Prolongement du fonds de solidarité des très petites entreprises

Le dispositif du fonds de solidarité des très petites entreprises est prolongé jusqu’au 31 mai 2020 par un décret du 12 mai 2020. Ce même décret apporte également des précisions (notamment en qui concerne l’application aux associations) et élargit ses conditions d’éligibilité.

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Publication du décret sur les fichiers covid

Les traitements Contact Covid et SI-DEP ont reçu l’aval de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Celle-ci annonce qu’elle contrôlera étroitement leur mise en oeuvre.

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Coronavirus : licéité de la surveillance policière par drones

Par ordonnance de référé rendue le 5 mai 2020, le tribunal administratif de Paris rejette la demande de deux associations tendant à suspendre le dispositif de captation d’images par drones ordonnés par le préfet de police de Paris.

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Nouvelles précisions réglementaires sur le prêt garanti par l’État

Le cadre réglementaire du dispositif du prêt garanti par l’État vient à nouveau d’être modifié par deux arrêtés, respectivement du 2 mai et du 6 mai 2020. Ce second texte rend en particulier certaines sociétés civiles immobilière éligibles à ce type de prêt destiné à sécuriser les entreprises consécutivement à la crise sanitaire liée au covid-19.

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Nouvelle ordonnance « délai covid-19 » : impact sur la saisie immobilière

Les ordonnances « moratoire de procédure » nos 2020-304, 2020-306 et 2020-427 de mars et avril 2020 sont désormais bien connues des praticiens. La dernière-née l’est un peu moins, il s’agit de l’ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 fixant les délais applicables à diverses procédures pendant la période d’urgence sanitaire qui modifie plusieurs ordonnances et, pour ce qui concerne la présente réflexion, qui propose une nouvelle rédaction de l’article 1er de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 et détermine désormais avec précision la date de la période juridiquement protégée.

Cet enchevêtrement de textes nécessite une petite gymnastique digne d’un programme d’entraînement cérébral d’une célèbre marque de jeux vidéo, laquelle nous permettra ensuite d’aborder les effets de la suspension sur la saisie immobilière (v. sur le sujet F. Kieffer, Saisie immobilière et covid-19 : Ô temps suspends ton vol…, Le droit en débats, Dalloz actualité, 31 mars 2020).

Gymnastique cérébrale

L’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 (modifié par l’ord. n° 2020-427, 15 avr. 2020) pose le principe en matière d’acte et formalité : « Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d’office, application d’un régime particulier, non avenu ou déchéance d’un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l’article 1er sera réputé avoir été fait à temps s’il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois.
Il en est de même de tout paiement prescrit par la loi ou le règlement en vue de l’acquisition ou de la conservation d’un droit.
Le présent article n’est pas applicable aux délais de réflexion, de rétractation ou de renonciation prévus par la loi ou le règlement, ni aux délais prévus pour le remboursement de sommes d’argent en cas d’exercice de ces droits ».

L’article 2 de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 transpose ce principe aux procédures devant les juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale : « I. Les dispositions de l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 susvisée relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période sont applicables aux procédures devant les juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale ».

Mais, il prévoit trois exceptions et l’une d’elles concerne la procédure de saisie immobilière.

« II. Par dérogation aux dispositions du I :
1° Les délais de procédure applicables devant le juge des libertés et de la détention et devant le premier président de la cour d’appel saisi d’un appel formé contre les décisions de ce juge courent selon les règles législatives et réglementaires qui leur sont applicables ;
2° Les délais de procédure applicables devant les juridictions pour enfants sont adaptés dans les conditions prévues par le chapitre III du présent titre ;
3° Les délais mentionnés aux articles L. 311-1 à L. 322-14 et R. 311-1 à R. 322-72 du code des procédures civiles d’exécution sont suspendus pendant la période mentionnée à l’article 1er ».

Enfin, pour parachever cet entraînement cérébral, l’ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 met fin au terme glissant et vient fixer définitivement (?) les dates de la période juridiquement protégée qui débute le 12 mars 2020 (à 0h00) pour s’achever le 23 juin 2020 à minuit. Cependant, le lecteur assidu des textes juridiques aura immédiatement constaté que ce nouveau texte ne vise à aucun moment l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020. Certes, au premier abord, il aura raison, mais c’est sans compter sur le souci des rédacteurs de faire travailler nos méninges. En effet, et là est la véritable gymnastique à laquelle il faut se livrer, car les deux ordonnances sont liées, puisque l’article 2 de l’ordonnance n° 2006-304 renvoie, en miroir, elle aussi dans son article 2, à l’article 2 de l’ordonnance n° 2006-306 lequel fait référence à la période mentionnée à l’article 1er qui dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 est ainsi libellé : « Les dispositions du présent titre sont applicables aux délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus ».

En résumé, puisque l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-304 précise que les dispositions de l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306 sont applicables aux procédures devant les juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et que ce même article 2 de l’ordonnance n° 2020-306, renvoie à son article 1er modifié par l’article 1er, a, de l’ordonnance n° 2020-560, il s’en déduit que la période juridiquement protégée pour les juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale s’étend entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus, et ce sans même que l’ordonnance n° 2020-560 fasse référence à l’ordonnance n° 2020-304.

Les effets de la suspension sur la saisie immobilière

Il résulte de cette gymnastique cérébrale que les délais mentionnés aux articles L. 311-1 à L. 322-14 et R. 311-1 à R. 322-72 du code des procédures civiles d’exécution sont suspendus entre les 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus.

Cette analyse ne fait pas l’unanimité puisque l’article 2, II, 3°, de l’ordonnance n° 2020-304 déroge à l’article 1, aussi le renvoi opéré par l’article 2, I, vers l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306, désormais modifié par l’ordonnance n° 2020-560, vaudrait pour toutes procédures devant les juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale sauf la saisie immobilière.

Ce serait étrange, pourquoi tant de haine à l’égard de cette procédure ?

Si tel était le cas, la seule procédure qui resterait liée au terme de la cessation de l’état d’urgence sanitaire, désormais fixée au 10 juillet 2020 inclus, en application de l’article 1, I, de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions (date qui coïncide avec la nouvelle date des vacations judiciaires) serait… la saisie immobilière pour laquelle les délais seraient alors suspendus jusqu’au 10 août 2020 inclus.

Quelle que soit l’interprétation retenue, quelles sont les conséquences de cette suspension ?

Après recherches et réflexions, il est raisonnable d’affirmer que la suspension des délais pour agir n’empêche pas d’accomplir les actes mais allonge simplement le temps pour le faire.

Le raisonnement de certains auteurs (C. Laporte, Covid-19, Procédure civile d’exécution et état d’urgence sanitaire, Procédures n° 5, mai 2020, comm. 93) est peut-être influencé par le fait que la suspension des délais est habituellement associée à une impossibilité d’agir.

Or la suspension des délais n’a pas pour effet d’empêcher d’agir, c’est au contraire l’impossibilité d’agir qui est une des causes de la suspension des délais (v. R. Laher et C. Simon, Les délais de procédure civile face à l’épidémie de covid-19, Lexbase, éd. Hebo privée, 9 avr. 2019, ou encore C. civ., art. 2234l).

Mais c’est loin d’être la seule cause.

À titre d’exemples, les articles 2235 à 2239 code civil, les causes de suspension peuvent être des contraintes morales (dettes entre époux), voire de pure opportunité (MARD).

Ces contraintes peuvent inciter à ne pas agir, raison pour laquelle il faut suspendre les délais, mais ce n’est clairement pas une impossibilité.

Donc, la délivrance des actes en saisie immobilière reste possible pendant la période juridiquement protégée puisque suspension des délais ne veut pas dire impossibilité d’agir.

Cette question a récemment rebondi à la suite de la note diffusée par la Chancellerie le 5 mai 2020 (ci-jointe).

En effet, la page 23 de cette note indique les priorités juridictionnelles, mais précise aussi qu’au 11 mai, les plans de continuation d’activité (PCA) doivent être levés, ce qui signifie que toutes les activités doivent reprendre.

Cependant, elles doivent reprendre tout en respectant les préconisations de sécurité sanitaire imposées par l’épidémie et, pour cette raison, la note énumère ce qui semble prioritaire mais ne signifie pas pour autant que ce qui n’est pas énuméré est exclu.

En ce qui concerne le juge de l’exécution, la page 26 indique que ce qui est prioritaire est :

Juge de l’exécution (JEX) : toutes les contestations de mesures d’exécution forcée portées devant le juge de l’exécution et, au-delà, les requêtes au juge de l’exécution urgentes ou ayant des incidences économico-sociales (par ex. demande de mainlevée d’une saisie-rémunération).

Il serait insensé d’en déduire que cela signifie que, jusqu’à la fin de la période d’état d’urgence sanitaire (aujourd’hui sans influence sur la durée de la période juridiquement protégée fixée dans l’ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020), les juges de l’exécution devront se limiter à ces seules priorités.

En réalité, les PCA étant levés, toutes les activités doivent reprendre.

Aussi, comme peut-être certains ont pu le penser, bien que cette énumération ne vise pas la saisie immobilière, elle ne l’exclut pas.

La conséquence est incontestable : l’article 2, II, 3°, de l’ordonnance précitée ne remet pas en cause la validité et la régularité des actes réalisés durant le cours de la période de suspension, soit entre le 12 mars et le 23 juin 2020 inclus (ou entre le 12 mars et le 10 août inclus).

Cette position est d’ailleurs confirmée par la DACS (v. le compte rendu de la réunion CNB/DACS du 7 mai 2020) :

Le directeur des affaires civiles et du Sceau nous a par ailleurs confirmé que, « contrairement à certaines interprétations erronées des ordonnances », les procédures d’exécution n’étaient pas suspendues.

Certes, le terme employé n’est pas très heureux, mais il signifie que, quelle que soit la procédure civile d’exécution, la formalité peut être effectuée que le délai soit aménagé ou suspendu (pour la saisie immobilière).

Une des conséquences de cette analyse est que le maintien des ventes au cours de la période juridiquement protégée et surtout depuis la fin du confinement (le 11 mai 2020) n’est pas interdit, mais l’audience devra être aménagée pour respecter les préconisations sanitaires.

Ce qui est tout à fait possible en utilisant les alinéas 2 et 3 de l’article 8 de l’ordonnance n° 2020-304 :

Le président de la juridiction peut décider, avant l’ouverture de l’audience, que les débats se dérouleront en publicité restreinte.

En cas d’impossibilité de garantir les conditions nécessaires à la protection de la santé des personnes présentes à l’audience, les débats se tiennent en chambre du conseil.

Pour certaines juridictions, des ventes ont été effectuées le 14 mai 2020 et, pour d’autres, il a été envisagé la reprise des ventes à partir du 4 juin, ce qui permettra d’effectuer les visites en toute sérénité.

Pendant quelque temps, le plus souvent, le public ne sera pas autorisé à venir (ventes en chambre du conseil), seuls les avocats poursuivants et les avocats munis d’un mandat et d’un chèque de banque pourront accéder à la salle dont la taille permet généralement de respecter la distance recommandée.

Ce n’est pas un obstacle puisque seul un avocat peut porter les enchères.

De surcroît, dans ce contexte très particulier, les avocats pourront être en relation avec leur client par téléphone pendant le déroulement des enchères.

Quant à la consultation des cahiers des conditions de vente, elle se fera au cabinet de l’avocat poursuivant ou sur leur site internet, sur lequel ce document, préalablement anonymisé (ce qui n’est pas le cas au greffe) sera consultable.

D’ailleurs, parmi les nombreuses propositions de modernisation de la procédure de saisie immobilière adressées par le CNB à la DACS en avril 2018, dans le souci de décharger le greffe d’un certain nombre de tâches, il est préconisé la consultation du cahier des conditions de vente au seul cabinet de l’avocat poursuivant, sur son site internet ou sur la future plateforme de ventes aux enchères par avocats (dont le développement est en cours de finalisation) projet voté par l’assemblée générale du CNB des 13 et 14 décembre 2019.

Aussi, sauf à commettre un excès de pouvoir, le juge de l’exécution confronté à une adjudication requise après le 11 mai 2020 et après avoir vérifié que les publicités et les visites ont été effectuées dans les délais requis ne pourra pas d’office sanctionner le maintien de la vente.

En revanche, si la partie saisie élève une contestation dans les formes imposées par le code des procédures civiles d’exécution, il appartiendra au juge de l’exécution d’apprécier au cas par cas le bien fondé des arguments soutenus.

Dans le même temps, si le créancier poursuivant n’a pas effectué les publicités légales ou pu maintenir les visites, il lui appartiendra de faire signifier des conclusions de report de l’adjudication, sur le fondement combiné des dispositions des ordonnances n° 2020-304, 2020-306, 2020-560 et de l’article R. 322-28 du code des procédures civiles d’exécution.

Il n’en demeure pas moins que tout cela est tout de même très compliqué et que déjà se profile à l’horizon la procédure devant le tribunal judiciaire avec prise de date, applicable au 1er septembre 2020… Est-ce bien raisonnable ?

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Autorité de la concurrence : reprise des délais de procédure

L’Autorité de la concurrence avait dû suspendre les délais applicables aux procédures de concurrence (par exemple en matière de contrôle des concentrations) du fait des législations d’exception adoptées compte tenu de l’état d’urgence sanitaire. Elle vient d’annoncer, via deux communiqués de presse, la reprise de ces délais.

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Une personne n’ayant pas une activité commerciale à titre professionnel qui reçoit, met en libre pratique dans un État membre et stocke des produits manifestement non destinés à l’usage privé, qui lui ont été expédiés depuis un pays tiers et sur lesquels un signe, sans le consentement du titulaire est apposé, fait usage de la marque dans la vie des affaires.

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En présence d’une marque tridimensionnelle constituée par la forme du produit nécessaire à l’obtention du résultat technique, la perception du public pertinent peut être prise en compte pour identifier la caractéristique essentielle de la forme.

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Coronavirus : ultime traitement des syndicats de copropriétaires

Une ordonnance du 20 mai 2020 emporte de nouvelles dérogations au droit de la copropriété devant notamment permettre aux syndicats de tenir leurs assemblées générales de manière dématérialisée. Le texte nouveau modifie également, pour la troisième fois, la période juridiquement protégée et déroge temporairement à la règle du quota des mandats de vote.

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Crise sanitaire : un coup de pouce aux échanges numériques entre avocats et juridictions

Les avocats vont désormais pouvoir recevoir plus facilement les copies numérisées des dossiers pénaux. À la mi-mai, le Conseil national des barreaux (CNB) a salué la signature avec la Chancellerie d’un protocole en ce sens, qui suivait la finalisation, à la fin avril, d’un premier protocole sur la communication électronique pénale. « Grâce à ces protocoles, nous pourrons demander et obtenir une copie numérique, et se voir notifier numériquement les actes prévus par l’article 803-1 du code de procédure pénale », se félicite Me Vincent Penard, vice-président de la commission libertés et droits de l’homme du CNB.

Si l’envoi par mail d’un dossier pénal numérisé était déjà possible, l’exercice était compliqué en cas de pièces jointes trop volumineuses. La nouvelle plateforme, appelée Plex, un mix d’une messagerie et d’un service de téléchargement, va permettre l’envoi de fichiers pouvant atteindre un giga-octet. « Tout ce qui peut rendre l’accès au dossier plus rapide et facile est bon à prendre, même si cela fait longtemps que je reçois tous mes dossiers pénaux sous format dématérialisé », remarque un avocat lorrain. Toutes les robes noires ne feront pas la fine bouche. Exemple avec ce juriste qui demandait un renvoi le 11 mai, le jour du déconfinement à l’une des chambres correctionnelles du tribunal judiciaire de Paris, faute d’avoir pu avoir accès au dossier de son client pendant le confinement.

Alors que le protocole sur la communication électronique pénale était discussion depuis deux ans, il n’a fallu, de source avocat, qu’une poignée de semaines durant le confinement pour que les parties trouvent finalement un terrain d’entente. Mais si la crise sanitaire a boosté ce dossier, elle a cependant avant tout mis en lumière le retard inquiétant pris par la justice française sur le numérique. « C’est bien parce que la transformation numérique du ministère a été initiée en 2018 que la justice a pu continuer à travailler durant le confinement, défend Haffide Boulakras, le directeur de programme Procédure pénale numérique, place Vendôme. Sans ce plan, la justice aurait été en arrêt total. » L’Hexagone part de loin. Dans le tableau de bord 2019 de la justice dans l’Union européenne, la France est ainsi classée dix-neuvième sur vingt-huit pays en matière de disponibilité de moyens électroniques.

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Le confinement a permis l’aboutissement de deux protocoles encadrant les communications électroniques pénales et le transfert de dossiers pénaux entre avocats et juridictions.

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L’IVG médicamenteuse à domicile durant l’état d’urgence sanitaire

Le juge des référés du Conseil d’État a rejeté la requête de trois associations qui demandaient au Conseil d’État de suspendre un arrêté du ministre de la Santé adaptant pendant l’état d’urgence sanitaire les modalités d’interruption volontaire de grossesse (IVG) par voie médicamenteuse pratiquée en dehors d’un établissement de santé. 

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Attention à ne pas divulguer des informations au quart(z) de tour…

Même en l’absence d’une situation de concurrence directe et effective entre les personnes concernées, la divulgation, par l’une, d’une information de nature à jeter le discrédit sur un produit commercialisé par l’autre constitue un acte de dénigrement, à moins que l’information en cause ne se rapporte à un sujet d’intérêt général et repose sur une base factuelle suffisante, et sous réserve qu’elle soit exprimée avec une certaine mesure.

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Délais covid-19 : l’ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 et la saisie immobilière

Entre le 25 mars et le 21 mai 2020 ce sont plus d’une trentaine d’ordonnances relatives à l’épidémie de covid-19 qui ont été publiées au Journal officiel, ce qui pourrait laisser penser que leurs rédacteurs ont méprisé les conseils que donnait Nicolas Boileau dans le Chant I de L’art poétique (Boileau, Satires, Epîtres, Art poétique, Poésie, Gallimard, éd. 1985, p. 228-229) :

Fuyez de ces auteurs l’abondance stérile,
Et ne vous chargez point d’un détail inutile.
Tout ce qu’on dit de trop est fade et rebutant ;
L’esprit rassasié le rejette à l’instant.

Dans les semaines à venir, il appartiendra aux praticiens de bien maitriser ce foisonnement de textes pour éviter des lendemains douloureux (La lettre de la S.C.B, Avocats, tous à vos agendas !, Avr. 2020, n° 22).

Pour ne pas tomber dans le même travers, il ne semble pas opportun de répéter ce qui a déjà été écrit à propos de la suspension des délais en matière de saisie-immobilière (F. Kieffer, Saisie immobilière et covid-19 : Ô temps suspends ton vol… Dalloz actualités du 31 mars 2020 ; Nouvelle ordonnance « délai covid-19 » : impact sur la saisie immobilière, Dalloz actualités du 18 mai 2020) mais uniquement d’aborder les conséquences de la dernière ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 modifiant l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété (JORF n° 0124 du 21 mai 2020, texte n° 6) sur la matière.

Panorama de la situation

Il est utile de rappeler quelques-unes des ordonnances qui se sont succédées et qui sont susceptibles d’influencer la procédure de saisie-immobilière, il s’agit de :

• l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété ;

• l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période ;

• l’ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020 portant diverses dispositions en matière de délais pour faire face à l’épidémie de covid-19 ;

• l’ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 fixant les délais applicables à diverses procédures pendant la période d’urgence sanitaire ;

• l’ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 modifiant l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété.

Pour la procédure de saisie immobilière, avec la dernière ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020, le doute n’est désormais plus permis et c’est rassurant.

Il faut ici signaler que si le Rapport au Président de la République annonce une modification de l’article 1er de l’ordonnance n° 2020-304, cette modification annoncée ne figure pas dans l’ordonnance n° 2020-595.

En effet, l’article 1er de l’ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 modifie la rédaction de l’article 2, II, 3° de l’ordonnance n° 2020-304 qui dispose désormais ce qui suit : « Les délais mentionnés aux articles L. 311-1 à L. 322-14 et R. 311-1 à R. 322-72 du code des procédures civiles d’exécution sont suspendus pendant la période comprise entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus ».

En effet, alors que la plupart des délais de procédures ont été soumis à un régime sui generis qui n’est : « ni une suspension générale ni une interruption générale des délais arrivés à terme pendant la période juridiquement protégée » (Circ. de présentation des dispositions du titre I de l’ordonnance n° 2020- 306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période, publiée le 26 mars 2020, rectifiée le 30 mars 2020, JUSC 2008608C), la saisie immobilière a été dotée d’un régime de faveur : la suspension des délais.

Curieusement, alors que la cour de cassation avait précisé que la saisie immobilière et la distribution du prix étaient les deux phases d’une même procédure (cour de cassation, avis n° 0080003P, 15 mai 2008), la procédure de distribution n’est pas concernée par ce régime du faveur et est donc soumise au régime dérogatoire de l’article 2, I de l’ordonnance n° 2020-304.

Pour mémoire, la suspension d’un délai en arrête temporairement le cours sans effacer le délai déjà couru alors qu’en cas d’interruption, un nouveau délai recommence à courir à compter de la date de l’acte interruptif.

La suspension se distingue donc de l’interruption laquelle fait courir un nouveau délai de même durée que l’ancien.

Il est donc désormais établi que pour la procédure de saisie immobilière tous les délais mentionnés aux articles L. 311-1 à L. 322-14 et R. 311-1 à R. 322-72 du code des procédures civiles d’exécution, suspendus depuis le 12 mars 2020, reprendront leur cours le 24 juin à 0 heure.

Dès lors, les praticiens vont devoir se soumettre à un travail considérable en se livrant dans tous les dossiers, en fonction de l’état d’avancement de leurs procédures, à des calculs du temps déjà écoulé avant la suspension, pour déterminer le temps restant à courir pour ne pas se heurter à une caducité.

Et il n’existe à ce jour pas d’outil permettant de faciliter ce travail, comme celui proposé par le réseau Lexavoué, qui n’est utilisable que pour les délais concernés par l’article 2, I de l’ordonnance n° 2020-304 (hors délais de prescription), dont la saisie immobilière est exclue.

Il appartiendra donc au praticien de calculer le temps déjà écoulé entre l’acte concerné et le 12 mars, pour déterminer le temps qui lui restera pour respecter le délai légalement imparti à partir du 24 juin.

C’est encore un nouvel exercice de gymnastique cérébrale (D. actu. du 18 mai 2020) auquel devront se livrer les praticiens concernés.

Il est bien sûr impossible d’envisager ici toutes les situations, puisqu’en la matière, a minima, six délais des plus variées sont prescrits à peine de caducité (C. pr. exéc., art. R. 311-11), pêle-mêle, sans que cette énumération ne soit exhaustive :

vingt-quatre heures (C. pr. exéc., art. R. 321-1, dernier alinéa du code des procédures civiles d’exécution) ;
  trois jours (C. pr. exéc., art. R. 322-52) ;
  cinq jours (C. pr. exéc., art. R. 322-6, R. 322-10) ;
  huit jours (C. pr. exéc., art. R. 322-1 et R. 322-19 par renvoi à 917 du C. pr. civ.) ;
  dix jours (C. pr. exéc., art. R. 322-51, R. 322-19 par renvoi à 905-1 du C. pr. civ.) ;
  quinze jours (C. pr. exéc., art. R. 322-19) ;
  un mois (C. pr. exéc., art. R. 322-13) ;
  un et trois mois (C. pr. exéc., art. R. 322-4 dernier alinéa) ;
  un et deux mois (C. pr. exéc., art. R. 322-31) ;
  deux mois (C. pr. exéc., art. R. 321-6 et R. 322-4, R. 322-12, R. 322-56) ;
  deux et quatre mois (C. pr. exéc., art. R. 322-22, R. 322-26, R. 322-53) ;
  deux ans (C. pr. exéc., art. R. 321-20).

Aussi semble-il opportun d’apporter quelques illustrations pratiques.

Illustrations pratiques

Dans l’hypothèse d’un commandement de payer valant saisie qui aurait été signifié le 21 janvier 2020, en application des dispositions de l’article R. 321-6 du code des procédures civiles d’exécution, il devrait être publié, à peine de caducité, au service de la publicité foncière dans les deux mois de sa signification, soit au plus tard le 21 mars, donc au cours de la période juridiquement protégée.

S’il n’a pas été publié pendant la période juridiquement protégée – car, faut-il rappeler, la suspension des délais n’interdit pas d’effectuer les formalités (V.. Nouvelle ordonnance « délai covid-19 » : impact sur la saisie immobilière, D. actu, 18 mai 2020) – un mois et dix-neuf jours se seront écoulés entre le 21 janvier et le 12 mars, aussi, le praticien disposera d’un délai de dix jours à compter du 24 juin pour procéder à cette publication, soit jusqu’au 3 juillet 2020.

Là encore, il faut répéter que la suspension des délais ne lui interdit pas de publier avant le 23 juin à minuit, donc au cours de la période juridiquement protégée.

Un autre exemple, à propos de la péremption du commandement. Celle-ci sera parfois plus difficile à mettre en œuvre selon la juridiction devant laquelle la procédure sera poursuivie, car certaines d’entre-elles, malgré la levée des plans de continuité d’activité des juridictions depuis le 11 mai 2020 (note diffusée par la Chancellerie le 5 mai 2020) sont toujours en incapacité de tenir les audiences. Il en irait alors de la responsabilité de l’État.

Soit un commandement venant à péremption (C. pr. exéc., art. R. 321-20) le 30 mars 2020, vingt-trois mois et onze jours se seront écoulés entre le 30 mars 2018 et le 12 mars 2020, aussi, le praticien disposera d’un délai de dix-neuf jours à compter du 24 juin pour procéder à cette publication, soit jusqu’au 13 juillet 2020 (le 12 juillet étant un dimanche) pour obtenir une date d’audience, faire signifier des conclusions aux fins de prorogation, obtenir un jugement prorogeant les effets du commandement et le mentionner en marge au service de la publicité foncière.

Là encore, on ne peut que conseiller aux avocats d’agir, lorsque c’est possible, sans attendre le 24 juin, comme je le préconisais dès la fin de mois de mars (F. Kieffer, Saisie immobilière et covid-19 : Ô temps suspends ton vol… D. actu, 31 mars 2020).

Il n’en demeure pas moins que ce sera un véritable parcours du combattant, surtout lorsque la juridiction restera muette.

Un dernier exemple relatif aux voies de recours.

Un jugement d’orientation a été rendu le 27 février 2020 et a été signifié le 9 mars suivant. Il fixe la date d’adjudication au 11 juin 2020.

Le délai d’appel aurait dû expirer le 24 mars 2020, au cours de la période juridiquement protégée.

Ici, une question se pose, l’appel du jugement d’orientation se trouve-t-il soumis au régime de faveur octroyé à la saisie immobilière : la suspension de délais prévus par l’article 2, II, 3° de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 ou bien relève-t-il de l’article 2, I du même texte ?

En effet, l’article 2, II, 3° vise les « délais mentionnés aux articles L. 311-1 à L. 322-14 et R. 311-1 à R. 322-72 du code des procédures civiles d’exécution », parmi lesquels figure l’article R.322-19 qui impose la procédure à jour fixe pour l’appel du jugement d’orientation, mais ne fixe pas le délai appel, qui reste régi par les dispositions du Livre Ier du code des procédures civiles d’exécution et plus précisément par l’article R.121-20 dudit code (par renvoi de l’article R.311-1).

Aussi, a priori, le délai d’appel du jugement d’orientation n’est donc pas suspendu, mais prorogé dans les conditions de l’article 2, I de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020.

Aussi, dans notre exemple, l’appel sera recevable jusqu’au 8 juillet 2020 (23 juin inclus + 15 jours), pour un jugement d’orientation signifié le 9 mars 2020.

Toutefois, une autre analyse est possible ; puisque l’article R. 311-1 du code des procédures civiles d’exécution qui renvoie à l’article R.121-1 du même code est visé dans l’article 2, II, 3° de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, le régime de la suspension des délais s’appliquerait aussi à l’appel du jugement d’orientation.

Dans ce cas de figure, au 12 mars 2020, trois jours se seront écoulés, il restera douze jours et l’appel sera recevable jusqu’au 6 juillet 2020 (le 5 juillet étant un dimanche).

Quel que soit le mécanisme (prorogation ou suspension), le créancier poursuivant pourra  requérir l’adjudication le 11 juin 2020, si les conditions requises sont réunies (soit une juridiction opérationnelle avec magistrat et greffier, des publicités légales et visites effectuées) ; toutefois, son client pourrait décider d’attendre l’expiration du délai d’appel.

Or, si l’appel n’a pas été formé (il peut l’être au cours de la période juridiquement protégée), le créancier poursuivant ne pourra pas présenter une demande de report de l’adjudication sur le fondement de l’article R. 322-19 du code des procédures civiles d’exécution et sa demande devra alors être fondée sur les dispositions combinées des ordonnances n° 2020-304, 2020-306, 2020-560, 2020-595 et de l’article R. 322-28 du code des procédures civiles d’exécution.

Ce ne sont là que quelques illustrations des difficultés que rencontreront les praticiens dans les prochains mois.

Gageons qu’ils ne feront pas comme les rédacteurs des ordonnances et suivront, pour les calculs auxquels ils vont devoir se livrer, les conseils de Boileau (op. cit., p. 231) :

Hâtez-vous lentement ; et, sans perdre courage,
Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage :
Polissez-le sans cesse et le repolissez ;
Ajoutez quelquefois, et souvent effacez.

Délais covid-19 : l’ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 et la saisie immobilière

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Nouvelle ordonnance d’adaptation du droit des entreprises en difficulté aux conséquences de l’épidémie de covid-19

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Le caractère inassurable du risque pandémique : une « allégation fantaisiste » d’AXA

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Avec la création de deux groupes supplémentaires en une semaine, il y a désormais dix groupes parlementaires à l’Assemblée. Un record absolu depuis la Seconde Guerre mondiale. En cause : la baisse du seuil d’effectifs pour créer un groupe, mais aussi l’absence de culture partisane chez de nombreux députés. Le Parlement français paye son uberisation réussie.

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Dommages causés à un tiers au bail d’habitation : responsabilité extracontractuelle du bailleur

Le statut des baux d’habitation est d’ordre public, nul ne saurait l’ignorer. Mais caractériser ainsi la relation contractuelle qui lie locataire et bailleur ne doit pas faire oublier au praticien que certains agissements sont également source de responsabilité civile extracontractuelle. Plus précisément, les manquements contractuels du bailleur peuvent également mettre en jeu sa responsabilité quasi délictuelle.

Dans les faits, une bailleresse d’habitation condamnée par feu le tribunal d’instance de Roanne suivant jugement rendu le 4 septembre 2018, a interjeté appel devant la cour d’appel de Lyon. L’appel de la bailleresse était à la fois formé à l’encontre de sa locataire et de son compagnon, qui n’était pas partie à la relation locative, et qui était donc un tiers au contrat (il n’était pas en l’espèce question de cotitularité du bail – mariage ou PACS). Si le quantum des préjudices a été quelque peu modifié par les juges d’appel, qui ont par ailleurs condamné la bailleresse au titre du préjudice moral subi par la locataire, la décision du juge d’instance a été confirmée pour l’essentiel.

De première part, au terme d’un raisonnement classique, la bailleresse a été condamnée pour avoir consenti à bail un logement impropre à l’habitation. Le bien, qui avait fait l’objet d’un arrêté préfectoral portant interdiction de mise à disposition à des fins d’habitation, était en outre présumé pollué, le logement ayant été aménagé dans un local industriel anciennement exploité par une activité textile polluante. 

De seconde part, sur le fondement extracontractuel, la bailleresse a été condamnée pour défaut d’entretien du mur du garage inclus au bail, en ce que son effondrement avait causé d’importants dommages au véhicule qui y était entreposé. Véhicule qui appartenait au compagnon de la locataire.

En l’espèce, c’est bien ce dernier aspect qui nous intéresse, et qui nous amènera à apprécier la qualification de la faute quasi délictuelle tout d’abord, puis la causalité et le dommage, ensuite.

Identité du manquement contractuel et de la faute quasi délictuelle de la bailleresse

Pour la Cour : « […] si le propriétaire des lieux n’était pas lié par un contrat de dépôt et les obligations qui en découlent, il n’en demeure pas moins que la bailleresse a commis une faute quasi délictuelle en laissant une partie du mur de son garage s’effondrer par manque d’entretien sur un véhicule » qui y était entreposé.

Si les fondements de l’action de la locataire et de son compagnon ne font pas l’objet de développements, il est expressément indiqué qu’ils ont ensemble « assigné Madame G. [ndlr : la bailleresse] devant le tribunal d’instance de Roanne pour demander la condamnation de cette dernière à leur verser diverses sommes à titre de dommages et intérêts suite à la mise à disposition d’un logement structurellement indécent ».

En d’autres termes, le compagnon de la locataire, tiers au contrat de bail, aurait invoqué l’indécence du logement consenti à bail – et donc, la violation par la bailleresse de son obligation contractuelle de délivrer un logement décent – pour obtenir la réparation de son préjudice. 

Ainsi, le défaut d’entretien du mur qui incombe à la bailleresse au titre de son obligation locative contractuelle engage sa responsabilité civile extracontractuelle à l’encontre du tiers dont le véhicule a été endommagé par la chute dudit mur (s’agissant des notions de responsabilité quasi délictuelle et de responsabilité extracontractuelle, v. J.-S. Borghetti, Responsabilité des contractants à l’égard des tiers : pas de pitié pour les débiteurs, D. 2020. 416 image). Dans ce contexte, il n’est pas exclu que cette décision illustre le principe de l’identité entre le manquement contractuel et la faute quasi délictuelle. L’apport de cet arrêt pourrait dès lors être rapproché du principe dégagé par l’arrêt d’assemblée plénière rendu le 6 octobre 2006 (Cass., ass. plén., 6 oct. 2006, n° 05-13.255, Sté Myr’Ho, D. 2006. 2825, obs. I. Gallmeister image, note G. Viney image ; ibid. 2007. 1827, obs. L. Rozès image ; ibid. 2897, obs. P. Brun et P. Jourdain image ; ibid. 2966, obs. S. Amrani-Mekki et B. Fauvarque-Cosson image ; AJDI 2007. 295 image, obs. N. Damas image ; RDI 2006. 504, obs. P. Malinvaud image ; RTD civ. 2007. 61, obs. P. Deumier image ; ibid. 115, obs. J. Mestre et B. Fages image ; ibid. 123, obs. P. Jourdain image), récemment réaffirmé par un arrêt rendu le 13 janvier 2020 (Cass., ass. plén., 13 janv. 2020, n° 17-19.963, D. 2020. 416, et les obs. image, note J.-S. Borghetti image ; ibid. 353, obs. M. Mekki image ; ibid. 394, point de vue M. Bacache image ; AJ contrat 2020. 80 image, obs. M. Latina image ; RTD civ. 2020. 96, obs. H. Barbier image), dans le cadre duquel la Cour de cassation a jugé que « le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ». 

Dès lors, le tiers voit sa charge probatoire allégée, à partir du moment où le manquement contractuel est la cause de son dommage. En effet, le tiers au contrat qui établit un lien de causalité entre un manquement contractuel et le dommage qu’il subit n’est pas tenu de démontrer une faute délictuelle ou quasi délictuelle distincte de ce manquement (Réaffirmation par l’assemblée plénière de la jurisprudence Boot shop / Myr’Ho, CCC 2020, n° 58, obs. L. Leveneur ; v. aussi G. Viney, La responsabilité du débiteur à l’égard du tiers auquel il a causé un dommage en manquant à son obligation contractuelle, D. 2006. 2825 image).

Causalité et dommage : la charge de la preuve incombe au tiers qui s’était vu autoriser à entreposer son véhicule dans le parking loué à la locataire 

La Cour poursuit ensuite, déclarant que le véhicule était « légitimement entreposé par la volonté conjuguée de son propriétaire et de la locataire ».

La présence « légitime » du véhicule dans le garage est alors une condition à la réparation du dommage subi par son propriétaire (v. M. Bacache, L’assimilation des fautes délictuelle et contractuelle réaffirmée par l’assemblée plénière, D. 2020. 394 image).

En d’autres termes, la locataire avait accepté que son compagnon entrepose son véhicule dans le garage qu’elle avait loué : il était donc régulièrement utilisé, conformément à sa destination. Les magistrats rappellent alors de manière induite que le locataire d’habitation peut vivre avec qui il souhaite dans le logement loué. Sans doute cette mention est ainsi liée à la protection de la vie privée et familiale des locataires de baux soumis à la loi du 6 juillet 1989, qui ne peuvent se voir reprocher le fait d’héberger des proches. Aussi, la locataire avait le droit de jouir de sa place de parking, en autorisant son compagnon à y entreposer sa voiture. Tel n’aurait sans doute pas été le cas en présence d’une sous-location irrégulière du parking par la locataire, ou d’un prêt du logement en présence d’une clause l’interdisant (Civ. 3e, 10 mars 2010, n° 09-10.412, Bull. civ. III, n° 57 ; D. 2010. 1531, obs. Y. Rouquet image, note J.-M. Brigant image ; ibid. 2011. 1181, obs. N. Damas image ; AJDI 2010. 808 image, obs. N. Damas image ; RTD civ. 2010. 343, obs. P.-Y. Gautier image). 

Dès lors, le tiers devait prouver que les dommages causés à son véhicule résultaient de l’effondrement du mur du parking. Les magistrats ont alors conclu en ce sens, réduisant cependant de manière franche le quantum de l’indemnisation prononcée au profit du propriétaire du véhicule par feu le tribunal d’instance de Roanne, considérant que rien n’indiquait qu’il s’agissait d’un véhicule de collection et que l’indemnisation allouée ne pouvait dès lors être supérieure à sa valeur marchande.

D’un point de vue pratique, nous retiendrons que la relation contractuelle ne fait pas obstacle à l’engagement de la responsabilité extracontractuelle, que la mise en œuvre de cette responsabilité soit le fait du bailleur contre un occupant (Civ. 3e, 20 déc. 2018, n° 17-31.461, D. 2019. 7 image ; ibid. 1129, obs. N. Damas, spéc. 1138 image ; AJDI 2019. 630 image, obs. N. Damas image ; AJ contrat 2019. 93, obs. K. Magnier-Merran image ; RTD civ. 2019. 338, obs. P. Jourdain image ; ibid. 360, obs. P.-Y. Gautier image ; LEDC févr. 2019. 4, obs. G. Guerlin) ou, comme en l’espèce, de l’occupant légitime contre un bailleur. S’agissant particulièrement du manquement contractuel d’une partie qui cause un dommage à un tiers : la responsabilité extracontractuelle du contractant peut être engagée, sur la base de ce seul manquement. La preuve de la causalité et du dommage incombe néanmoins toujours au tiers qui se prétend lésé. 

Dommages causés à un tiers au bail d’habitation : responsabilité extracontractuelle du bailleur

Les dommages causés à un tiers au contrat de bail d’habitation occupant légitimement les lieux, qui trouvent leur source dans le défaut d’entretien du bailleur, sont réparés sur le fondement de sa responsabilité extracontractuelle.

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Dommages causés à un tiers au bail d’habitation : responsabilité extracontractuelle du bailleur

Les dommages causés à un tiers au contrat de bail d’habitation occupant légitimement les lieux, qui trouvent leur source dans le défaut d’entretien du bailleur, sont réparés sur le fondement de sa responsabilité extracontractuelle.

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Et s’il n’y avait pas de second tour le 28 juin prochain

Le ministre de l’Intérieur a présenté un projet de loi et un projet de loi organique qui anticipent le scénario d’un report du second tour des élections municipales. 

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Règlement Bruxelles I [I]bis[/I] : notaires, exécution forcée et litiges transfrontières

Les présentes affaires – jointes aux fins de la procédure écrite et de l’arrêt – conduisent la Cour de justice de l’Union européenne à connaitre de nouveau d’une spécificité du droit croate de l’exécution forcée permettant aux notaires locaux d’émettre des ordonnances d’exécution sur la base de « documents faisant foi » (ex. factures).

Auparavant, dans deux arrêts prononcés le 9 mars 2017, elle avait jugé que, dans le contexte de cette procédure, lesdits notaires ne relevaient pas de la notion de « juridiction », au sens du règlement (CE) n° 805/2004 du 21 avril 2004 « Titre exécutoire européen » (CJUE, 2e ch., 9 mars 2017, aff. C-484/15, Ibrica Zulfikarpašić, Dalloz actualité, 22 mars 2017, obs. F. Mélin ; Rev. crit. DIP 2017. 472, note L. Pailler image ; D. 2018. 966, obs. F. Jault-Seseke image ; JDI, oct. 2018, chron. 9, spéc. n° 13, obs. J.-S. Quéguiner ; Europe, mai 2017. Comm. 216, obs. L. Idot ; Procédures, mai 2017. Comm. 90, obs. C. Nourissat) et du règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 « Bruxelles I bis » (CJUE, 2e ch., 9 mars 2017, aff. C-551/15, Pula Parking, Dalloz actualité, 24 mars 2017, obs. F. Mélin ; Rev. crit. DIP 2017. 472, note L. Pailler image). Pour parvenir à cette conclusion, après avoir indiqué que le terme de juridiction se prêtait à une interprétation « autonome » et insisté sur la nécessaire préservation du principe de confiance mutuelle dans l’administration de la justice dans les États membres de l’Union, les hauts magistrats européens ont principalement pris appui sur le caractère non contradictoire de la procédure litigieuse. En effet, en droit croate, la demande qui saisit le notaire aux fins de délivrance d’une ordonnance d’exécution sur le fondement d’un « document faisant foi », n’est pas communiquée préalablement au débiteur, de sorte que cette procédure ne saurait être qualifiée de contradictoire.

Dans l’arrêt sous commentaire, la Cour de justice de l’Union européenne complète son analyse de cette procédure croate, en raisonnant à l’aune du principe de non-discrimination et du droit à un procès équitable, respectivement fondés sur l’article 18 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

Dans la première espèce, sur la base d’un relevé de comptes certifiés conformes attestant de l’existence d’une créance (qualifié, pour l’occasion de « document faisant foi »), une société de droit croate introduit, auprès d’un notaire établi dans ce même État, une procédure d’exécution forcée contre une société de droit slovène. Suite à la notification de l’ordonnance d’exécution délivrée par ledit notaire lui réclamant le paiement d’une certaine somme, la société débitrice forme opposition – dans le délai imparti – devant la juridiction croate compétente (en l’occurrence, le tribunal de commerce de Zagreb). On retrouve des faits similaires dans la seconde espèce, à la différence que la demande – fondée sur une liste de factures – est formée par une société établie en Slovaquie contre une société de droit croate. Dans les deux affaires, la juridiction croate de renvoi – saisie de l’opposition – nourrit des doutes sur la conformité, avec le droit de l’Union européenne, de la procédure suivie en amont de sa saisine. En ce sens, dès lors qu’il résulte de la jurisprudence précitée de la Cour de justice que lesdits notaires ne peuvent être considérés comme des « juridictions », les ordonnances qu’ils délivrent en Croatie ne sauraient être reconnues dans les autres États membres en tant que « titres exécutoires européens », au regard du règlement (CE) n° 805/2004, ou en tant que « décisions judiciaires », au sens du règlement (UE) n° 1215/2012. Pour la juridiction de renvoi, il y a là une différence de traitement entre les personnes physiques ou morales établies en Croatie et celles situées dans les autres États membres de l’Union constitutive d’une discrimination prohibée par l’article 18 du Traité. De plus, le caractère non contradictoire de la procédure de recouvrement de créances impayées suivie devant ces notaires constituerait, toujours selon la juridiction de renvoi, une violation du droit à un procès équitable garanti par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Sur le fond, en réponse aux demandes de décisions préjudicielles introduites par le tribunal de commerce de Zagreb et reformulées par ses soins (arrêt, pts 40 à 42), la Cour de justice dit pour droit que « l’article 18 TFUE et l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale habilitant les notaires, agissant dans le cadre des compétences qui leur sont dévolues dans les procédures d’exécution forcée sur le fondement d’un document faisant foi, à rendre des ordonnances d’exécution qui, ainsi qu’il ressort de l’arrêt du 9 mars 2017, Pula Parking […], ne peuvent pas être reconnues et exécutées dans un autre État membre ».

- Principe de non-discrimination. En faveur de la comptabilité de la procédure croate avec cet important principe, il est tout d’abord mis en évidence que cette législation n’établit pas de traitement différencié fondé sur la nationalité des parties (arrêt, pts 45 et 46). Ensuite, est indifférent le fait que les notaires hongrois soient expressément qualifiés de « juridictions », à l’article 3 du règlement « Bruxelles I bis », faisant ainsi bénéficier les ordonnances qu’ils émettent du dispositif européen de reconnaissance et d’exécution transfrontières. Comme le rappelle fort opportunément les hauts magistrats européens, « la qualification des notaires dans divers États membres demeure liée aux spécificités des ordres juridiques respectifs, le règlement n° 1215/2012 n’ayant pas vocation […] à imposer une organisation déterminée de la justice » (arrêt, pts 47 et 48). Enfin, pour la Cour de justice de l’Union européenne – qui rappelle que les créanciers disposent d’autres voies de droit offertes par l’ordre juridique croate pour obtenir leur dû –, aucune situation de discrimination à rebours n’est à déplorer (arrêt, pts 49 et 50).

- Droit à un procès équitable. Alors que la demande de décision préjudicielle portait sur l’interprétation de l’article 6, paragraphe 1er, de la Convention européenne des droits de l’homme, la Cour de justice entend raisonner sur le fondement du droit à un recours effectif, tel que protégé par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ; article dont l’examen relève de sa compétence (arrêt, pt 37). Pour conclure au respect de ce droit, elle envisage la procédure de recouvrement croate dans son intégralité. Pour ce faire, après avoir indiqué que la phase procédurale se déroulant devant les notaires est effectivement unilatérale, la Cour constate que l’accès au juge n’en demeure pas moins garanti, les débiteurs ayant la possibilité de former opposition contre les ordonnances d’exécution délivrées (arrêt, pt 52).

- Notion de litige transfrontière. Au-delà de la réponse apportée sur le fond – qui intéresse au premier chef l’ordre juridique croate –, l’arrêt du 7 mai 2020 retient l’attention pour ses développements visant à démontrer l’existence d’un lien de rattachement des affaires au principal avec le droit de l’Union, au moyen de la justification de l’applicabilité du règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 (arrêt, pts 27 à 36). Ce préalable était nécessaire pour établir la compétence de la Cour de justice. Sans entrer dans le détail de la motivation avancée, on relève surtout les précisions apportées sur la notion de « litiges transfrontières ».

On le sait, l’applicabilité du règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 – comme des autres actes législatifs européens adoptés à ce jour dans le domaine de la coopération judiciaire civile (TFUE, art. 81) – suppose que le litige en cause présente un élément d’extranéité, en plus de s’inscrire en « matière civile et commerciale » (arrêt, pts 29 et 30). Les termes « litiges transfrontières » y sont d’ailleurs employés au considérant n° 26, sans toutefois être définis. Or, dans l’affaire Interplastics s.r.o. c/ Letifico d.o.o. (aff. C-323/19), toutes les circonstances de l’affaire étaient circonscrites à l’intérieur de la Croatie, à l’exception de l’établissement en Slovaquie du demandeur à l’exécution. Cette donnée était-elle suffisante pour caractériser l’élément d’extranéité du litige ? La Cour de justice de l’Union européenne répond par l’affirmative, en transposant, dans le contexte du règlement « Bruxelles I bis », la définition de la notion de « litiges transfrontières » énoncée dans le règlement (CE) n° 1896/2006 du 12 décembre 2006 « Injonction de payer européenne » ; le droit commun de la coopération judiciaire civile s’inspirant, pour l’occasion, d’une règle spéciale.

Conformément à l’article 3, paragraphe 1er, du règlement « Injonction de payer européenne », un litige peut être ainsi qualifié lorsqu’au moins une des parties a son domicile ou sa résidence habituelle dans un État membre différent de celui de la juridiction saisie. Ainsi en est-il lorsque le demandeur dans la procédure d’injonction de payer européenne a son siège dans un autre État membre que celui du for (en ce sens, CJUE 19 déc. 2019, aff. jtes C-453/18 et C-494/18, Bondora AS c/ Carlos V.C., XY, pt 35, Dalloz actualité, 30 janv. 2020, obs. F. Mélin ; D. 2020. 23 image ; Rev. prat. rec. 2020. 17, chron. A. Raynouard image ; Europe 2019. Comm. 87, obs. L. Idot ; JDI avr. 2020. Chron. 5, spéc. n° 13, obs. K. Mehtiyeva ; RTD eur. 2020/2, obs. G. Payan, à paraître). Pour la Cour de justice, « une telle interprétation de l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 1896/2006 sert également, en principe, à établir le caractère transfrontalier et, partant, l’élément d’extranéité, d’un litige aux fins de l’application du règlement n° 1215/2012. En effet, ces règlements relevant tous les deux du domaine de la coopération judiciaire dans les matières civiles ayant une incidence transfrontière, il convient d’harmoniser l’interprétation des notions équivalentes auxquelles le législateur de l’Union a eu recours dans ceux-ci » (arrêt, pt 35).

Sans doute, le litige en cause dans l’affaire Interplastics s.r.o. c/ Letifico d.o.o. présentait-il un élément d’extranéité. Cependant, la Cour de justice aurait pu l’affirmer sans opérer un détour par le règlement (CE) n° 1896/2006. La justification avancée est surprenante en ce qu’elle laisse penser qu’il y aurait une définition unique de la notion centrale de litiges transfrontières – ou de litiges transfrontaliers – dans le domaine de la coopération judiciaire civile. Or, s’il est vrai que l’on retrouve une définition commune dans le règlement (CE) n° 1896/2006 du 12 décembre 2006 « Injonction de payer européenne » (spéc. art. 3) et le règlement (CE) n° 861/2007 du 11 juillet 2007 « Petits litiges » (spéc. art. 3), d’autres actes législatifs européens retiennent des définitions différentes, tels que la directive 2008/52/CE du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale (spéc. art. 2) ou le règlement (UE) n° 655/2014 du 15 mai 2014 instituant une procédure d’ordonnance européenne de saisie conservatoire des comptes bancaires (spéc. art. 3).

Avec cette transposition, dans le droit commun de la coopération judiciaire civile, de la définition de litiges transfrontières jusque-là circonscrite dans le domaine de la procédure d’injonction de payer européenne, on est amené à penser que cette définition sera retenue à chaque fois que le règlement ou la directive applicable ne contient pas de dispositions spécifiques – et, par hypothèse, dérogatoires – sur cette notion.

Règlement Bruxelles I [I]bis[/I] : notaires, exécution forcée et litiges transfrontières

L’article 18 TFUE et l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ne s’opposent pas à une règlementation nationale habilitant les notaires, agissant dans le cadre des compétences qui leur sont dévolues dans les procédures d’exécution forcée sur le fondement d’un document faisant foi, à rendre des ordonnances d’exécution ne pouvant pas être reconnues et exécutées dans un autre État membre.

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Contrefaçon : le Conseil constitutionnel censure partiellement les pouvoirs de la HADOPI

Les dispositions du code de la propriété intellectuelle organisant l’accès de la HADOPI aux informations d’identification d’un internaute sont conformes à la Constitution. En revanche, celles permettant son accès à tous documents, dont les données de connexion, sont déclarées inconstitutionnelles.

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Action négatoire de nationalité : absence de prescription

L’action négatoire de nationalité régie par l’article 29-3 du code civil n’est soumise à aucune prescription.

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Action négatoire de nationalité : absence de prescription

L’article 29-3 du code civil dispose que « toute personne a le droit d’agir pour faire décider qu’elle a ou qu’elle n’a point la qualité de Français » et que « le procureur de la République a le même droit à l’égard de toute personne ».
Ces principes organisent les actions déclaratoires et négatoires de nationalité française, qui peuvent être exercées à titre principal ou à titre incident (pour une présentation de ces actions, F. Jault-Seseke, S. Corneloup et S. Barbou des Places, Droit de la nationalité et des étrangers, PUF, 2015, nos 248 s.).

La jurisprudence a eu à connaître, à quelques reprises, d’une difficulté concernant les actions négatoires : qu’en est-il de la prescription, notamment dans l’hypothèse où le procureur engage l’action ?

Trois arrêts de la première chambre civile ont retenu que cette action en dénégation de la nationalité française n’est soumise à aucune prescription (Civ. 1re, 1er juill. 2003, n° 01-02.242 ; 22 juin 2004, n° 02-10.105 ; 6 oct. 2010, n° 09-15.792).

Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a été saisi de la disposition selon laquelle « le procureur de la République a le même...

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Quelle adaptation du droit des personnes et de la famille suite à l’ordonnance n° 2020-595 ?

1. L’ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 « permet de tenir compte tant de la prorogation de l’état d’urgence sanitaire que de la nécessité de la reprise de l’activité juridictionnelle » (Compte rendu du Conseil des Ministres du 20 mai 2020 accessible en ligne sur le site du gouvernement). Cette reprise de l’activité juridictionnelle ne peut avoir lieu sans le strict respect des consignes sanitaires : gestes barrières et distanciation sociale. En ce sens, le texte complète ou adapte l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 qui a été prise dans le contexte de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020. L’analyse critique que nous livrerons de l’ordonnance se placera précisément sous l’angle du droit des personnes et de la famille seulement pour les dispositions explicites de l’ordonnance étudiée (Pour une analyse en droit immobilier : F. Kieffer, Délais covid-19 l’ordonnance du 20 mai 2020 et la saisie immobilière, Dalloz actualité, 27 mai 2020). Dispositions explicites seulement car certaines précisions générales issues de l’ordonnance pourraient toucher plus ou moins directement le droit de la famille. Nous nous risquerons toutefois à soulever au moins une absence notable de l’ordonnance, celle d’adaptations spécifiques de la procédure de divorce. La désunion du couple marié n’est pas évoquée explicitement mais on sait que l’ordonnance n° 2020-304 s’y intéressait implicitement au moins par la procédure sans audience. Comme l’a évoqué Maître Thouret (S. Thouret, L’impact du covid-19 sur la procédure de divorce, AJ fam. 2020. 261 image), ces procédures de divorce restées au point mort ont nécessairement pris du retard ; certaines juridictions n’étant pas équipées pour organiser une audience de conciliation à distance comme l’article 7 de l’ordonnance du 25 mars 2020 peut le suggérer. Mais on comprend aisément que parmi le contentieux le plus urgent, ce sont des thèmes qui cristallisent des difficultés importantes qui priment. Nous évoquerons donc tour à tour : l’hospitalisation sans consentement, les mesures liées à la minorité (assistance éducative et autorité parentale) et celles intéressant les majeurs protégés.

2. L’article 6 de l’ordonnance n° 2020-595 s’intéresse en premier lieu aux mesures d’hospitalisation sans consentement. On connaît l’importance actuelle du contentieux à ce sujet que nous commentons régulièrement dans ces colonnes. Récemment, une question prioritaire de constitutionnalité a d’ailleurs été transmise au Conseil constitutionnel (Civ. 1re, 5 mars 2020 n° 19-40.039, Dalloz actualité, 15 avr. 2020, obs. C. Hélaine) montrant la tension importante qui règne en la matière. Cette tension inscrite dans une certaine stabilité s’explique par la grande particularité de ces mesures d’hospitalisation qui – sans l’accord de l’intéressé – vont la priver de liberté. La prolongation de la mesure occupe donc notamment une place de choix dans les prétoires. Or, en situation de crise sanitaire telle que nous la connaissons actuellement, cette importance du juge des libertés et de la détention aurait pu être menacée. Cette situation est corroborée par l’article 8 de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 lequel précise « Lorsque la représentation est obligatoire ou que les parties sont assistées ou représentées par un avocat, le juge ou le président de la formation de jugement peut décider que la procédure se déroule selon la procédure sans audience. Elle en informe les parties par tout moyen ». La procédure sans audience pose évidemment des difficultés dans le cadre très particulier de l’hospitalisation sans consentement. On sait que la loi n° 2013-869 du 27 septembre 2013 avait pour objectif de renforcer le contrôle du juge des libertés et de la détention dans ce contexte particulier de privation de liberté (sur les conditions d’hospitalisation, D. Truchet, Rép. civ., v° Malades mentaux, nos 4 s.). Ce contrôle systématique déjà impulsé par la loi de 2011 souffrait donc d’une certaine gêne avec les dispositions d’urgence de l’ordonnance n° 2020-304. L’article 6 de l’ordonnance nouvelle prend acte de cette nécessité en précisant désormais que « En matière de soins psychiatriques sans consentement, la personne hospitalisée peut à tout moment demander à être entendue par le juge des libertés et de la détention. Cette audition peut être réalisée par tout moyen permettant de s’assurer de son identité et garantissant la qualité de la transmission et la confidentialité des échanges ». L’expression « à tout moment » bien connue des spécialistes de l’hospitalisation sans consentement n’est pas sans rappeler l’article L. 3211-12.-I du code de la santé publique sur la mainlevée de la mesure et l’article L. 3213-4 sur sa prolongation. Le texte reste volontairement très vague sur les mesures qui permettront l’audition par le juge des libertés et de la détention de la personne qui le sollicite. Chaque établissement composera avec les moyens à disposition même si la visioconférence reste le moyen le plus sûr de d’assurer de « l’identité » de l’intéressé. La qualité de la transmission demeure toutefois une question délicate, les réseaux internet des établissements concernés n’étant pas forcément pourvus d’un très haut débit. En pratique, il sera peut-être délicat d’assurer une telle transmission.Le texte a pour principale ambition de ne pas malmener ce fameux et délicat équilibre entre les droits de la personne placée en hospitalisation sans consentement et la protection de l’ordre public. Il s’agit donc d’une véritable mesure corrective par rapport à l’ordonnance précédente. Cette correction est la bienvenue mais il faut s’assurer d’un retour rapide à une situation normale dès que les conditions sanitaires le permettront ; seule façon de s’assurer d’une égalité dans le traitement des dossiers selon les établissements concernés et les moyens disponibles dans ces derniers.

3. En ce qui concerne les dispositions relatives à la minorité de manière générale, deux corps de disposition sont concernés. D’une part, sur l’assistance éducative, le Rapport remis au président de la République résume l’objectif de l’ordonnance ainsi : « Les articles 10 à 13 de la présente ordonnance portent sur l’assistance éducative. Les nouvelles dispositions relatives à l’assistance éducative visent à concilier la reprise rapide d’un fonctionnement normal de la justice des mineurs avec le respect des règles de distanciation sociale. Elles prennent en compte les contextes locaux différents et la nécessité d’organiser dans des salles plus grandes que les bureaux des magistrats les audiences en assistance éducative qui regroupent souvent de nombreuses personnes. C’est pourquoi l’essentiel des dispositions de l’ordonnance a été conservé, à l’exception de celles portant sur les placements et de celles portant sur la suspension des droits de visite et d’hébergement, qui devront faire l’objet d’audiences. Le prolongement dans la durée de la crise sanitaire commande également de limiter le renouvellement des autres mesures sans audience à une seule fois par affaire ». En ce sens, l’article 9 de l’ordonnance n° 2020-595 ajoute à l’article 13 alinéa 3 une précision quant à la mesure d’assistance éducative concernée par cette disposition : « À défaut de mise en œuvre des dispositions des deux alinéas précédents, les mesures d’assistance éducative dont le terme vient à échéance au cours de la période définie à l’article 1er sont prorogées de plein droit jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la fin de cette période ». Il ne s’agit donc que de l’assistance éducative en milieu ouvert (AEMO) qui est le principe en la matière comme le prévoit l’article 375-2, alinéa 1er, du code civil (Rép. civ., v° Autorité parentale, par V. Larribau-Terneyre et M. Azavant, n° 454). Le texte prévoit que la disposition est applicable également à l’aide à la gestion du budget de l’article 375-9-1 du code civil créé par la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007. Ces deux mesures liées à l’assistance éducatives étant les plus souples dans le corps de règle envisagé, l’ordonnance permet donc assez logiquement selon nous leur maintien de plein droit. Ces modifications procédurales importantes étaient nécessaires dans ce contexte (pour une présentation approfondie des apports de l’ord. n° 2020-304 à ce sujet, V. Égéa, Les dispositions de l’ordonnance n °2020-304 du 25 mars 2020 relatives à l’assistance éducative, Gaz. Pal. 28 avr. 2020, n° 16, p. 87 et s. n° 1 spéc.). Une précision sur les bornes temporelles bienvenue suit ces dispositions : « toutefois, les mesures d’assistance éducative et les mesures judiciaires d’aide à la gestion du budget arrivées à échéance avant le 1er juin 2020 sont prorogées de plein droit jusqu’au 1er août 2020 inclus ». Cette prolongation de plein droit reste intéressante dans ce contentieux très particulier où l’enfant est au cœur des préoccupations du système imaginé par le législateur. On ne peut que louer cette différenciation faite dans l’ordonnance n° 2020-595 entre l’assistance éducative en milieu ouvert de l’article 375-2 et celle de l’article 375-3, plus exceptionnelle et demandant ainsi un contrôle du juge renforcé. La mention de l’article 375-3 du code civil est d’ailleurs, en ce sens, supprimée de l’article 14 de l’ordonnance n° 2020-304 lequel prévoit le renouvellement sans audience avec une décision spécialement motivée. Ainsi, seule l’AEMO et la mesure d’aide à la gestion du budget restent concernées par le dispositif issu de la crise sanitaire. L’ordonnance unifie le temps du renouvellement, désormais à une année et ce une seule fois. Le Rapport remis au président de la République justifie ce bornage temporel au maintien de la crise sanitaire dans le temps. Conformément à l’esprit général de l’article 388-1 du code civil, l’article poursuit sur l’importance donnée à l’écoute du mineur doué de discernement mais sur ce point nihil novi sub sole. L’urgence sanitaire étant sur sa phase de déclin, on comprend bien volontiers que l’écoute du mineur doué de discernement retrouve son empire normal. La condition reste toutefois classique : le mineur doit en faire la demande. Cette dualité entre le respect des consignes sanitaires de distanciation sociale et la nécessité de maintenir des audiences pour les contentieux les plus délicats nous paraît bien balancée. En somme, c’est la plupart de l’ossature de l’assistance éducative adaptée au covid-19 qui perdure. Les différences portent sur les mesures qui cristallisent le plus de difficultés et le retour à une audience semble fort pertinente pour ces domaines-ci. 

D’autre part, sur l’autorité parentale, l’ordonnance étudiée vient préciser comme le dit le Rapport « que la durée des mesures de droit de visite et de remise d’enfant fixées en espace de rencontre par décision du juge aux affaires familiales est réputée avoir été suspendue à compter de la fermeture de l’établissement et jusqu’à la reprise effective de la mesure par l’espace de rencontre (art. 11-2) ». Il s’agit d’une adaptation de l’article 1180-5 du Code de procédure civile qui prévoit la possibilité pour le juge de décider que le droit de visite s’exercera dans un espace neutre dit « espace de rencontre ». Le texte prévoit donc que la durée des mesures qui font intervenir ledit espace est suspendue jusqu’à l’ouverture de ces derniers ; ce qui n’est que l’économie générale de tout le dispositif procédural lié au covid-19. Il est intéressant de noter que les sites internet de ces espaces de rencontre indiquent souvent que leurs équipes en télétravail sont à la disposition des parents pour aider à « trouver des solutions amiables » pendant la crise sanitaire. On sait que le contentieux de l’autorité parentale est très difficile psychologiquement pour les parents et les enfants. Ainsi, on ne peut que louer cet effort d’accompagner les parents dans cette voie amiable ; probablement inspirée par le législateur qui a instauré une expérimentation de médiation préalable aux modifications de convention d’autorité parentale. Sur les droits de visite, plus spécifiquement, deux suppressions majeures et importantes. L’article 11 supprime l’article 19 de l’ordonnance précédente qui prévoyait la possibilité pour le juge de suspendre ou de modifier un droit de visite ou d’hébergement sans l’audition des parties tandis que l’article 12 supprime la simplification procédurale de l’article 21, alinéa 2, de l’ordonnance n° 2020-304 (absence de contreseing et notification par voie électronique pour la modification d’un droit de visite). Ce retour à une audience pour la modification de ces situations juridiques paraît nécessaire mais la mise en œuvre pratique risque de ne pas être aisée. 

4. Le texte étudié intéresse également les majeurs protégés. On sait que l’ordonnance n° 2020-304 permettait déjà de proroger les mesures de protection du droit des majeurs vulnérables et celles liées aux violences conjugales des articles 515-9 à 515-13 du code civil qui arrivaient à échéance pendant la période troublée. C’était une solution bienvenue dans le cadre de l’épidémie ; notamment pour toutes les personnes déjà protégées ou leurs représentants qui auraient pu contracter le virus. L’ordonnance n° 2020-595 ajoute un article 11-1 à l’ordonnance précitée lequel précise : « Art. 11-1.-Par dérogation aux articles 1222 à 1223-1 du code de procédure civile, le dossier d’un majeur protégé peut être communiqué par tous moyens aux mandataires judiciaires à la protection juridique des majeurs, à l’exception du certificat médical qui ne peut être consulté que suivant les règles énoncées aux articles précités ». La principale nouveauté reste donc cette communication « par tous moyens » qui permet d’éviter que le dossier soit consultable uniquement au greffe. C’est évidemment une mesure appréciable en ces temps où l’accès aux différents tribunaux et cours demeure très délicat. La communication essentielle du dossier – ici comme ailleurs certes – dans ces procédures parfois délicates à gérer reste donc d’actualité en ces temps troubles (V. Montourcy, Le droit d’accès au dossier et le droit à la copie des pièces le constituant, in Dossier « Majeurs protégés », AJ fam. 2014. 167 image). Bien évidemment, le texte réserve la communication du certificat médical dans les conditions classiques du Code de procédure civile, i.e. au greffe. On comprend évidemment que pour cette pièce particulière le droit commun ne s’adapte pas.

5. En somme, cette ordonnance procédurale est plus complexe qu’il n’y paraît. Adaptant, modifiant, parfois supprimant des dispositions, elle ne peut pas être décrite comme une simplification mais bien comme une continuation raisonnée. Les adaptations procédurales qui étaient nécessaires hier au pic de l’épidémie ne sont parfois plus à l’ordre du jour et elles ont été ainsi supprimées mais un grand nombre d’entre-elles reste toujours en vigueur aujourd’hui. Les inquiétudes peuvent se dissiper – nous sommes bien loin d’un point de non-retour – mais il faudra continuer à revenir au droit commun au fur et à mesure que la situation le permettra. Le droit des personnes et de la famille ne se complaît que peu dans ces situations particulières. Le tout est d’avancer sans se précipiter afin de retrouver si ce n’est le droit d’hier au moins une situation plus connue des juristes.

Quelle adaptation du droit des personnes et de la famille suite à l’ordonnance n° 2020-595 ?

L’ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 intéresse à plusieurs égards le droit des personnes et de la famille. Le texte étudié tente de concilier deux intérêts contradictoires : d’une part l’urgence imposée par les dossiers familiaux, liés aux majeurs protégés ou hospitalisés sans consentement et d’autre part la distanciation sociale, préalable nécessaire au recul de l’épidémie dans le temps. 

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Arrêté du 20 mai 2020 relatif à la CPVE en matière civile devant les cours d’appel : entre espoir et déception…

Si 2019 a été une année riche, pour ne pas dire foisonnante, en matière de communication par voie électronique, 2020 est déjà marquée par des textes concernant la matière : outre le droit d’exception régi par l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, permettant les audiences virtuelles et allégeant les normes de sécurité dans certaines transmissions d’actes, des arrêtés, en février, ont été des étapes de la communication par voie électronique version 2 (CPVE v. 2), alors que l’arrêté commenté du 20 mai 2020 constitue un énième petit pas dans le long et tortueux cheminement de la dématérialisation des procédures en version 1 (CPVE v. 1 ; Sur ces notions, v. C. Bléry et J.-P. Teboul, De la communication par voie électronique au code de cyber procédure civile, JCP 2017; 665 ; Numérique et échanges procéduraux, in Vers une procédure civile 2.0, Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2018, p. 7 s.).

En effet,

deux arrêtés du 18 février 2020 ont modifié deux précédents arrêtés des 6 et 28 mai 2019 relatifs au Portail du justiciable : depuis le 21 février 2020, ce Portail permet au justiciable, outre la consultation du dossier d’une affaire, d’adresser des requêtes par voie électronique à certaines juridictions civiles. Le portail, créé par le décret n° 2019-402 du 3 mai 2019 (v. C. Bléry, T. Douville et J.-P. Teboul, Dalloz actualité, 24 mai 2019), qui a réécrit l’article 748-8 du code de procédure civile, ne se limite donc plus à des flux sortants de la juridiction à destination du justiciable, il accueille le flux entrant des actes de saisine, que sont les requêtes, soit le flux allant du justiciable vers la juridiction (C. Bléry et J.-P. Teboul, Dématérialisation des procédures : saisine d’une juridiction par le Portail du justiciable, Dalloz actualité, 5 mars 2020). Le Portail est bel et bien une première mise en œuvre concrète de la CPVE v. 2 ;
  l’arrêté du 20 mai 2020, au contraire, est une contribution à la CPVE v. 1. Il concerne en effet les « antiques » RPVA et RPVJ. Son apport n’est pas négligeable. Il laisse cependant le « cépévéiste » sur sa faim.

I - Situation antérieure à l’arrêté du 20 mai 2020

Antérieurement à l’arrêté du 20 mai 2020, faute d’un cadre juridique autorisant le recours systématique à cette voie et même en présence de « tuyaux » (RPVA/RPVJ), la CPVE était, selon le cas, facultative, obligatoire ou interdite devant la cour d’appel : c’était la conséquence de la combinaison des dispositions du code de procédure civile, des arrêtés techniques et de la jurisprudence. Cette situation était contraire à un « adage » qu’il serait souhaitable d’instituer, selon lequel « dès lors qu’il y a les “tuyaux”, il y a le droit »…

Pourtant, juridiquement, l’article 748-1 envisageait et envisage toujours la transmission (envoi, remise, notifications) par voie électronique de tous les actes du procès, qu’il énumère ; le principe étant qu’elles sont permises, dans les conditions posées par les articles suivants, et parfois imposées. Pour la cour d’appel, l’article 930-1 rend obligatoire la remise des actes au greffe, et par ce greffe, par voie électronique – ceci à peine d’irrecevabilité et sauf cause étrangère, lorsque la représentation est obligatoire : plus précisément il s’agit de représentation obligatoire par avocat (ROA), à l’exclusion de représentation par le défenseur syndical en matière prud’homale, puisque celui-ci n’a pas accès au RPVA (C. pr. civ., art. 930-2 et 3).

Pour compléter ces articles 748-1 et 930-1, des arrêtés techniques sont nécessaires. Ils sont régis par l’article 748-6, alinéa 1er, du code de procédure civile : ils déterminent les garanties techniques, mais aussi le domaine de la CPVE, lorsqu’elle est facultative. L’exigence d’arrêté est la « clé de voute » du système de 2005. Parmi ces arrêtés, deux concernaient les cours d’appel : l’arrêté du 5 mai 2010 applicable devant les cours d’appel en procédure sans représentation obligatoire et l’arrêté du 30 mars 2011 relatif aux procédures avec représentation obligatoire devant les cours d’appel.

A - Procédure sans ROA

L’arrêté du 5 mai 2010, abrogé, permettait la communication par voie électronique de certains actes seulement. Du fait de cet arrêté, lorsque la procédure était sans représentation obligatoire, la CPVE était facultative, mais limitée.

Cela s’explique par l’« histoire » : en procédure orale classique, la formulation à l’audience des prétentions des parties, de « vive voix », interdisait a priori toute notion de dématérialisation procédurale. De fait, lorsqu’il s’est agi de permettre le recours à la communication par voie électronique dans les procédures sans représentation obligatoire, donc orales, devant les cours d’appel, les rédacteurs de l’arrêté technique se sont heurtés à cette antinomie entre oralité et dématérialisation : faute de régime réglementaire de l’écrit à l’époque, ils n’ont pu ouvrir largement ce mode de communication (J.-P. Teboul, Les métamorphoses des procédures orales. Le décret n° 2010-1165 du 1er octobre 2010 : une métamorphose de la procédure devant le tribunal de commerce impliquant une stratégie de conduite du changement, Gaz. Pal. 30-31 juill. 2014, p. 28). Pour cette raison, le recours facultatif à la communication par voie électronique a été limité aux « envois et remises des déclarations d’appel, des actes de constitution et des pièces qui leur sont associées » : ces actes étaient prévus par le code et conçus par lui comme devant être réalisés ou constatés par écrits sur support papier ; ils avaient une valeur autonome, l’antinomie n’existait pas pour eux. Les autres écrits, qui jouaient pourtant de fait un rôle en procédure orale, tout particulièrement les échanges entre parties, échappaient à la communication par voie électronique au sens du titre XXI ; en effet, ils n’étaient pas soumis à un régime particulier du code de procédure civile, de sorte qu’aucune démarche par équivalence ne pouvait leur être appliquée. Le décret du 1er octobre 2010, en créant les articles 446-1 à 4 a permis le passage de l’oralité classique à l’oralité moderne : l’écrit a acquis une valeur autonome, indépendamment de la parole prononcée à l’audience et a pu être dématérialisé. La communication par voie électronique est ainsi devenue praticable, à condition qu’une dispense de présentation soit possible et effective (C. pr. civ., art. 446-1, al. 2 : c’est l’oralité moderne). Par la suite, la Cour de cassation est allée plus loin. Elle a ajouté à l’article 446-2 en donnant une certaine autonomie aux écrits indépendemment d’une dispense de présentation, dès lors que des échanges écrits avaient été organisés par le juge (C. pr. civ., art. 446-2, al. 1er, et jurisprudence, Civ. 2e, 22 juin 2017, n° 16-17.118 P, D. 2017. 1588 image, note C. Bléry et J.-P. Teboul image ; ibid. 1868, chron. E. de Leiris, N. Touati, O. Becuwe, G. Hénon et N. Palle image ; ibid. 2018. 692, obs. N. Fricero image ; Procédures 2017. comm. 228, obs. Y. Strickler ; Gaz. Pal. 31 oct. 2017, p. 60, obs. L. Mayer : c’est l’oralité « post-moderne »).

Malgré l’avènement de l’oralité moderne, l’arrêté du 5 mai 2010 n’a pas été actualisé et la faculté de transmission des actes par voie électronique est restée limitée à ses prévisions. Or, ce caractère limitatif a posé des difficultés. Ainsi, le 10 novembre 2016, la deuxième chambre civile a jugé que la cour d’appel n’était pas saisie d’un mémoire remis par RPVA dans une procédure d’expropriation, procédure sans représentation obligatoire. Dans un arrêt du même jour elle a estimé en revanche qu’un avocat pouvait remettre à la cour d’appel une déclaration d’appel en matière de procédure d’expropriation par RPVA (V. Civ. 2e, 10 nov. 2016, nos 15-25.431 et 14-25.631 P, D. 2016. 2502 image, note C. Bléry image ; ibid. 2017. 605, chron. E. de Leiris, N. Palle, G. Hénon, N. Touati et O. Becuwe image ; D. avocats 2017. 72, obs. C. Lhermitte image ; et, sur le premier, Dalloz actualité, 1er déc. 2016, obs. R. Laffly). La deuxième chambre civile a confirmé la recevabilité d’une déclaration d’appel par voie électronique dans une procédure sans représentation obligatoire, toujours en matière d’expropriation, dans un arrêt rendu le 19 octobre 2017 (Civ. 2e, 19 oct. 2017, n° 16-24.234, D. 2017. 2353 image, note C. Bléry image ; ibid. 2018. 692, obs. N. Fricero image). Cette jurisprudence s’expliquait parce que l’article 1er de l’arrêté technique cantonnait l’utilisation du réseau privé virtuel des avocats à certains actes. Le texte était limitatif, mais clairement rédigé : il n’y avait aucune ambiguïté sur ce qu’il permettait ou pas. La Cour de cassation l’avait, dès lors, appliqué strictement, validant la remise de la déclaration d’appel par voie électronique, mais pas celle d’un mémoire en matière de procédure d’expropriation. Remarquons que, si le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 a transformé la procédure d’expropriation en procédure avec représentation obligatoire tant en première instance (C. expr., art. R. 311-9) qu’en appel (C. expr., art. R. 311-17), le raisonnement de la Cour n’a pas été modifié dès lors que la procédure d’appel est (de moins en moins souvent) sans représentation obligatoire. Un arrêt du 19 mars 2020 en atteste : il a été rendu à propos d’un recours contre une décision prise par un bâtonnier à propos d’un litige né à l’occasion d’un contrat de collaboration ou d’un contrat de travail d’un avocat. Ce recours, relevant de l’article 16 du décret du 27 novembre 1991, a été considéré comme éligible à la CPVE, parce que porté devant la cour d’appel elle-même ; dès lors la déclaration d’appel formée par RPVA a été jugée recevable (Civ. 2e, 19 mars 2020, n° 19-11.450, F-P+B+I, Dalloz actualité, 2 juin 2020, obs. C. Bléry).

La Cour de cassation a par ailleurs fait preuve d’une étonnante souplesse en faisant jouer l’arrêté là où on ne l’aurait pas forcément pensé, ainsi à propos du recours formé contre une décision du directeur général de l’INPI en application de l’article R. 411-21 du code de la propriété intellectuelle (Com. 13 mars 2019, n° 17-10.861 F-P+B et Civ. 2e, 18 oct. 2018, n° 17-10.861 FS-D, Dalloz actualité, 28 mars 2019, obs. C. Bléry ; D. 2019. 583 image ; ibid. 2020. 451, obs. J.-P. Clavier image ; RTD com. 2019. 370, obs. J. Passa image).

Quoi qu’il en soit, selon l’acte à accomplir, la CPVE était facultative ou interdite… malgré l’existence de « tuyaux ».

B - Procédure avec ROA

L’arrêté du 30 mars 2011, abrogé, énumérait des actes, mais pas tous les actes, susceptibles d’être transmis par voie électronique, ce qui – là aussi – a entraîné des hésitations.

Cet arrêté était lié à l’article 930-1 du code de procédure civile, qui s’appliquait, et s’applique toujours, aux procédures ordinaires et à jour fixe. L’alinéa 1er dispose qu’« à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique ». Les alinéas 2 et 3 prévoient le retour au papier en cas de cause étrangère : l’acte est remis ou adressé par LRAR – depuis le décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 – au greffe. De même, selon l’alinéa 4, « les avis, avertissements ou convocations sont remis aux avocats des parties par voie électronique, sauf impossibilité pour cause étrangère à l’expéditeur ». Enfin, l’alinéa 5 précise qu’« un arrêté du garde des Sceaux définit les modalités des échanges par voie électronique ». C’était donc l’arrêté du 30 mars 2011, d’ailleurs modifié à plusieurs reprises.

Souvent appelée à se prononcer, la Cour de cassation a estimé que certaines transmissions « avocat-greffe », non visées par l’arrêté technique du 30 mars 2011, devaient être accomplies par voie électronique : ainsi de la saisine de la cour par voie électronique en cas de renvoi après cassation (Civ. 2e, 1er déc. 2016, n° 15-25.972 P, Dalloz actualité, 14 déc. 2016, obs. C. Bléry ; D. 2016. 2523 image ; ibid. 2017. 422, obs. N. Fricero image ; D. avocats 2017. 28, obs. C. Lhermitte image ; 17 mai 2018, n° 17-15.319 NP), du déféré (Civ. 2e, 26 janv. 2017, n° 15-28.325 NP, Procédures 2017. Comm. 57, obs. H. Croze ; 1er juin 2017, n° 16-18.361 P ; Gaz. Pal. 31 oct. 2017, p. 70, obs. C. Bléry). Elle a statué de la même manière à propos des transmissions « greffe-avocat » : par exemple pour un avis d’audience en rectification d’erreur matérielle, alors que la décision rectifiée était issue d’une procédure avec ROA (Civ. 2e, 7 déc. 2017, n° 16-18.216 P, Dalloz actualité, 8 janv. 2018, obs. F. Mélin ; Gaz. Pal. 6 févr. 2018, p. 56, obs. C. Bléry) ; elle a encore jugé que si la requête aux fins d’assignation à jour fixe devait être faite sur support papier (v. infra), l’assignation à jour fixe, elle, devait emprunter la voie électronique… sauf cause étrangère (Civ. 2e, 27 sept. 2018, n° 17-20.930 P, Dalloz actualité, 3 oct. 2018, obs. C. Bléry ; D. 2018. 1919 image ; ibid. 2019. 555, obs. N. Fricero image ; 9 janv. 2020, n° 18-24.513 P, Dalloz actualité, 24 janv. 2020, obs. F. Kieffer ; D. 2020. 88 image ; Rev. prat. rec. 2020. 8, chron. O. Salati image).

M. de Leiris (E. de Leiris, D. 2017. 607 image) justifie cette jurisprudence de la manière suivante : l’auteur écrit qu’en matière de communication par voie électronique obligatoire, et en l’état de l’article 930-1, « il n’y a pas lieu de se pencher sur l’arrêté le mettant en œuvre pour déterminer le domaine d’application de cette obligation ».

Notons encore que l’article 959 prévoit que « la requête [de l’art. 958] est présentée par un avocat dans le cas où l’instance devant la cour implique constitution d’avocat dans les conditions prévues à l’article 930-1 ».

La Cour de cassation a en revanche précisé que certaines procédures « autonomes », qui relèvent du premier président de la cour d’appel – juridiction au sein de la juridiction – et qui n’étaient donc soumises ni à l’arrêté de 2010, ni à celui de 2011, étaient exclues de la communication par voie électronique : dès lors, une requête en récusation (Civ. 2e, 6 juill. 2017, n° 17-01.695 P, Gaz. Pal. 31 oct. 2017, p. 61, obs. C. Bléry ; Dalloz actualité, 20 juill. 2017, obs. M. Kebir), une requête aux fins d’assigner à jour fixe (Civ. 2e, 7 déc. 2017, n° 16-19.336 P, Dalloz actualité, 14 déc. 2017, obs. C. Bléry ; D. 2017. 2542 image ; ibid. 2018. 692, obs. N. Fricero image ; ibid. 1223, obs. A. Leborgne image ; Gaz. Pal. 15 mai 2018, p. 77, obs. N. Hoffschir), adressée au premier président par le réseau RPVA, ont été déclarées irrecevables … De même du recours porté devant le premier président de la cour d’appel, en matière de contestation des honoraires de l’avocat (Civ. 2e, 6 sept. 2018, n° 17-20.047 P, Dalloz actualité, 14 sept. 2018, obs. C. Bléry ; JCP 2018. 1174, obs. N. Gerbay)… à la différence du recours contre une décision du même bâtonnier, mais porté devant la cour elle-même (v. Civ. 2e, 19 mars 2020, n° 19-11.450, F-P+B+I, préc.). Le moins que l’on puisse dire c’est que les arrêts ont interrogé quant à l’autonomie de certaines procédures « condamnées » par cette jurisprudence à être « papier ».

Dès lors qu’il s’agissait de la remise d’actes à la cour d’appel ou par la cour d’appel, la communication par voie électronique était obligatoire. Elle était interdite devant le premier président, exclu de la communication par voie électronique.

C’est en cet état complexe, pour ne pas dire byzantin, du droit que l’arrêté du 20 mai 2020 a été publié.

II - Apports de l’arrêté du 20 mai 2020

L’arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant les cours d’appel concerne, on l’a dit, le RPVA et le RPVJ. Il est des plus classiques dans son découpage (conditions de forme des actes de procédure remis par la voie électronique, système de communication électronique mis à disposition des juridictions et du ministère public, sécurité des moyens d’accès des avocats au système de communication électronique mis à leur disposition, identification des parties à la communication électronique et de sa fiabilité), ses solutions techniques inchangées…

Son apport original tient donc dans ses deux premiers articles, qui disposent respectivement : « l’arrêté du 5 mai 2010 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures sans représentation obligatoire devant les cours d’appel et l’arrêté du 30 mars 2011 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d’appel sont abrogés » (art. 1er) ; et, « lorsqu’ils sont effectués par voie électronique entre avocats, ou entre un avocat et la juridiction, ou entre le ministère public et un avocat, ou entre le ministère public et la juridiction, dans le cadre d’une procédure avec ou sans représentation obligatoire devant la cour d’appel ou son premier président, les envois, remises et notifications mentionnés à l’article 748-1 du code de procédure civile doivent répondre aux garanties fixées par le présent arrêté » (art. 2).

Un autre article, aussi important que peu heureux, doit être mentionné, à savoir l’article 24 qui prévoit l’entrée en vigueur de l’arrêté en deux temps : immédiatement (« à la date de sa publication », soit le 21 mai 2020), pour la plupart de ses dispositions et au 1er septembre 2020, pour les « dispositions de l’article 2, en ce qu’elles portent sur la transmission des actes de procédure au premier président près la cour d’appel ».

Si le texte suscitait l’espoir, il faut bien admettre que toutes les difficultés ne sont pas pour autant derrière nous, car l’arrêté est imprécis.

A - CA : procédures avec et sans ROA

Il résulte des articles 1er et 2 qu’il n’y a plus qu’un seul arrêté, là où il y en avait deux – sans distinction selon la nature de la procédure devant la cour d’appel, c’est-à-dire qu’elle soit avec ou sans représentation obligatoire.

L’arrêté du 20 mai 2020 généralise la CPVE facultative dans l’hypothèse d’une procédure sans ROA : il abandonne heureusement la liste limitative de l’article 1er de l’arrêté de 2010. Il est cependant permis de se demander dans quelles conditions ? Plus précisément le texte joue-t-il seulement en oralité moderne, dans laquelle les écrits sont autonomes en raison de la dispense de présentation ou aussi en oralité classique, dans laquelle les écrits ne sont pas autonomes sauf ceux qui étaient énumérés à l’arrêté du 5 mai 2010… ce qui nous ferait « basculer » en oralité post-moderne ?

La question se pose si l’on compare avec l’arrêté « TC » du 21 juin 2013, portant communication par voie électronique entre les avocats et entre les avocats et la juridiction dans les procédures devant les tribunaux de commerce. Dans l’arrêté « CA », il n’est fait nulle référence à l’oralité moderne. L’article 12 de l’arrêté « TC » du 21 juin 2013, lui, prévoit que « pour permettre aux avocats, en application de l’article 861-1 du code de procédure civile, d’accomplir les notifications directes prévues à l’article 673 dudit code, la remise de l’acte à l’avocat destinataire s’opère par sa transmission au moyen du RPVA » (rappelons que, selon l’article 861-1, « la formation de jugement qui organise les échanges entre les parties comparantes peut, conformément au second alinéa de l’article 446-1, dispenser une partie qui en fait la demande de se présenter à une audience ultérieure. Dans ce cas, la communication entre les parties est faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par notification entre avocats et il en est justifié auprès du tribunal dans les délais qu’il impartit » – l’article 861-3 donnant les mêmes pouvoirs au juge chargé d’instruire l’affaire). Autrement dit, c’est parce qu’une partie est dispensée de se présenter que les échanges organisés par le TC peuvent être effectués par voie électronique. Il existe aussi une dispense de présentation judiciaire devant la cour d’appel en procédure sans représentation obligatoire, donc orale : c’est l’article 946-1 qui permet donc la mise en œuvre d’une oralité moderne devant cette juridiction. Comme l’arrêté du 20 mai 2020 n’y fait pas référence, faut-il admettre que la CPVE sera valide pour tous les actes – y compris sans dispense de présentation ? Même si ce n’est pas totalement rigoureux, sans doute faut-il considérer que, dès lors qu’un écrit est formalisé par un avocat qui assiste une partie en cas de procédure sans représentation obligatoire l’usage du RPVA est possible. La jurisprudence, qui octroie une autonomie aux écrits indépendamment d’une dispense – et qui consacre ainsi l’oralité « post-moderne » – , va plutôt dans ce sens (Civ. 2e, 22 juin 2017, n° 16-17.118, P, préc.)…

Au passage, notons qu’un précédent arrêté technique « CA » a été pris qui a peut-être inspiré les rédacteurs de l’arrêté de 2020 : c’est l’arrêté du 20 décembre 2017 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures devant la cour d’appel de Papeete, applicable depuis le 1er janvier 2018. Selon l’article 1er, « le présent arrêté s’applique à la communication par voie électronique dans toutes procédures devant la cour d’appel de Papeete » : c’est ainsi que « peuvent être effectués par voie électronique, entre avocats représentant une partie ou entre un avocat et la juridiction, ou entre le ministère public et un avocat, ou entre le ministère public et la juridiction les envois, remises et notifications des actes de procédure, des pièces, avis, avertissements ou convocations, des rapports, des procès-verbaux ainsi que des copies et expéditions revêtues de la formule exécutoire des décisions juridictionnelles » (art. 2). Ceci alors qu’un article 440-6 du code de procédure civile de Polynésie française, applicable devant la cour d’appel de Papeete, lorsque la procédure est avec représentation obligatoire impose la voie électronique. La communication par voie électronique facultative semble donc générale lorsque la représentation n’est pas obligatoire (à la différence de ce que prévoyait l’arrêté du 5 mai 2010) sans précision sur les conditions ; de son côté, la communication par voie électronique obligatoire concerne toutes les transmissions avocats/juridiction… le premier président, non visé, paraissant exclu.

Il semble bien que les arrêtés techniques de 2017 et 2020 soient conçus plutôt pour les procédures écrites que pour les procédures orales. La notion d’écrit dématérialisé autonome a été perdue de vue par le pouvoir réglementaire, alors qu’elle était incluse dans l’arrêté « TC » du 21 juin 2013. L’arrêté du 20 mai 2020 est, en procédure sans ROA, source d’incertitude… Elle sera cependant sans doute dissipée par la Cour de cassation qui admettra l’usage du RPVA pour tout acte écrit même en l’absence de dispense de présentation, donc, une nouvelle fois, en oralité « post-moderne ».

Par ailleurs, quid de la nature de la CPVE devant le premier président (PP) ?

B - PP : faculté ou obligation ?

Il résulte de l’article 2 que les tuyaux seront ouverts devant le premier président le 1er septembre 2020 ! L’ouverture est une bonne nouvelle. Notre adage est décliné dans ce cas de figure : puisqu’il y a les tuyaux devant le PP, il y a le droit…

Mais pourquoi l’article 24 reporte-t-il l’entrée en vigueur ? La règle devrait déjà être en vigueur tant la jurisprudence sur les procédures autonomes a causé de difficultés inutiles et rien ne justifie un retard plus grand à l’appliquer : la technique est bien opérationnelle (au moins devant certains greffes), la meilleure preuve étant les erreurs d’aiguillage commises et ayant donné lieu à la jurisprudence évoquée…

Par ailleurs, ce n’est pas parce que les tuyaux vers le PP pourront être utilisés que l’on sait selon quelles modalités. La remise des actes au PP sera-t-elle obligatoire ou seulement facultative ? Il nous semble que la CPVE sera seulement facultative ; ceci, compte tenu de la rédaction de l’article 930-1 visant la juridiction, de la place de l’article dans le code de procédure civile et de la jurisprudence qui a toujours vu dans le PP une juridiction autonome. Cela n’est cependant pas absolument certain et la prudence sera de mise : mieux vaudra systématiquement utiliser le RPVA en procédure avec ROA, ce qui aura d’ailleurs le mérite d’unifier la procédure, surtout la procédure à jour fixe : la demande d’autorisation d’assigner à jour fixe, l’assignation en cas d’autorisation, les conclusions,… les actes adressés par le greffe, seront dématérialisées. Cette CPVE avec le PP sera nécessairement facultative en procédure sans ROA : par exemple pour une demande en référé en matière de sécurité sociale…

III - Difficultés subsistantes

La publication de l’arrêté « cour d’appel » conduit à revenir sur la CPVE devant le tribunal judiciaire et son président (C. Bléry, 1er septembre 2019 : communication par voie électronique obligatoire devant le tribunal de grande instance, Dalloz actualité, 2 sept. 2019 ; Nouveaux modes d’introduction de la procédure et communication par voie électronique, D. avocats 2020. 57 ; E. Vergès, Réforme de la procédure civile 2020 – Procédures écrite, orale et sans audience, la transformation du modèle procédural, Lexbase hebdo, éd. privée, 23 janv. 2020, p. 14 s., spéc. p. 16 ; E. Raskin, Synthèse des nouvelles règles régissant les modes de saisine en procédure civile, Gaz. Pal. 28 janv. 2020, p. 74) : il faut en effet se (re)poser des questions car l’arrêté technique « tribunal judiciaire » n’est pas rédigé de la même façon que le texte nouveau…

A - Tribunal judidiaire (TJ)

Jusqu’au 31 août 2019, aucun article spécifique du code de procédure civile ne concernait le tribunal de grande instance (TGI). Cette juridiction était régie par le régime général de la matière : par application combinée des articles 748-1, 748-6 et de l’arrêté technique « TGI ». Le 1er septembre 2019, a été mis en application un article 796-1, venu rendre obligatoire l’usage du RPVA/RPVJ pour les avocats et les greffes des TGI en procédure ordinaire et à jour fixe (hors requête au président ?) en matière contentieuse (ceci compte tenu de la place de l’art. 796-1 c. pr. civ.). Cet article 796-1 était calqué sur l’article 930-1 applicable devant les cours d’appel en procédure avec représentation obligatoire. L’arrêté technique du 7 avril 2009 s’était « glissé » dans les prévisions de l’alinéa 4 de l’article 796-1 créé en 2017 et appelant un tel arrêté. Il semblait qu’une CPVE facultative pouvait jouer dans certaines procédures orales, hors du domaine de l’article 796-1, grâce aux articles 748-1 et 6 et grâce à la généralité de l’arrêté : ainsi en matière de sécurité sociale. Mais, ne fallait-pas être en oralité moderne ? Rien n’est précisé par l’arrêté de 2009 (d’ailleurs pas conçu dans cette optique).

Devant le TJ, l’article 850 a reconduit les dispositions de l’article 796-1 en précisant expressément son domaine, à savoir « en matière de procédure écrite ordinaire et de procédure à jour fixe […] à l’exception de la requête mentionnée à l’article 840 » (al. 1er) : la remise des actes à et par la juridiction est donc obligatoire sauf cause étrangère autorisant le retour au papier. L’arrêté technique du 7 avril 2009 continue son office devant le TJ, par la grâce de la consolidation effectuée par le décret n° 2019-966 du 18 septembre 2019 (art. 8) qui a changé son intitulé : c’est désormais l’arrêté du 7 avril 2009 relatif à la communication par voie électronique devant les tribunaux judiciaires. C’est l’arrêté appelé par l’article 850, alinéa 4, et il semble qu’une CPVE facultative peut encore jouer hors du domaine de l’article 850, toujours grâce à la généralité de l’arrêté… Là encore, sans doute que tout écrit formalisé par un avocat peut emprunter le RPVA, sans qu’il soit besoin d’avoir été dispensé de se présenter.

B - Président

En l’état initial du droit devant les TGI, deux décisions notables avaient été rendues, dont il résulte que des juges ayant un pouvoir juridictionnel sont cependant « englobés » dans le TGI : ils étaient donc éligibles à la communication par voie électronique générale et facultative évoquée. Ainsi devant le juge aux affaires familiales (impl., Civ. 2e, 15 oct. 2015, n° 14-22.355 NP) et devant le juge de l’exécution, spécialement pour les procédures de saisies immobilières (Civ. 2e, 1er mars 2018, n° 16-25.462 P, Dalloz actualité, 13 mars 2018, obs. C. Bléry ; D. 2018. 517 image ; ibid. 1223, obs. A. Leborgne image ; JCP 2018. 514, obs. L. Raschel). Avec l’entrée en vigueur de l’article 796-1, la question a donc été de savoir si la jurisprudence « englobant » le JAF ou le JEX n’a pas été remise en cause ? Et quid du président statuant en référé ou sur requêtes – autres qu’aux fins d’autorisation d’assigner à jour fixe ? Si la CPVE ne s’imposait pas devant ces juges (président, JAF, JEX), l’utilisation du RPVA nous semblait devoir rester facultative et non interdite, toujours en vertu de l’ « adage » : « Là où il y a les tuyaux, il y a le droit » ! Devant le TJ, l’article 850 exclut expressément les requêtes aux fins d’assigner à jour fixe devant le président du TJ : l’article 840 vise en effet la requête adressée au président du TJ pour… assigner à jour fixe, tout en disant que les procédures à jour fixe sont concernées par la CPVE obligatoire. Est-ce alors une CPVE facultative ou interdite ? Quid des référés ? De la procédure accélérée au fond (PAF) ? Une nouvelle fois, dès lors que nous sommes hors CPVE obligatoire, les textes nous semblent permettre une CPVE facultative… sous réserve (qui devrait n’être que provisoire) de tuyaux.

L’incertitude est donc encore plus grande devant le président du TJ que devant le PP où la future permission d’utiliser le RPVA est un point acquis… à moins que ce ne soit une obligation (v. supra).

L’arrêté du 20 mai 2020 apporte des améliorations que nous n’allons pas bouder. Il est quand même permis de regretter qu’il arrive bien tard et qu’il ne mette pas fin à toutes les incertitudes qui sont le lot du « cépévéiste ».

On peut essayer de résumer ainsi l’état actuel de la CPVE v. 1 devant les cours d’appel :

en procédure écrite/ROA : remise obligatoire de tous les actes du procès à et par le greffe (sauf anomalie) ; en procédure orale/sans ROA : remise facultative de tous les actes du procès à et par le greffe ; devant le PP : remise facultative des actes.

À quand une remise à plat globale, une réglementation intelligible et simple, de la CPVE ? C’était pourtant le cas en 2005 lorsque le Titre XXI a été inséré dans le code de procédure civile. Il est vrai que la question se pose tout autant pour toute la procédure civile, qui sort toute meurtrie de la récente réforme d’ampleur qui vient de lui être infligée…

Arrêté du 20 mai 2020 relatif à la CPVE en matière civile devant les cours d’appel : entre espoir et déception…

Un arrêté du 20 mai 2020 a été publié au Journal officiel du 21 mai 2020 : il abroge les deux arrêtés « cour d’appel » de 2010 et 2011 et ouvre heureusement la CPVE avec le premier président… au 1er septembre 2020. Il laisse malheureusement encore subsister des incertitudes.

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Appel contre une décision du bâtonnier à propos d’un contrat de travail d’un avocat : le droit et les tuyaux

« Là où il y a les tuyaux, il y a le droit ! ». L’arrêt rendu le 19 mars 2020 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation en matière de communication par voie électronique met en œuvre cet « adage » qui nous est cher. Si nous nous en réjouissons, il faut cependant reconnaître que la décision illustre une fois de plus les difficultés que la détermination du champ d’application de la CPVE, notamment en appel, a pu susciter (Sur la CPVE, v. C. Bléry, Droit et pratique de la procédure civile. Droit interne et européen, S. Guinchard (dir.),  9e éd., Dalloz Action, 2016/2017, nos 161.221 s. ; Rép. pr. civ., v° Communication électronique, par E. de Leiris, sept. 2012 [actu. janv. 2016] ; C. Bléry et J.-P. Teboul, Une nouvelle ère pour la communication par voie électronique, in 40 ans après… Une nouvelle ère pour la procédure civile ?, Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2016, p. 31 s. et Numérique et échanges procéduraux, in Vers une procédure civile 2.0, Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2018, p. 7 s. ; J.-L. Gallet et E. de Leiris, La procédure civile devant la cour d’appel, 4e éd., LexisNexis,  2018, nos 485 s.). 

Rappelons à cet égard que, jusqu’au 20 mai 2020, deux arrêtés techniques concernaient les cours d’appel : l’arrêté du 5 mai 2010 applicable devant les cours d’appel en procédure sans représentation obligatoire et l’arrêté du 30 mars 2011 relatif aux procédures avec représentation obligatoire devant les cours d’appel ; et que les arrêtés techniques, régis par l’article 748-6, alinéa 1er, du code de procédure civile, déterminent non seulement les garanties techniques, mais aussi le domaine de la CPVE, lorsqu’elle est facultative. Faute d’un cadre juridique autorisant le recours systématique à cette voie et même en présence de « tuyaux » (RPVA/RPVJ), la CPVE était, selon le cas, facultative, obligatoire ou interdite devant la cour d’appel.

Précisons aussi qu’un arrêté « CA » vient d’être publié, de sorte que le contentieux de la détermination du domaine de la CPVE va se tarir, même si de nouvelles questions vont se poser (C. Bléry, Arrêté du 20 mai 2020 relatif à la CPVE en matière civile devant les cours d’appel : entre espoir et déception…, Dalloz actualité, 2 juin 2020)…

L’arrêt du 19 mars 2020 concerne un recours contre une décision prise par un bâtonnier à propos d’un litige né à l’occasion d’un contrat de travail d’un avocat ; la solution serait la même dans l’hypothèse d’un contrat de collaboration. Ce recours, relevant de l’article 16 du décret du 27 novembre 1991 (par renvoi des art. 142 et 152 du même décret de 1991), a été jugé éligible à la CPVE, parce que porté devant la cour d’appel elle-même. A l’inverse, le recours formé, en application de l’article 176 du même décret, contre la décision du bâtonnier statuant en matière de contestations d’honoraires et débours, s’était vu refuser cette éligibilité à la CPVE, parce qu’il relevait du premier président (PP) de la cour d’appel (Civ. 2e, 6 sept. 2018, n° 17-20.047, F-P+B, Dalloz actualité, 14 sept. 2018, obs. C. Bléry ; JCP 2018. 1174, obs. N. Gerbay) : ce recours – procédure « autonome » devant le PP – n’entrait pas dans le champ d’application de l’arrêté du garde des Sceaux du 5 mai 2010, relatif à la communication par voie électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d’appel, tel que fixé par son article 1er…

Un avocat salarié saisit un bâtonnier du différend l’opposant à la société qui l’employait après son licenciement par cette dernière. Débouté de l’intégralité de ses demandes par une ordonnance du 22 mai 2018, il interjette appel de cette décision, d’abord par une première déclaration « papier » faite au greffe de la cour d’appel le 11 juin 2018, puis par la voie du réseau privé virtuel des avocats (le RPVA) le 12 juin 2018.

La cour d’appel déclare les deux déclarations d’appel irrecevables, considérant notamment que « les règles prévues par l’article 16 du décret du 27 novembre 1991 avaient seules vocation à s’appliquer en l’espèce, à l’exclusion des dispositions de l’article 748-1 du code de procédure civile ». L’avocat se pourvoit en cassation pour contester l’irrecevabilité des deux DA : à propos de la DA dématérialisée, il estime au contraire que l’envoi ou la remise au greffe de la cour d’appel, en application des articles 152 et 16 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, de la déclaration d’appel formée contre la décision du bâtonnier rendue dans le cadre d’un litige né à l’occasion du contrat de travail d’un avocat salarié, peut être effectué par voie électronique (première branche du moyen).

Seule cette branche est examinée par la deuxième chambre civile, qui casse l’arrêt d’appel au visa des articles et avec un attendu rappelés ci-dessus, en chapô.

L’arrêt commenté n’est pas surprenant. En effet, il y a équivalence entre les actes de procédure effectués par voie électronique et ceux sur support papier (v. C. Bléry, Droit et pratique de la procédure civile, nos 161.08 et 161.221 ; Rép. pr. civ., v° Communication électronique, par E. de Leiris, n° 6). Il en a d’ailleurs été jugé ainsi le 18 janvier 2017 (Soc. 18 janv. 2017 FS-P+B, n° 14-29.013, Dalloz actualité, 6 févr. 2017, nos obs.). Dans cette affaire de 2017, le pourvoi prétendait que l’article R. 1461-1 du code du travail (dans sa version antérieure au décret du 12 mai 2016) imposait une déclaration d’appel « papier », qu’une déclaration d’appel par voie électronique devait donc être jugée irrecevable ; cependant, le législateur ayant mis en œuvre la dématérialisation des procédures selon une démarche d’équivalence, la voie électronique pouvait être utilisée pour la déclaration d’appel. La Cour de cassation avait donc affirmé que « l’article 748-1 du code de procédure civile et l’arrêté du 5 mai 2010 y relatif, qui n’ouvrent en matière prud’homale qu’une faculté, ne dérogent pas au principe d’égalité de traitement de l’article 16 de la DDH dès lors que les prescriptions des articles 58 et 933 du même code demeurent applicables ». Ici, il devait être fait application de l’article 16 du décret de 1991 ; or celui-ci dispose que « le recours devant la cour d’appel est formé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressée au secrétariat-greffe de la cour d’appel ou remis contre récépissé au greffier en chef […] » (al. 1er). Dans l’affaire donnant lieu à l’arrêt du 19 mars 2020, la DA ou plus rigoureusement la déclaration de recours « papier » par LRAR, prévue à l’article 16, pouvait tout à fait être effectuée par voie électronique en raison de l’équivalence de l’écrit papier et de l’écrit dématérialisé.

Cette équivalence joue cependant dans les limites du domaine de la CPVE, ce que l’arrêt du septembre 2018, précité (parmi d’autres) affirme. Dans l’affaire de 2018, le demandeur au pourvoi avait tenu le raisonnement d’équivalence, ce qui paraissait logique… sauf que, on l’a dit, la Cour de cassation a élaboré une jurisprudence sur des procédures « autonomes » qu’elle exclut de la communication par voie électronique : rappelons que le 6 juillet 2017 (Civ. 2e, 6 juill. 2017, n° 17-01.695 P, Dalloz actualité, 20 juill. 2017, obs. M. Kebir ; Gaz. Pal. 31 oct. 2017, p. 61, obs. C. Bléry), la deuxième chambre civile a considéré que la procédure de récusation et/ou de renvoi pour cause de suspicion légitime est autonome ; dès lors, elle n’entre pas dans le champ d’application des arrêtés existants, qui visent la cour d’appel et non le premier président – juridiction au sein de la juridiction –, de sorte que la requête en récusation, adressée au premier président par RPVA, est irrecevable. Comme un arrêté technique est nécessaire pour fixer les modalités techniques, tant en CPVE facultative qu’obligatoire et qu’il n’en existe pas pour la juridiction du premier président de la cour d’appel, celui-ci ne peut être saisi d’actes dématérialisés (É. de Leiris, D. 2018. 692, n° 3 ; Adde J.-L. Gallet et É. de Leiris, La procédure civile devant la cour d’appel, préc., n° 491)… Or, dans l’arrêt de 2018, le recours en cause était régi par l’article 176, alinéa 1er, du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, qui dispose : « la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel, qui est saisi par l’avocat ou la partie, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception »… PP et non CA, donc recours autonome.

Dans notre arrêt de 2020, le recours en cause est porté devant la cour d’appel et non le premier président. Ce n’est pas une procédure autonome, mais une procédure visée par l’arrêté du 5 mai 2010 alors encore en vigueur, puisque ce recours « est instruit et jugé selon les règles applicables en matière contentieuse à la procédure sans représentation obligatoire » (Décr. 1991, art. 16, al. 1erin fine). Comme il s’agit de saisir la cour d’appel, l’acte entre dans les prévisions de l’article 1er de l’arrêté technique de 2010, qui vise « la déclaration d’appel, les actes de constitution et les pièces qui leur sont associées ». Tout au plus, pourrait-on dire que ce n’était pas exactement une DA, mais une déclaration de recours. Mais, et c’est plutôt heureux, la Cour de cassation a déjà fait preuve de souplesse dans un cas similaire : elle a ainsi pu juger, à propos du recours contre une décision du directeur général de l’INPI, que « les tuyaux sont ouverts »… (Com. 13 mars 2019, n° 17-10.861, F-P+B et Civ. 2e, 18 oct. 2018, n° 17-10.861, FS-D, Dalloz actualité, 28 mars 2019, obs. C. Bléry).

Une nouvelle fois, avec l’arrêté du 20 mai 2020 précité, de tels arrêts appartiennent à l’histoire du droit, ce dont on ne peut que se réjouir, même si d’autres difficultés risquent de se présenter. 

Appel contre une décision du bâtonnier à propos d’un contrat de travail d’un avocat : le droit et les tuyaux

Il résulte de la combinaison des articles 748-1, 748-3 et 748-6 du code de procédure civile et 1er de l’arrêté du 5 mai 2010 relatif à la communication électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d’appel que, pour les litiges nés à l’occasion d’un contrat de collaboration ou d’un contrat de travail d’un avocat, relevant de la compétence du bâtonnier et portés devant la cour d’appel, la déclaration d’appel, les actes de constitution et les pièces qui leur sont associées peuvent être valablement adressées au greffe de la cour d’appel par la voie électronique par le biais du RPVA. 

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Adoption simple : portée de l’insanité d’esprit de l’adoptant au moment de l’adoption

L’arrêt rendu le 13 mai 2020 par la première chambre civile de la Cour de cassation intervient dans un domaine, la révocation de l’adoption simple, qui a rarement les honneurs de la haute juridiction et encore moins parmi les arrêts publiés (moins d’une dizaine en cinquante ans…). Sa motivation « nouvelle génération », loin de priver le commentateur de toute matière (sur ces débats, v. B. Dondero, Nouvelle rédaction des arrêts de la Cour de cassation : panique à l’Université !, D. 2020. 145 image ; D. Houtcieff, Motivation enrichie des arrêts de la Cour de cassation : sans commentaire ?, D. 2020. 662 image), offre l’occasion de revenir sur quelques fondamentaux de cette institution.

En l’espèce, un homme avait adopté en la forme simple l’enfant de son épouse. Passés quelques mois, le couple avait effectué diverses donations en faveur de l’adopté. Quatre ans plus tard, l’époux demandait le divorce et, dans la foulée, la révocation de l’adoption et des donations.

La configuration est classique et la jurisprudence des juges du fond en la matière, d’abord rare, puis de plus en plus riche en raison du nombre croissant de recompositions familiales (en ce sens, v. P. Salvage-Gerest, in P. Murat [dir.], Droit de la famille, Dalloz Action, 2019, § 225.41 ; F. Gasnier, Réflexion sur la pratique de l’adoption simple de l’enfant du conjoint, LPA 20 juin 2011, n° 121, p. 4), en témoigne. Très souvent, l’adoption simple est le fait du conjoint du parent de l’adopté et la séparation du couple entraîne une volonté de remettre en cause cette adoption (en ce sens, v. P. Salvage-Gerest, in P. Murat [dir.], Droit de la famille, Dalloz Action, 2019, § 224.213 ; C. Neirinck, note ss Versailles, 9 sept. 2010, Dr. fam. 2010. Comm. 185), en particulier quand celle-ci s’est accompagnée de libéralités, les considérations patrimoniales s’ajoutant alors au désamour.

La particularité de l’espèce, outre le fait qu’elle mènera à une cassation – rarissime, nous y reviendrons –, réside dans le motif invoqué pour la révocation. Dans l’arrêt sous examen, il était avéré par différents documents médicaux qu’au moment où l’adoption avait été prononcée, l’adoptant souffrait de multiples troubles mentaux. Probablement sensibles à l’ampleur de ces troubles et à la concordance des avis médicaux, les juges du fond avaient alors cru pouvoir prononcer la révocation de l’adoption simple au motif que l’ensemble des éléments démontrait que l’adoptant n’était pas sain d’esprit au moment où il avait donné son consentement à l’adoption, ce qui, selon eux, constituait un motif grave justifiant la révocation de celle-ci.

Sans véritable surprise, la Cour de cassation, au visa des articles 353, alinéa 1, et 370, alinéa 1, du code civil, casse cette décision pour violation de la loi.

Le premier texte, l’article 353, alinéa 1, du code civil, prévoit que l’adoption est prononcée à la requête de l’adoptant par le tribunal (de grande instance à l’époque, judiciaire désormais) qui vérifie dans un délai de six mois à compter de sa saisine si les conditions de la loi sont remplies et si l’adoption est conforme à l’intérêt de l’enfant.

Il est en effet fondamental de rappeler que l’adoption découle d’un jugement : cela implique qu’elle ne peut être attaquée qu’en tant que décision judiciaire. En l’espèce, la cour d’appel avait d’ailleurs pris soin de rappeler que le jugement prononçant l’adoption était susceptible d’appel et de relever que l’adoptant n’avait pas formé de recours contre la décision.

S’il y a pu y avoir un temps un flottement sur la question des « modalités » de remise en cause de l’adoption (sur ce flottement, v. Rép. civ., v° Adoption, par F. Eudier, n° 119 ; S. Mornet, note sous Civ. 1re, 27 nov. 2001, Gaz. Pal. 31 oct. 2002, p. 25), notamment sur le fondement de la qualité du consentement à l’adoption, la première chambre civile a mis fin à toute ambiguïté dans un arrêt du 27 novembre 2001 (Civ. 1re, 27 nov. 2001, n° 00-10.151, Bull. civ. I, n° 292 ; D. 2002. 39, et les obs. image ; AJ fam. 2002. 63, et les obs. image ; RTD civ. 2002. 82, obs. J. Hauser image ; Dr. fam. 2002. Comm. 57, note P. Murat ; RJPF 2002-2/32, note A.-M. Blanc ; Gaz. Pal. 30-31 oct. 2002. Somm. 26, note J. Massip) dans lequel, appliquant l’adage « Voies de nullité n’ont lieu contre les jugements », elle a affirmé que « le consentement à l’adoption et le jugement qui le constate et prononce l’adoption sont indivisibles » et qu’« en conséquence, la contestation du consentement ne pouvait se faire qu’au moyen d’une remise en cause directe du jugement par l’exercice des voies de recours en conformité avec l’article 460 du nouveau code de procédure civile ». C’est quasiment au mot près ce que la Cour de cassation affirme dans l’arrêt rapporté.

Il convient toutefois de préciser ici que, si la question de la qualité du consentement de l’adoptant n’est pas inexistante en jurisprudence (v., par ex., l’hypothèse d’une personne mise sous tutelle peu après le dépôt de la requête, Civ. 1re, 10 juin 1981, Bull. civ. I, n° 202 ; RTD civ. 1984. 303, obs. J. Rubellin-Devichi ou encore cet arrêt dans lequel l’adoptant soutenait avoir consenti à l’adoption par erreur, Civ. 1re, 28 févr. 2006, n° 03-12.170, RTD civ. 2006. 296, obs. J. Hauser image ; Dr. fam. 2006. Comm. 126, obs. P. Murat), elle reste assez exceptionnelle. Lorsque l’adoption est contestée sur le fondement d’un consentement vicié, voire absent, c’est le plus souvent le consentement des parents de l’adopté (par hypothèse mineur) qui est concerné.

Pour autant, il est admis que le candidat à l’adoption doit lui aussi avoir manifesté sans équivoque sa volonté d’adopter (en ce sens, v. Rép. civ., v° Adoption, par F. Eudier, n° 57 ; F. Terré, C. Goldie-Genicon et D. Fenouillet, Droit de la famille, 9e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2018, spéc. § 789).

Ce consentement résulte concrètement de la demande d’adoption qu’il doit formuler pour déclencher la procédure et saisir le tribunal. C’est d’ailleurs au moment de la requête en adoption que la capacité s’apprécie (Civ. 1re, 10 juin 1981, préc.), signe que c’est à ce moment-là que le consentement doit être présent et intègre. En outre, quoique les faits de l’espèce puissent faire douter (il semble établi que l’adoptant souffrait de troubles mentaux depuis 2003 avec une aggravation fin 2006, or l’adoption a été prononcée fin 2007…), on aime à penser que, comme le souligne la Cour de cassation en l’espèce, « en tant que condition légale à l’adoption », l’intégrité du consentement de l’adoptant fait partie des éléments vérifiés lors de l’instruction de la demande par le tribunal. Il reste que, même dans l’hypothèse où le consentement des uns ou des autres serait vicié, il est acquis que le prononcé de l’adoption par le juge, une fois la décision passée en force de chose jugée, « purge » la procédure de ses vices (en ce sens, v. Rép. civ., v° Adoption, par F. Eudier, n° 119), ce qui exclut qu’on puisse demander, comme le faisait M. T…, la « nullité de l’adoption » pour insanité d’esprit.

Cette impasse explique sans doute que, face à l’évidente insanité d’esprit de l’adoptant au moment de l’adoption, les juges du fond aient accepté de se placer non pas sur le terrain, menant tout droit à l’échec comme nous venons de le voir, de la validité de l’adoption mais sur celui de sa révocation. L’échec était pourtant tout aussi prévisible.

Le second texte visé, l’article 370, alinéa 1, du code civil, prévoit que l’adoption peut être révoquée s’il est justifié de motifs graves. Comme souvent lorsqu’un texte prévoit des « motifs graves », c’est vers la jurisprudence qu’il convient de se tourner pour dessiner les contours de la notion.

Les motifs graves retenus par les juges du fond sont très disparates (F. Gasnier, Réflexion sur la pratique de l’adoption simple de l’enfant du conjoint, LPA 20 juin 2011, n° 121, p. 4). Il reste que, conformément à la volonté du législateur de 1966, les juges s’attachent en principe à ne révoquer l’adoption simple que dans des situations exceptionnelles (en ce sens, v. J. Hauser, note sous Paris, 28 janv. 2010 et Versailles, 9 sept. 2010 ; C. Neirinck, L’irrévocabilité de l’adoption en question, RDSS 2006. 1076 image ; F. Monéger, note sous Versailles, 9 déc. 1999, RDSS 2000. 437 image ; H. Fulchiron, note sous Civ. 1re, 11 oct. 2017, Dr. fam. 2017. Comm. 241 ; F. Granet, Les motifs de révocation d’une adoption simple, AJ fam. 2002. 24 image). On citera à titre d’exemples (pour d’autres illustrations, v. F. Granet, art. préc.) : des voies de fait sur la personne de l’adoptant (Civ. 1re, 20 mars 1978, Bull. civ. I, n° 144), la liaison de l’adopté avec sa mère adoptive ayant entraîné le suicide du père adoptif (Grenoble, 15 déc. 2004, Dr. fam. 2005. Comm. 129, note P. Murat) ou encore l’attitude de l’adopté délibérément blessante, vexatoire, méprisante, offensante, voire attentatoire à l’honneur de l’adoptant (Pau, 10 juill. 1997, Juris-Data n° 046308).

Ainsi, les simples aléas et vicissitudes des relations familiales ne suffisent pas à constituer ces motifs. Selon les analyses, il est admis que les motifs graves nécessitent la preuve de conflits majeurs entre adoptant et adopté (en ce sens, v. R. Le Guidec, note sous Civ. 1re, 9 juill. 2014, JCP N 2014. 1385 et la jurisprudence citée) et d’une altération irrémédiable des liens affectifs entre eux (Rép. civ., v° Adoption, par F. Eudier, n° 500), voire d’une absence totale de tels liens (F. Terré, C. Goldie-Genicon et D. Fenouillet, op. cit., spéc. § 814, et la jur. citée) de nature à rendre moralement impossible le maintien des liens créés par l’adoption, ou tout au moins éminemment souhaitable leur cessation (Rép. civ., v° Adoption, par F. Eudier, n° 500 ; M. Le Bihan-Guénolé, La révocation de l’adoption, JCP 1991. 3539 et la jur. citée).

À cela s’ajoute parfois le critère de l’ingratitude (C. Neirinck, note préc. ss Versailles, 9 sept. 2010 ; M. Le Bihan-Guénolé, art. préc).

En l’espèce, rien de tout cela, du moins dans les éléments exposés par les parties et retenus par les juges du fond. En effet, les juges de la cour d’appel de Nancy avaient retenu comme unique élément constitutif de motifs graves l’insanité d’esprit de l’adoptant au moment de l’adoption. On ne peut que constater que cet élément, même avéré, est sans lien avec l’attitude de l’adopté envers l’adoptant et réciproquement ou les liens les unissant. Compte tenu de ce qui précède, la cassation ne surprend donc pas et doit être approuvée.

En revanche, on peut être plus réservé sur la justification apportée par la Cour de cassation.

Dans ce type d’affaires, les cassations sont rares, la Cour de cassation s’en remettant en principe à l’appréciation souveraine des juges du fond sur l’existence ou non de motifs graves (en ce sens, v. Rép. civ., v° Adoption, par F. Eudier, n° 500 ; C. Neirinck, note préc. ss Versailles, 9 sept. 2010) et ce en vertu d’une jurisprudence constante et ancienne (Civ. 1re, 10 juill. 1973, Bull. civ. I, n° 243 ; JCP 1974. II. 17689, 5e esp., note E.S. de la Marnierre ; 20 mars 1978, n° 76-13.415, Bull. civ. I, n° 114). La Cour de cassation tenait donc l’occasion de préciser les contours de la notion, notamment grâce à la « motivation enrichie ».

Elle aurait ainsi pu confirmer (ou non) que, schématiquement, les motifs graves résidaient dans l’attitude des intéressés ou la nature de leurs liens et ne pouvait donc découler de l’existence d’une maladie mentale. Or, loin de revenir sur la « substance » du motif grave, sans doute trop protéiforme, elle préfère souligner un critère temporel et affirme, suivant en cela le premier moyen du pourvoi, que l’adoption ne peut être révoquée que si est rapportée la preuve d’un motif grave « résidant dans une cause survenue postérieurement au jugement d’adoption ».

Une telle affirmation interroge. Le critère semble nouveau, même si on peut citer un précédent, plus mesuré, dans une décision du tribunal de grande instance de Paris du 21 novembre 1995 (inédit, rapporté par J. Hauser, RTD civ. 1996. 138 image) qui avait retenu que l’action en révocation de l’adoption est fondée « sur des comportements en général postérieurs à son établissement ».

En l’espèce, on pressent qu’il s’agissait pour les juges de la haute juridiction d’insister sur la distinction entre les conditions de l’adoption – qui doivent être vérifiées en amont du jugement et dont les éventuels défauts sont purgés par celui-ci – et les motifs graves susceptibles de justifier en aval la révocation, lesquels, en principe, résultent schématiquement d’une dégradation des relations entre adopté et adoptant.

Tout de même, avec une telle définition, qu’en serait-il si on découvrait quelques mois, années, après l’adoption, que l’adopté avait tenté de tuer l’adoptant avant l’adoption ou que l’adoptant avait un temps abusé de l’adopté avant le jugement d’adoption ? Il n’est pas certain qu’une telle limite « temporelle » générale à la prise en compte des éléments susceptibles de caractériser des motifs graves soit totalement opportune…

Compte tenu de la rareté des décisions de la Cour de cassation en matière de révocation de l’adoption, on ne devrait pas avoir de précisions de sitôt. Une preuve de plus que, décidément, l’adoption simple… ne l’est pas tant que ça !

Adoption simple : portée de l’insanité d’esprit de l’adoptant au moment de l’adoption

La Cour de cassation affirme que la révocation d’une adoption simple ne peut être prononcée qu’en cas de motifs graves résidant dans une cause survenue postérieurement au jugement d’adoption. Elle casse donc l’arrêt d’appel qui avait considéré que l’insanité d’esprit de l’adoptant au moment du prononcé de l’adoption permettait une telle révocation.

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Une ordonnance non ratifiée peut acquérir valeur de loi

Dans sa décision n° 2020-843 QPC, le Conseil constitutionnel considère qu’une ordonnance non ratifiée acquiert rétroactivement valeur législative à compter de la fin du délai d’habilitation, à condition que le projet de loi de ratification ait été déposé dans le délai imparti. 

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Privilège de nationalité de l’article 15 du code civil : vocation subsidiaire

L’article 15 du code civil dispose qu’« un Français pourra être traduit devant un tribunal de France, pour des obligations par lui contractées en pays étranger, même avec un étranger ».

A l’instar de l’article 14 qui vise le Français demandeur, ce texte instaure un privilège de nationalité fondé sur la nationalité française : le défendeur, dès lors qu’il a cette nationalité, peut être assigné en France, même si le litige n’a pas d’autre rattachement avec la France que cette nationalité.

Ce principe est bien connu en droit international privé. Depuis l’arrêt Cognacs et...

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Privilège de nationalité de l’article 15 du code civil : vocation subsidiaire

L’article 15 du code civil, « qui donne compétence à la juridiction française en raison de la nationalité française du défendeur, n’a vocation à s’appliquer que lorsqu’aucun critère de compétence territoriale n’est réalisé en France ».

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Coronavirus : complément aux règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale

Comme la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 l’y a autorisée, l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 a adapté les règles relatives à la compétence territoriale et aux formations de jugement notamment de l’ordre judiciaire ainsi que les règles relatives aux délais de procédure et de jugement, à la publicité des audiences et à leur tenue, au recours à la visioconférence devant ces juridictions et aux modalités de saisine de la juridiction et d’organisation du contradictoire devant ces juridictions (art. 11, I, 2°). Cette première ordonnance est modifiée et complétée par l’ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020, afin, selon le rapport fait au président de la République, « de faciliter la reprise de l’activité juridictionnelle malgré les mesures d’urgence sanitaire prises pour ralentir la propagation du virus covid-19 ».

Le champ d’application de ces règles doit retenir l’attention. Tout d’abord, contrairement à ce qui a été envisagé, elles restent limitées à la matière non pénale. Ensuite, l’article 1 de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2010 prévoit que ses dispositions sont applicables pendant une période s’étendant du 12 mars jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire. Or, conformément au I de l’article 1er de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020, l’état d’urgence sanitaire, déclaré par l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, est prorogé jusqu’au 10 juillet 2020 inclus. Les règles prévues par l’ordonnance du 25 mars 2020, modifiée par l’ordonnance du 20 mai 2020, doivent donc recevoir application jusqu’au 10 août 2020.

Ceci étant précisé, les modifications apportées par le décret du 20 mai 2020 s’articulent autour de deux grandes idées : la limitation des contacts au sein des juridictions et la recherche d’une information effective.

La limitation des contacts au sein des juridictions

Accès aux juridictions

Cette limitation passe tout d’abord par un encadrement de l’accès aux juridictions. L’ordonnance du 20 mai 2020 insère un nouvel article 6-1 à l’ordonnance du 25 mars 2020, qui précise, dans son I, que les « les chefs de juridiction définissent les conditions d’accès à la juridiction, aux salles d’audience et aux services qui accueillent du public » tout cela dans le respect des règles sanitaires en vigueur et en informant le public par voie d’affichage.

Juge unique

Ensuite, l’ordonnance du 20 mai 2020 apporte trois précisions quant à la possibilité offerte aux présidents de juridiction, par l’article 5 de l’ordonnance du 25 mars 2020, de recourir au juge unique.

En premier, elle précise les règles applicables devant le conseil de prud’hommes et le recours à la formation restreinte – tenant lieu de juge unique devant cette juridiction paritaire – recours qui semble d’ailleurs être imposé. En effet, alors que l’alinéa précédent précise que, devant le tribunal de commerce, le président du tribunal peut recourir à la formation d’un juge unique, l’alinéa 4 de l’article 5 de l’ordonnance du 25 mars 2020, indique expressément que « le conseil de prud’hommes statue en formation restreinte ». Le présent de l’indicatif sonne comme un impératif qui ne laisserait pas le choix au président de la juridiction. L’ordonnance du 20 mai 2020 précise alors qu’en cas de départage, un juge du tribunal judiciaire dans le ressort duquel est situé le siège du conseil de prud’hommes statue seul, après avoir recueilli l’avis des conseillers prud’homaux. Mais s’il n’a pas tenu l’audience de départage avant le 10 août 2020, alors l’affaire est renvoyée devant la formation restreinte présidée par ce juge. Cette dernière disposition est intéressante car elle prévoit, au-delà de la période d’application des règles exceptionnelles d’organisation juridictionnelle, la mise en œuvre d’une formation extraordinaire qui n’est pas prévue par le code du travail. Selon son article L. 1454-2, en cas de départage, l’affaire est tranchée par le bureau de jugement présidé par un juge du tribunal judiciaire, même si le départage est intervenu devant le bureau de conciliation ou d’orientation. La formation de départage comporte donc habituellement cinq membres (C. trav., art. R. 1423-35, 4°), sauf en cas de référé (C. trav., art. R. 1423-35, 2°) et, maintenant, sauf si le départage est intervenu pendant la période de crise sanitaire augmentée d’un mois, mais n’a pas pu être résolu dans cette même période.

La deuxième précision concerne la possibilité pour le juge de la mise en état ou le magistrat chargé du rapport de tenir seul l’audience de plaidoiries dans une procédure écrite ordinaire. Cette faculté n’est pas nouvelle, puisqu’après avoir longtemps figuré à l’article 786 du code de procédure civile, elle se trouve, depuis le 1er janvier 2020, à l’article 805 du même code. On notera toutefois que l’article 5 de l’ordonnance du 25 mars 2020 modifié par l’ordonnance du 20 mai 2020 a écarté l’absence d’opposition des avocats, laissant le juge décider seul de l’opportunité d’entendre seul les plaidoiries. Il doit toutefois en informer les parties par tout moyen et en rendre compte au tribunal. On peut alors imaginer que la mention dans l’arrêt que les débats ont eu lieu devant un seul magistrat qui a fait rapport à la formation collégiale, devrait alors suffire à établir qu’il a bien rendu compte des débats à ses collègues, comme c’est le cas lorsqu’il met en œuvre le mécanisme prévu aujourd’hui à l’article 805 du code de procédure civile (Com. 20 janv. 1998, Procédures 1998, n° 90, obs. Laporte).

Enfin, la troisième précision concerne le champ d’application de l’extension du recours au juge unique et plus exactement la désignation des affaires concernées. Il s’agit des affaires dans lesquelles l’audience de plaidoirie ou la mise en délibéré de l’affaire dans le cadre de la procédure sans audience a lieu entre le 12 mars et le 10 août 2020.

Publicité des débats

Enfin, l’ordonnance du 20 mai 2020 confie, non plus au président de juridiction, mais au juge ou au président de la formation de jugement, le rôle de prendre les mesures qu’il estime nécessaires en termes de publicité des débats. On peut alors imaginer des approches différentes au sein d’une même juridiction, chaque juge pouvant adapter l’exigence de publicité aux cas qui lui seront soumis, soit en la restreignant, soit en l’écartant en décidant que les débats se dérouleront en chambre du conseil. Lorsque le nombre de personnes admises à l’audience est limité, les personnes qui souhaitent y assister saisissent par tout moyen le juge ou le président de la formation de jugement (ord. n° 2020-304, 25 mars 2020, art. 6-1). Enfin, c’est également au juge ou au président de la formation de jugement d’autoriser la présence de journalistes, que l’audience soit publique ou non.

Présence des protagonistes

Mais la possibilité de limiter la présence physique aux audiences ne se cantonne pas à celle du public. Le juge, le président de la juridiction ou le juge des libertés et de la détention peuvent limiter la présence des protagonistes des affaires.

Ainsi, ils ont la faculté, sans qu’ils aient à exposer de circonstances particulières, de recourir à un moyen de télécommunication audiovisuelle, pour tenir une audience, mais aussi éventuellement, et c’est un ajout de l’ordonnance du 20 mai 2020, pour tenir une audition (ord. n° 2020-304, 25 mars 2020, art. 7, al. 1). La seule condition est que l’on puisse s’assurer de l’identité des personnes y participant et garantir la qualité de la transmission et la confidentialité des échanges entre les parties et leurs avocats. Plus encore, le juge peut décider, si la visioconférence est impossible, de recourir à tout moyen de communication électronique, y compris téléphonique, pour entendre les parties, leur avocat ou les personnes à auditionner. C’est ce qui se pratique notamment dans le cadre des hospitalisations d’office. Là, encore, il faut que le média utilisé permette de s’assurer de l’identité des personnes et garantir la qualité de la transmission et la confidentialité des échanges. Mais comment peut-on s’assurer de l’identité d’une personne par téléphone ? Et comment garantir la qualité des échanges ? Ces questions sont d’autant plus importantes que la décision du juge, du président de la formation de jugement ou du juge des libertés et de la détention est insusceptible de recours. Toutefois, dans son ordonnance de référés du 10 avril 2020 (nos 439883 et 439892, AJDA 2020. 814 image ; AJ fam. 2020. 265 et les obs. image), le Conseil d’État énonce qu’en autorisant, sous les conditions prévues, le recours dérogatoire à des moyens de communication à distance pendant la période prévue à l’article 1er de l’ordonnance, dans le but de permettre une continuité d’activité des juridictions de l’ordre judiciaires statuant en matière non pénale, l’article 7 de l’ordonnance du 25 mars 2020 n’a pas porté d’atteinte grave et manifestement illégale aux droits de la défense (M. Kebir, Coronavirus et adaptation du fonctionnement des juridictions judiciaires : rejet des référés devant le Conseil d’État, Dalloz actualité, 20 avr. 2002).

Les questions restent toutefois nombreuses. Le dernier alinéa de l’article 7 de l’ordonnance du 25 mars 2020 tel que modifié par l’ordonnance du 20 mai 2020 prévoit que « les membres de la formation de jugement, le greffier, les parties, les personnes qui les assistent ou les représentent en vertu d’une habilitation légale ou d’un mandat, les techniciens et auxiliaires de justice ainsi que les personnes convoquées à l’audience ou à l’audition peuvent se trouver en des lieux distincts ». Ce que l’ordonnance du 25 mars 2020 avait prévu pour les avocats et les interprètes est ainsi largement étendu. Mais dans quelles hypothèses pourra-t-on avoir affaire à ce tribunal déstructuré ? Le dernier alinéa précise « dans les cas prévus par le présent article ». Or l’article 7 ne semble prévoir aucun cas particulier… cela dépendrait de la volonté du juge. En outre, peut-on imaginer une audience où chaque protagoniste est chez soi ? Et même si les moyens de communication utilisés par les membres de la formation de jugement garantissent le secret du délibéré, garantissent-ils leur qualité ?

Procédure sans audience

Enfin, c’est également la technique du jugement sur dossier qui est développée, par l’ordonnance du 20 mai 2020. Elle précise qu’à tout moment de la procédure, le juge ou le président de la formation de jugement peut décider qu’elle se déroulera sans audience. Les parties ont quinze jours pour s’opposer à cette décision, sauf dans les procédures caractérisées par la célérité (notamment les procédures de référés et les procédures accélérées au fond). L’ordonnance du 20 mai 2020 apporte toutefois des précisions en matière de soins psychiatriques sans consentement. « La personne hospitalisée peut à tout moment demander à être entendue par le juge des libertés et de la détention », sans pouvoir toutefois exiger une rencontre physique. Il lui est garanti une audition par tout moyen permettant de s’assurer de son identité et garantissant la qualité de la transmission et la confidentialité des échanges.

Ces dispositions s’appliquent aux affaires dans lesquelles la mise en délibéré de l’affaire est annoncée pendant la période s’étendant du 12 mars au 10 août 2020.

La recherche d’une information effective

Notification

Concernant de décisions de justice, l’ordonnance du 25 mars 2020 semblait doubler les dispositions relatives à leur notification, de l’obligation de les porter à la connaissance des parties par tout moyen. L’ordonnance du 20 mai 2020 précise qu’il s’agit là d’une simple faculté qui concerne la notification des décisions aux parties et à toute personne intéressée (ord. n° 2020-304, 25 mars 2020, art. 10, al. 1).

L’ordonnance du 20 mai 2020 précise également que « les convocations et les notifications qui sont, à la charge du greffe sont adressées par lettre simple lorsqu’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception est prévue » (ord. n° 2020-304, 25 mars 2020, art. 10, al. 2). L’idée est d’augmenter la possibilité de porter à la connaissance effective des parties ladite décision.

Communication

Enfin, l’ordonnance du 20 mai 2020 insère un article 11-4 dans un nouveau chapitre de l’ordonnance du 25 mars 2020 intitulé « Dispositions relatives au SAUJ ». Les agents de ce service peuvent assurer la réception et la transmission, par voie électronique, d’un certain nombre d’actes, jouant pleinement leur rôle d’intermédiaires entre la justice et les justiciables. Tout d’abord, il s’agit de tous les actes en matière civile, lorsque la représentation n’est pas obligatoire. Ensuite, il en est de même en matière prud’homale pour les requêtes et les demandes de délivrance de copie certifiée conforme, d’un extrait ou d’une copie certifiée conforme revêtue de la formule exécutoire. Enfin, c’est aussi le cas des demandes d’aide juridictionnelle. Là, à nouveau, un doute peut apparaître quant à la signification du verbe « pouvoir » (« les agents de service de greffe […] peuvent assurer […] »). Il semble toutefois qu’il n’offre pas une faculté des agents du SAUJ, mais reconnaît leur capacité lorsque le justiciable fera le choix de la communication électronique.

Dans tous les cas, le dernier alinéa de l’article 11-4 prévoit que, s’il a été reçu par voie électronique, le document original établi sur support papier doit être produit par son auteur avant qu’il ne soit statué sur sa demande.

Une réflexion

Ces mesures ont des airs de déjà-vu. La plupart, à l’image de la procédure sans audience, ont été promues ces dernières années pour assurer la célérité de la justice et le respect du délai raisonnable, conduisant à un inexorable éloignement physique des acteurs de la justice. La preuve en est que ces mesures sont aujourd’hui accentuées pour assurer la distanciation sociale que le covid-19 impose. Il est alors à souhaiter que le juge ne fasse usage de ces possibilités que dans des circonstances exceptionnelles, même lorsque les textes ne prévoient rien de tel, et que les pouvoirs publics ne prolongent pas ces mesures au-delà de ce qui est nécessaire, car une justice de qualité ne saurait se passer de présentiel.

Coronavirus : complément aux règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale

Afin de faciliter la reprise de l’activité juridictionnelle malgré les mesures d’urgence sanitaire prises pour ralentir la propagation du virus covid-19, l’ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 précise, entre autres, les règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale.

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Parmi les éléments du compromis, l’expérimentation des cours criminelles départementale sera étendue de 10 à 18 départements (le gouvernement souhaitait initialement en avoir 30). Par ailleurs, pour la réorientation des affaires pénales, les procureurs devront s’assurer que la procédure retenue permettra aux victimes de demander et d’obtenir une indemnisation. En l’absence de victime, le classement sans suite sera possible pour les procédures contraventionnelles.

L’entrée en vigueur de plusieurs dispositions a été repoussée. Citons le code de justice pénale des mineurs (31 mars 2021), la réforme du divorce (1er janvier 2021), ou l’application au lobbying envers les collectivités locales du registre des représentants d’intérêts de la HATVP (1er juillet 2022).

Immigration, consommation et trésorerie des CARPA

La CMP a validé un article adopté par le Sénat prévoyant la dématérialisation des récépissés de demande de titre de séjour ou de renouvellement. Elle a également prévu que les étrangers titulaires d’un visa de court séjour ou exemptés de visa, contraints de demeurer en France pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire, bénéficieraient d’une autorisation provisoire de séjour.

En droit de la consommation, la CMP a conservé la transposition de la nouvelle procédure ad hoc de transaction administrative et la création d’un nouveau mécanisme d’indemnisation des consommateurs sous l’égide de la DGCCRF. A noter, le Sénat a rejeté un amendement gouvernemental qui prévoyait de permettre la DGCCRF d’enjoindre des restrictions d’accès à une interface en ligne qui proposait des contenus manifestement illicites.

La commission a rétabli plusieurs articles qui avaient été supprimés par le Sénat. Elle a ainsi réintroduit l’habilitation permettant au gouvernement de centraliser, par ordonnances, certains dépôts vers le compte du Trésor, en excluant explicitement les caisses de retraite et les CARPA. Elle a aussi rétabli la disposition qui rend rétroactifs les critères restrictifs d’indemnisation des victimes d’essais nucléaires.

Le texte sera étudié dès ce mercredi à l’Assemblée. Il sera le 10 juin au Sénat.

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Nouvelle exigence devant le FGTI : la caractérisation d’une infraction constitutive d’un acte de terrorisme

Un arrêt récent de la Cour de cassation revient sur la question de la reconnaissance de la qualité de victime d’acte de terrorisme devant le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (le FGTI) et des éléments à établir par celle-ci pour relever de cette catégorie. En effet, « quelques affaires médiatisées ont attiré l’attention sur le phénomène des “fausses victimes”, lors des attaques terroristes de masse – ces personnes se rendent coupables d’escroquerie aggravée (C. pén., art. 313‐1 et 313‐2). Un processus d’identification et de recensement des victimes est organisé » (C. Quézel-Ambrunaz, L’indemnisation des victimes du terrorisme, RLDR 2020, n° 384-23).

En l’espèce, à la suite de l’attentat terroriste commis le 9 janvier 2015, dans le magasin Hyper Cacher, situé avenue de la Porte de Vincennes à Paris, durant lequel un homme a pris des clients en otage et tué quatre personnes avant d’être abattu par les forces de l’ordre lorsqu’elles ont donné l’assaut, une personne a été inscrite sur la liste unique des victimes d’actes de terrorisme établie par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris.

La victime, après avoir reçu des sommes provisionnelles du FGTI, l’a assigné aux fins d’expertise et en paiement d’une provision supplémentaire à valoir sur l’indemnisation de ses préjudices psychologique et professionnel.

Par un premier arrêt rendu le 8 février 2018, la Cour de cassation a jugé que le versement de provisions, en vertu de l’article L. 422-2, alinéa 1, du code des assurances, « à la personne qui en fait la demande, à la suite d’un acte de terrorisme, ne prive pas le FGTI de la possibilité de contester ultérieurement sa qualité de victime » (Civ. 2e, 8 févr. 2018, n° 17-10.456, D. 2018. 350 image ; ibid. 2153, obs. M. Bacache, A. Guégan et S. Porchy-Simon image). La doctrine en a déduit que l’inscription d’une personne sur la liste unique des victimes ne vaut cependant pas présomption irréfragable de sa qualité de victime (C. Lienhard, Contestation de la reconnaissance de la qualité de victime d’attentat par le FGTI, JCP 2018. 476). La doctrine considère que la précision apportée par cette décision « restaure au profit du fonds de garantie une liberté d’appréciation… que celui-ci n’avait en réalité jamais perdue » (J. Knetsch, La preuve de la qualité de victime d’acte de terrorisme devant le FGTI, RCA n° 6, juin 2018, étude 7, n° 17).

Cependant, le 10 janvier 2019, la cour d’appel de Paris, statuant en matière de référé, rendu sur renvoi après cassation (Civ. 2e, 8 févr. 2018, préc.), a condamné le FGTI à payer à la victime une indemnité provisionnelle complémentaire de 15 000 € (Paris, 10 janv. 2019).

Le Fonds de garantie a réalisé un second pourvoi en cassation. Il a reproché à l’arrêt de le condamner ainsi alors « que seuls constituent des actes de terrorisme, au sens des articles L. 126-1 et L. 422-1 du code des assurances, les infractions limitativement énumérées aux articles 421-1 et suivants du code pénal ; qu’en jugeant, pour allouer une provision de 15 000 € à [la justiciable], qu’elle n’avait pas à préciser la nature et les éléments matériels de l’infraction terroriste qu’elle retenait comme ayant été commise à son encontre, quand il lui appartenait au contraire, pour caractériser l’existence d’une obligation non sérieusement contestable justifiant l’allocation d’une provision, de motiver tout spécialement sa décision de ce chef, la cour d’appel a violé l’article 809 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 126-1 et L. 422-1 du code des assurances et 421-1 à 421-2-6 du code pénal ».

Par un arrêt du 20 mai 2020, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a censuré l’arrêt d’appel en ce qu’il condamne le FGTI à payer à la victime une indemnité provisionnelle complémentaire.

La décision a été rendue au visa de l’article 809, alinéa 2, devenu 835, alinéa 2, du code de procédure civile, des articles L. 126-1 et L. 422-1 du code des assurances, en leur rédaction applicable à l’espèce, et de l’article 421-1 du code pénal.

D’une part, l’article L. 126-1 du code des assurances tel qu’issu de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 dispose que « les victimes d’actes de terrorisme commis sur le territoire national, les personnes de nationalité française victimes à l’étranger de ces mêmes actes ainsi que leurs ayants droit, quelle que soit leur nationalité, sont indemnisés dans les conditions définies aux articles L. 422-1 à L. 422-3. La réparation peut être refusée ou son montant réduit à raison de la faute de la victime ». L’alinéa 1er a été modifié par la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, et prévoit désormais que « les victimes d’actes de terrorisme commis sur le territoire national, les personnes de nationalité française victimes à l’étranger de ces mêmes actes, y compris tout agent public ou tout militaire, ainsi que leurs ayants droit, quelle que soit leur nationalité, sont indemnisés dans les conditions définies aux articles L. 422-1 à L. 422-3 ». Les agents publics et les militaires peuvent donc bénéficier de ce régime.

D’autre part, l’article L. 422-1 du code des assurances, modifié par la loi n° 2014-896 du 15 août 2014, retient quel’article L. 422-1 du code des assurances: « Pour l’application de l’article L. 126-1, la réparation intégrale des dommages résultant d’une atteinte à la personne est assurée par l’intermédiaire du fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions.

Ce fonds, doté de la personnalité civile, est alimenté par un prélèvement sur les contrats d’assurance de biens dans les conditions suivantes.

Ce prélèvement est assis sur les primes ou cotisations des contrats d’assurance de biens qui garantissent les biens situés sur le territoire national et relevant des branches 3 à 9 de l’article R. 321-1, dans sa rédaction en vigueur à la date de publication de la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013, et souscrits auprès d’une entreprise mentionnée à l’article L. 310-2.

Le montant de la contribution, compris entre 0 € et 6,50 €, est fixé par arrêté du ministre chargé des assurances.

Cette contribution est perçue par les entreprises d’assurance suivant les mêmes règles et sous les mêmes garanties et sanctions que la taxe sur les conventions d’assurance prévue à l’article 991 du code général des impôts. Elle est recouvrée mensuellement par le fonds de garantie.

Il est subrogé dans les droits que possède la victime contre la personne responsable du dommage.

Le fonds est également alimenté par des versements prévus au II de l’article 728-1 du code de procédure pénale. Lorsque ces versements sont effectués, la victime est alors directement indemnisée par le fonds à hauteur, le cas échéant, des versements effectués et, à hauteur de ces versements, l’avant-dernier alinéa du présent article n’est pas applicable ».

Enfin, l’article 421-1 du code pénal, tel que modifié par la loi n° 2016-819 du 21 juin 2016, dispose que : « Constituent des actes de terrorisme, lorsqu’elles sont intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur, les infractions suivantes :

1° Les atteintes volontaires à la vie, les atteintes volontaires à l’intégrité de la personne, l’enlèvement et la séquestration ainsi que le détournement d’aéronef, de navire ou de tout autre moyen de transport, définis par le livre II du présent code ;

2° Les vols, les extorsions, les destructions, dégradations et détériorations, ainsi que les infractions en matière informatique définis par le livre III du présent code ;

3° Les infractions en matière de groupes de combat et de mouvements dissous définies par les articles 431-13 à 431-17 et les infractions définies par les articles 434-6 et 441-2 à 441-5 ;

4° Les infractions en matière d’armes, de produits explosifs ou de matières nucléaires définies par les articles 222-52 à 222-54, 322-6-1 et 322-11-1 du présent code, le I de l’article L. 1333-9, les articles L. 1333-11 et L. 1333-13-2, le II des articles L. 1333-13-3 et L. 1333-13-4, les articles L. 1333-13-6, L. 2339-2, L. 2339-14, L. 2339-16, L. 2341-1, L. 2341-4, L. 2341-5, L. 2342-57 à L. 2342-62, L. 2353-4, le 1° de l’article L. 2353-5 et l’article L. 2353-13 du code de la défense, ainsi que les articles L. 317-7 et L. 317-8 à l’exception des armes de la catégorie D définies par décret en Conseil d’État, du code de la sécurité intérieure ;

5° Le recel du produit de l’une des infractions prévues aux 1° à 4° ci-dessus ;

6° Les infractions de blanchiment prévues au chapitre IV du titre II du livre III du présent code ;

7° Les délits d’initié prévus aux articles L. 465-1 à L. 465-3 du code monétaire et financier ».

La haute juridiction a préalablement rappelé qu’« il résulte des deuxième et troisième de ces textes que la réparation intégrale des dommages résultant d’une atteinte à la personne subis par les victimes d’infractions constitutives d’actes de terrorisme, visées par le dernier de ces textes, est assurée par l’intermédiaire du Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme » (Civ. 2e, 20 mai 2020, n° 19-12.780, D. 2020. 1105 image).

La deuxième chambre civile a ensuite souligné que « l’arrêt, après avoir relevé qu’il est constant que l’attentat commis le 9 janvier 2015 dans le magasin Hyper Cacher à Paris constitue un acte de terrorisme au sens des articles L. 126-1 du code des assurances et 421-1 du code pénal et qu’il incombe à [la justiciable] de faire la preuve qu’elle est victime de cet attentat, retient, d’une part, que celle-ci démontre s’être trouvée dans la zone de danger au moment de l’attentat et, d’autre part, que ce dernier lui a causé un traumatisme psychologique d’une exceptionnelle intensité, constaté par l’expert judiciaire, en lien direct, certain et exclusif avec les faits. La décision en déduit que la demanderesse a été, avec l’évidence requise en référé, victime de l’attentat, sans qu’il soit besoin que la juridiction précise la nature et les éléments matériels de l’infraction qu’elle retient comme ayant été commise au préjudice de cette victime, contrairement à ce que le FGTI demande » (ibid.).

Cependant, la Cour de cassation a conclu que la cour d’appel a privé sa décision de base légale en se déterminant ainsi, « alors qu’il lui appartenait de caractériser une infraction constitutive d’un acte de terrorisme prévue par l’article 421-1 du code pénal, ouvrant droit de manière non sérieusement contestable à l’indemnisation sollicitée du FGTI » (ibid.).

Pour rappel, le système d’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme résulte d’une lente évolution (A. Cayol et R. Bigot, L’influence du terrorisme sur l’assurance du dommage corporel, RGDA, déc. 2019, n° 12, 116z2, p. 1-7). Désormais, le FGTI « intervient dans la prise en charge des dommages corporels générés par un acte de terrorisme dont la preuve peut résulter de présomptions graves, précises et concordantes. Les victimes susceptibles d’être prises en charge par ce Fonds doivent simplement se trouver sur le territoire national ou détenir la nationalité française si l’acte de terrorisme a été commis à l’étranger. Les dommages corporels sont seuls indemnisés y compris le préjudice spécifique constitué par le “syndrome post-traumatique spécifique”. L’obligation du Fonds n’est pas subsidiaire, ce qui permet à la victime de s’adresser directement à lui pour obtenir une indemnisation de son préjudice. De plus, son obligation de réparation est intégrale. La procédure d’indemnisation suppose que le Fonds soit informé de l’acte terroriste par le parquet, la victime, l’autorité consulaire, etc. La victime doit le saisir d’une demande sans condition de délai, hormis celui de dix années prévu par l’article 2226 du code civil. Lorsque le dossier est complet, le Fonds est tenu de présenter une offre d’indemnité dans un délai de trois mois. Si la victime accepte cette offre, la transaction est conclue et le règlement doit intervenir dans le mois qui suit l’expiration le délai de quinze jours accordé à la victime pour renoncer. Elle peut cependant la refuser et envisager une action en justice. Dans tous les cas de figure, le Fonds est subrogé dans les droits de la victime qu’il aura indemnisée » (P. Casson, « L’indemnisation des victimes de dommages intentionnels », in A. Cayol et R. Bigot [dir.], Le droit des assurances en tableaux, préf. D. Noguéro, 1re éd., Ellipses, 2020, à paraître).

S’il a pu être souligné que le droit de la réparation du dommage corporel n’a pas à nécessairement suivre dans toute sa rigueur le droit pénal dans sa définition de l’acte de terrorisme (G. Viney, P. Jourdain et S. Carval, Les régimes spéciaux et l’assurance de responsabilité, 4e éd., LGDJ, 2017, n° 287), il s’avère toutefois que « l’imbrication des réactions des différents acteurs consécutivement à un acte de terrorisme, telle que précisée dans la circulaire du premier ministre du 10 novembre 2017, n° 5979/SG, relative à la prise en charge des victimes d’actes de terrorisme, amène à relativiser l’autonomie respective du répressif et de l’indemnitaire » (C. Quézel-Ambrunaz, art. préc., n° 384-3).

Cette dernière analyse de la doctrine prend toute sa force dans l’affaire sous commentaire qui impose à la victime de caractériser une infraction constitutive d’un acte de terrorisme prévue par l’article 421-1 du code pénal. Le champ d’application du régime d’indemnisation en fonction des incriminations visées est donc circonscrit par le renvoi opéré par l’article L. 126‐1 du code des assurances à la définition pénale de l’acte de terrorisme.

Une liste limitative est ainsi constituée par l’article 421‐1 du code pénal. En résumé, la qualification d’actes de terrorisme concerne « des infractions prévues et réprimées par ailleurs » (des atteintes à la vie aux délits d’initiés en passant notamment par le détournement d’aéronefs, le vol, et les infractions de blanchiment – soit finalement la plupart des infractions), qui révèlent un élément moral particulier : intentionnel, mais surtout dans une relation « avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur » (ibid. ; adde Y. Mayaud, Regard sur les qualifications terroristes, AJ pénal 2017. 478 image ; O. Décima, Terreur et métamorphose, D. 2016. 1826 image). N’oublions pas toutefois les dispositions qui suivent immédiatement. Elles prévoient d’autres incriminations.

D’une part, on trouve à l’article 421‐2 du code pénal « le fait d’introduire dans l’atmosphère, sur le sol, dans le sous‐sol, dans les aliments ou les composants alimentaires ou dans les eaux, y compris celles de la mer territoriale, une substance de nature à mettre en péril la santé de l’homme ou des animaux ou le milieu naturel ». D’autre part, l’article 421‐2‐1 du même code retient que « constitue également un acte de terrorisme le fait de participer à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d’un des actes de terrorisme mentionnés aux articles précédents ».

En définitive, le présent arrêt ne fait que combler les lacunes de la loi. Il s’inscrit parfaitement dans ce qu’avait souhaité le législateur. Certes, le code des assurances ne dit mot sur les contours exacts la notion d’acte de terrorisme. Mais « le silence des textes relatifs aux dommages corporels ne doit cependant pas être surinterprété. À en croire les travaux préparatoires de la loi du 9 septembre 1986, il s’agirait d’un simple oubli législatif, les parlementaires ayant fait état de leur volonté de faire de l’acte de terrorisme une notion non pas à géométrie variable, mais unitaire. Dès lors, les “actes de terrorisme” visés par l’article L. 126-1 du code des assurances doivent être déterminés par référence au droit pénal » (J. Knetsch, art. préc.).

À cet effet, toute personne se considérant victime d’un tel acte sera tenue, à l’avenir, de caractériser une infraction constitutive d’un acte de terrorisme prévue par l’article 421-1 du code pénal, si elle souhaite que son droit à compensation de son dommage ne soit pas réfuté par le Fonds de garantie.

Faisons le vœu cependant que cette règle indemnitaire relative aux conséquences de cette forme de guerre moderne (B. Beignier et S. Ben Hadj Yahia, Droit des assurances, 3e éd., LGDJ, Lextenso, coll. « Précis Domat », 2018, n° 537 ; Y. Mayaux, Le terrorisme, Dalloz, coll. « Connaissance du droit », 1997 ; M.-H. Gozzi, Le terrorisme, thèse, Toulouse, 1997) n’ait plus l’occasion d’être invoquée.

Plateformes : la Commission européenne a ouvert une consultation sur le Digital Services Act

Du 2 juin au 8 septembre, la Commission européenne recueille les avis des Européens et des non-Européens sur la future législation relative aux services numériques (Digital Services Act).

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La signature de l’acte de partage judiciaire : impossible par un mandataire successoral et inutile par les copartageants

Voilà une nouvelle occasion pour la Cour de cassation d’apporter d’utiles précisions sur les pouvoirs pouvant être confiés à un mandataire successoral et sur les formalités de la procédure de partage judiciaire. En l’espèce, le partage judiciaire d’une indivision post-communautaire et de deux indivisions successorales avait été ordonné par un tribunal qui avait désigné un notaire pour procéder aux opérations de partage. L’état liquidatif dressé par le notaire avait été partiellement homologué par le juge, qui avait tranché les difficultés subsistant entre les parties et renvoyé celles-ci devant le notaire pour établir l’acte constatant le partage. L’un des indivisaires refusant de signer l’acte dressé par le notaire, ses copartageants ont sollicité la désignation judiciaire d’un mandataire successoral, sur le fondement de l’article 813-1 du code civil, afin qu’il procède à la signature de l’acte de partage.

Les juges du fond, en première instance comme en appel, ont fait droit à cette demande et désigné un mandataire successoral qu’ils ont autorisé à signer l’acte de partage des indivisions litigieuses. Le copartageant non consentant s’est pourvu en cassation, donnant à la Cour de cassation l’occasion d’affirmer, d’une part, qu’un mandataire successoral ne peut être désigné pour consentir à un partage, mais aussi, d’autre part, que la signature des copartageants n’est pas requise en matière de partage judiciaire.

Autrement dit, le débat qui s’est tenu devant les juges, de savoir si un mandataire successoral pouvait se voir confier la tâche de consentir au partage (I), était totalement inutile, dans la mesure où le partage judiciaire s’opère sans que la signature des parties ne soit requise (II).

I - L’impossibilité de désigner un mandataire successoral pour signer un acte de partage

La possibilité d’une désignation judiciaire d’un mandataire successoral, inaugurée par la jurisprudence, a été consacrée par la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 et se trouve depuis lors régie par les articles 813-1 et suivants du code civil. Instaurée pour résoudre les situations de blocage entravant le règlement successoral, cette mesure est précisément encadrée dans ses conditions de mise en œuvre. Ainsi, le mandataire ne peut être désigné que si l’une des circonstances visées par l’article 813-1 du code civil est caractérisée : inertie, carence ou faute d’un héritier dans l’administration de la succession ; mésentente ou opposition d’intérêts entre les héritiers ; complexité de la situation successorale.

Surtout, et c’est l’objet de la présente décision, les pouvoirs du mandataire successoral sont nécessairement limités par l’objet même de sa mission, qui consiste, suivant l’article 813-1 du code civil, à « administrer provisoirement la succession ». Ainsi, tant que la succession n’a pas été acceptée par un héritier, le mandataire successoral ne peut accomplir que les actes qui, effectués par un héritier, n’emporteraient pas acceptation tacite. Ses pouvoirs se limitent alors aux « actes purement conservatoires ou de surveillance » et aux « actes d’administration provisoire » visés par l’article 784 du code civil, applicable sur renvoi de l’article 813-4 du code civil, sauf à ce que le juge autorise expressément le mandataire à accomplir « tout autre acte que requiert l’intérêt de la succession ». Les pouvoirs du mandataire peuvent ensuite s’étendre dans l’hypothèse où la succession a été acceptée par au moins un héritier, puisqu’il pourra alors se voir confier par le juge un mandat général l’autorisant à...

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La signature de l’acte de partage judiciaire : impossible par un mandataire successoral et inutile par les copartageants

Un mandataire successoral judiciairement désigné ne peut recevoir pour mission de signer un acte de partage, car cela met fin à l’indivision qu’il est chargé d’administrer. Mais en tout état de cause, la réalisation d’un partage judiciaire ne requiert pas la signature des copartageants, de sorte qu’il n’est pas besoin de recourir à mandataire pour signer l’acte de partage en lieu et place d’un copartageant qui s’y refuse.

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Acte de naissance établi à l’étranger : apostille

L’apostille apposée sur un acte de naissance établi en Inde qui n’authentifie pas la signature de l’officier de l’état civil ne peut pas produire effet en France faute de répondre aux exigences de l’article 5, alinéa 2, de la Convention de La Haye du 5 octobre 1961.

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Acte de naissance établi à l’étranger : apostille

La Convention de La Haye du 5 octobre 1961 supprimant l’exigence de la légalisation des actes publics étrangers s’applique aux actes publics qui ont été établis sur le territoire d’un État contractant et qui doivent être produits sur le territoire d’un autre État contractant. Sont notamment visés les documents administratifs et les actes notariés (art. 1).

Elle prévoit que la seule formalité qui puisse être exigée pour attester la véracité de la signature, la qualité en laquelle le signataire de l’acte a agi et, le cas échéant, l’identité du sceau ou timbre dont cet acte est revêtu, est l’apposition de l’apostille (art. 3). Celle-ci est apposée sur l’acte lui-même ou sur une allonge et doit être conforme au modèle annexé à la Convention (art. 4).

Selon l’article 5 de la Convention, l’apostille est délivrée à la requête du signataire ou de tout porteur de l’acte (al. 1) et, dûment remplie, elle atteste la véracité de la signature, la qualité en laquelle le signataire de l’acte a agi et, le cas échéant, l’identité du sceau ou timbre dont cet acte...

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La consécration de la théorie dualiste des fautes volontaires inassurables

La faute intentionnelle et la faute dolosive, au sens de l’article L. 113-1 du code des assurances, sont autonomes, chacune justifiant l’exclusion de garantie dès lors qu’elle fait perdre à l’opération d’assurance son caractère aléatoire, la prise de risque en ayant manifestement conscience de commettre un dommage suffisant à caractériser la faute dolosive.

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Prouver et réparer des désordres de construction

Le juge ne peut exiger la réparation d’un désordre en se fondant uniquement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties, quand bien même celui auquel l’expertise est opposée aurait été régulièrement appelée aux opérations.Si l’entreprise est condamnée à la reprise des désordres, le juge ne peut rejeter sa demande de paiement du solde du marché sans indemniser deux fois un même préjudice. 

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Une université doit respecter le principe de contrôle des connaissances et aptitudes étudiants

Même en situation de crise sanitaire, une université ne peut pas décider de neutraliser toutes les notes inférieures à dix de ses étudiants.

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Une mission parlementaire propose d’amender la loi renseignement

Cinq ans après son vote, une mission d’information composée de trois députés s’est penchée sur l’évaluation de la loi renseignement du 24 juillet 2015, une loi « fondatrice ». Dalloz actualité a pu consulter ce rapport. Tout en livrant un bilan positif, la mission parlementaire esquisse plusieurs pistes pour la modifier.

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L’applicabilité de la prescription biennale du code de la consommation aux services funéraires

Même la mort n’échappe pas au droit de la consommation, ainsi qu’en témoigne un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 25 mars 2020. En l’espèce, Mme E., héritière de sa tante décédée, a formé opposition à une ordonnance d’injonction de payer une certaine somme au titre d’un contrat de prestations funéraires conclu avec M. U., opérateur de pompes funèbres. Le tribunal d’instance de Limoges, dans un jugement du 20 juillet 2018, a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale, en retenant que la créance litigieuse n’est pas née d’un contrat de consommation et que, dépendant du passif de la succession, les frais funéraires obéissent à la prescription quinquennale de droit commun. L’arrêt est censuré, au visa de l’article L. 137-2, devenu L. 218-2 du code de la consommation. La Cour régulatrice réalise pour ce faire un syllogisme impeccable. Elle rappelle tout d’abord qu’« Aux termes de ce texte, l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans » (pt 3). Elle considère ensuite que « L’opérateur de pompes funèbres qui conclut un contrat de prestations funéraires avec un consommateur lui fournit un service, ce dont il résulte que l’action en paiement qui procède de ce contrat est soumise à la prescription biennale » (pt 4) et qu’« Il importe peu que la créance relève des frais funéraires, dès lors que, les dettes successorales ne faisant l’objet d’aucun régime de...

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L’applicabilité de la prescription biennale du code de la consommation aux services funéraires

L’opérateur de pompes funèbres qui conclut un contrat de prestations funéraires avec un consommateur lui fournit un service, ce dont il résulte que l’action en paiement qui procède de ce contrat est soumise à la prescription biennale.

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Loi Badinter : l’assiette de la pénalité en cas d’offre tardive par l’assureur de payer une rente

Une personne a été victime, le 3 mars 2010, d’un accident de la circulation dans lequel était impliqué le véhicule conduit par une autre personne, couverte par une société d’assurance. La victime a assigné le conducteur et l’assureur de ce dernier aux fins d’être indemnisée de l’ensemble de ses préjudices, en présence de l’Assistance publique-hôpitaux de Paris, la caisse primaire d’assurance maladie de Paris, la Caisse des dépôts et consignations, l’établissement public université Paris Diderot et la mutuelle Mutualité familiale du corps médical Français. Plusieurs membres de la famille de la victime sont intervenus volontairement à l’instance. L’assureur a adressé en cours de procédure à la victime une offre d’indemnisation, par lettre du 4 juillet 2012.

Par un arrêt en date du 12 novembre 2018, la cour d’appel de Paris a condamné l’assureur à payer à la victime des intérêts au double du taux de l’intérêt légal sur une somme en capital de 242 565,88 € du 4 novembre 2010 au 4 juillet 2012.

L’assureur a formé un pourvoi en cassation. Il a soutenu « que lorsque l’offre n’a pas été faite dans les délais impartis à l’article L. 211-9 du code des assurances, le montant de l’indemnité offerte tardivement par l’assureur à la victime produit intérêt de plein droit au double du taux de l’intérêt légal à compter de l’expiration du délai jusqu’au jour de l’offre ; que si l’assureur a proposé une indemnisation sous la forme d’une rente annuelle viagère, l’assiette de calcul de la sanction du doublement de l’intérêt légal s’applique à la rente et aux arrérages qui auraient été perçus pendant cette période, et non au capital servant de base à la détermination de son montant ; qu’en condamnant dès lors la société GMF assurances à paiement de la somme de 242 565,88 € au titre du double des intérêts au taux légal, en prenant pour assiette le montant de 202 907,88 € correspondant au capital constitutif de la rente annuelle viagère offerte par l’assureur au titre de l’assistance tierce personne, quand cette sanction, qui avait en réalité pour assiette la rente annuelle viagère d’un montant de 8 760 €, devait s’appliquer aux seuls arrérages qui auraient dû être perçus par l’assuré après l’expiration du délai de l’offre jusqu’au jour de celle-ci, la cour d’appel a violé les articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des...

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Loi Badinter : l’assiette de la pénalité en cas d’offre tardive par l’assureur de payer une rente

Si l’assureur offre de payer une rente, le doublement du taux s’applique non pas au capital servant de base à son calcul mais aux arrérages qui auraient été perçus à compter de l’expiration du délai de l’offre jusqu’au jour de celle-ci, si elle intervient, ou jusqu’à la décision définitive.

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Contrat de sécurisation professionnelle : précisions sur l’obligation d’information

L’employeur est tenu, à peine de requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’énoncer la cause économique de la rupture du contrat dans un écrit remis ou adressé au salarié au cours de la procédure de licenciement et au plus tard au moment de l’acceptation du contrat de sécurisation professionnelle (CSP).

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Le confinement, [I]crash test[/I] de la transformation numérique de la justice

Les personnels de la Place Vendôme sont particulièrement critiques sur la numérisation de leur ministère, après un confinement qui a fait figure de crash test. Le résultat, bancal, n’est en effet pas brillant et souffre de la comparaison avec d’autres administrations, que ce soit l’intérieur, qui a passé l’épreuve sans couac majeur, ou la santé, qui a misé sur la télémédecine. Pour la Place Vendôme, le printemps a ressemblé au contraire à un long supplice numérique. « En début de confinement, je suis parti en sauvegardant sur ma clé USB un listing Excel de l’ensemble de mes affaires et de mon rôle d’audience, et derrière, j’ai jonglé avec les annuaires des barreaux, relève ainsi un magistrat niçois. C’était un travail de bénédictin. »

Lorsque le confinement débute, le 17 mars, des magistrats sont certes bien dotés en ultraportables, qui permettent le travail à domicile. Mais les personnels des greffes n’en possèdent pas. Résultat : dans l’urgence, le ministère de la justice pioche dans ses stocks pour distribuer trois cents ultraportables, une goutte d’eau par rapport aux 13 000 greffiers de France, selon le décompte du Syndicat des greffiers de France-FO. « Il y a bien eu quelques ordinateurs portables qui ont permis de rentrer des procédures dans le bureau d’ordre, d’autres pour payer les interprètes », détaille Isabelle Besnier-Houben, la présidente de cette organisation syndicale. Cette absence de dotation des greffes est, selon le député Patrick Hetzel, dans un récent rapport, « le principal point noir » du bilan numérique du ministère durant la crise sanitaire. Ce manque d’équipement est dû, selon Isabelle Besnier-Houben, à des réticences sur le télétravail des greffiers. « Il a fallu le covid-19 pour que l’administration se rende compte de l’intérêt du télétravail, regrette-t-elle. Pourtant, adoptée plus tôt, cette forme d’organisation aurait permis à des gens de mieux travailler et d’avoir d’autres conditions de vie. »

VPN sous-dimensionné

Les magistrats dotés d’un ultraportable – le nombre total d’ordinateurs distribués varie selon les sources, mais, après la crise, la direction des services judiciaires indiquera aux organisations syndicales avoir déployé plus de 13 000 portables au sein du ministère – ne sont pas forcément mieux lotis. Car le réseau privé virtuel (VPN) de la Place Vendôme est sous-dimensionné face à la crise sanitaire. À la mi-mars, il ne permet que 2 500 connexions simultanées. Les premières semaines, les magistrats enragent devant leur clavier. « On s’est retrouvés tous en télétravail et on a tous eu un problème, déplorait après le début du confinement une magistrate parisienne. Il faut se déconnecter, essayer de se reconnecter. » Il faudra plusieurs semaines pour que le ministère de la justice boucle la montée en puissance de son prestataire. Jusqu’à 40 000 connexions simultanées sont désormais possibles. Réussir à se connecter ne résout cependant pas tous les problèmes. Si les applications de la chaîne pénale sont bien consultables à distance, ce n’est pas le cas de la plupart de celles de la chaîne civile, qui ne fonctionnent que sur les postes en juridiction. « Les personnels de greffe doivent aujourd’hui être les seuls utilisateurs en France de WordPerfect », la brique logicielle de Winci, ironise ainsi le consultant indépendant Bruno Mathis, expert associé au centre européen de droit et d’économie de l’Essec. Faute de pouvoir se rendre en juridiction, « toute la mise en état, qui permet de faire avancer les dossiers, a été plantée », note David Melison, le trésorier adjoint de l’USM.

Zoom, Skype et Jitsi

La visioconférence n’a pas non plus donné satisfaction. Si le ministère possède le parc le plus important de l’État, les organisations syndicales pointent par exemple un manque de micros compliquant l’exercice. Et, dans les cabinets, ce sont d’autres outils qui se sont imposés. À Nice, on a tenté de s’emparer du logiciel Webconférence de l’État. « Tous les essais ont échoué, déplore ce magistrat des Alpes-Maritimes. L’application ne fonctionnait que sur le navigateur Chrome. Nos ordinateurs ne l’avaient pas, il a fallu l’installer. Puis c’est le réseau qui était surchargé et instable. Nous n’avons réussi à travailler que sur Zoom et Jitsi », deux applications privées de visioconférence, une situation peu satisfaisante sur le plan de la sécurité. « Pour mes réunions de cabinet, j’ai utilisé Skype et Zoom, confirme de son côté le magistrat David Melison. C’est du bricolage et clairement en dehors des clous, mais s’il y a des logiciels, soit ils ne marchent pas, soit ils se déconnectent en permanence. »

De la visio, on est également passé à l’audio, pour un résultat très mitigé. L’avocat Philippe Ohayon a relaté une audience devant le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Nantes. Le résultat fait peur. « J’ai toutes les peines du monde à entendre ce que me dit mon client, racontera-t-il à l’Obs. Lui non plus ne m’entend pas très bien. » Que ce soit par mail ou via des applications, la communication a parfois été difficile. « Des magistrats qui souhaitaient joindre des avocats et les services d’enquête ont utilisé leurs téléphones personnels, remarque Nils Monsarrat, secrétaire national du Syndicat de la magistrature. Il y a désormais une demande importante pour avoir des téléphones de dotation. » Et à cause de l’empêchement des greffiers, confinés à leurs domiciles, des avocats n’ont pu contacter des magistrats. Au retour en juridiction des personnels de greffe, certains ont ainsi été submergés de messages.

Mission d’appui

Des lacunes et des manques dans le viseur de l’Inspection générale de la justice. De source syndicale, une mission d’appui sur les plans de continuité d’activité a été lancée. Elle devrait insister sur les ratés et les points d’améliorations en matière numérique, un domaine où le ministère a pourtant été en pointe, il y a… une trentaine d’années. « Le confinement a mis en lumière ce qui n’allait pas et ce qui a été mal anticipé, résume Nils Monsarrat. La dotation informatique n’est pas suffisante, et la priorité devrait être de revoir tous les logiciels. » Même constat pour David Melison, de l’USM : « Nous avons manqué d’anticipation et de réactivité », regrette-t-il. « La crise n’a fait que mettre en exergue le manque de moyens financiers et son retard sur le télétravail », conclut Isabelle Besnier-Houben. La facture est en fin de compte salée. Le confinement s’est traduit par 20 millions d’euros de dépenses informatiques pour la mission justice.

La ministre de la justice, Nicole Belloubet, n’a pas éludé le problème. Elle a admis qu’il restait « beaucoup à faire », notamment en matière de logiciels permettant le travail à distance des greffiers. Le ministère planche ainsi sur un moyen d’accéder à distance aux applications civiles. Médiocre, le bilan numérique du confinement n’est toutefois pas totalement désastreux. « C’est bien parce que la transformation numérique du ministère a été initiée en 2018 que la justice a pu continuer à travailler durant le confinement, expliquait à Dalloz actualité Haffide Boulakras, le directeur de programme Procédure pénale numérique à la Place Vendôme, à propos de la mise en place récente de la nouvelle plateforme d’échanges numériques Plex, qui permet d’échanger avec les avocats de grosses pièces jointes. Sans ce plan, la justice aurait été en arrêt total. » Haut débit, réseau justice raccordé au réseau interministériel ou premières dotations en ultraportables : autant d’actions antérieures à la crise qui ont permis, souligne la Place Vendôme, de limiter la casse. Quatre-vingts applications ont été également mises à disposition pour du télétravail pendant le confinement.

Le ministère tente aujourd’hui de poursuivre sur cette lancée. L’ouverture d’un flux dématérialisé sur une plateforme des commissaires de justice doit alléger les greffes, tandis qu’un dispositif de webcaméra a été mis en place, courant mai, pour organiser des audiences avec des tiers. « Le confinement va booster la transformation numérique du ministère, et nous permettre de rattraper notre retard en matière informatique », espère David Melison. « La crise aura le mérite de raccourcir le délai de la conduite du changement », note également Bruno Mathis. Les juristes ont en effet vécu, lors de la crise sanitaire, une acculturation à marche forcée aux outils numériques. « Mais la situation informatique des juridictions est extrêmement dégradée, avertit-il. Le ministère essaye de moderniser à coups d’effets d’annonce. » Un constat déjà déploré par ce consultant il y a deux ans. Il s’inquiétait d’un mauvais sens des priorités de la Place Vendôme, laissant en arrière-plan, derrière des sujets plus tendance comme l’intelligence artificielle, la question de l’infrastructure numérique de la justice.

Le confinement, [I]crash test[/I] de la transformation numérique de la justice

La crise du coronavirus a fait figure de crash test pour le chantier de la numérisation de la justice française.

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