été tenu à réparation.
Les proches de la victime avaient formulé une demande d’indemnisation au fond en juillet 2015, mais ils avaient également saisi, au mois de juin 2013, le juge des référés aux fins notamment d’obtenir une indemnité provisionnelle. Cette saisine du juge des référés permettait-elle de considérer que la demande d’indemnisation était antérieure au 31 décembre 2014 ?
La Cour de cassation, après avoir rappelé l’évolution du régime d’indemnisation des dommages consécutifs à des actes de chirurgie esthétique (citant, en ce sens, une décision antérieure à la loi du 22 décembre 2014 qui avait ouvert droit à une indemnisation au titre de la solidarité nationale), répond de la manière suivante : « La cour d’appel en a déduit, à bon droit, qu’étaient applicables les dispositions de l’article L. 1142-3-1 du code de la santé publique, de sorte que l’indemnisation des dommages subis […] n’incombait pas à l’ONIAM. » Reprenant les motifs des juges d’appel, elle énonce que le juge des référés, en rejetant par ordonnance du 17 juillet 2013 la demande de provision, a été vidé de sa saisine et que la demande d’indemnisation au fond a été formée postérieurement au 31 décembre 2014. La solution n’est pas complètement nouvelle puisque le Tribunal des conflits avait déjà eu l’occasion de statuer en ce sens, retenant que le juge judiciaire, qui s’était prononcé par ordonnance de référé sur une demande de provision, n’avait été saisi d’aucune demande d’indemnisation (T. confl. 28 févr. 2011, n° 3750, M.-C. de Montecler, Juge compétent pour les dommages causés par les transfusions sanguines, Dalloz actualité, 16 mars 2011 ; Lebon ; AJDA 2011. 482 ). La solution est logique dans la mesure où l’allocation de dommages et intérêts impose de statuer au fond, l’attribution d’une provision par le juge des référés pouvant d’ailleurs toujours être remise en cause par la décision du juge statuant au principal (v. not., en ce sens, Y. Strickler, Le juge des référés, juge du provisoire, thèse, Université Robert-Schuman de Strasbourg, 1993, spéc. p. 531 s.).
L’étendue de la saisine de la cour d’appel. La Cour de cassation, au visa de l’article 954 du code de procédure civile, casse partiellement l’arrêt rendu par la cour d’appel de Nîmes aux motifs que cette dernière « n’était saisie d’aucune demande tendant à mettre à la charge de la clinique l’indemnisation des préjudices subis par les consorts […] ». Les conclusions d’appel des proches de la victime avaient été déclarées irrecevables par le conseiller de la mise en état, de sorte que l’ONIAM et la clinique étaient les seules parties concluantes. Or l’ONIAM, appelante, avait demandé, à titre principal, qu’il soit jugé que l’article L. 1142-1-1 du code de la santé publique n’était pas applicable et qu’il soit décidé, en conséquence, sa mise hors de cause. La clinique, quant à elle, avait demandé que le jugement entrepris soit confirmé en ce qu’il avait mis à la charge de l’ONIAM l’indemnisation des dommages subis par la victime et ses proches. Les parties s’opposaient donc sur le régime d’indemnisation applicable. La cour d’appel, suivie par la Cour de cassation, conclut, comme cela vient d’être exposé, à l’exclusion de l’ONIAM de la prise en charge de l’indemnisation au regard de l’application dans le temps de l’article L. 1142-3-1 du code de la santé publique. Pour autant, la mise hors de cause de l’ONIAM permettait-elle aux juges du fond de statuer consécutivement sur la condamnation de la clinique à la prise en charge de l’indemnisation des victimes ? La Cour de cassation répond par la négative : en l’absence de demande formulée en ce sens par l’ONIAM, les juges du fond ont excédé le champ de leur saisine. La règle selon laquelle « la partie qui conclut à l’infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu’elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance » est appliquée strictement par les juges de cassation. Il était pourtant possible de s’interroger sur l’étendue de la saisine de la cour d’appel. D’une part, l’appel formulé par l’ONIAM était un appel général auquel s’appliquait l’article 562 du code de procédure civile dans sa version antérieure au décret du 6 mai 2017. L’effet dévolutif s’opérait donc pleinement. D’autre part, il était aussi possible de considérer que, quand bien même la déclaration d’appel n’aurait pas critiqué l’ensemble des chefs du jugement, il existait un lien de dépendance suffisant entre la question de la charge de l’indemnisation et celle de la condamnation à réparation du préjudice pour considérer que les juges du fond n’avaient donc pas outrepassé le champ de leur saisine. Ce n’est pourtant pas la solution retenue par la Cour de cassation qui, il est vrai, ne se fonde pas sur l’article 562 du code de procédure civile, mais sur l’article 954 de ce même code. L’étendue de la saisine de la cour d’appel doit donc bien se déterminer au regard de ces deux dispositions. Lorsque l’effet dévolutif est total, les juges d’appel vont juger, à nouveau, en droit et en fait l’entier litige, en considération toutefois des prétentions et moyens que les parties ont formulés au sein des leurs conclusions. Ils ne peuvent se prononcer en l’absence de demande explicitement formulée. En l’espèce, l’ONIAM sollicitait, à titre principal, la réformation totale du jugement sans pour autant demander une quelconque condamnation de la clinique au paiement de dommages et intérêts, se contentant de demander sa mise hors de cause. L’application stricte de l’article 954 du code de procédure civile peut sembler sévère, mais n’est pas dépourvue de cohérence, notamment dans l’hypothèse où il y aurait plus de deux responsables potentiels. En effet, la mise hors de cause de l’un ne suffirait pas à permettre la condamnation d’un autre au bénéfice d’un troisième en l’absence de demande formulée en ce sens. De plus, cette solution s’inscrit également pleinement dans l’application rigoureuse des dispositions relatives à la structuration des conclusions (v. déjà, à ce sujet, antérieurement au décret du 6 mai 2017, C. Bléry, Article 954 du code de procédure civile : questions et réponses, Gaz. Pal. 2014. 29) et notamment de l’alinéa de l’article 954 du code de procédure civile qui prévoit, depuis le décret du 9 décembre 2009, que « la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif » (v. par ex. Civ. 2e, 27 févr. 2014, n° 13-11.957, Dalloz actualité, 13 mars 2014, obs. V. Avena-Robardet ; Procédures 2014. 139. comm. R. Perrot). En l’espèce, aucune demande de condamnation de la clinique à réparer les préjudices subis n’était formulée par les conclusions d’appel de l’ONIAM, que ce soit au sein des moyens ou du dispositif. La cour d’appel ne pouvait donc, sans excéder ses pouvoirs, statuer au fond dès lors qu’elle n’était saisie d’aucune demande de condamnation à réparation de la clinique. L’étendue de la saisine des juges d’appel questionne ainsi encore et toujours, même pour les litiges auxquels s’appliquent les textes antérieurs à la réforme de 2017 (depuis la réforme de 2017, l’étendue de la saisine des juges d’appel et de l’effet dévolutif interroge également, v., pour un exemple récent, Civ. 2e, 30 janv. 2020, n° 18-22.528, Dalloz actualité, 17 févr. 2020, obs. R. Laffly ; D. 2020. 288 ; ibid. 576, obs. N. Fricero ; ibid. 1065, chron. N. Touati, C. Bohnert, S. Lemoine, E. de Leiris et N. Palle ; D. avocats 2020. 252, étude M. Bencimon ; RTD civ. 2020. 448, obs. P. Théry ; ibid. 458, obs. N. Cayrol ; JCP 2020. 336, obs. P. Gerbay ; Procédures 2010, n° 55, obs. H. Croze).
L’application des textes relatifs à l’indemnisation de préjudices consécutifs à une infection nosocomiale a été l’occasion, pour la première chambre civile de la Cour de cassation, de répondre, dans un arrêt du 9 décembre 2020, à des questions portant à la fois sur l’application dans le temps de l’article L. 1142-3-1, I, du code de la santé publique et sur l’étendue de la saisine des juges d’appel.
Le jugement de caducité fondé sur l’article 469 du code de procédure civile, qui doit intervenir après un débat contradictoire, ne peut faire l’objet d’un recours en rétractation. La juridiction qui l’admet commet un excès de pouvoir.
M. G…H…, de nationalité française, et Mme R…, de nationalité russe et américaine, se sont mariés à Paris en 1991 sous le régime de la séparation de biens, par contrat reçu par un notaire en France. Ils se sont ensuite installés aux États-Unis où sont nés leurs deux enfants.
En novembre 2001, l’épouse a saisi la Supreme Court de l’État de New York d’une requête en divorce. Par decision and order du 28 juin 2002, le juge Lobis a rejeté la demande de M. G…H… tendant à voir dire le contrat de mariage français valide et exécutoire, et a écarté l’application de ce contrat. Le juge Goodman a ensuite rendu une trial decision le 3 octobre 2003, puis un judgement of divorce le 9 janvier 2004, lequel a prononcé le divorce aux torts du mari, confié la garde des enfants mineurs à la mère avec un droit de visite et d’hébergement au profit du père, en précisant que la mère devrait consulter le père sur toutes les décisions significatives concernant les enfants mais qu’elle aurait le pouvoir de décision finale, fixé les modalités de contribution du père à l’entretien et l’éducation des enfants, alloué à l’épouse une pension alimentaire mensuelle pendant sept ans et statué sur la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux. En mai 2005, la cour d’appel de l’État de New York a partiellement réformé la décision sur la liquidation des intérêts patrimoniaux, en disant notamment que l’intégralité du solde du produit de la vente de l’appartement new-yorkais devait revenir à M. G…H….
L’ex-épouse a saisi le tribunal de grande instance de Paris d’une demande d’exequatur des décisions du 3 octobre 2003 et du...
Un jugement américain ne viole pas l’ordre public international, ni en ce qu’il liquide un régime matrimonial sans égard au contrat de mariage reçu en France ni en ce qu’il accorde à la mère la possibilité de prendre seule les décisions relatives à l’autorité parentale.
Conventions action cœur de ville, contrats de ruralité, pactes État-métropoles, contrat local de sécurité et de prévention de la délinquance, etc. Depuis plusieurs années, les contrats entre l’État et les collectivités territoriales se multiplient. Ils répondent à un besoin et peuvent notamment constituer un outil précieux de la différenciation territoriale, estime Jean-René Cazeneuve, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l’Assemblée.
Dans un référé, publié le 19 janvier 2021, la formation interjuridictions de la Cour des comptes (la Cour des comptes et huit chambres régionales des comptes) a analysé la territorialisation des politiques du logement, depuis la mise en œuvre de la loi Libertés et responsabilités locales de 2004, alors que le gouvernement envisage de légiférer à nouveau sur ce sujet.
Le loyer d’un bail d‘habitation meublé soumis à l’encadrement « expérimental » mis en place par la loi ELAN ne peut être supérieur au loyer de référence majoré en l’absence de mention afférente à l’application d’un complément de loyer.
La Cour de cassation paraît confirmer l’abandon de la notion d’ordre public de proximité en matière de loi étrangère plus restrictive quant à l’établissement de la filiation.
Après deux explosions liées à des tuyères défectueuses, une fonderie castelbriantaise souhaite être indemnisée. C’est l’occasion pour la Cour de cassation d’opérer d’utiles rappels en droit des contrats sous le prisme du droit des assurances.
La Cour de cassation considère que sont réparables, au sens des articles 1245 et suivants du code civil, les dommages organoleptiques causés à un vin à la suite de sa contamination par des produits défectueux.
Une mission flash de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation au sein de l’Assemblée nationale plaide pour un renforcement du pouvoir réglementaire local dans le futur projet de loi 4D.
Il n’appartient aux juges de fixer le sens de leur décision que lorsqu’elle donne lieu à des lectures différentes, tel n’est pas le cas de l’expression « de tous occupants du chef » du locataire.
Il n’appartient aux juges de fixer le sens de leur décision que lorsqu’elle donne lieu à des lectures différentes, tel n’est pas le cas de l’expression « de tous occupants du chef » du locataire.
Au visa de l’article 388 du code de procédure civile, la Cour de cassation rappelle qu’à peine d’irrecevabilité, la péremption d’instance doit être demandée ou opposée avant tout autre moyen, et ce, peu important qu’une telle demande avait déjà été présentée en première instance.
Les membres de la famille des réfugiés et étrangers installés régulièrement en France doivent pouvoir venir les y rejoindre en dépit de la persistance de la pandémie de covid-19.
Le salarié qui relate des faits de discrimination ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu’il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.
On sait que la législation relative aux clauses abusives est (trop ?) protectrice des intérêts du consommateur, mais elle ne saurait dispenser ce dernier de faire preuve de bonne foi, sous peine d’être privé de son bénéfice (rappr. C. consom., art. L. 711-1, al. 1er : « Le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement est ouvert aux personnes physiques de bonne foi »). Tel est l’enseignement que l’on peut tirer de l’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 20 janvier 2021. En l’espèce, suivant offre acceptée le 30 novembre 2011, une banque a consenti un prêt immobilier à deux emprunteurs. Les conditions générales du contrat prévoyaient à l’article 9-1 une exigibilité du prêt par anticipation, sans que le prêteur ait à remplir une formalité judiciaire quelconque, en cas de fourniture de renseignements inexacts sur la situation de l’emprunteur, dès lors que ces renseignements étaient nécessaires à la prise de décision du prêteur. Soutenant que les emprunteurs avaient produit de faux relevés de compte à l’appui de leur demande de financement, la banque s’est prévalue de l’article précité pour prononcer la déchéance du terme, puis les a assignés en paiement. La cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 3 août 2018, a accueilli cette demande, après avoir exclu le caractère abusif de l’article 9.1 des conditions générales du contrat. Les emprunteurs se sont donc pourvu en cassation, arguant notamment de l’ancien article R. 132-2, 4° (devenu R. 212-2, 4°, nouv.) du code de la consommation, présumant simplement abusives les clauses ayant pour objet ou pour effet de « reconnaître au professionnel la faculté de résilier le contrat sans préavis d’une durée raisonnable » (cette présomption est toutefois écartée pour certaines opérations en vertu de l’article R. 212-3 du code de la consommation). Mais la Cour de cassation ne se laissa pas convaincre par l’argument, considérant que « l’arrêt relève que la stipulation critiquée limite la faculté de prononcer l’exigibilité anticipée du prêt aux seuls cas de fourniture de renseignements inexacts portant sur des éléments déterminants du consentement du prêteur dans l’octroi du prêt et ne prive en rien l’emprunteur de recourir à un juge pour contester l’application de la clause à son égard. Il ajoute qu’elle sanctionne la méconnaissance de l’obligation de contracter de bonne foi au moment de la souscription du prêt » (pt 4). Elle en conclut que, « de ces constatations et énonciations, la cour d’appel, qui a implicitement mais nécessairement retenu que la résiliation prononcée, ne dérogeait pas aux règles de droit commun et que l’emprunteur pouvait remédier à ses effets en recourant au juge, a déduit, à bon droit, que, nonobstant son application en l’absence de préavis et de défaillance dans le remboursement du prêt, la clause litigieuse, dépourvue d’ambiguïté et donnant au prêteur la possibilité, sous certaines conditions, de résilier le contrat non souscrit de bonne foi, ne créait pas, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties » (pt 5).
À première vue, la solution peut paraître contraire à l’article R. 212-2, 4°, du code de la consommation, dont elle heurte à l’évidence la lettre. En effet, comme susdit, ce texte fustige la possibilité pour le professionnel de résilier le contrat sans préavis d’une durée raisonnable (pour une critique de cette référence au caractère raisonnable de la durée du préavis, v. N. Sauphanor-Brouillaud, C. Aubert de Vincelles, G. Brunaux et L. Usunier et J. Ghestin (dir.), Les contrats de consommation. Règles communes, 2e éd., 2018, LGDJ, n° 946 ; v. égal. C.-L. Péglion-Zika, La notion de clause abusive. Étude de droit de la consommation, préf. L. Leveneur, LGDJ, coll. « Bibliothèque de droit privé », t. 585, 2018, n° 444). A fortiori, l’on doit donc considérer que l’absence pure et simple de préavis tombe sous le coup de cette disposition. Toutefois, l’existence d’un motif légitime peut en réalité justifier la stipulation d’une clause a priori sujette à caution parce que consacrant au profit du professionnel une prérogative unilatérale. D’abord, l’annexe à la directive du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, contenant une liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être déclarées abusives, permet d’étayer cette considération, tout particulièrement son point g), qui vise les clauses ayant pour objet ou pour effet « d’autoriser le professionnel à mettre fin sans un préavis raisonnable à un contrat à durée indéterminée, sauf en cas de motif grave ». Ensuite, l’étude des recommandations de la Commission des clauses abusives ainsi que de la jurisprudence révèle également que l’existence d’un tel motif peut justifier ce type de clause. Comme l’affirme à juste titre un auteur, citant de nombreuses recommandations et décisions en ce sens, « le caractère injustifié ou justifié de la prérogative unilatérale conférée au professionnel influe sur le caractère abusif ou non de la clause qui l’organise. En effet, dès lors que la stipulation de cette prérogative s’explique par un motif légitime, elle perd ses caractères arbitraire et abusif. Cela ressort, encore une fois, de la pratique […]. L’exemple le plus probant est sans doute celui de la clause de résiliation unilatérale par le professionnel. Elle est abusive dès lors qu’elle peut être invoquée, même sans motif légitime » (C.-L. Péglion-Zika, op. cit., nos 452 et 453).
En l’occurrence, il est évident que la fourniture de renseignements inexacts portant sur des éléments déterminants du consentement du prêteur dans l’octroi du prêt constitue un motif légitime permettant de justifier la clause de résiliation sans préavis. En d’autres termes, l’absence de bonne foi du consommateur permet de légitimer la faculté de résiliation sans préavis stipulée au profit du prêteur.
Certes, les juges du fond avaient jugé la clause litigieuse non abusive sans prendre la peine de constater que la banque avait renversé la présomption posée par l’article R. 212-2 du code de la consommation, alors que ce texte impose précisément au professionnel de « rapporter la preuve contraire » (v. égal. C. consom., art. L. 212-2, al. 5, seconde partie : « en cas de litige concernant un contrat comportant une telle clause, le professionnel doit apporter la preuve du caractère non abusif de la clause litigieuse » ; sur la notion de clause grise, v. J.-D. Pellier, Droit de la consommation, 3e éd., 2021, Dalloz, coll. « Cours », n° 103). Mais il ne faut pas oublier que l’article R. 632-1 du code de la consommation prévoit, en son alinéa 2, que le juge « écarte d’office, après avoir recueilli les observations des parties, l’application d’une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat » (sur ce relevé d’office, v. J.-D. Pellier, op. cit., nos 112 et 327). Il est possible de considérer, a contrario, nous semble-t-il, que, si les éléments du débat font apparaître que la clause litigieuse ne présente pas de caractère abusif, alors le juge ne doit pas l’écarter. Le professionnel peut donc également être avantagé par ce texte, principalement conçu en faveur du consommateur.
On définit traditionnellement l’astreinte comme une mesure comminatoire de nature judiciaire qui permet d’exercer une pression financière sur le débiteur afin qu’il procède à l’exécution de la décision de justice exécutoire prononcée à son encontre et, pour ce faire, qu’il respecte l’obligation constatée dans ce titre. À cet égard, on la présente comme une mesure de contrainte sur la personne ou une « voie indirecte et exceptionnelle d’exécution » (CEDH 25 janv. 2000, Ignaccolo-Zenide c. Roumanie, req. n° 31679/96, § 111, RTD civ. 2001. 451, obs. J.-P. Marguénaud ). Elle se distingue en cela des saisies (mobilières ou immobilière) qui s’analysent en des mesures in rem.
La question se pose de savoir ce qu’il en est lorsque l’obligation principale, mise à la charge du débiteur dans la décision de condamnation, est finalement exécutée par un tiers. La présente affaire donne l’occasion à la Cour de cassation d’y apporter une importante réponse.
À la suite de désordres apparus dans des locaux d’habitation, un litige survient entre des locataires et leur bailleur. Les premiers obtiennent d’une cour d’appel la condamnation du second à confier, au bureau d’études « structure » de son choix, différentes missions (à savoir, notamment, procéder à la recherche de la descente de charges de l’immeuble entier, en recherchant les poussées latérales sur les murs porteurs). Il s’agit d’une condamnation sous astreinte, laquelle est fixée à 100 € par jour de retard passé un délai de deux mois à dater de l’arrêt, soit à compter du 21 août 2016. Saisie par les locataires, cette cour d’appel a par la suite décidé de liquider l’astreinte à une certaine somme pour la période s’achevant le 22 octobre 2017. En revanche, elle les a déboutés concernant leurs autres demandes tendant à prendre en considération la période subséquente à cette date pour établir le montant de l’astreinte due par le bailleur. Afin d’étayer la solution ainsi retenue, les conseillers d’appel tirent argument de la circonstance que, le 23 octobre 2017, a été conclu un contrat entre un bureau d’études « structure » et le syndic de copropriété. Les locataires forment alors un pourvoi, en faisant notamment valoir que le montant de l’astreinte aurait dû être liquidé au regard du comportement du seul bailleur ; les démarches de la copropriété dont le bailleur fait partie ne devant pas, selon eux, être prises en considération.
Le pourvoi est cependant rejeté. Sur la base des articles L. 131-1 et L. 131-4 du code des procédures civiles d’exécution – dont la violation était excipée par les auteurs du pourvoi –, les hauts magistrats affirment en effet que, « dès l’instant où l’obligation assortie d’une astreinte a été exécutée, fût-ce par un tiers, l’astreinte ne peut plus donner lieu à liquidation pour la période de temps postérieure à cette exécution, sauf si le créancier justifie d’un intérêt légitime à ce qu’elle soit exécutée par le débiteur lui-même » (arrêt, pt 6). En somme, pour établir le montant de l’astreinte due, il a été tenu compte des démarches du tiers (le syndic de la copropriété de l’immeuble) venant pallier le manque de diligence du bailleur.
Cette solution – qui, en l’absence de précision contraire, paraît concerner l’astreinte provisoire, comme l’astreinte définitive – invite à brièvement faire le point sur les prérogatives respectives du créancier, du débiteur et des tiers.
En premier lieu, il convient de noter que si, dans cette affaire, les locataires n’ont pas obtenu gain de cause, les créanciers ne sont pas totalement dépourvus pour autant par le principe ici consacré. Ainsi que l’a indiqué la Cour de cassation, il leur est possible d’alléguer « un intérêt légitime » à ce que l’obligation litigieuse soit exécutée par le débiteur lui-même (arrêt, pt 6). On peut imaginer qu’il pourrait en être ainsi lorsque la bonne exécution d’une obligation – notamment de faire – nécessite un savoir-faire, une aptitude ou des connaissances spécifiques que seul le débiteur détient. Il faudra néanmoins être attentif à l’interprétation et au contrôle que feront les juridictions de cette notion d’« intérêt légitime ». Des clarifications seront bienvenues à l’égard de la façon et du moment où cet intérêt peut être mis en avant. À ce sujet, il faut naturellement éviter que les créanciers fassent un usage dilatoire de cette prérogative.
En deuxième lieu, la prise en compte des diligences du tiers n’est pas subordonnée à la démonstration, par le débiteur, de l’existence d’une « cause étrangère » ou de « difficultés sérieuses rencontrées dans l’exécution » (arrêt, pt 7). Pour rappel, conformément à la lettre de l’article L. 131-4 du code des procédures civiles d’exécution, lors de la phase de la liquidation, ces événements permettent respectivement de supprimer – en tout ou partie – l’astreinte (provisoire ou définitive) ou de minorer le montant de l’astreinte (provisoire). Cependant, dans les hypothèses visées par cet article, on considère, dans un premier temps, que l’astreinte est potentiellement due (il s’agit d’un « droit virtuel » pour le créancier : en ce sens, v. R. Perrot et P. Théry, Procédures civiles d’exécution, 3e éd., Dalloz, 2013, spéc. p. 92, n° 87) et, dans un second temps, que les circonstances subies par le débiteur permettent d’en diminuer le taux lors de sa liquidation ou de la supprimer partiellement ou totalement. À l’inverse, l’exécution par un tiers de l’obligation assortie d’une astreinte marque la fin de la période où l’astreinte est due. Pour le dire autrement, s’agissant de la phase postérieure à l’exécution de l’obligation constatée dans la décision de justice, l’astreinte n’a plus lieu d’être. On ne se situe donc pas sur le même plan.
En troisième lieu, la latitude reconnue aux tiers devrait être largement fonction de la nature de l’obligation à exécuter. À ce propos, on relève que, dans le présent arrêt, la Cour de cassation prend soin de préciser que non seulement le bailleur avait pris attache avec un bureau d’études « structure » et n’avait finalement pas signé la proposition d’honoraires établie par ce dernier, mais également que le syndic de copropriété de l’immeuble avait contracté avec ce même bureau à raison du même devis (arrêt, pt 7). Pour l’heure, il est toutefois bien délicat d’en tirer des conclusions définitives et générales sur la prise en compte des diligences des tiers.
Nonobstant son application en l’absence de préavis et de défaillance dans le remboursement du prêt, la clause litigieuse, dépourvue d’ambiguïté et donnant au prêteur la possibilité, sous certaines conditions, de résilier le contrat non souscrit de bonne foi, ne crée pas, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.
Dès l’instant où l’obligation assortie d’une astreinte a été exécutée, fût-ce par un tiers, l’astreinte ne peut plus donner lieu à liquidation pour la période de temps postérieure à cette exécution, sauf si le créancier justifie d’un intérêt légitime à ce qu’elle soit exécutée par le débiteur lui-même.
Dès l’instant où l’obligation assortie d’une astreinte a été exécutée, fût-ce par un tiers, l’astreinte ne peut plus donner lieu à liquidation pour la période de temps postérieure à cette exécution, sauf si le créancier justifie d’un intérêt légitime à ce qu’elle soit exécutée par le débiteur lui-même.
Nonobstant son application en l’absence de préavis et de défaillance dans le remboursement du prêt, la clause litigieuse, dépourvue d’ambiguïté et donnant au prêteur la possibilité, sous certaines conditions, de résilier le contrat non souscrit de bonne foi, ne crée pas, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.
Prise en application de l’article 105 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, l’ordonnance n° 2021-45 du 20 janvier 2021 réforme la formation des élus locaux.
Le principe d’unité de la famille ne s’applique pas aux enfants des bénéficiaires de la protection subsidiaire.
La mention d’éléments en rapport avec l’activité syndicale du salarié dans la lettre de licenciement pour faute de ce dernier n’est pas en soi de nature à priver ledit licenciement de validité, dès lors qu’aucun grief de discrimination syndicale ne peut y être établi.
Les voies d’exécution ne font pas toujours bon ménage avec les procédures collectives, comme en témoigne un arrêt rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 14 janvier 2021. En l’espèce, M. X. a été déclaré coupable des faits de violence à l’encontre de Mme Y. par jugement d’un tribunal correctionnel du 26 mai 2011. Par la suite, un tribunal de commerce a ouvert, à l’encontre de l’auteur des faits, une procédure de redressement judiciaire le 21 mars 2012 et a adopté un plan de redressement le 21 novembre de la même année. Par jugement du 2 octobre 2014, un tribunal de grande instance a déclaré M. X. responsable des conséquences dommageables de l’infraction et fixé la créance de Mme Y. à certaines sommes. La commission d’indemnisation des victimes d’infraction ayant alloué à Mme Y., le 9 novembre 2016, la somme de 34 705 € à titre de dommages-intérêts, la décision a été signifiée à M. X. le 31 mars 2017 et le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI) s’est acquitté de cette somme. Puis, les 5 avril et 20 juin 2017, ce dernier, subrogé dans les droits de la victime, a fait procéder à deux saisies-attributions sur le compte de M. X., que celui-ci a contestées devant un juge de l’exécution qui, par jugement du 23 novembre 2017, a dit que l’action en contestation de la seconde saisie était irrecevable et débouté M. X. de sa demande de mainlevée de la première.
La Cour d’appel de Grenoble, dans un arrêt du 26 juin 2018, rejette les moyens tirés de l’inopposabilité à l’égard de M. X. de la créance de la victime et déboute celui-ci de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution du 20 juin 2017, au motif que le texte même de l’article 706-11 du code de procédure pénale indique bien que le FGTI est en droit d’obtenir auprès de la personne déclarée responsable du dommage le remboursement des indemnisations versées à la victime, que M. X. a bénéficié d’un plan de continuation adopté le 21 novembre 2012, soit antérieurement à la décision fixant le montant précis de l’indemnisation, que l’adoption du plan a mis fin à la période d’observation et a remis le débiteur en capacité de gérer son entreprise sous réserve des mesures imposées par ce plan, que dès lors, les créances nées après l’adoption du plan relèvent du droit commun et doivent être payées à l’échéance.
L’intéressé se pourvut donc en cassation, arguant du fait que le subrogé n’a pas plus de droits que son subrogeant au lieu et place duquel il agit et que Mme Y. n’a jamais eu de créance à son égard dans la mesure où le jugement du 2 octobre 2014, qui sert de fondement à la saisie-attribution du 20 juin 2017, ne prononce aucune condamnation à l’encontre de M. X., en redressement judiciaire à cette date. En outre, Mme Y. n’a déclaré aucune créance indemnitaire au passif de cette procédure collective, de sorte que le Fonds ne pouvait se trouver subrogé dans des droits en réalité inexistants du subrogeant.
La Cour régulatrice se laisse convaincre par l’argument. Elle considère en effet, au visa des articles L. 111-2 et L. 111-3 du code des procédures civiles d’exécution et 706-11 du code de procédure pénale, que « La décision rendue par une juridiction, qui se borne à constater une créance et à en fixer le montant dans le cadre d’une procédure collective, ne constitue pas un titre exécutoire et ne peut, dès...
Une centrale d’achat, s’approvisionnant auprès de fournisseurs pour revendre à des distributeurs indépendants, est en principe soumise au formalisme prescrit par l’article L. 441-3 du code de commerce, qui impose la conclusion d’une convention écrite, voire au formalisme additionnel prescrit par l’article L. 441-4 du même code lorsque la convention est relative à des produits de grande consommation.
L’action du bailleur devant le juge des référés en constatation de l’acquisition d’une clause résolutoire pour non-paiement de l’intégralité des loyers dus au titre du troisième trimestre 2020 se heurte à des contestations sérieuses.
Un jugement de divorce est prononcé le 21 juin 2017, signifié le 13 juillet 2017.
Le 18 août 2017 (et non « 2018 » comme indiqué dans l’arrêt de cassation), l’époux fait appel pour contester la prestation compensatoire mise à sa charge au profit de son épouse.
L’époux appelant conclut sur son appel le 18 novembre 2017, soit dans le délai de trois mois de l’article 908. Dans ses conclusions au fond, il soulève « in limine litis » la nullité de la signification du jugement.
Le 17 janvier 2018, l’intimé saisit le conseiller de la mise en état d’un incident d’irrecevabilité de l’appel pour tardiveté au regard de la date de signification du jugement.
Par ordonnance de mise en état du 6 septembre 2018, confirmée par arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence le 12 février 2019, l’appel est déclaré irrecevable.
Sur pourvoi, la Cour de cassation approuve les juges d’appel d’avoir prononcé cette irrecevabilité.
Les « conclusions spécialement adressées au conseiller de la mise en état »
Cette précision peut paraître évidente, l’article 791, et avant lui l’article 772-1, précisant que « le juge de la mise en état est saisi par des conclusions qui lui sont spécialement adressées distinctes des conclusions » au fond.
Toutefois, il n’en a pas toujours été ainsi, et nous devons cette disposition au décret du 6 mai 2017 dit décret Magendie 2 (décr. n° 2017-891, 6 mai 2017).
Même si cet article 791, tout comme l’ancien article 772-1, s’applique à la procédure d’appel, par renvoi de l’article 907, l’article 914 précise lui aussi, surabondamment, que le conseiller de la mise en état est saisi par des conclusions qui lui sont spécialement adressées.
Avant qu’il n’en soit ainsi, et en l’absence d’un texte précisant les conditions de saisine du magistrat de la mise en état, la Cour de cassation avait considéré que celui-ci, tant qu’il n’était pas dessaisi, était saisi des moyens contenus dans des conclusions au fond et qui relevaient de son pouvoir juridictionnel (Civ. 2e, 9 avr. 2015, n° 13-28.707 P, Dalloz actualité, 19 mai 2015, obs. M. Kebir ; D. 2015. 1791, chron. H. Adida-Canac, T. Vasseur, E. de Leiris, L. Lazerges-Cousquer, N. Touati, D. Chauchis et N. Palle ; ibid. 2016. 449, obs. N. Fricero ).
Cette jurisprudence était favorable à l’avocat qui n’avait pas à s’interroger si son moyen devait ou non être soumis au conseiller de la mise en état, à charge pour ce dernier de prendre connaissance des conclusions au fond pour y relever les moyens relevant de sa compétence.
Cette jurisprudence fera long feu, puisqu’il n’aura fallu qu’une année pour que la Cour de cassation opère un revirement et retienne que le conseiller de la mise en état n’est saisi des demandes relevant de sa compétence que par des « conclusions qui lui sont spécialement adressées » (Civ. 2e, 12 mai 2016, n° 14-25.054 et 14-28.086 P, Dalloz actualité, 30 mai 2016, obs. M. Kebir ; D. 2016. 1290 , note C. Bléry ; ibid. 1886, chron. H. Adida-Canac, T. Vasseur, E. de Leiris, G. Hénon, N. Palle, O. Becuwe et N. Touati ; ibid. 2017. 422, obs. N. Fricero ; JCP 2016. 1154, note Mas ; ibid. 1296, n° 7, obs. L. Mayer ; Gaz. Pal. 30 août 2016, p. 56, obs, Amrani Mekki).
Si, en l’espèce, l’appelant avait pris soin de soulever la nullité de la signification du jugement, il l’avait fait dans ses conclusions au fond, non dans des conclusions spécialement adressées au conseiller de la mise en état, comme le relève la Cour de cassation.
L’antériorité de l’exception de procédure, en tout état de cause
Ce choix procédural de l’appelant peut étonner. En effet, nous savons que le magistrat de la mise en état n’est saisi des demandes relevant de sa compétence que par les conclusions qui lui sont spécialement adressées, et qu’en conséquence, est irrecevable l’incident soulevé dans des conclusions qui comportent en outre des moyens et demandes au fond (Civ. 2e, 12 mai 2016, n° 14-25.054, préc. ; 12 mai 2016, n° 14-28.086, préc. ; 23 juin 2016, n° 15-13.483 P, Dalloz actualité, 19 juill. 2016, obs. M. Kebir).
Par conséquent, en circuit ordinaire avec désignation d’un conseiller de la mise en état, cela ne présentait aucun intérêt de développer cette exception dans des conclusions au fond puisque le magistrat de la mise en état ne pouvait en être saisi, et la cour n’ayant pas à connaître des exceptions de procédure qui sont de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état (C. pr. civ., art. 789, anc. 771). Il en aurait été différemment si l’affaire avait relevé du circuit court, sans désignation d’un conseiller de la mise en état.
Dans le cadre de son pourvoi, l’appelant expliquait être recevable à opposer l’irrégularité de la signification une fois que l’irrecevabilité de son appel a été soulevée par son adversaire.
La Cour de cassation n’entend pas l’argument. La nullité de la signification du jugement, qui est une exception de procédure, ayant été soulevée dans les conclusions au fond de l’appelant, et non dans des conclusions adressées au conseiller de la mise en état, la demande en nullité était irrecevable.
Peu importe que cette exception ait été soulevée avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir, cette précaution s’avérant inutile dès l’instant où l’exception n’est pas contenue dans les conclusions adressées au magistrat ayant compétence (exclusive) pour en connaître.
Surtout, la Cour de cassation n’est pas sensible à l’argument de l’appelant selon lequel c’est un moyen de procédure en défense à une irrecevabilité.
Et c’est là que l’arrêt devient dangereux, même si la Cour de cassation avait déjà mis en garde par un précédent arrêt publié.
Le piège du timing de l’exception de procédure
Une partie qui bénéficie d’une exception de procédure peut estimer opportun de rester discret et de ne pas invoquer une exception de procédure qui ne sert que dans l’hypothèse où ça se gâte.
C’était la thèse de l’appelant, largement répandue, selon laquelle l’exception de nullité est un moyen de défense à opposer à l’irrecevabilité de l’appel.
Ce timing ne convient pas à la Cour de cassation, qui fait une (trop ?) stricte application de l’article 74 selon lequel « les exceptions doivent, à peine d’irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant tout défense au fond ou fin de non-recevoir ».
Il importe peu que cette exception de procédure ne profite pas directement à l’appelant, comme pourrait l’être une nullité de l’acte introductif d’instance ou des conclusions.
Même si l’irrecevabilité de l’appel n’avait pas été soulevée par l’intimé, l’appelant devait néanmoins anticiper cette irrecevabilité en saisissant préventivement le conseiller de la mise en état d’un incident aux seules fins de voir déclarer nulle la signification du jugement.
On comprend aisément qu’un appelant puisse être réticent à procéder de la sorte.
L’appelant peut considérer que si l’intimé ne dit rien, il n’a pas à appeler son attention sur une irrecevabilité qui passera peut-être inaperçue ou que l’intimé n’entend pas soulever.
Avec cette jurisprudence, l’appelant perd l’exception-joker que l’on sort en cas de difficulté.
Si l’appelant sait qu’il est hors délai pour faire appel, il doit immédiatement aller sur le terrain de la nullité de l’acte de signification, avant même de conclure au fond, et alors que l’intimé n’avait pas soulevé une irrecevabilité que la cour d’appel n’aurait pas relevé d’office.
L’avocat devra donc redoubler de vigilance et s’assurer que son client a reçu signification du jugement avant de conclure au fond. Lorsque l’irrecevabilité sera opposée, il sera bien souvent trop tard.
C’est déjà en ce sens que la Cour de cassation avait statué, considérant que l’intimé irrecevable à conclure ne pouvait espérer échapper à la sanction en arguant de la nullité de l’acte de signification des conclusions par l’appelant, alors qu’il avait déjà conclu au fond (Civ. 2e, 1er févr. 2018, n° 16-27.322 P, Dalloz actualité, 22 févr. 2018, obs. R. Laffly ; D. 2019. 555, obs. N. Fricero ; Procédures 2018, n° 137, obs. Croze ; Gaz. Pal. 15 mai 2018, p. 69, obs. Amrani-Mekki).
L’arrêt du 10 décembre 2020 et celui du 1er février 2018 s’inscrivent donc dans cette jurisprudence qui fait une stricte application de l’article 74 et écarte la possibilité de faire de l’exception de procédure un moyen de défense.
Si une partie dispose d’une exception de procédure qui doit être soulevée avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir, elle doit saisir le magistrat de la mise en état par des conclusions spécialement adressées, avant de conclure au fond, en tout état de cause.
Il peut paraître curieux de saisir le magistrat de la mise en état d’un incident de nullité de l’acte de signification, alors que l’intimé ne soulève pas l’irrecevabilité de l’appel, et l’incident n’ayant finalement pour objectif que de voir reconnaître une recevabilité qui n’était pas discutée.
Cet arrêt est dangereux, en ce que la partie devra immédiatement dévoiler ses cartes, sauf à faire le choix irréversible de parier sur ce que sera la position de son adversaire.
Pour la Cour de cassation, si l’acte de signification du jugement, des conclusions ou de la déclaration d’appel est nul, et même si la partie n’en obtient pas un bénéfice immédiat, elle doit saisir le magistrat de la mise en état avant d’avoir conclu au fond, ou se taire à jamais et accepter la sanction.
Le « jeu de la dame »…
Toutefois, cela suppose que la partie a connaissance de l’acte prétendu nul.
En l’espèce, cette connaissance était manifeste puisque l’appelant concluait à la nullité dans ses conclusions au fond.
En revanche, il ne saurait être reproché à une partie de ne pas soulever la nullité d’un acte dont elle n’a pas connaissance. Il en irait ainsi des actes d’huissier signifiés selon procès-verbal de recherches infructueuses (C. pr. civ., art. 659).
En revanche, il sera plus difficile pour la partie de s’affranchir de l’antériorité posée à l’article 74, lorsque l’acte a été signifié à la personne ou à personne habilitée.
Pour cette raison, il pourra être opportun, pour celui qui craint que son acte soit attaqué sur le terrain de la nullité, de le porter à la connaissance de son adversaire, en le communiquant, ou en l’adressant par courrier officiel par exemple. Mais sans pour autant s’en prévaloir, de manière à laisser l’adversaire conclure au fond sans invoquer cette nullité.
Si la partie ne soulève pas l’exception de nullité en temps, l’acte potentiellement irrégulier sera ainsi consolidé et la partie aura le champ libre pour soulever l’irrecevabilité (de l’appel, des conclusions) sans craindre le retour du bâton.
La procédure consiste aussi à avancer des pions, au bon endroit, au bon moment, comme aux échecs…
Lorsqu’après la clôture de l’instruction, les parties sont informées que la décision du juge est susceptible d’être fondée sur un moyen relevé d’office, cette information n’a pas pour effet de rouvrir l’instruction.
Lorsqu’après la clôture de l’instruction, les parties sont informées que la décision du juge est susceptible d’être fondée sur un moyen relevé d’office, cette information n’a pas pour effet de rouvrir l’instruction.
Un salarié licencié avant la conclusion d’un accord d’entreprise peut bénéficier des avantages conventionnels prévus rétroactivement pour la période précédant la rupture du son contrat.
La Cour de cassation confirme que le caractère révocable d’une adoption prononcée à l’étranger conduit à lui faire produire les effets d’une adoption simple et non plénière.
Une enfant est née en novembre 2014 en Tunisie, de père inconnu. Sa mère a établi un acte écrit d’abandon par lequel elle certifie abandonner l’enfant de sa propre volonté et de façon définitive. Par jugement tunisien du 27 mars 2015, il a été décidé du placement de l’enfant à titre définitif auprès de l’Institut national de la protection de l’enfance tunisien. L’enfant a été adoptée par un couple marié, par jugement du tribunal cantonal de Tunis du 16 avril 2015. L’institut national de protection de l’enfance tunisien a, par attestation du 21 avril 2015, certifié que l’enfant était abandonnée par ses parents, sans attache familiale et pupille de l’État, et que, suite à la rupture complète et irrévocable du lien de filiation préexistant de l’enfant, le directeur de l’institut avait donné son consentement définitif et irrévocable à l’adoption de l’enfant par les époux pour une adoption plénière de droit français.
Les époux ont saisi le tribunal de grande instance de Nantes aux fins de transcription, en soutenant que le jugement tunisien produisait les effets d’une adoption plénière.
La cour d’appel de Rennes, par un arrêt en date du 1er juillet 2019, a dit que le jugement tunisien produirait les effets d’une adoption simple. Elle a estimé que le caractère révocable de l’adoption en droit tunisien, affirmé par la jurisprudence tant de la cour d’appel de Tunis du 14 février 1980 que de la Cour de cassation tunisienne du 9 novembre 2011, avait pour conséquence que le lien de filiation préexistant n’avait pas été totalement et irrévocablement rompu. Par conséquent, selon l’article 370-5 du vode civil, l’adoption ne pouvait produire en France que les effets...
Les sénateurs ont adopté le projet de loi reportant les élections départementales et régionales au mois de juin. Mais ils refusent d’envisager tout décalage supplémentaire.
La décision par laquelle le président d’une université refuse d’admettre un étudiant en première ou en deuxième année de master relève-t-elle d’une des catégories de décisions devant être motivées en application de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration ?
Les incertitudes ont longtemps plané sur l’entrée en vigueur de la nouvelle procédure de divorce que l’AJ famille (à moitié prix jusqu’au 3 février 2021) avait déjà présentée à ses lecteurs il y a un an (v. nos numéros de janv. et de févr. 2020, AJ fam. 2020. 11 s. et 89 s.). Cette fois, elle est bel et bien entrée en application le 1er janvier 2021. Depuis notre précédent dossier, certains points ont été éclaircis, même s’il reste encore de nombreuses interrogations auxquelles la pratique ne manquera pas d’apporter des réponses. L’avenir nous dira si la procédure est effectivement simplifiée, plus rapide et si les avocats se sont enfin emparés de la procédure participative de mise en état et s’ils s’ouvrent davantage à la médiation.
Pour l’heure, il faut vite se débarrasser des anciens réflexes pour s’approprier au plus vite cette nouvelle procédure qui débute par une assignation ou requête conjointe introductive d’une instance unique s’articulant autour d’une audience charnière : celle d’orientation et sur mesures provisoires. Pour ce faire, l’AJ famille publie un nouveau dossier en deux parties en janvier et...
Le divorce, sous toutes ses formes, est à l’honneur en ce début d’année. Divorce judiciaire, mais également divorce par consentement mutuel…
L’enfant, âgé de moins de deux ans, qui a voyagé sans billet d’avion sur les genoux de ses parents ne peut bénéficier de l’indemnisation forfaitaire réclamée au transporteur aérien sur le fondement du règlement n° 261/2004 du 11 février 2004 sur les droits des passagers aériens.
L’arrêt rendu le 17 décembre 2020 par la troisième chambre civile de la Cour de cassation offre l’occasion de revenir sur les modalités de preuve du droit de propriété en cas de ventes successives d’une chose par son propriétaire à deux acheteurs différents.
En l’espèce, le propriétaire d’un terrain s’était engagé à le vendre par acte sous seing privé du 9 juin 1961. Un arrêt irrévocable du 3 juin 1980 a confirmé un jugement du 23 février 1976 ayant déclaré la vente parfaite et ordonné sa régularisation par acte authentique. Cette vente n’a, cependant, jamais donné lieu à publication. Par la suite, les ayants droit du vendeur ont vendu le même terrain à un autre acheteur par acte du 23 août 1995, publié le 13 décembre 1995. Le second acquéreur, se prévalant alors de son titre régulièrement publié, assigne le premier en expulsion le 3 octobre 2013. Celui-ci lui oppose la prescription acquisitive trentenaire. La cour d’appel accueille les demandes du second acquéreur aux motifs que ce dernier était fondé à se prévaloir de l’antériorité de la publication de son titre de propriété. Le premier acquéreur forme alors un pourvoi en cassation, invoquant une violation par les juges du fond de l’article 30.1 du décret du 4 janvier 1955 par fausse application, et des articles 712 et 2272 du code civil par refus d’application. Selon lui, en effet, il serait toujours possible de prescrire contre un titre. C’est ce que confirme, sans surprise, la troisième chambre civile de la Cour de cassation dans l’arrêt commenté. Cassant l’arrêt de la cour d’appel pour violation de la loi au visa des articles 712 et 2272 du code civil, elle rappelle que « la prescription trentenaire peut être opposée à un titre ».
Rappelons que la preuve de la propriété est libre et peut être rapportée par tout moyen, que la chose appropriée soit de nature mobilière (Civ. 1re, 11 janv. 2000, n° 97-15.406, Deschamps (Mme) c/ Société lyonnaise de banque, D. 2001. 890 , note A. Donnier ; RDI 2000. 145, obs. M. Bruschi ; RTD civ. 2002. 121, obs. T. Revet ) ou immobilière (Civ. 3e, 20 juill. 1988, n° 87-10.998). Les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain d’appréciation pour déterminer la preuve la meilleure et la plus probable du droit de propriété. N’importe quel indice est susceptible d’être pris en compte (Civ. 3e, 26 févr. 1974, n° 73-10.126 concernant des indications cadastrales).
Très souvent, un titre de propriété est présenté par une partie au procès. Celui-ci est opposable aux tiers quel qu’en soit le titulaire (Civ. 3e, 13 mai 2015, n° 13-27.342, D. 2015. 1098 ; ibid. 1863, obs. L. Neyret et N. Reboul-Maupin ; ibid. 2016. 167, obs. J.-D. Bretzner et A. Aynès ; AJDI 2015. 858 , obs. N. Le Rudulier ; RTD civ. 2015. 902, obs. W. Dross ). En l’espèce, les deux parties se prévalaient d’un titre de propriété, seul le second acheteur ayant cependant procédé aux formalités de publicité foncière. Or, les actes translatifs de propriété ne sont, en matière immobilière, opposables aux tiers qu’à compter de leur publication. En cas de ventes successives de la même chose par son propriétaire initial, l’acquéreur qui publie le premier son titre est donc préféré (décr. du 4 janv. 1955, art. 30-1), et ce même s’il s’agit pourtant chronologiquement du second acheteur. Cette règle a été appliquée strictement par la jurisprudence à partir de 2011, l’éventuelle mauvaise foi du premier publiant n’étant pas dirimante (Civ. 3e, 12 janv. 2011, n° 10-10.667, D. 2011. 851 , note L. Aynès ; ibid. 2298, obs. B. Mallet-Bricout et N. Reboul-Maupin ; AJDI 2011. 238 ; RTD civ. 2011. 158, obs. P. Crocq ; ibid. 369, obs. T. Revet , réalisant un revirement ; v. auparavant, Civ. 3e, 30 janv. 1974, n° 72-14.197). L’ordonnance du 10 février 2016 a modifié cette solution : la bonne foi est désormais requise (C. civ., art. 1198, al. 2). En vertu de l’article 2274 du code civil, celle-ci est cependant toujours présumée : c’est à celui qui allègue la mauvaise foi de la prouver. Rien ne laisse penser, en l’espèce, que le second acquéreur (seul à avoir publié son titre) ait été de mauvaise foi : ayant contracté avec les ayants droit du premier vendeur, il est probable qu’il n’ait pas eu connaissance de la première vente conclue trente-quatre ans plus tôt ! Appliquant dès lors les règles de la publicité foncière, la cour d’appel avait cru pouvoir en conclure que la qualité de propriétaire devait être reconnue au second acquéreur.
Elle avait toutefois omis de prendre en compte le fait que le premier acquéreur, même s’il n’avait pas publié son titre de propriété, se prévalait en revanche, en sus de ce titre, du jeu de la prescription acquisitive trentenaire. En effet, si la propriété peut être acquise de manière dérivée – notamment par la conclusion d’un contrat de vente –, tel peut également être le cas de manière originaire, comme le précise l’article 712 du code civil, lequel cite expressément l’acquisition par accession ou incorporation, et par prescription.
La prescription acquisitive est « un moyen d’acquérir un bien ou un droit par l’effet de la possession sans que celui qui l’allègue soit obligé d’en rapporter un titre ou qu’on puisse lui opposer l’exception déduite de la mauvaise foi » (C. civ., art. 2258). Simple pouvoir de fait sur une chose, la possession permet ainsi, lorsqu’elle est « utile », d’en devenir propriétaire de manière originaire après l’écoulement d’un certain délai. Il est nécessaire, pour être possesseur d’une chose, d’en avoir à la fois le corpus et l’animus. Le corpus, élément objectif, suppose la réalisation d’actes matériels ; l’accomplissement d’actes juridiques étant considéré comme insuffisant à caractériser un pouvoir de fait sur la chose (par ex. le paiement des impôts fonciers, Civ. 3e, 30 juin 1999, n° 97-11.388, D. 1999. 209 ; RDI 1999. 624, obs. M. Bruschi ). L’animus, élément subjectif, désigne quant à lui l’intention de se comporter comme le véritable propriétaire de la chose. Il est présumé (Civ. 3e, 8 mai 1969, Bull. civ. III, n° 371).
L’article 2256 du code civil précise en effet que l’« on est toujours présumé posséder pour soi, et à titre de propriétaire, s’il n’est prouvé qu’on a commencé à posséder pour un autre ». Il s’agit là d’une présomption simple, susceptible d’être renversée par la preuve contraire. Ainsi, les détenteurs précaires, tels que les locataires ou les dépositaires de la chose, n’ont pas l’animus car ils savent qu’ils devront un jour la restituer. La simple détention de la chose ne permet pas d’en devenir propriétaire, et ce quelle que soit sa durée (C. civ., art. 2266 et 2257). Seule une interversion de titre peut rendre le détenteur précaire possesseur (C. civ., art. 2268).
La prescription acquisitive requiert que la possession soit « utile ». L’article 2261 du code civil précise ainsi que, « Pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire ». En réalité la continuité et l’intention de se comporter comme un propriétaire sont des conditions d’existence même de la possession. L’interruption arrête en effet le cours de la prescription : « Quand une possession est interrompue, elle n’est pas viciée ; elle n’existe tout simplement pas ! » (Y. Strickler, Droit des biens, LGDJ, 2017, n° 355). Exiger que la possession ait lieu « à titre de propriétaire » est seulement un rappel de la nécessité d’un animus. L’avant-projet de réforme du droit des biens propose ainsi de retenir, dans une formule plus claire, seulement trois qualités pour que la possession soit utile : ses caractères paisible, public et non équivoque (C. civ., art. 543). Une possession paisible est dénuée de toute forme de violence matérielle ou morale, tant au moment de l’appréhension initiale de la chose par le possesseur que pendant toute la durée de la possession (Civ. 3e, 15 févr. 1995, n° 93-14.143, RDI 1995. 284, obs. J.-L. Bergel ). Ainsi, le voleur d’une chose ne peut jamais en devenir propriétaire car il n’est pas entré en possession de manière paisible. Comme le précise l’article 2263 du code civil, « Les actes de violence ne peuvent fonder (…) une possession capable d’opérer la prescription. La possession utile ne commence que lorsque la violence a cessé. » L’exigence d’une possession publique exclut l’acquisition d’une chose conservée de manière secrète, clandestine (Civ. 1re, 8 mars 2005, n° 03-14.610 : don manuel dissimulé aux services de police et dont l’existence n’a été révélée qu’après une perquisition du domicile). La possession doit avoir lieu aux yeux de tous. Une possession est non équivoque lorsque, « pris en eux-mêmes, les actes du possesseur révél(ent) sans ambiguïté son intention de se comporter en propriétaire (…), et cela dans des circonstances qui (ne sont) pas de nature à faire douter de cette qualité » (Civ. 1re, 2 juin 1993, n° 90-21.982, D. 1993. 306 , obs. A. Robert ; ibid. 1994. 582 , note B. Fauvarque-Cosson ). Il y a dès lors vice d’équivoque à chaque fois qu’un doute existe quant à l’existence d’une possession personnelle et exclusive. Tel est notamment le cas lorsque celui qui se prétend possesseur cohabite avec une autre personne (Civ. 1re, 7 déc. 1977, n° 76-13.044 concernant des concubins).
En principe la prescription acquisitive a lieu après écoulement d’un délai de trente ans à compter de l’entrée en possession (C. civ., art. 2272, al. 1er). Une prescription abrégée est toutefois prévue par l’article 2272, alinéa 2, du code civil en matière immobilière : « Celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans ». Deux conditions cumulatives sont requises : la bonne foi du possesseur et un juste titre. La bonne foi est toujours présumée (C. civ., art. 2274). Aux termes de l’article 550 du code civil, « Le possesseur est de bonne foi quand il possède comme propriétaire, en vertu d’un titre translatif de propriété dont il ignore les vices ». La mauvaise foi est caractérisée lorsqu’il est établi que le possesseur savait que l’aliénateur de la chose n’en était pas propriétaire. La bonne foi est toutefois seulement requise au moment de l’entrée en possession (C. civ., art. 2275) : peu importe que le possesseur apprenne après l’acquisition, que le vendeur n’était pas le véritable propriétaire. Le juste titre est un acte propre à conférer la propriété à la partie qui invoque la prescription (Civ. 3e, 29 fév. 1968, n° 65-13.821). Le possesseur dispose d’un titre régulier mais n’a pas acquis du véritable propriétaire : il s’agit d’un acquéreur a non domino. Le juste titre « suppose un transfert de propriété consenti par un tiers qui n’est pas le véritable propriétaire » (Civ. 1re, 7 oct. 2015, n° 14-16.946, D. 2016. 242 , note S. Zinty ; AJDI 2016. 134 , obs. F. de La Vaissière ; AJ fam. 2015. 626, obs. S. Ferré-André ; RTD civ. 2016. 146, obs. W. Dross ). Dans l’affaire commentée, le premier acquéreur ne pouvait donc pas se prévaloir d’un juste titre, la vente ayant été conclue avec le véritable propriétaire de l’immeuble. Seul le délai de droit commun, de trente ans, était dès lors applicable. Bien que long, un tel délai était bien écoulé en l’espèce, lui permettant ainsi d’être reconnu comme le véritable propriétaire de la parcelle par préférence au second acheteur, pourtant seul à pouvoir justifier d’un titre de propriété régulièrement publié.
Contrairement à ce que l’on pourrait a priori penser, un titre de propriété ne constitue, en effet, pas une preuve irréfutable de la propriété. Encore faudrait-il, pour cela, réussir à prouver que son propre auteur était lui-même véritablement propriétaire, et ainsi de suite en remontant la chaîne des actes translatifs (Civ. 3e, 26 oct. 1988, n° 87-11.833) : il s’agit là d’une preuve « diabolique » (probatio diabolica), impossible à rapporter en pratique. La possession constitue en réalité le meilleur moyen de preuve car il s’agit d’une présomption légale irréfragable de propriété lorsque les conditions de la prescription acquisitive sont réunies, et ce, même face à un titre, comme le rappelle la Cour de cassation en l’espèce.
Viole les articles 712 et 2272 du code civil la cour d’appel qui fait prévaloir l’antériorité de la publication du titre de propriété d’une des parties alors que l’autre était fondée à invoquer la prescription acquisitive trentenaire.
Viole les articles 712 et 2272 du code civil la cour d’appel qui fait prévaloir l’antériorité de la publication du titre de propriété d’une des parties alors que l’autre était fondée à invoquer la prescription acquisitive trentenaire.
Le Sénat a adopté le 28 janvier le projet de loi autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et reportant la date de caducité des régimes institués pour faire face à la crise sanitaire.
Des dispositions législatives qui n’ont pas été invoquées en première instance, qui n’ont pas été appliquées et qui ne sont pas susceptibles d’être relevées d’office, ne sont pas applicables au litige dont le Conseil d’État est saisi en appel et ne peuvent donc pas faire l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).
Saisie d’un pourvoi relatif à l’effet de l’annulation d’une convention collective par le juge, la Cour de cassation confirme l’applicabilité du nouvel article L. 2262-15 du code du travail à un accord antérieur à son entrée en vigueur et se prononce sur la justification d’une décision de non-rétroactivité.
Parmi les causes d’interruption de la prescription, l’article 2240 du code civil prévoit la reconnaissance de la part du débiteur du droit de son adversaire contre qui il prescrivait. Mais cette reconnaissance doit être non équivoque pour pouvoir être interruptive et les juges du fond doivent bien relever des éléments attestant de la non-équivocité de cette reconnaissance pour estimer qu’une action en indemnisation des préjudices résultant de troubles anormaux de voisinage n’est pas prescrite. C’est ce que rappelle ici clairement la Cour dans cet arrêt de cassation pour défaut de base légale.
L’action en troubles anormaux du voisinage relève des règles de la responsabilité civile délictuelle, ce qui conduit à lui appliquer la prescription quinquennale de droit commun de l’article 2224 du code civil. Il s’agit ainsi d’engager l’action dans les cinq ans à compter de la première manifestation du trouble ayant causé le dommage ou de son aggravation.
La Cour de cassation, mais sous l’empire du droit antérieur à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, avait d’ailleurs pu indiquer que le point de départ de l’action en indemnisation d’un préjudice résultant de troubles anormaux du voisinage était la première manifestation des troubles (Civ. 2e, 13 sept. 2018, n° 17-22.474, Civ. 2e, 13 sept. 2018, n° 17-22.474, D. 2018. 1806 ; AJDI 2019. 470 , obs. N. Le Rudulier ; RTD civ. 2018. 948, obs. W. Dross ; Constr.-Urb. nov. 2018, p. 24, obs. P. Cornille et p. 26, obs. M.-L. Pagès de Varenne ; v. aussi, Civ. 2e, 7 mars 2019, n° 18-10.074, AJDI 2019. 308 , retenant que le délai de prescription de cinq ans avait commencé à courir à compter de la date de la connaissance des faits. Rappelons également qu’après la deuxième chambre civile, la nature extra-contractuelle de la responsabilité pour troubles anormaux a aussi été retenue par la troisième chambre civile, Civ. 3e, 16 janv. 2020, n° 16-24.352, D. 2020. 466 , note N. Rias ; ibid. 1761, obs. N. Reboul-Maupin et Y. Strickler ; RDI 2020. 120, étude C. Charbonneau ). Comme d’autres matières, il est donc bien évident que pour des propriétaires subissant des troubles du voisinage mais n’ayant pas réagi suffisamment tôt, il faille tenter d’invoquer un événement interrompant la prescription pour que le temps antérieurement écoulé ne puisse pas les priver de leur action.
Dans l’espèce rapportée, une propriétaire subissant une gêne certaine de la chute sur son fonds d’aiguilles et de pommes de pin des sapins de son voisin avait...
Les juges du fond ne peuvent retenir l’interruption de la prescription de l’action en indemnisation des préjudices résultant de troubles anormaux de voisinage qu’après avoir relevé le caractère non équivoque de la reconnaissance du débiteur du droit de son adversaire contre qui il prescrivait.
Les juges du fond ne peuvent retenir l’interruption de la prescription de l’action en indemnisation des préjudices résultant de troubles anormaux de voisinage qu’après avoir relevé le caractère non équivoque de la reconnaissance du débiteur du droit de son adversaire contre qui il prescrivait.
La déclaration de saisine n’est pas une déclaration d’appel
Aux termes de l’article 625 du code de procédure, la cassation replace les parties dans la situation dans laquelle elles se trouvaient avant la décision cassée.
Il en résulte qu’après une cassation, les parties n’ont pas à introduire une nouvelle instance mais poursuivent l’instance ayant abouti à la décision cassée, à charge pour la partie qui y a intérêt de saisir la juridiction désignée, par une déclaration de saisine, comme le prévoit l’article 1032.
La Cour de cassation, dans son arrêt du 14 janvier 2021, rappelle que la déclaration de saisine n’est pas une déclaration d’appel.
À notre connaissance, la haute juridiction n’avait jamais eu l’occasion d’apporter cette précision dont nous ne doutions pas (C. Lhermitte, Procédures d’appel, Dalloz, coll. « Delmas express », n° 1610 : « la déclaration de saisine n’est pas un acte d’appel et elle ne se substitue pas à l’acte d’appel qui demeure, dans le cadre du renvoi de cassation, l’acte introductif de l’instance d’appel »). Sauf que cela est parfois oublié.
La déclaration de saisine est un acte de procédure à part entière qui n’a pas pour objet d’introduire une instance d’appel, mais bien de poursuivre celle déjà engagée.
Cela a des conséquences sur le plan procédural.
Par exemple, en matière prud’homale, si la déclaration d’appel est antérieure au 1er août 2016, et quelle que soit la date de la déclaration de saisine, la procédure sur renvoi en appel relèvera de la procédure orale sans représentation obligatoire (C. trav., art. R. 1461-2 ; décr. n° 2016-660, 20 mai 2016, relatif à la justice prud’homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail) et l’article 1037-1 fixant les règles de la procédure sur renvoi de cassation sera écarté au profit de l’article 1036.
Pour la même raison, le timbre fiscal de l’article 1635 bis P du code général des impôts n’est pas dû sur renvoi de cassation s’il a déjà été réglé dans le cadre de l’appel (C. Lhermitte, La taxe fiscale de 150 € est-elle due pour les procédures d’appel après renvoi de cassation ?, Gaz. Pal. 24-25 janv. 2014).
L’obligation de porter dans la déclaration de saisine les chefs de dispositif critiqués mentionnés dans l’acte d’appel
L’article 1033, qui précise les mentions devant être portées dans l’acte de saisine de la juridiction de renvoi après cassation, renvoie aux « mentions exigées pour l’acte introductif d’instance devant cette juridiction ».
En appel, ces mentions sont prévues à l’article 901 – qui lui-même renvoie au demeurant aux articles 57 et 54 – dont le 4° concerne les « chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible ».
Par application des articles 1033 et 901, la déclaration de saisine doit donc mentionner les chefs expressément critiqués.
Cette obligation procédurale, sur l’intérêt de laquelle nous pouvons nous interroger, est confirmée par l’arrêt qui souligne « l’obligation prévue au dernier de ceux-ci (C. pr. civ., art. 901 et 1033) de faire figurer dans la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi après cassation, qui n’est pas une déclaration d’appel les chefs de dispositif critiqués de la décision entreprise tels que mentionnés dans l’acte de l’appel ».
Mais la Cour de cassation, sans remettre en question cette obligation résultant du renvoi de l’article 1033 au 4° de l’article 901, prend soin aussi de rappeler que la déclaration de saisine n’est pas une déclaration d’appel, précision qui n’est pas anodine. En effet, n’étant pas un acte d’appel, cette mention dans l’acte de saisine « ne peut avoir pour effet de limiter l’étendue de la saisine de la cour d’appel de renvoi ».
Effet dévolutif et portée de la cassation
En apportant la précision selon laquelle la mention des chefs critiqués « ne peut avoir pour effet de limiter l’étendue de la saisine de la cour d’appel de renvoi », la Cour de cassation distingue l’effet dévolutif (de l’appel) et la portée de la cassation (par l’arrêt de cassation).
Cette distinction est importante pour permettre de comprendre que l’éventuel manquement quant aux chefs critiqués ne conduit pas à la même sanction selon qu’est concerné la déclaration de saisine ou l’acte d’appel.
Pour la Cour de cassation, « la portée de la cassation [est] déterminée par le dispositif de l’arrêt qui la prononce ».
C’est l’application des articles 624 et 625 du code de procédure civile au visa desquels intervient la cassation.
Rappelons que l’indication des chefs critiqués dans l’acte d’appel (C. pr. civ., art. 901, 4°) permet de déterminer la dévolution de l’appel (C. pr. civ., art. 562), c’est-à-dire la portée de l’appel (Civ. 2e, 30 janv. 2020, n° 18-22.528 P, Dalloz actualité, 17 févr. 2020, obs R. Laffly ; D. 2020. 288 ; ibid. 576, obs. N. Fricero ; ibid. 1065, chron. N. Touati, C. Bohnert, S. Lemoine, E. de Leiris et N. Palle ; D. avocats 2020. 252, étude M. Bencimon ; RTD civ. 2020. 448, obs. P. Théry ; ibid. 458, obs. N. Cayrol ; 2 juill. 2020, n° 19-16.954 P, Dalloz actualité, 18 sept. 2020, obs. R. Laffly ; Soc. 14 oct. 2020, n° 18-15.229 P, Dalloz actualité, 3 nov. 2020, obs. C. Lhermitte ; D. 2020. 2071 ).
Mais comme cela a été vu, la déclaration de saisine n’est pas un acte d’appel et, surtout, la déclaration d’appel reste l’acte de procédure qui a introduit l’instance d’appel.
La déclaration de saisine n’est pas un acte introductif d’instance et n’opère pas dévolution. C’est un acte de procédure permettant de saisir la juridiction de renvoi de manière à poursuivre une instance existante. Et, comme l’a précisé la Cour de cassation, c’est l’acte d’appel, et seulement l’acte d’appel, qui fixe la dévolution de l’appel (v. Civ. 2e, 30 janv. 2020, n° 18-22.528 P, préc. : « seul l’acte d’appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement »).
Dans le cadre d’un renvoi de cassation, la dévolution est opérée par la déclaration d’appel, lequel acte d’appel, selon la date à laquelle il a été régularisé, à savoir si l’appel a été formé avant ou après le 1er septembre 2017 (décr. n° 2017-891, 6 mai 2017, relatif aux exceptions d’incompétence et à l’appel en matière civile), renverra ou non à la nouvelle rédaction de l’article 562 du code de procédure civile.
La cour d’appel, sur renvoi de cassation, sera tenue par l’effet dévolutif opéré par l’acte d’appel, dans la limite toutefois du dispositif de l’arrêt de cassation, qui marque la portée de la cassation. C’est ce que nous confirme la Cour de cassation par cet arrêt.
Il en résulte que, même si l’appel portait sur tous les chefs du jugement dont appel, la cour d’appel de renvoi n’aura pas à connaître des chefs sur lesquels la cassation ne portait pas, soit parce qu’ils n’ont pas été soumis dans le cadre d’un pourvoi à la Cour de cassation, soit en raison du rejet du moyen concernant ces chefs.
Manifestement, l’indication des chefs dans la déclaration de saisine ne présente aucun intérêt particulier, que ce soit pour la cour d’appel ou pour la « partie adverse » qui sera destinataire de cet acte.
La Cour de cassation aurait pu considérer en conséquence qu’elle était sans objet.
Pour autant, la Cour de cassation fait une stricte application des textes et retient l’obligation de mentionner les chefs critiqués, mais sans que cette mention ait le moindre effet sur le plan procédural et notamment sur la dévolution.
C’est purement formel, et inutile sur le plan pratique.
Nullité de la déclaration de saisine ?
L’article 1033 ne précise pas que les mentions sont prescrites à peine de nullité. Toutefois, pour la Cour de cassation, « l’irrégularité des mentions de la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi après cassation ne constitue pas une cause d’irrecevabilité de celle-ci, mais relève des nullités pour vice de forme » (Civ. 2e, 19 oct. 2017, n° 16-11.266 P, Dalloz actualité, 21 nov. 2017, obs. R. Laffly ; D. 2017. 2157 ).
En conséquence, l’absence des chefs critiqués dans l’acte de saisine pourrait aboutir à une nullité, pour vice de forme.
En pratique, dès lors que cette mention ne répond à une aucune utilité, nous ne voyons pas que cette nullité, qui suppose de démontrer un grief, et qui ne peut pas être relevée d’office, pourrait effectivement aboutir à une nullité.
Le grief sera impossible à démontrer.
Et si l’acte est nul, reste à savoir si cette nullité permettrait à la partie de se prévaloir de l’interruption de l’article 2241 du code civil, ce dont nous pouvons douter, et ce sur quoi la Cour de cassation n’a pas eu l’occasion de se prononcer.
Si la Cour de cassation a fait entrer la déclaration d’appel dans le champ d’application de cette disposition (Civ. 2e, 16 oct. 2014, n° 13-22.088 P, Dalloz actualité, 28 oct. 2014 obs. N. Kilgus ; D. 2015. 287, obs. Fricero ; JCP 2014. 1271, note Auché), cela peut se comprendre dès lors que l’acte d’appel introduit une instance (d’appel), ce que ne fait pas la déclaration de saisine. Nous penchons donc plutôt pour une exclusion de la déclaration de saisine du domaine de l’article 2241 (C. Lhermitte, Procédures d’appel, op. cit., nos 1613, 1618).
Quels chefs dans la déclaration de saisine ?
Avec son arrêt du 14 janvier 2021, la Cour de cassation livre des précisions quant aux chefs à faire apparaître dans l’acte de saisine, ce qui pouvait constituer un véritable casse-tête pour l’avocat auteur de la déclaration de saisine.
Nous aurions pu penser qu’il devait s’agir des chefs issus de la cassation, mais cela aurait conduit à considérer que la déclaration de saisine pouvait avoir un effet dévolutif, ce qui serait absurde, et d’ailleurs précisément écarté par la Cour de cassation.
Selon l’arrêt rendu, il suffit de porter dans la déclaration de saisine « les chefs de dispositif critiqués de la décision entreprise tels que mentionnés dans l’acte d’appel ».
Il conviendrait donc de mentionner dans l’acte de saisine les chefs qui figuraient dans l’acte d’appel.
Et si l’appel est antérieur au 1er septembre 2017, date d’entrée en application du décret du 6 mai 2017 ayant modifié les articles 901 et 562, nous pourrions considérer que ces chefs n’ont pas à être mentionnées sur l’acte de saisine dès lors qu’ils n’ont pas à figurer sur l’acte d’appel, et la dévolution opérant pour le tout à défaut d’être limitée.
Il pourra être opportun, s’il y a lieu, de ne pas reprendre les chefs pour lesquels l’arrêt de la cour d’appel est irrévocable, puisque la cour de renvoi n’aura pas à les connaître.
Mais si néanmoins ils apparaissent, cela sera sans conséquence.
De même, l’auteur de la déclaration de saisine n’aura pas à s’inquiéter outre mesure s’il a omis des chefs, puisque la déclaration de saisine n’opère pas effet dévolutif, et la juridiction de renvoi étant en tout état de cause saisie dans la limite de l’arrêt de cassation.
Une solution de bon sens
Même si l’arrêt n’est pas allé jusqu’à écarter l’obligation consistant à faire mention des chefs critiqués, nous ne pouvons que saluer la solution donnée par la Cour de cassation qui permettra d’éviter des dérives déjà constatées.
En effet, il apparaît qu’il a pu être oublié que la déclaration de saisine n’est pas une déclaration d’appel et que les deux actes de procédure, même s’ils doivent contenir les mêmes mentions, ne peuvent produire les mêmes effets.
Et c’est ainsi que des cours d’appel ont pu donner un effet dévolutif à une déclaration de saisine, et ont considéré que l’absence des chefs critiqués dans l’acte de saisine permettait à la juridiction de se dire non saisie de chefs de demandes (Rennes, 3e ch. com., 25 févr. 2020, n° 19/04483 : « La saisine de la cour de renvoi en date du 4 juillet 2019 ne contient aucune critique des chefs du jugement (sic). Aucune déclaration d’appel rectificative (sic) n’a été régularisée dans le délai imparti pour conclure au fond. Il en résulte que la cour n’est saisie d’aucune demande », JS 2020, n° 208, p. 10, obs. J. Mondou ; Paris, pôle 5, ch. 9, 9 janv. 2020, n° 19/07776).
Cet arrêt coupera court à toute discussion à cet égard et permet en outre à l’avocat de savoir précisément quelles mentions doivent figurer dans son acte de saisine et quel risque il prend en cas d’omission ou d’oubli.
Dans une procédure d’appel rigoureuse et stressante, les praticiens accueilleront favorablement un arrêt qui, tout en étant conforme aux textes, allège opportunément les obligations procédurales mises à leur charge.
Si les parties ont l’obligation de mentionner les chefs de dispositif critiqués dans la déclaration de saisine après cassation, cela ne peut avoir pour effet de limiter l’étendue de la saisine de la cour d’appel de renvoi, la déclaration de saisine n’étant pas une déclaration d’appel et la portée de la cassation étant déterminée par l’arrêt de cassation.
Il est tentant de discerner, au sein de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 6 janvier 2021, un brutal revirement de la jurisprudence de la chambre commerciale quant au point de départ de la prescription des actions pour manquement aux devoirs d’information, de mise en garde et de conseil supportés par le banquier. Il semble pourtant que la nature profonde de cet arrêt soit plus subtile et qu’en lieu et place d’un brutal revirement, il existe un habile ajustement.
En 2007, un emprunteur avait obtenu un crédit immobilier pour lequel il avait également adhéré au contrat d’assurance de groupe souscrit par la banque. Placé en arrêt maladie en 2012, l’emprunteur s’est prévalu de la couverture des échéances par la police d’assurance. Cependant, la prise en charge lui a été refusée, dès lors qu’il avait atteint l’âge au-delà duquel le risque maladie n’était plus couvert. À la suite d’échéances impayées, la banque a prononcé la déchéance du terme et a sollicité paiement auprès de la caution, laquelle s’est retournée contre l’emprunteur qui, pour tenter de se libérer de son prêt, à invoquer la responsabilité de la banque pour manquement à son devoir de conseil. Sans s’attacher aux manquements éventuels, les juges du fond ont retenu la prescription de l’action en réparation de l’emprunteur puisqu’il s’était écoulé plus de cinq ans entre l’exercice de l’action et la conclusion du contrat.
Le pourvoi invitait dès lors à un départage quant à la détermination du point de départ du délai de prescription : doit-il être fixé à la date de la conclusion du contrat ou reporté à la date du refus de garantie opposé par l’assureur ?
Au visa des articles 2224 du code civil et L. 110-4 du code de commerce, la Cour de cassation rappelle que les « actions personnelles ou mobilières entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ». Prenant appui sur le caractère glissant du point de départ de la prescription consacré par la loi, la chambre commerciale retient que lorsqu’un prêteur n’a pas suffisamment informé l’emprunteur sur les risques couverts par l’assurance souscrite, le dommage consiste alors en « la perte de la chance de bénéficier d’une […] prise en charge », lequel se réalise « au moment du refus de garantie opposé par l’assureur ». Il en découle que ce refus constitue « le point de départ du délai de prescription de l’action en responsabilité exercée par l’emprunteur ». Le contexte de la décision est éclairant dès lors que la solution retenue n’avait rien d’évident ; l’examen de son appréciation ainsi que de sa portée permet d’exactement en cerner la teneur.
Contexte
En matière de devoirs d’information, de mise en garde et de conseil, il est de jurisprudence classique, au moins pour la chambre commerciale et concernant le contrat de prêt, de retenir qu’en cas de manquement, le dommage réside en une perte de chance de ne pas contracter, en sorte qu’il se réalise au jour de la conclusion du contrat, lequel marque le point de départ de la prescription de l’action (en ce sens, v. not. Com. 26 janv. 2010, n° 08-18.354, Dalloz actualité, 25 févr. 2010, obs. V. Avena-Robardet, D. 2010. 934, obs. V. Avena-Robardet , note J. Lasserre Capdeville ; RTD com. 2010. 770, obs. D. Legeais ; 27 mars 2012, n° 11-13.719 ; 17 mai 2017, n° 15-21.260, RTD civ. 2017. 865, obs. H. Barbier ). Cependant, cette position a été récemment malmenée à propos de l’assurance adjointe au prêt, par un arrêt de la deuxième chambre civile (Civ. 2e, 18 mai 2017, n° 16-17.754, Dalloz actualité, 9 juin 2017, obs. N. Kilgus ; D. 2017. 1120 ; H. Barbier, Pour une approche unitaire du point de départ de la prescription des actions pour manquement aux devoirs d’information, mise en garde et conseil, RTD civ. 2017. 865 s. ; CCC 2017. Comm. 164, obs. L. Leveneur) ayant retenu que la manifestation du dommage ne découlait pas de la conclusion du contrat mais du refus de garantie opposé par l’assureur. Dès lors, il a été décidé que le point de départ du délai de prescription devait être reporté à la date de ce refus.
Il est vrai que les deux analyses – le maintien du point départ au jour de la conclusion du contrat ou le report à la date du refus de prise en charge – peuvent être raisonnablement soutenues à propos du devoir d’information et de conseil en cas d’assurance souscrite par l’emprunteur. La première n’est pas fantaisiste dès lors que les termes du contrat d’assurance, pour lequel il n’était pas contesté en l’espèce qu’ils avaient été transmis au prêteur par l’entremise des conditions générales et de la notice d’information, permettent de connaître les événements excluant la couverture et donc l’éventualité d’un préjudice généré par le défaut de prise en charge. En somme, et de façon générale, la perte de chance de ne pas contracter résultant du défaut d’information se réaliserait toujours au jour de la conclusion du contrat, lequel devrait invariablement constituer le point de départ de la prescription.
Cependant, la seconde analyse, tendant au report du point de départ de la prescription à la date du refus de garantie par l’assureur, présente également quelques arguments. L’absence de garantie de l’assureur peut être la résultante de subtilités qui n’apparaissent pas en pleine lumière au sein de l’instrumentum, encore qu’elles ne soient pas dissimulées. Là réside d’ailleurs l’utilité d’un devoir de conseil : attirer spécifiquement l’attention de l’emprunteur sur ce qu’induisent et recouvrent les termes de l’assurance au regard de sa situation personnelle. Par ailleurs, la réalisation du risque est en ce cas différée, qui n’apparaît que tardivement, au moment du refus de prise en charge de l’assureur. À ces égards, il est tentant de procéder à un transfert de l’objet de la perte de chance, laquelle ne serait plus de ne pas contracter mais de ne pas pouvoir bénéficier de la prise en charge, de sorte que le point de départ de la prescription ne peut alors qu’être reporté au moment du défaut de prise en charge, lors du refus de garantie opposé par l’assureur.
Confrontée à l’alternative, la chambre commerciale consacre la seconde analyse, en retenant que le dommage invoqué par le prêteur consistait « en la perte de la chance de bénéficier d’une […] prise en charge » et non en la perte d’une chance de ne pas contracter. Ce changement d’objet de la perte de chance conduit à retenir que le dommage se réalise « au moment du refus de garantie opposé par l’assureur », cette date devant constituer « le point de départ du délai de prescription de l’action en responsabilité […] ». Ce faisant, la chambre commerciale accorde ses violons avec la deuxième chambre civile (Civ. 2e, 18 mai 2017, n° 16-17.754, préc.) et procède à un ajustement net de sa jurisprudence quant au point de départ de la prescription de l’action pour manquement au devoir d’information et de conseil quant à l’adéquation des risques couverts par l’assurance à la situation personnelle de l’emprunteur. Reste à déterminer si l’ajustement est opportun.
Appréciation et portée
Le truchement employé, consistant à cerner la perte de chance non dans la possibilité de ne pas contracter mais dans celle de bénéficier d’une prise en charge par l’assureur, est particulièrement favorable à l’emprunteur. En effet, on ne peut s’empêcher de penser que le refus de garantie opposé par l’assureur manifeste bien plus un effet prévisible du contrat d’assurance que la caractérisation de la perte d’une chance, puisque de chances de prise en charge de l’événement exclu, le contrat d’assurance n’en laissait justement planer aucune… proprement parce qu’il l’excluait expressément ! La solution découle donc essentiellement de considérations d’opportunité. Il est vrai qu’à défaut de report du point de départ de la prescription, les hypothèses seraient nombreuses où les emprunteurs réaliseraient hors délai le manquement du prêteur à son obligation d’information sur la teneur des risques couverts par l’assurance souscrite. Les emprunts, en particulier pour le financement des acquisitions immobilières, sont le plus souvent remboursés sur une longue période, de sorte qu’un point de départ de la prescription fixé à la date de la conclusion du contrat dédouanerait le prêteur de son manquement chaque fois que le refus de garantie opposé par l’assureur interviendrait au-delà de cinq ans à compter de la conclusion du contrat. La position retenue par la chambre commerciale permet d’éviter ce résultat et qu’in fine, le devoir de conseil en matière de contrat d’assurance adossé à un crédit soit rendu stérile, faute de pouvoir sanctionner les manquements.
Au-delà, l’essentiel tient à la détermination de la portée de la solution rendue. À cet égard, l’analyse montre que l’arrêt procède certainement à un ajustement de la jurisprudence en matière de point de départ de la prescription en cas de manquement aux devoirs d’information, de mise en garde et de conseil dans le cadre des crédits dispensés par les professionnels, plutôt qu’à un revirement général et tonitruant. En effet, la solution de la chambre commerciale, à l’identique de celle retenue par la deuxième chambre civile en 2017 (Civ. 2e, 18 mai 2017, n° 16-17.754, préc.), est rendue à propos d’un aspect bien particulier : le défaut d’information de l’emprunteur sur l’adéquation des risques couverts par l’assurance par rapport à sa situation personnelle. Dans ce cas, la réalisation du risque se détache de la conclusion du contrat pour se fixer au jour du refus de garantie de l’assureur, c’est-à-dire au jour de l’exécution du contrat. Il semble dès lors que cet arrêt participe d’un mouvement jurisprudentiel tendant à fixer le point de départ de la prescription de l’action pour manquement aux devoirs d’information, de mise en garde et de conseil au jour de la réalisation du risque, avec une application distributive au contrat de prêt, ainsi qu’aux contrats d’assurance ou de cautionnement venant en complément (v. H. Barbier, art. préc., p. 865 s.). Suivant cette ligne, la jurisprudence récente retient le point de départ de la prescription au jour de la réalisation du cautionnement pour le contrat de cautionnement (Com. 4 mai 2017, n° 15-22.830, RTD civ. 2017. 865, obs. H. Barbier ), au jour de la conclusion du prêt pour le contrat de prêt (Com. 17 mai 2017, n° 15-21.260, préc.) et au jour du refus de garantie opposé par l’assureur, en matière de contrat d’assurance (Civ. 2e, 18 mai 2017, n° 16-17.754, préc.). Appréhendée de la sorte, la solution dégagée par cet arrêt de la chambre commerciale ne s’applique qu’au contrat d’assurance et non à l’obligation de mise en garde en matière de prêt, pour laquelle la règle de principe revient, qui commande de retenir pour point de départ de la prescription de l’action en responsabilité la date de la conclusion du contrat. Et l’exacte portée de l’arrêt se dessine : il s’agit essentiellement d’un ajustement et non véritablement d’un revirement. Il faudra néanmoins que la jurisprudence future le confirme.
Le dommage résultant d’un défaut d’information de l’emprunteur sur l’étendue des risques couverts par l’assurance souscrite se réalise au moment du refus de garantie opposé par l’assureur. Dès lors, le point de départ de l’action en responsabilité se fixe à cette date.
Le dommage résultant d’un défaut d’information de l’emprunteur sur l’étendue des risques couverts par l’assurance souscrite se réalise au moment du refus de garantie opposé par l’assureur. Dès lors, le point de départ de l’action en responsabilité se fixe à cette date.
Il n’appartient pas aux pouvoirs publics de mettre en demeure les entreprises qui ne se seraient pas conformées à leur obligation de publier un plan de vigilance.
Par une décision du 21 janvier, le Conseil d’État a laissé au ministre de la Justice un délai de trois mois pour fixer le calendrier de mise en œuvre de l’obligation de mise à disposition gratuite de toutes les décisions de justice.
L’acquéreur bénéficie du concours de l’action en garantie décennale et en réparation des vices apparents et lorsqu’il agit en réparation contre le vendeur en l’état futur d’achèvement sur le fondement des articles 1646-1, 1792 et suivants du code civil, le caractère apparent du désordre s’apprécie en la personne du maître de l’ouvrage et au jour de la réception.
La Cour de cassation rappelle que l’intervention est principale lorsqu’elle élève une prétention au profit de celui qui la forme. La haute juridiction en déduit que le désistement de l’une des parties à la demande originelle n’a aucune incidence sur la recevabilité des prétentions liées à l’intervention principale.
L’interruption du délai de prescription et du délai de forclusion par la procédure visant à voir ordonner une mesure d’instruction in futurum n’est pas systématique. C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans l’arrêt sous commentaire.
Par requête du 22 octobre 2010, une société saisit le président d’un tribunal de commerce, sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, afin de voir ordonner la désignation d’un huissier de justice et la réalisation d’investigations dans les locaux appartenant à d’autres sociétés, demande admise par ordonnance du même jour. Le 8 février 2011, elle assigna les mêmes sociétés en référé à fin de mainlevée du séquestre des documents recueillis et conservés par l’huissier de justice conformément à l’ordonnance d’octobre 2010, la mainlevée étant ordonnée en appel le 16 novembre 2011.
La demanderesse décida alors d’assigner au fond les sociétés défenderesses, suivant exploit d’huissier du 25 juin 2014, aux fins de les voir condamner solidairement à l’indemniser. Ces dernières, opposant la prescription de son action au fond, devaient obtenir cependant gain de cause par un arrêt de la cour d’appel de Paris du 10 avril 2019.
Afin d’échapper à la prescription de son action au fond, la demanderesse arguait devant la Cour de cassation que l’interruption du délai de prescription était intervenue par l’effet de la requête du 22 octobre 2010 ainsi que par le jeu de l’assignation en référé du 8 février 2011.
Notion de demande en justice et exigence du contradictoire
Sur le premier moyen, la Cour de cassation confirme l’arrêt d’appel par un attendu doté d’une portée générale : « Une requête fondée sur l’article 145 du code de procédure civile, qui introduit une procédure non contradictoire, ne constitue pas une demande en justice au sens de l’article 2241 du code civil. » En conséquence, la requête du 22 octobre 2010 n’avait pas interrompu le délai de prescription de l’action au fond.
Sur ce point, la Cour de cassation interprète strictement les dispositions de l’alinéa premier de l’article 2241 du code civil lequel énonce que « la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion ».
La haute juridiction semble cependant ajouter une condition non prévue par le texte, celle de l’exigence d’une procédure contradictoire. À suivre le raisonnement de la Cour de cassation, les requêtes remises ou adressées au greffe de la juridiction, si elles ont pour effet d’introduire l’instance conformément à l’article 54 du code de procédure civile, ne constitueraient pas des demandes en justice interruptives du délai d’action.
L’arrêt demeure sur ce point contestable. En effet, la prescription civile a été historiquement instituée afin de sanctionner le créancier négligent qui, bien qu’informé des faits permettant l’exercice de son droit, s’abstient d’agir pendant un certain laps de temps. Dès lors, malgré son caractère non contradictoire, il n’en demeure pas moins que la requête traduit une action positive de la part du créancier et qu’elle introduit en sus une action en justice.
La solution dégagée par la Cour de cassation interroge d’autant plus qu’il est constant que la demande d’aide juridictionnelle interrompt le délai d’action, alors même qu’il ne s’agit pas d’une procédure contradictoire (v. décr. n° 91-1266, 19 déc. 1991, art. 38, devenu depuis le 1er janv. 2021, décr. n° 2020-1717, 28 déc. 2020, art. 43).
En tout état de cause, le praticien doit se montrer particulièrement vigilant quant aux suites à venir de cette jurisprudence. Dans le doute, ce dernier a tout intérêt à systématiquement requérir une mesure d’instruction fondée sur l’article 145 du code de procédure civile par la voie de l’assignation.
Extension prétorienne de l’effet interruptif du délai aux actions liées
Sur le second moyen, la Cour de cassation retient une analyse tout autre. Les juges rappellent tout d’abord la règle prétorienne selon laquelle, « si, en principe, l’interruption de la prescription ne peut s’étendre d’une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions tendent à un même but, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première ».
En effet, il résulte d’une jurisprudence bien établie que l’effet interruptif du délai d’action par l’introduction d’une première action s’étend à une seconde action liée à cette dernière (Civ. 1re, 9 mai 2019, n° 18-14.736, Dalloz actualité, 29 mai 2019, obs. J.-D. Pellier ; D. 2019. 1046 ; RTD civ. 2019. 590, obs. H. Barbier ; RTD com. 2019. 749, obs. B. Bouloc ; Procédures 2019. Comm. 186, obs. Y. Strickler ; v. égal. Civ. 3e, 22 sept. 2004, n° 03-10.923, D. 2004. 2549, et les obs. ; RDI 2004. 569, obs. P. Malinvaud ; RCA 2004. Comm. 340, obs. H. Groutel ; Constr.-Urb. 2004. Comm. 205, obs. M.-L. Pagès-de Varenne). Deux conditions sont alors exigées :
les actions, bien qu’ayant des causes distinctes, doivent tendre à un seul et même but ;la seconde action doit être « virtuellement comprise » dans la première, en d’autres termes, elle doit être son pendant.
En l’espèce, la cour d’appel avait considéré que l’assignation en référé du 8 février 2011 n’avait interrompu la prescription qu’au regard de la seule procédure sur requête et à la mainlevée des séquestres, à l’exclusion de la procédure au fond fondée sur l’exécution déloyale du contrat.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt d’appel au motif qu’ en statuant ainsi, alors que la demande en référé, à fin de mainlevée du séquestre de documents recueillis par un huissier de justice en vertu d’une ordonnance sur requête rendue sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, qui tend, comme la demande au fond, à obtenir l’indemnisation du préjudice, interrompt le délai de prescription de l’action au fond, celle-ci étant virtuellement comprise dans l’action visant à l’obtention de la mesure in futurum, la cour d’appel a violé l’article 2241 du code civil. En d’autres termes, l’assignation en référé du 8 février 2011, laquelle constituait cette fois-ci une demande en justice, avait valablement interrompu le délai de prescription régissant l’action au fond.
La position de la haute juridiction doit ici être approuvée en ce que la mainlevée du séquestre des documents recueillis par l’huissier de justice, à l’issue des investigations réalisées dans les locaux des sociétés défenderesses, avait justement permis à la demanderesse de récolter des informations suffisantes et de poursuivre conséquemment une action en indemnisation devant les juges du fond.
En conséquence, le délai de prescription avait été interrompu le 8 février 2011 jusqu’au jour de l’arrêt d’appel du 16 novembre 2011 ayant ordonné la mainlevée. En effet, l’interruption du délai d’action par la demande en justice se prolonge jusqu’à l’extinction de l’instance, c’est-à-dire jusqu’au jour où le litige trouve définitivement sa solution (Civ. 2e, 8 avr. 2004, n° 02-15.096 P). Un nouveau délai avait commencé à courir à compter de cette date. Dès lors, l’assignation au fond introduite le 25 juin 2014 n’était pas prescrite.
Illustration schématique :
La requête visant à obtenir une mesure d’instruction in futurum, qui n’est pas une demande en justice au sens de l’article 2241 du code civil, n’est pas interruptive du délai d’action. L’assignation au fond bénéficie de l’effet interruptif du délai d’action par l’assignation en référé à fin de mainlevée du séquestre de documents recueillis par l’huissier de justice, en ce qu’elle est virtuellement comprise dans cette dernière et que ces deux actions tendent à un seul et même but, celui d’obtenir l’indemnisation du préjudice.
Le Conseil d’État précise les conditions dans lesquelles l’autorité compétente en matière de réseau de distribution d’eau potable est tenue de donner suite à une demande de réalisation des travaux de raccordement.
À défaut d’accord collectif, le recours au vote électronique peut résulter d’une décision unilatérale de l’employeur. Cette décision unilatérale peut, en l’absence de délégués syndicaux dans l’entreprise ou dans le groupe, être prise par l’employeur sans qu’il soit tenu de tenter préalablement une négociation selon les modalités dérogatoires.
Le Conseil d’État indique les modalités d’examen d’une demande d’asile présentée par un étranger parent d’un ou plusieurs enfants mineurs.
Des élections professionnelles par internet dans la fonction publique sont annulées au motif que les électeurs pouvaient obtenir une réédition de leurs identifiant et mot de passe sans contrôle suffisant.
La demande d’un héritier tendant à voir fixer sa créance à l’égard de la succession ne constitue pas une opération de partage. Elle est recevable même si un partage judiciaire n’a pas été ordonné. Elle peut être formée contre un seul héritier mais la décision à intervenir sera inopposable aux autres indivisaires s’ils ne sont pas mis en cause.
La division des dettes successorales se distingue de l’indivisibilité de l’action en partage. L’héritier qui disposaient d’une créance contre le de cujus n’est donc pas tenu de diriger ses demandes contre tous les héritiers. Cette souplesse de bon sens présente le risque d’attiser les conflits entre cohéritiers, d’autant plus lorsqu’il s’agit d’anciens conjoints. L’arrêt rendu ce 16 décembre 2020 en témoigne.
En l’espèce une personne était décédée en 2011 dans un accident de la circulation en laissant à sa survivance son père, sa mère et cinq demi-frères et sœurs, issus de l’union de la mère avec un autre homme. Celle-ci prétendait détenir une créance contre son fils au titre de l’aide et de l’assistance qu’elle lui avait prodiguées avant son décès et qui dépassaient semble-t-il l’obligation alimentaire d’une mère envers son fils. Indépendamment de la procédure de partage judiciaire, pendante devant le tribunal judiciaire de Bourgoin-Jallieu, la mère a assigné le père en fixation d’une créance contre la succession.
La demande fut déclarée une première fois irrecevable par un arrêt rendu le 26 janvier 2016 par la cour d’appel de Lyon. Pour les juges du fond, la prétention s’analysait en une contestation née à l’occasion du règlement de la succession et la demanderesse ne justifiait pas d’une tentative de partage amiable. De plus, l’ouverture des opérations de liquidation-partage n’avait pas été ordonnée judiciairement et les droits respectifs des héritiers restaient à déterminer.
L’arrêt est cassé par la première chambre civile de la Cour de cassation le 12 juillet 2017 au motif que les juges du fond n’avaient pas invité au préalable les parties à présenter leurs observations sur ces moyens relevés d’office (Civ....
Le juge est tenu de relever d’office la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée attachée à une décision précédemment rendue dans la même instance. Il en découle que le tribunal de grande instance, saisi d’une exception de procédure déjà tranchée par le juge de la mise en état, est tenu de relever d’office la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée attachée à l’ordonnance de ce juge. Dès lors que la cour d’appel connaît, par l’effet dévolutif de l’appel, de l’affaire soumise à la juridiction du premier degré, elle est elle-même tenue de relever d’office cette fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée, après l’avoir soumise à la contradiction.
Un arrêt du 14 janvier 2021, destiné à une large publication, revient une fois de plus sur l’autorité de la chose jugée. Même s’il est rendu au visa, notamment, de l’article 1355 du code civil, il ne s’agit pas ici de rappeler la teneur de l’attribut, telle qu’elle est inscrite (artificiellement) dans ce texte, qui a repris mot à mot l’historique article 1351 ; il ne met pas non plus en œuvre l’obligation de concentration des moyens – liée par la Cour de cassation à l’autorité de la chose jugée (sur ces aspects, v. en dernier lieu, C. Bléry, Encore l’autorité de chose jugée !, à propos de Civ. 2e, 10 déc. 2020, n° 19-12.140, F-P+B+I, Dalloz actualité, 19 janv. 2021 et les réf.). Il est ici doublement question des pouvoirs du juge à l’égard de l’exception de chose jugée, tant en première instance qu’en appel. La deuxième chambre civile rappelle quels sont ces pouvoirs, alors que l’exception de chose jugée repose sur l’existence d’une précédente décision rendue dans la même instance et qu’un appel – avec son effet dévolutif – est ensuite interjeté.
L’arrêt est en outre une illustration de la latitude, offerte à la Cour de cassation, de statuer au fond : l’article L. 411 3 du code de l’organisation judiciaire, issu de la loi « JXXI » n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, permet à la Cour de cassation « en matière civile, [de] statuer au fond lorsque l’intérêt d’une bonne administration de la justice le justifie » (al. 2). Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application de cette disposition (al. 6), à savoir le décret n° 2017-396 du 24 mars 2017 (C. Chainais, F. Ferrand, L. Mayer et S. Guinchard, Procédure civile, 34e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2018, n° 1398 ; J. Héron, Droit judiciaire privé, 7e éd., 2019, par T. Le Bars et K. Sahli, n° 853) : le président de la formation ou le conseiller rapporteur indique les chefs du dispositif de la décision attaquée susceptibles d’être atteints par la cassation et peut demander aux parties de communiquer toute pièce utile à la décision. Si « pour l’instant, la Cour de cassation semble faire un usage modéré du pouvoir qui lui a été accordé par l’article L. 411-3 du code de l’organisation judiciaire, à l’occasion de la réforme du 18 novembre 2016 » (J. Héron, Droit judiciaire privé, op. cit., n° 853), il est indéniable qu’elle s’en empare (V. déjà, Civ. 2e, 17 sept. 2020, n° 19-15.814 F-P+B+I, Lexbase avocats n° 307 du 1er oct. 2020, N4714BYA, C. Bléry).
Une banque assigne un client emprunteur devant le tribunal de grande instance de Marseille. Celui-ci soulève l’incompétence de ce tribunal au profit de la juridiction monégasque. Le juge de la mise en état, par une ordonnance du 18 avril 2016, déclare le tribunal marseillais compétent pour statuer sur la demande en paiement de la banque. L’ordonnance ne fait l’objet d’aucun appel (alors que l’art. 776, al. 3, 2°, permettait l’appel immédiat des ordonnances du JME statuant sur une exception de procédure). Le tribunal de grande instance condamne l’emprunteur à verser à la banque diverses sommes au titre du prêt.
Le client interjette appel du jugement et décline à nouveau la compétence du tribunal.
La cour d’appel infirme le jugement déféré en toute ses dispositions. Elle déclare également le tribunal de grande instance de Marseille territorialement incompétent au profit de la juridiction monégasque.
La banque se pourvoit en cassation et présente un moyen divisé en deux branches : la première reproche à la cour d’appel un excès de pouvoir et une violation des articles 771, 772 et 775 du code de procédure civile pour avoir statué sur une exception de procédure préalablement rejetée par une ordonnance du juge de la mise en état contre laquelle aucune voie de recours n’avait été exercée ; la seconde invoque une méconnaissance de l’autorité de la chose jugée attachée à l’ordonnance, en violation des articles 480 et 775 du code de procédure civile, ensemble l’article 1355 du code civil.
La deuxième chambre civile casse, sans renvoi, pour violation de l’article 1355 du code civil et des articles 125, alinéa 1er, 561 et 775 (dans sa rédaction antérieure au décr. n° 2019-1333 du 11 déc. 2019) du code de procédure...
L’Agence française anticorruption a publié ses nouvelles recommandations le 12 janvier 2021. Les anciennes recommandations dataient de décembre 2017. Cette nouvelle version, fruit d’une véritable concertation préalable, porte de nouvelles attentes ambitieuses, invitant les entreprises et leurs conseils à faire plus que jamais preuve d’agilité.
La perte de chance d’avoir effectué un investissement plus rentable peut être évaluée en comparant l’avantage fiscal attaché à un investissement outre-mer avec un investissement locatif immobilier qui aurait été réalisé en métropole en conservant une valeur stable.
La perte de chance d’avoir effectué un investissement plus rentable peut être évaluée en comparant l’avantage fiscal attaché à un investissement outre-mer avec un investissement locatif immobilier qui aurait été réalisé en métropole en conservant une valeur stable.
L’Assemblée nationale a adopté, le 28 janvier, une proposition de loi visant à réformer le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles. Le texte entend simplifier les démarches des communes comme des sinistrés et améliorer l’indemnisation.
La Cour nationale du droit d’asile a publié son rapport d’activité. Alors que le nombre de recours était en constante augmentation depuis sept ans, celui-ci a baissé de 22 % en 2020.
La question prioritaire de constitutionnalité relative à l’incapacité de recevoir à titre gratuit énoncée par l’article L. 116-4 du code de l’action sociale et des familles présente un caractère sérieux car ce texte a pour conséquence de réduire le droit de disposer librement de ses biens, hors tout constat d’inaptitude du disposant.
L’incapacité spéciale de recevoir à titre gratuit serait-elle contraire à la protection constitutionnelle de la propriété ? C’est en substance la question posée au Conseil constitutionnel, auquel a été renvoyé une question prioritaire de constitutionnalité par cet arrêt rendu le 18 décembre 2020 par la première chambre civile de la Cour de cassation.
Les faits sont simples. Une personne décède en 2018 en laissant à sa survivance divers cousins. Un testament olographe rédigé le 18 janvier 2017 les désigne légataires universels. Le même acte contient en sus un legs à titre particulier au bénéfice de l’employée de maison, portant sur un appartement et son contenu.
La vocation à l’universalité qui caractérise la situation des légataires universels ne les place pas toujours en position favorable. Non-seulement ils doivent, en tant que continuateurs de la personne du défunt, contribuer aux dettes successorales, mais de surcroît ils n’exercent leurs droits que sur le reliquat d’actif après déduction des legs à titre particulier. Ainsi vaut-il parfois mieux être l’unique légataire particulier que l’un des nombreux légataires universels. C’est précisément où le bât blesse en l’espèce. Désireux d’étendre leurs droits sur l’immeuble légué, les légataires universels ont assigné la légataire à titre particulier en nullité de son legs devant le tribunal judiciaire de Toulouse. Ils fondaient leur demande sur l’article L. 116-4 du code de l’action sociale et des familles qui énonce une incapacité spéciale de recevoir à titre gratuit à l’endroit de certaines personnes physiques délivrant des services d’aide à la personne, notamment « les services aux personnes à leur domicile relatif aux tâches ménagères ou familiales » (C. trav., art. L. 7231-1, 3°). Les aidants « ne peuvent profiter de dispositions à titre gratuit entre vifs ou testamentaires faites en leur faveur par les personnes prises en charge ».
La défenderesse étant directement concernée par le texte, son salut ne peut venir que d’une remise en cause de celui-ci. C’est pourquoi elle a posé aux juges du fond une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée : « L’article L. 116-4 du code de l’action sociale et des familles méconnaît-il les droits et libertés garantis par les articles 2, 4 et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 ? ».
Par jugement du 30 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Toulouse a transmis cette question à la Cour de cassation, laquelle devait examiner si les conditions de son renvoi au Conseil constitutionnel étaient réunies. La question étant applicable au litige (la légataire était employée de maison de la testatrice) et n’ayant jamais été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, il restait à en examiner le caractère sérieux. Sur ce point la motivation de la Cour de cassation va droit au but : « La question présente un caractère sérieux en ce que, ayant pour conséquence de réduire le droit de disposer librement de ses biens, hors tout constat d’inaptitude du disposant, l’article L. 116-4 du code de l’action sociale et des familles pourrait être de nature à porter atteinte aux articles 2, 4 et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 28 août 1789 ». Le renvoi est donc ordonné.
Quelle sera la position du Conseil ? Il y a fort à parier que le texte obtiendra son brevet de conventionnalité et que la nullité du legs pourra en conséquence être obtenue. Certes, le droit de propriété est constitutionnellement protégé : l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 le classe au rang des droits naturels et imprescriptibles de l’homme ; l’article 4 ne tolère que les atteintes assurant à autrui le respect du même droit ; et l’article 17 en fait sans ambages un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé « si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité ».
C’est néanmoins un aspect bien particulier de la propriété qui est ici questionné : le...
En cas d’annulation de la convention de forfait-jours, le paiement des jours de réduction du temps de travail accordés en exécution de celle-ci devient indû fondant dès lors l’employeur à en réclamer le remboursement.
L’exercice de la tierce opposition contre les jugements rendus en matière de procédure collective est un art délicat. La récurrence du contentieux en ce domaine, déjà liée aux difficultés procédurales associées à l’exercice de cette voie de recours, résulte en outre de la conciliation difficile des intérêts antagonistes du droit des entreprises en difficulté. S’il faut ménager le droit à l’accès au juge des personnes concernées par la faillite, il faut dans le même temps veiller à conserver une certaine efficacité dans le traitement de l’insolvabilité.
Naviguant entre rigueur procédurale et pragmatisme, l’arrêt rendu par la Cour de cassation réunie en chambre commerciale le 20 janvier 2021 témoigne de ces antagonismes. Il confirme en outre que la rencontre du droit des entreprises en difficulté avec les règles de la procédure civile et du droit des sociétés se fait rarement sans heurts.
En l’espèce, une banque a consenti courant 2007 deux prêts à une société civile immobilière (SCI). Quelques années plus tard, par un arrêt du 24 mars 2011, la société a été condamnée à payer à la banque diverses sommes dues au titre de ces prêts. Le 3 février 2014, la personne morale est placée en redressement judiciaire, puis le 9 février 2015, en liquidation judiciaire. La banque a régulièrement déclaré sa créance relative à l’arrêt du 24 mars 2011 et celle-ci est admise au passif de la liquidation judiciaire par une ordonnance du juge-commissaire du 2 février 2015.
Assignés en paiement par la banque, les associés de la SCI, tenus en tant que tels des dettes de la société à proportion de leur part dans le capital social, ont formé tierce opposition à l’arrêt du 24 mars 2011 et ont sollicité l’annulation des contrats de prêts et le rejet de la demande en paiement. La cour d’appel estime recevable la tierce opposition formée par les associés et fait droit à leurs demandes.
La banque se pourvoit en cassation et la haute juridiction censure l’arrêt d’appel. Pour la Cour de cassation, les associés sont dépourvus d’intérêt à former tierce opposition à l’encontre du jugement antérieur à la procédure collective condamnant la société au paiement de plusieurs sommes.
Plus précisément, la Cour reproche aux associés de la personne morale débitrice de s’être privés des canaux de la procédure collective en ne présentant pas de réclamation à l’état des créances pour contester la créance de la banque (C. com., art. R. 624-8, al. 4).
Afin de comprendre l’essence de cette décision, un retour sur les principes applicables en la matière est nécessaire.
Les décisions du juge-commissaire statuant sur l’admission des créances peuvent être contestées par les parties elles-mêmes, c’est-à-dire les parties à la vérification du passif : le débiteur, le créancier et le mandataire judiciaire (par ex., v. Com. 19 mai 2015, n° 14-14.395, Bull. civ. IV, n° 84 ; Dalloz actualité, 9 juin 2015, obs. X. Delpech ; D. 2015. 1152 ; RTD com. 2015. 748, obs. A. Martin-Serf ).
Par ailleurs, toute personne intéressée peut présenter une réclamation auprès du juge-commissaire contre ses décisions d’admission, de rejet ou d’incompétence dans le mois du dépôt de l’état des créances au greffe (C. com., art. R. 624-8, al. 4). Ce recours est réservé aux personnes qui n’ont pas la qualité de partie à l’instance de vérification de la créance contestée. Cette caractéristique fait de la réclamation une variété de tierce opposition.
Ce recours revêt un intérêt tout particulier pour les « garants » et plus généralement, pour les personnes susceptibles d’être appelées à payer la dette du débiteur sous procédure collective. En effet, puisque l’admission d’une créance au passif est une véritable décision de justice, une fois les voies de recours épuisées, la décision acquiert force de chose jugée et les créances admises ont autorité de chose jugée quant à leur montant, leur nature et leur principe (Com. 3 mai 2011, n° 10-18.031, Bull. civ. IV, n° 63 ; Dalloz actualité, 11 mai 2011, obs. A. Lienhard ; D. 2011. 1279, obs. A. Lienhard ; ibid. 2069, obs. P.-M. Le Corre et F.-X. Lucas ; ibid. 2012. 1573, obs. P. Crocq ; RTD com. 2011. 798, obs. A. Martin-Serf ; 1er mars 2005, n° 03-19.539 NP). Par conséquent, une fois l’admission acquise, le tiers ne peut plus ensuite contester le principe ou le quantum de la créance (Com. 22 oct. 1996, n° 94-14.570 NP ; D. 1997. 2 ; Rev. sociétés 1997. 596, note P. Didier ).
Sur un plan théorique, cette solution peut trouver diverses explications en fonction de la qualité du tiers intéressé par l’admission de la créance.
Elle a parfois reposé sur la notion de représentation mutuelle des co-obligés, notamment pour expliquer son application à des cautions solidaires (Com. 9 janv. 2001, n° 97-22.053 NP) ou à des codébiteurs solidaires (Com. 20 sept. 2005, n° 04-14.410 NP). Dans ces cas, la solidarité entre les co-obligés implique qu’une décision ayant autorité de chose jugée entre un créancier et l’un des co-obligés s’impose aux autres obligés solidaires. Toutefois, le concept de représentation mutuelle des co-obligés ne permet pas d’expliquer l’ensemble des solutions rendues en la matière (outre les nombreuses critiques portées à la notion, v. P. Veaux-Fournerie et D. Veaux, « La représentation mutuelle », in Mélanges Weill, Dalloz, 1983, p. 547 s. ; M. Mignot, Les obligations solidaires et les obligations in solidum en droit privé français, préf. E. Loquin, Dalloz, coll. « Nouvelle bibliothèque des thèses », 2002, vol. 17, nos 147 s.). Par exemple, s’il est reconnu qu’une caution simple ne peut plus se prévaloir des exceptions inhérentes à la dette après l’admission au passif de la créance garantie, ce principe ne peut être fondé sur une éventuelle solidarité. Au contraire, il est admis que l’autorité de chose jugée d’une admission au passif du débiteur principal sur une caution simple s’explique sous l’angle de la règle de l’accessoire (P.-M. Le Corre, Droit et pratique des procédures collectives, 10e éd., Dalloz Action, 2019-2020, n° 723.241).
En l’espèce, la Cour de cassation estime que l’autorité de chose jugée attachée à l’admission au passif s’impose à l’associé de SCI et que ce dernier doit former une réclamation à l’état des créances s’il entend contester la somme due par la personne morale débitrice.
Il ne fait pas de doute que l’associé de société civile est un tiers intéressé par l’admission de la créance, mais sa situation n’est en rien comparable à celle d’une caution ou d’un codébiteur solidaire (C. Lebel, « L’obligation aux dettes sociales des associés en cas de défaillance de la société débitrice », in Mélanges D. Tricot, Dalloz/LexisNexis, 2011, spéc. p. 495, n° 15).
Le seul fait de répondre des dettes sociales ne confère pas la qualité de co-obligé (Com. 20 mars 2012, n° 10-27.340, Bull. civ. IV, n° 61 ; Dalloz actualité, 28 mars 2021, obs. A. Lienhard ; D. 2012. 874, obs. A. Lienhard ; Rev. sociétés 2012. 577, note O. Dexant - de Bailliencourt ). Dans la même veine, contrairement à la caution engagée envers le créancier à payer la dette d’autrui, il n’y a ici qu’une dette sociale avec deux degrés de poursuite pour le créancier : le premier contre la société et le second, subsidiairement, contre les associés (M. Cozian, A. Viandier et F. Deboissy, Droit des sociétés, 33e éd., LexisNexis, 2020, nos 1821 et 1823). À cet égard, la doctrine qualifie les associés d’une société civile comme des débiteurs subsidiaires des dettes sociales (P. Briand, Retour sur la notion de co-obligé, BJS sept. 2012, n° 351), tandis que la Cour de cassation voit en eux des garants subsidiaires (Com. 29 mars 2011, n° 10-15.554, BJS 2011, p. 571, note F.-X. Lucas), mais refuse d’assimiler leur situation à un cautionnement (Civ. 1re, 17 janv. 2006, n° 02-16.595, Bull. civ. I, n° 15 ; D. 2006. 2660, obs. V. Avena-Robardet , note F. Bicheron ; ibid. 2007. 267, obs. J.-C. Hallouin et E. Lamazerolles ; Rev. sociétés 2006. 540, note D. Legeais ; RTD com. 2006. 419, obs. C. Champaud et D. Danet ; ibid. 432, obs. M.-H. Monsèrié-Bon et L. Grosclaude ).
Quoi qu’il en soit, si l’autorité de chose jugée attachée à la décision d’admission au passif s’impose à l’associé de SCI, cette solution ne peut s’expliquer sous l’angle de la solidarité ou de la règle de l’accessoire. Dès lors, les parallèles avec la situation des garants du débiteur face aux effets de la décision d’admission au passif sont peu pertinents dans la recherche des fondements de l’arrêt sous commentaire.
En réalité, le raisonnement porté par l’arrêt fait sens au regard des conditions relatives à la poursuite des associés d’une société civile par un créancier social lorsque la société est en procédure collective.
Pour rappel, en droit commun, le créancier ne peut poursuivre le paiement des dettes sociales contre les associés qu’après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale (C. civ., art. 1858). Lorsque la société est en procédure collective, cette condition est remplie par la déclaration de la créance à la procédure collective de la société (Cass., ch. mixte, 18 mai 2007, n° 05-10.413, Bull. ch. mixte, n° 4 ; D. 2007. 1414 , obs. A. Lienhard ; Rev. sociétés 2007. 620, note J.-F. Barbièri ; RTD com. 2007. 550, obs. M.-H. Monsèrié-Bon ; ibid. 597, obs. A. Martin-Serf ).
Par le biais de la déclaration de créance, le créancier s’ouvre la voie des poursuites contre les associés indéfiniment tenus à la dette à proportion de leur participation dans le capital social. Ceci permet d’expliquer que les associés de société civile sont recevables à former tierce opposition contre le jugement ayant fixé une créance au passif de la société (Com. 26 mai 2010, n° 09-14.241 NP, Dalloz actualité, 8 juin 2010, obs. A. Lienhard ; D. 2010. 1415, obs. A. Lienhard ; Rev. sociétés 2010. 406, obs. P. Roussel Galle ; RTD com. 2010. 567, obs. M.-H. Monsèrié-Bon ).
La déclaration de créance et, par suite, son admission vont donc déterminer l’importance des montants susceptibles d’être réclamés par le créancier à l’associé. Dans cette mesure, l’associé est tout autant concerné par l’admission au passif que ne l’est la personne morale débitrice. La poursuite de l’associé dépend de l’existence de la dette sociale, laquelle doit être reconnue par la procédure collective. En effet, ce n’est qu’à condition que la dette sociale soit admise au passif de la procédure collective que l’associé, débiteur subsidiaire, peut être poursuivi. Au contraire, si la créance est rejetée par le juge-commissaire, le créancier ne pourra poursuivre l’associé, la dette sociale ayant disparu du fait du rejet.
Dès lors, puisque l’admission au passif est une condition de l’action du créancier social contre l’associé, le seul moyen pour ce dernier de contester le bien-fondé de cette action est de se soumettre, lui aussi, aux canaux de la procédure collective. En l’espèce, il s’agissait de la réclamation à l’état des créances et seul ce recours pouvait assurer aux associés un droit à l’accès au juge conforme aux exigences de la Convention européenne des droits de l’homme (Com. 12 janv. 2016, n° 15-40.036 NP, RTD com. 2016. 200, obs. A. Martin-Serf ).
Sous cet angle, la solution fournie par la Cour de cassation nous paraît tout à fait logique. Aussi, concédons qu’elle était, en outre, prévisible.
Certes, la haute juridiction a un temps reconnu que les associés d’une société civile pouvaient contester les droits du créancier – déjà admis au passif – dans le cadre d’une instance engagée contre eux en dehors de la procédure collective et tendant au support du passif social (Com. 28 sept. 2004, n° 02-15.755 NP). Toutefois, cette solution semble avoir vécu, car il a plus récemment été jugé qu’en cas d’admission d’une créance au passif et à défaut de réclamation à l’état des créances formée par l’associé d’une SCI, ce dernier ne pouvait soulever, par la suite, la prescription de la créance pour échapper à son obligation à la dette (Com. 13 oct. 2015, n° 11-20.746, Bull. civ. IV, n° 837 ; D. 2015. 2125 ; Rev. sociétés 2016. 298, note J.-F. Barbièri ).
En se détachant quelque peu de la technicité des règles, n’oublions pas que l’un des objectifs premiers du droit des entreprises en difficulté est la célérité. Aussi, que le tiers intéressé à l’admission de la créance soit une caution, un codébiteur solidaire ou un associé obligé aux dettes sociales, ces derniers ont vocation à faire valoir un certain nombre d’arguments communs à ceux susceptibles d’être opposés par le débiteur au créancier. Dans ces conditions, pour se préserver de décisions contradictoires, l’obligation d’employer les canaux de la procédure collective ne paraît pas dénuée de sens et explique qu’en l’espèce, la tierce opposition de l’associé en dehors de la procédure collective ait été jugée irrecevable.
Pour finir, à suivre l’arrêt commenté, la réclamation à l’état des créances permet de garantir à l’associé son droit effectif à l’accès au juge. Théoriquement, l’affirmation est exacte. En pratique, il est en revanche possible de se demander s’il ne s’agirait pas là d’une gageure.
Le propos est provocant. Pourtant, il nous semble pertinent, car la réclamation à l’état des créances est enfermée dans le confortable délai de… trente jours à compter du dépôt de l’état des créances au greffe. Dès lors, est-ce qu’un délai d’action aussi réduit garantit véritablement un droit effectif à l’accès au juge ?
La réponse à cette dernière question est difficile et n’était de toute façon pas abordée au sein de l’arrêt commenté et en dépasse largement le cadre. Elle confirme cependant toute la complexité liée à la conciliation du droit à l’accès au juge des personnes concernées par la faillite et le maintien d’une certaine efficacité dans le traitement des difficultés de l’entreprise.
L’autorité de chose jugée attachée à la décision d’admission d’une créance au passif de la liquidation judiciaire d’une société civile s’impose à ses associés. Par conséquent, l’associé n’ayant pas formé de réclamation à l’état des créances (C. com., art. R. 624-8) est sans intérêt à former tierce opposition à la décision antérieure condamnant la société au paiement de la créance admise au passif.
L’autorité de chose jugée attachée à la décision d’admission d’une créance au passif de la liquidation judiciaire d’une société civile s’impose à ses associés. Par conséquent, l’associé n’ayant pas formé de réclamation à l’état des créances (C. com., art. R. 624-8) est sans intérêt à former tierce opposition à la décision antérieure condamnant la société au paiement de la créance admise au passif.
Avec patience, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation semble faire sien l’adage, Repetitio est mater studiorum, généralement maladroitement traduit par « la répétition est la mère de la pédagogie », le plus souvent attribué à Saint Thomas d’Aquin.
Ainsi, inlassablement, à destination des juges du fond et des parties, elle répète ce qu’elle a parfois déjà précisé, notamment que le juge de l’exécution :
- ne peut prononcer une condamnation en paiement hors les cas prévus par la loi (Civ. 2e, 19 nov. 2020, n° 19-20.700, Dalloz actualité, 5 janv. 2021, obs. F. Kieffer) ;
- doit examiner le bien fondé de la contestation portant sur le fond du droit, même lorsqu’il est saisi d’une autorisation de pratiquer une mesure conservatoire (Civ. 2e, 22 oct. 2020, n° 19-16.347, Dalloz actualité, 11 déc. 2020, obs. F. Kieffer ; Rev. prat. rec. 2020. 8, chron. C. Kieffer et Ulrik Schreiber ) ou que celle-ci est contestée (Civ. 2e, 14 janv. 2020, n° 19-18.844) ;
- ne peut plus statuer sur les contestations et demandes incidentes qui sont soumises à son examen s’il constate que le commandement est périmé (Civ. 2e, 21 mars 2019, n° 17-31.170, Dalloz actualité, 4 avr. 2019, obs. J. Couturier ; D. 2019. 1306, obs. A. Leborgne ; AJDI 2019. 807 , obs. F. Cohet ) ;
- ne peut relever d’office une contestation lorsque le projet de distribution n’a pas été contesté par le partie sauf à se rendre coupable d’un excès de pouvoir (Civ. 2e, 17 sept. 2020, n° 19-10.366, Dalloz actualité, 24 sept. 2020, obs. F. Kieffer ; D. 2020. 1844 ; Rev. prat. rec. 2020. 15, chron. I. Faivre, Anne-Isabelle Gregori, Rudy Laher et A. Provansal ; RTD civ. 2020. 951, obs. N. Cayrol ) ;
- est incompétent pour connaître des contestations sur le titre exécutoire lorsque le créancier a renoncé à la procédure de saisie immobilière en faisant radier le commandement (Civ. 2e, 5 janv. 2017, n° 15-26.694).
La décision commentée est dans le droit fil de cette vertu pédagogique.
Il est vrai que les faits s’y prêtaient, le parcours du combattant précédant l’arrêt de la Cour de cassation ayant débuté en 2011. Ce...
En application de l’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire, lorsqu’il a été mis fin à la procédure de saisie immobilière, le juge de l’exécution ne peut plus connaître des contestations élevées à l’occasion de celle-ci ni statuer sur les demandes reconventionnelles nées de cette procédure ou s’y rapportant.
Le tribunal administratif de Paris reconnaît la carence partielle de l’Etat à respecter les objectifs qu’il s’est fixés en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Le 21 janvier 2021, Google et l’Alliance de la presse d’information politique générale en France ont annoncé la conclusion d’un accord relatif aux droits voisins. Ce que l’on sait de la nature, du périmètre ou encore de la portée de l’accord interroge sur ses enjeux et confirme le caractère subversif de l’approche de Google.
Ces deux arrêts – promis à une publication élargie (FS+P+B+I) – aux résultats diamétralement opposés, sont riches d’enseignement à la fois sur la territorialité des procédures civiles d’exécution mais aussi sur les possibilités de recouvrement à l’encontre d’un État étranger.
Sans entrer dans les détails des faits de chacune de ces décisions, il convient cependant d’en évoquer quelques lignes.
Dans le pourvoi n° 18-17.937, d’anciens salariés de l’ambassade des États-Unis d’Amérique ont obtenu des décisions en matières prud’homales condamnant les États-Unis d’Amérique et l’ambassadeur des États-Unis d’Amérique pris en sa qualité de représentant de ceux-ci.
En vertu des décisions qu’ils ont obtenu, les créanciers ont pratiqué une saisie-attribution des loyers entre les mains d’une société de droit américain dont le siège social était aux États-Unis, dans l’Ohio, qui était également locataire pour un établissement situé à Paris, dans un immeuble dont les États-Unis étaient propriétaires.
Dans le pourvoi n° 19-10.801, en vertu d’une sentence arbitrale exécutoire en France prononcée à l’encontre de la République du Panama et de l’autorité du Canal du Panama, un créancier a fait pratiquer une saisie-attribution du compte bancaire de ses débiteurs, entre les mains de la succursale parisienne d’une banque ayant son siège social à Londres.
Dans la première décision, la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la cour d’appel qui avait ordonné la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée entre les mains du locataire.
Dans la seconde décision, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi qui reprochait à l’arrêt de la cour d’appel d’avoir ordonné la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée entre les mains de la banque étrangère.
Ces deux décisions qui semblent contradictoires appliquent pourtant la même règle.
Premier obstacle, il est permis de constater que des procédures civiles d’exécution dans les deux espèces ont été poursuivies à l’encontre d’États étrangers, les États-Unis dans un cas et la République du Panama, dans l’autre.
Or, il est important de rappeler que le fait qu’il s’agisse d’un État souverain condamné n’est pas en soit un obstacle à toutes mesures d’exécutions sur le territoire national, l’article L. 111-1-1 du code des procédures civile d’exécution prévoyant seulement, dans cette hypothèse, qu’une autorisation du juge de l’exécution est requise au préalable.
Puisque, par application des règles du droit international privé, les États bénéficient d’une immunité d’exécution de principe, il est permis de penser qu’aucune procédure civile d’exécution ne peut être pratiquée à leur encontre, sauf dans les cas où ils auraient renoncé à leur immunité.
Toutefois, ce principe connaît des exceptions.
Ainsi, l’immunité d’exécution des États étrangers tombe lorsque le bien ou la créance saisi a été affecté à l’activité économique ou commerciale relevant du droit privé (Civ. 1re, 14 mars 1984, n° 82-12.462, Eurodif, D. 1984. Jur. 625).
Ainsi, lorsque ces conditions d’exception ne sont pas réunies, la voie d’exécution n’est pas possible (voir dans ce sens, Civ. 1re, 5 mars 2014, n° 12-22.406, Dalloz actualité, 19 mars 2014, obs. V. Avena-Robardet ; D. 2014. 672 ; ibid. 1466, obs. A. Leborgne ; ibid. 1967, obs. L. d’Avout et S. Bollée ; Just. & cass. 2015. 115, étude P. Chevalier ).
En l’espèce, dans les deux décisions commentées, le créancier a pratiqué une mesure d’exécution qui entrait dans le champ des exceptions à l’immunité d’exécution.
Ce premier obstacle levé, le créancier pouvait-il valablement pratiquer une saisie-attribution des loyers entre les mains d’une société ayant son siège social aux États-Unis d’une part, ou de la succursale en France d’une banque dont le siège social était à Londres ?
Pour répondre à cette épineuse question, la Cour de cassation a appliqué avec une grande simplicité les règles relatives à la territorialité des procédures civiles d’exécution.
Dans le pourvoi n° 18-17.937, elle a considéré que la saisie-attribution pratiquée portant sur une créance saisie résultant d’un contrat de bail signé entre les États-Unis d’Amérique et une société de droit américain dont le siège était dans l’Ohio était possible s’il était démontré que le tiers saisi était établi en France soit en y ayant soit son siège social, soit en disposant d’une entité ayant le pouvoir de s’acquitter du paiement d’une créance du débiteur saisi à son encontre.
Dans le cas de la saisie-attribution des loyers pratiquée à l’encontre de la société américaine locataire en France, ayant observé que les loyers étaient payés sur un compte ouvert dans une agence de la Société Générale en France, elle a considéré que la saisie-attribution était régulièrement pratiquée, le tiers saisi disposant bien d’une entité en France ayant le pouvoir de s’acquitter des loyers.
En revanche, dans le pourvoi n° 19-10.801, la Cour de cassation a retenu que la saisie-attribution pratiquée sur le compte bancaire détenu par le débiteur auprès d’une succursale d’une banque dont le siège social était à Londres, succursale dans laquelle aucun compte n’était ouvert au nom du débiteur saisi, ne répondait à ces conditions.
Elle a donc rejeté le pourvoi formé à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel qui avait ordonné la mainlevée de cette saisie-attribution.
Cette décision peut sembler surprenante car la jurisprudence française avait déjà admis qu’un créancier pouvait faire pratiquer une saisie-attribution entre les mains d’une banque française et que cette saisie s’étendait aux fonds déposés auprès de sa succursale monégasque (Civ. 2e, 14 févr. 2008, n° 05-16.167, D. 2008. 686 , obs. V. Avena-Robardet ; ibid. 2373, chron. J.-M. Sommer et C. Nicoletis ; ibid. 2560, obs. L. d’Avout et S. Bollée ; ibid. 2009. 1044, obs. D. R. Martin et H. Synvet ; ibid. 1168, obs. A. Leborgne ; RTD civ. 2008. 357, obs. R. Perrot ; RTD com. 2008. 601, obs. D. Legeais ; ibid. 2009. 648, obs. P. Delebecque ).
Aussi cette position est étonnante car comme l’avait souligné un auteur : « La limitation des effets d’une saisie-attribution au seul compte détenu dans une succursale ne peut qu’être source de difficulté (…) et ne semble pas en phase avec l’évolution des technologies de la communication qui permettent à chaque établissement teneur de compte d’accéder à l’ensemble des autres comptes du dépositaire » (E. de Leiris, Droit et pratiques des procédures civiles d’exécution, Dalloz Action, 2018 -2019, p. 1025, § 0922.14).
Néanmoins, dans les deux arrêts commentés, la règle posée par la Cour de cassation a au moins le mérite de la simplicité, la procédure civile d’exécution sera possible lorsque le tiers saisi est établi en France, qu’il y a son siège social ou y dispose d’une entité ayant le pouvoir de s’acquitter du paiement d’une créance du débiteur saisie à son encontre.
Si ces conditions sont réunies, la saisie-attribution pourra être valablement pratiquée.
Dans le cas contraire, elle sera irrégulière et pourra faire l’objet d’une mainlevée.
Près de 35 000 escroqueries ont été constatées depuis mars 2020, rendant les déclarations de soupçon des professionnels des entreprises en difficulté stratégiques dans la lutte contre la fraude et le blanchiment.
Statuant au fond, le Conseil d’État a rejeté les recours contre les décrets limitant puis interdisant la prescription d’hydroxychloroquine aux malades de la covid-19. Les données acquises de la science en mars et mai dernier justifiaient les décisions prises par le gouvernement à propos de ce traitement controversé.
Statuant au fond, le Conseil d’État a rejeté les recours contre les décrets limitant puis interdisant la prescription d’hydroxychloroquine aux malades de la covid-19. Les données acquises de la science en mars et mai dernier justifiaient les décisions prises par le gouvernement à propos de ce traitement controversé.
En cas de licenciement nul, le salarié qui sollicite sa réintégration a droit au paiement d’une indemnité égale au montant de la rémunération qu’il aurait dû percevoir entre son éviction de l’entreprise et sa réintégration. Toutefois, le salarié qui présente de façon abusive sa demande de réintégration tardivement n’a droit, au titre de cette nullité, qu’à la rémunération qu’il aurait perçue du jour de sa demande de réintégration à celui de sa réintégration effective.
En application des articles L. 113-2, 4° et L. 111-2 du code des assurances – le premier de ces textes étant déclaré d’ordre public par le second – la clause de déchéance invoquée par l’assureur, prévoyant un délai de déclaration de sinistre inférieur au délai minimal légal de cinq jours ouvrés, n’est pas opposable à l’assuré.
L’octroi de mer est assis sur le prix de vente de biens meubles fabriqués par la société qui en est redevable. La cour d’appel, qui a retenu que les sociétés distributrices de tabac ne pouvaient vendre les biens acquis auprès d’une société fabricant du tabac sur l’Île de la Réunion qu’après l’acquittement de ces redevances et qu’elles ne devenaient propriétaires de ces biens qu’à la suite de ce paiement, a ajouté à la loi une exigence qui a élargi l’assiette légale de l’octroi de mer.
Face à l’ampleur de la crise sociale intensifiée par l’épidémie de la covid-19, le 1er février 2021, la ministre déléguée auprès de la ministre de la Transition écologique chargée du logement, Emmanuelle Wargon, a annoncé plusieurs mesures visant la protection des locataires en situation précaire.
Allongement de la trêve hivernale
Pour cette année, la ministre a entériné la prolongation de deux mois de la trêve hivernale, obligeant de surseoir aux expulsions locatives, non pas jusqu’au 31 mars, mais jusqu’au 1er juin.
On rappellera que ce dispositif a été créé par la loi n° 56-1223 du 3 décembre 1956, interdisant toute expulsion locative entre le 1er décembre et le 15 mars de l’année suivante. Cette date a été rallongée d’un mois et demi (du 1er nov. au 31 mars de l’année d’après) par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, dite « ALUR ». En 2020, en raison de l’épidémie sanitaire liée à la covid-19, cette trêve avait été allongée par l’ordonnance n° 2020-331 du 25 mars 2020 jusqu’au 31 mai, puis une prorogation similaire jusqu’au 10 juillet 2020 avait été actée par la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020.
Prévention des expulsions
La ministre reprend par ailleurs les principales recommandations du rapport remis en décembre 2020 au Premier ministre par le député Nicolas Démoulin intitulé « Prévenir les expulsions locatives tout en protégeant les propriétaires et anticiper les conséquences de la crise sanitaire (Covid-19) ».
Ainsi, en sortie de trêve, les expulsions avec concours de la force publique seront échelonnées afin de maintenir les personnes fragiles dans leur logement, avec indemnisation des bailleurs sociaux et privés.
Et lorsque l’expulsion est inévitable, une politique de relogement ou, a minima, d’hébergement, sera systématiquement proposée aux locataires expulsés.
De manière plus structurelle, une réforme de la procédure de prévention des expulsions, permettant d’agir en amont en réalisant les diagnostics sociaux au stade du commandement de payer et non plus comme aujourd’hui au stade de l’assignation en justice, a été annoncée. Le rôle de certains acteurs (huissiers de justice, gardiens d’immeuble, notamment) sera renforcé en vue de pouvoir dialoguer avec les habitants et de repérer les personnes en difficulté.
Enfin, une procédure visant à simplifier et à harmoniser l’action de l’État, avec une meilleure coordination des actions de prévention avec les collectivités territoriales porteuses des fonds de solidarité logement a été engagée.
Construction de 250 000 logements sociaux en deux ans
La ministre a, en outre, annoncé un investissement massif dans la construction de 250 000 logements sociaux en deux ans, en lien avec le mouvement HLM, Action Logement et la Caisse des Dépôts. Ella a également précisé qu’une réflexion était en cours sur le prolongement nécessaire de la loi SRU du 13 décembre 2000 .
Soutien de l’intermédiation locative
Enfin, dans le cadre du renforcement de la politique du « plan quinquennal pour le logement d’abord et la lutte contre le sans-abrisme » lancé le 11 janvier 2017 par le président de la République, proposant une réforme structurelle de l’accès au logement pour les personnes sans domicile, la ministre du Logement a décidé d’investir dans les pensions de famille et de soutenir les actions en faveur de l’intermédiation locative, permettant de louer un logement à un coût réduit, et ce dans le parc privé, ainsi que le doublement des territoires de mise en œuvre accélérée du logement d’abord qui passent de 23 à 46, grâce à un partenariat renforcé avec les collectivités territoriales.
Face à l’ampleur de la crise sociale intensifiée par l’épidémie de la covid-19, le 1er février 2021, la ministre déléguée auprès de la ministre de la Transition écologique chargée du logement, Emmanuelle Wargon, a annoncé plusieurs mesures visant la protection des locataires en situation précaire.
Cet arrêt de la chambre sociale doit retenir l’attention du processualiste, même si certains textes qui le fondent sont aujourd’hui abrogés. En effet l’analyse de l’articulation de la péremption avec l’organisation d’échanges entre parties en procédure orale reste d’actualité sous l’empire des textes nouveaux : l’arrêt nous indique en effet quel est le point de départ du délai de péremption de deux ans alors qu’un juge avait ainsi organisé les échanges entre parties.
Des salariés licenciés pour motif économique en 2006 saisissent la juridiction prud’homale, puis interjettent appel des jugements. La procédure d’appel, orale, se déroule sans représentation obligatoire. L’instruction est confiée à un magistrat (de la cour d’appel) chargé d’instruire l’affaire. Celui-ci convoque les parties à une audience collégiale, organise l’échange mutuel de leurs conclusions et pièces en respectant un certain délai ; il prévoit aussi la remise, à la cour d’appel, des conclusions avec le bordereau récapitulatif des pièces versées et la lettre de rupture du contrat, sans impartir de délai – tout ceci par des ordonnances notifiées le 4 juin 2015.
Peu après l’audience, le 13 janvier 2016, la cour d’appel prononce la radiation des affaires pour défaut de diligence. Le 2 octobre 2017, celles-ci sont réinscrites. Les appelants concluent le 19 novembre 2018. Le 12 juin 2019, la cour d’appel constate la péremption de l’instance, son extinction et le dessaisissement de la cour.
Les salariés se pourvoient. La première branche du moyen reproche à la cour d’appel une violation « des articles 446-1, 446-2, 939 et 946 du code de procédure civile, R. 1453-3 et R. 1453-4 du code du travail dans leur version alors applicable, ensemble l’article R. 1452-8 du code du travail alors applicable et l’article 386 du code de procédure civile » : selon eux, le calendrier de procédure pour l’organisation des échanges a été fixé sans leur accord, de sorte que le délai de péremption de deux ans n’a pas commencé à courir.
La chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi. Rappelant la teneur des différents textes, elle juge que, si, en application de...
La péremption d’instance prud’homale est acquise lorsque les parties ont adressé leurs conclusions avec le bordereau récapitulatif des pièces versées et la lettre de rupture du contrat plus de deux ans après la notification de l’ordonnance prescriptive.
La péremption d’instance prud’homale est acquise lorsque les parties ont adressé leurs conclusions avec le bordereau récapitulatif des pièces versées et la lettre de rupture du contrat plus de deux ans après la notification de l’ordonnance prescriptive.
L’existence de certificats E101 et A1 ne fait obstacle ni à une condamnation du chef de travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié en cas d’omission de procéder à la déclaration préalable à l’embauche ni à une condamnation du chef de travail dissimulé par dissimulation d’activité au titre d’un défaut d’inscription au registre du commerce et des sociétés.