La rédaction de Dalloz actualité fait une petite pause hivernale.
Nous serons de retour dès le mardi 27 février 2024.
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Le Conseil d’État élargit les pouvoirs de l’Autorité de régulation de l’audiovisuel en lui imposant un contrôle exigeant du pluralisme et de l’indépendance des chaînes de télévision.
Ces derniers jours, les tribunaux, les barreaux, l’État et la Nation ont rendu hommage à Robert Badinter, ancien garde des Sceaux et père de l’abolition de la peine de mort, décédé à 95 ans, le 9 février. Mercredi, à l’issue de l’hommage national rendu place Vendôme, le président de la République a annoncé l’entrée prochaine de l’avocat éternel au Panthéon.
Autour des barrières, le public a afflué. Aux fenêtres des bâtiments, les employés des boutiques de luxe se sont rassemblés. Sur la place Vendôme, les invités défilent, parmi lesquels les avocats Jacqueline Laffont, Francis Szpiner ou Richard Malka, ou les anciens gardes des Sceaux Elisabeth Guigou, Nicole Belloubet et Rachida Dati, respectivement ministres de l’Éducation nationale et de la Culture, et l’actuel titulaire Éric Dupond-Moretti. Ce mercredi 14 février, sous un ciel gris et bruineux, tous attendent l’hommage national à Robert Badinter, l’avocat, le professeur de droit, le ministre de la Justice, le président du Conseil constitutionnel, le sénateur et l’essayiste décédé vendredi 9 février à l’âge de 95 ans. Au premier rang des deux tribunes officielles, se tiennent ses enfants et petits-enfants, sa femme, Élisabeth Badinter, avec laquelle il a formé un couple mythique pendant près de 60 ans au point d’hésiter, un instant, à prendre la tête de la Chancellerie en 1981, après le départ précipité de l’ancien résistant Maurice Faure, et avant son discours historique pour l’abolition de la peine de mort devant l’Assemblée nationale, le 17 septembre de la même année.
À 12 h, au rythme du tambour, le cercueil de Robert Badinter pénètre sur la place sous une salve d’applaudissements. Quelques instants plus tard, le président de la République Emmanuel Macron salue la famille et les officiels au premier rang dont le Premier ministre Gabriel Attal et l’ancien président François Hollande. Sur l’écran géant, les photos et séquences vidéo du grand homme sont égrenées, témoignant de ses combats et procès, de ses colères, de ses victoires, de ses vies multiples.
Les dernières images d’archives le présentent sur un plateau télé face à Bernard Pivot : « Si Dieu existe, qu’aimeriez-vous après votre mort l’entendre vous dire à vous, Robert Badinter ? » L’œil rieur, il réfléchit, puis répond : « Tu as fait ce que tu as pu, entre. »
L’éloge funèbre du président de la République commence avec « le sang sur la lame » lors de la guillotine de Roger Bontems, que Robert Badinter avait échoué à sauver de la peine de mort. « Son mentor Me Torrès l’avait prévenu : tu deviendras vraiment un avocat après ta première mort de condamné » – à l’époque, les plaideurs assistaient à l’exécution de...
Dans un arrêt rendu le 14 février 2024, la chambre commerciale de la Cour de cassation opère des précisions utiles sur le mécanisme du retrait litigieux dans le contexte d’une cession en bloc d’un grand nombre de créances au profit d’un fonds de titrisation.
Dans un arrêt rendu le 14 février 2024, la chambre commerciale de la Cour de cassation opère des précisions utiles sur le mécanisme du retrait litigieux dans le contexte d’une cession en bloc d’un grand nombre de créances au profit d’un fonds de titrisation.
Le devoir de conseil de l’expert-comptable n’implique pas d’alerter les dirigeants sur l’importance de l’encours clients, les relances clients nécessaires et les délais de paiement s’il n’a pour mission que la tenue de la comptabilité, une aide à l’établissement des comptes annuels et la présentation des documents fiscaux et sociaux ponctuels et de fin d’exercice.
Une nouvelle fois à quelques mois d’intervalle d’une décision sur l’obligation vaccinale, la chambre sociale de la Cour de cassation refuse de transmettre au Conseil constitutionnel plusieurs questions prioritaires de constitutionnalité concernant l’obligation de présentation du « passe sanitaire » de certains travailleurs spécifiquement visés exerçant leurs activités professionnelles dans certains établissements de santé ou médico-sociaux. Cette mesure – qui a suscité beaucoup de débats et fait couler beaucoup d’encre – n’est pas jugée inconstitutionnelle. En effet, cela suppose d’analyser l’engagement des autorités françaises à utiliser la vaccination ou tout autre dispositif tel que le « passe sanitaire » comme un outil clé pour gérer la santé publique, tout en évaluant les implications sur les droits individuels et la liberté personnelle.
Le Conseil d’État fait explicitement application de l’interdiction légale de cumuler un référé précontractuel et un référé contractuel à la Polynésie française. Il choisit également de rejeter les conclusions en référé contractuel pour irrecevabilité au lieu de renvoyer l’affaire au tribunal administratif compétent.
Si des travaux réalisés illégalement par le preneur ont entraîné une dégradation du fonds, le bailleur ne peut pas exiger la remise des lieux en l’état en cours de bail, Il peut demander, à l’expiration du bail, l’allocation d’une indemnité ; en revanche, le renouvellement du bail ne prive pas le bailleur de la possibilité d’en demander la résiliation, lorsque les agissements du fermier ont compromis la bonne exploitation du fonds, même antérieurs à ce renouvellement, et se sont produits ou prolongés au cours du bail renouvelé.
La loi n° 2024-120 du 19 février 2024 visant à garantir le respect du droit à l’image des enfants consacre l’obligation parentale de protection du droit à l’image de l’enfant mineur, soumise à un contrôle judiciaire.
L’héritier d’un associé décédé qui a demandé à être agréé comme associé au titre des parts dont il a hérité peut, à tout moment, même après la fixation du prix par l’expert, renoncer à sa demande d’agrément et exiger le remboursement de la valeur des droits de son auteur.
Dans un arrêt rendu le 14 février 2024, la chambre commerciale de la Cour de cassation vient rappeler qu’à défaut de produire le bordereau de cession de créances professionnelles, ladite cession ne peut pas être opposable aux tiers.
Dans un arrêt rendu le 14 février 2024, la chambre commerciale de la Cour de cassation vient rappeler qu’à défaut de produire le bordereau de cession de créances professionnelles, ladite cession ne peut pas être opposable aux tiers.
En vertu de l’article L. 134-8 du code forestier, un propriétaire ne peut être soumis à l’obligation de débroussaillement et de maintien en état débroussaillé de son terrain, au titre des 3° et 4° de l’article L. 134-6 de ce code, que lorsque le fonds en question se trouve en zone urbaine.
En vertu de l’article L. 134-8 du code forestier, un propriétaire ne peut être soumis à l’obligation de débroussaillement et de maintien en état débroussaillé de son terrain, au titre des 3° et 4° de l’article L. 134-6 de ce code, que lorsque le fonds en question se trouve en zone urbaine.
La participation de la directrice adjointe de la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) à la préparation de l’avis de la Mission régionale d’autorité environnementale (MRAE) ne rend pas illégal cet avis dans la mesure où la mission agit dans les conditions fixées par le code de l’environnement.
Dans un arrêt rendu le 15 février 2024, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation opère quelques précisions au sujet de la qualification d’une clause de dessaisissement au sein d’une convention d’honoraires d’avocat.
Les affaires Jarre et Colombier étaient attendues. L’impatience ne s’expliquait pas seulement en raison des noms de familles célèbres portés par les requérants et l’écho médiatique de leurs déchirements familiaux qui en rappellent d’autres. Elle était aussi due à la question inédite posée aux juges européens à cette occasion : l’abrogation immédiate, par le Conseil constitutionnel, de l’article 2 de la loi de 1819 s’analyse-t-elle en une violation des droits protégés par la Convention européenne des droits de l’homme ?
En matière d’assurance obligatoire des professionnels de santé, il est primordial de déterminer la date de la première réclamation. C’est, en effet, de cette date que vont dépendre non seulement la mise en œuvre de la garantie, mais aussi son étendue.
Une instance est engagée par une personne assistée de son curateur contre la Mutualité sociale Agricole de la Vienne (MSA), devant le tribunal des affaires de sécurité sociale (devenu le pôle social du tribunal judiciaire), concernant le paiement de cotisations.
Le tribunal, par jugement du 17 décembre 2018, donne raison au demandeur assisté de son curateur. La MSA fait appel, par lettre recommandée du 27 février 2019, la procédure étant sans représentation obligatoire, et orale.
L’appel est formé à l’encontre du seul curatélaire, sans intimer le curateur.
Toutefois, le curateur est intervenu volontairement à l’instance d’appel, pour soulever l’irrecevabilité de l’appel au motif que l’appel devait être dirigé tant contre le curatélaire que contre le curateur.
La cour d’appel retient l’argument, soulignant que la régularisation de cette irrégularité de fond supposait un appel contre le curateur dans le délai d’appel.
Le pourvoi de la MSA est rejeté, mais la Cour de cassation substitue néanmoins un motif à ceux invoqués.
Est une irrégularité de fond, au regard de l’article 117 du code de procédure civile, le défaut de capacité à ester en justice.
Et aux termes de l’article 468 du code civil, la personne en curatelle ne peut, sans l’assistance du curateur, introduire une action en justice ou y défendre.
Il en résulte que le curatélaire n’a pas capacité à ester en justice sans l’assistance de son curateur, que ce soit pour engager une action, ou pour se défendre sur une action engagée à son encontre.
Cette irrégularité peut être relevée d’office par le juge, sans que cela soit toutefois une obligation.
L’article 121 du code de procédure civile prévoit quant à lui que « dans les cas où elle est susceptible d’être couverte, la nullité ne sera pas prononcée si sa cause a disparu au moment où le juge statue », sans pour autant préciser les cas dans lesquels cette nullité peut être couverte, laissant à la Cour de cassation le soin de préciser si telle irrégularité peut être régularisée ou non.
En l’espèce, devant le premier juge, le curateur était présent, aux côtés de la personne en curatelle.
Mais curieusement, la MSA avait fait appel à l’encontre du seul curatélaire, oubliant le curateur.
Pour la cour d’appel, cette intervention du curateur en appel – sur la recevabilité de laquelle personne ne s’est attardée – n’avait pas régularisé la cause de nullité, pour être intervenue après l’expiration du délai d’appel : « l’absence d’acte d’appel déclaré contre le curateur est constitutive d’une nullité qui ne peut être couverte qu’avant l’expiration du délai d’appel ».
C’est ce point qui ne convient pas à la Cour de cassation pour qui « une régularisation demeure possible, même après l’expiration du délai d’appel ».
En tout état de cause, si la régularisation est possible, ce n’est pas par une intervention volontaire.
Mais une intervention forcée aurait-elle eu pour effet de régulariser ?
Nous en doutons, car une intervention, qu’elle soit forcée ou volontaire, reste une demande incidente qui a pour objet de rendre un tiers partie au procès.
Cette impossibilité de régulariser par une intervention n’est pas nouvelle.
La Cour de cassation l’avait déjà exclue, considérant que l’omission du curateur devant le premier juge constitue une irrégularité de fond que ne peut couvrir l’intervention volontaire ou forcée du curateur en cause d’appel à l’effet de faire sanctionner cette irrégularité (Civ. 1re, 23 févr. 2011, n° 09-13.867, Dalloz actualité, 7 mars 2011, obs. I. Gallmeister ; D. 2011. 1265, note R. Loir ; ibid. 2501, obs. J.-J....
La circonstance qu’une décision refusant de reconnaître l’imputabilité d’un accident au service peut comporter des éléments couverts par le secret médical n’est pas, par elle-même, susceptible de l’entacher d’illégalité.
Dans une opération d’investissement immobilier locatif avec défiscalisation comportant un emprunt dont le remboursement du capital est différé à dix ans, le point de départ de l’action en responsabilité engagée par l’acquéreur contre des professionnels pour manquement à leurs obligations d’information, de conseil ou de mise en garde est le jour où le risque s’est réalisé, soit celui où l’acquéreur a appris qu’il serait dans l’impossibilité de revendre le bien à un prix lui permettant de rembourser le capital emprunté.
Sur proposition d’une société de conseil en gestion de patrimoine, des particuliers ont acquis, le 30 juillet 2009, un appartement en l’état futur d’achèvement, moyennant un prix d’environ 240 000 €. Pour financer cet investissement locatif, un contrat de prêt était souscrit le 24 juin 2009.
Il doit être souligné que cette opération offrait aux acquéreurs de se placer sous un régime fiscal de faveur (défiscalisation « loi Girardin ») leur procurant un crédit d’impôt important, à condition de conserver le bien pendant une certaine période.
Cette précision importe puisque les modalités de remboursement du crédit bancaire se calquaient sur les exigences du dispositif fiscal. En effet, le capital emprunté sur vingt ans n’était amortissable que sur les dix dernières années ce qui devait permettre aux acquéreurs, au terme de la période de conservation, soit de garder l’appartement et de percevoir des revenus locatifs, soit de revendre le bien, les deux hypothèses étant censées assurer le remboursement du prêt.
Le bien a été achevé et livré en 2010 et, dès 2011, les acquéreurs subissaient leurs premières déconvenues en constatant que le rendement locatif n’était pas celui qu’ils escomptaient (logement vacant, loyers en baisse).
Le 14 septembre 2012, une agence tierce avisait les acquéreurs d’un risque de perte de valeur dudit bien, à concurrence de 30 % par rapport au prix d’achat. Risque confirmé le 18 juillet 2016, date à laquelle les acquéreurs étaient rendus destinataires d’une estimation chiffrant entre 80 000 € et 90 000 € la valeur du bien (soit une perte de valeur d’environ 65 %).
Comprenant que tant leur rente locative que leur faculté de revente étaient compromises, les acquéreurs ont, les 12, 16 et 17 janvier 2017, assigné l’établissement bancaire et la société de gestion de patrimoine pour manquement à leur devoir d’information, de conseil et de mise en garde, leur reprochant notamment d’avoir surévalué le bien et la rentabilité de l’opération.
Suivant jugement rendu le 18 juin 2020, le Tribunal judiciaire de Paris a déclaré irrecevable, car prescrite, l’action des acquéreurs et condamné ces derniers au paiement de diverses sommes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Les acquéreurs en relevaient appel de cette décision le 30 juillet suivant, sans davantage de succès.
Par un arrêt du 6 décembre 2021, la Cour d’appel de Paris déboutait de nouveau les acquéreurs, jugeant également que leur action était prescrite et les condamnant derechef sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Doublement déboutés, sans débat sur le fond, et redevables de plus de 10 000 € au titre des frais de procédure, les acquéreurs ont formé un pourvoi en cassation.
Comme en dispose l’article 2224 du code civil, le délai de prescription de droit commun est de « cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ».
Cette formulation alternative laisse aux juges une marge d’appréciation quant au point de départ afin que la prescription ne puisse courir à l’égard d’une partie empêchée d’agir (contra non valentem agere non currit praescriptio) sans pour autant excuser la carence d’un plaideur qui, en mesure de le faire, n’aurait pas accompli les diligences utiles en temps et en heure.
Et le contentieux de la prescription porte ainsi régulièrement sur le point de départ du délai, étant courant de s’interroger sur la date à partir de laquelle le demandeur aurait dû pouvoir agir.
Les mots comptent puisqu’en...
L’adoption du projet de loi constitutionnelle sur l’IVG a été un parcours semé d’embûches. À la suite du revirement de la Cour suprême américaine, plusieurs initiatives ont proposé de garantir un droit à l’avortement dans la Constitution française. En effet, si le Conseil constitutionnel a rattaché l’IVG à la liberté de la femme (Cons. const. 27 juin 2001, n° 2001-446 DC, D. 2001. 2533 , note B. Mathieu ; ibid. 2002. 1948, obs. G. Nicolas ; RSC 2002. 672, obs. V. Bück ), il ne l’a jamais consacré comme un droit constitutionnel. De manière générale, le Conseil reste prudent sur les grands débats de société, s’abstenant de consacrer ou de censurer ces mesures âprement débattues.
À l’Assemblée nationale, la proposition avait été facilement adoptée, la gauche et la majorité étant même rejointe par une partie des voix de la droite et l’extrême droite.
Au contraire, le Sénat s’y sera repris plusieurs fois. En octobre 2022, une première proposition de loi sénatoriale fut rejetée (139 pour, 172 contre, v. Dalloz actualité, 24 oct. 2022, obs. P. Januel). Mais en février 2023, une autre proposition de loi de Mathilde Panot, venue de l’Assemblée, fut adoptée de justesse après avoir été largement réécrite par le sénateur Philippe Bas (166 pour, 152 contre). L’ancien président de la commission des lois avait ébauché un compromis. Alors que l’Assemblée proposait de créer un nouvel article 66-2 déclarant que « la loi garantit l’effectivité et l’égal accès au droit à l’interruption volontaire de grossesse », la version sénatoriale était plus sobre,...
L’avis rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 14 février 2024 porte sur une pratique relativement ancienne – le « placement éducatif à domicile » – analysée à la lumière d’une réforme assez récente – la loi n° 2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants. Il en résulte un avis sans surprise pour qui s’en tient aux textes, mais sans doute décalé quant à la réalité de la mise en place de cette pratique.
Pour mieux comprendre le contexte, rappelons que « si la santé, la sécurité ou la moralité d’un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises, des mesures d’assistance éducative peuvent être ordonnées par justice » (C. civ., art. 375).
Dans ce cas, l’article 375-2 du code civil précise que « chaque fois qu’il est possible, le mineur doit être maintenu dans son milieu actuel » lequel s’entend, en principe, du domicile familial ou, si ses parents vivent séparément, du domicile du parent chez lequel a été fixée sa résidence habituelle. Le juge désigne alors « soit une personne qualifiée, soit un service d’observation, d’éducation ou de rééducation en milieu ouvert, en lui donnant mission d’apporter aide et conseil à la famille, afin de surmonter les difficultés matérielles ou morales qu’elle rencontre ». C’est ce que l’on appelle une « mesure d’AEMO » pour assistance éducative en milieu ouvert.
Ce n’est que si la protection de l’enfant l’exige que le juge des enfants peut décider de le confier à d’autres personnes et, notamment, à un service départemental de l’aide sociale à l’enfance (C. civ., art. 375-3, 3°) ou à un service ou établissement habilité pour l’accueil de mineurs à la journée ou suivant toute autre modalité de prise en charge (C. civ., art. 375-3, 4°). C’est ce que l’on appelle communément le placement de l’enfant (en ce sens, S. Guinchard et T. Debard [dir.], Lexique des termes juridiques, 31e éd., Dalloz, 2023-2024, v° Placement de l’enfant, p. 791).
Pour organiser la protection de l’enfant en danger, le code civil offre donc deux approches en apparence très distinctes : l’enfant reste dans sa famille ou en est retiré. Face à cette alternative,...
Voici un bel arrêt, technique mais important tant en théorie qu’en pratique. Il se trouve à la jointure de plusieurs thèmes. Il intéresse d’abord l’astreinte, dont il contribue à affiner le régime. Il intéresse aussi la théorie de l’excès de pouvoir et, à travers elle, la théorie des recours restaurés (dits aussi « recours-nullité »). Il intéresse enfin l’exécution provisoire, sujet qui a naturellement gagné en importance au lendemain de la réforme de la procédure civile de 2019, laquelle a procédé à la généralisation de l’exécution provisoire de droit, de principe aujourd’hui (C. pr. civ., art. 514 ; v. J.-Cl. Procédures Formulaires, v° Exécution provisoire, par M. Barba et R. Laffly, fasc. 10, à jour au 26 oct. 2020).
Par ordonnance du 7 mars 2017, un juge de la mise en état enjoint une partie à communiquer divers documents sous astreinte. Par jugement du 3 septembre 2020, un tribunal statue au fond sur le litige, liquide l’astreinte et condamne l’intéressé à payer le montant de l’astreinte liquidée.
Appel de l’ordonnance et du jugement est relevé. L’appelant saisit parallèlement le premier président de la cour d’appel d’une demande d’arrêt de l’exécution provisoire du jugement sur le fondement de l’article 524 du code de procédure civile dans sa version applicable à la cause (devenu art. 514-3 ensuite de la réforme de 2019, pour l’arrêt de l’exécution provisoire de droit).
Selon toute vraisemblance (l’ordonnance du délégué du premier président n’étant pas en libre accès), l’appelant sollicite uniquement l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement des chefs liquidant l’astreinte et condamnant à son paiement. C’est important de le préciser : l’appelant ne demande pas l’arrêt de l’exécution provisoire de l’obligation assortie de l’astreinte issue de l’ordonnance du juge de la mise en état.
Le délégué du premier président juge irrecevable cette demande. Selon lui, les dispositions de l’article 524 du code de procédure civile dans sa version applicable à la cause ne concernent que les décisions portant mesure d’exécution. Or, selon lui toujours, l’astreinte n’est pas une mesure d’exécution mais une mesure de contrainte indirecte liée à l’obligation principale, en l’espèce une obligation de communiquer divers documents.
L’appelant forme un pourvoi à l’encontre de l’ordonnance du premier président. Selon lui, en droit, rien n’empêche de solliciter l’arrêt de l’exécution provisoire des seuls chefs liquidant l’astreinte et condamnant à son paiement, sans solliciter conjointement l’arrêt de l’exécution provisoire des chefs portant obligation et l’assortissant d’une astreinte.
La première difficulté concerne la recevabilité même du pourvoi car, en matière d’exécution provisoire, le premier président statue par une ordonnance insusceptible de recours. La règle figurait, en 2019, à l’article 525-2 du code de procédure civile. Elle figure encore aujourd’hui aux articles 514-6 et 517-4 du même code (respectivement pour l’exécution provisoire de droit et octroyée).
Chacun sait néanmoins que la possibilité d’un recours est restaurée – et le recours-nullité ouvert – en cas d’excès de pouvoir, que le requérant invoquait bien en l’espèce. La Cour de cassation reçoit le pourvoi-nullité sur ce fondement.
Au fond, la question est de savoir si une partie peut demander l’arrêt de l’exécution provisoire des seuls chefs de liquidation de l’astreinte et de condamnation à son paiement.
Au visa des articles R. 131-4 du code des procédures civiles d’exécution, selon lequel la décision du juge est exécutoire de plein droit par provision en matière d’astreinte, et 524 du code de procédure civile, la réponse de la Cour de cassation est sans appel : « le jugement du tribunal, exécutoire de plein droit par provision des chefs liquidant l’astreinte et condamnant (…) au paiement de l’astreinte liquidée, pouvait faire l’objet d’une demande d’arrêt de l’exécution provisoire en application de l’article 524 du code de procédure civile », de sorte que « le premier président a méconnu l’étendue de ses pouvoirs » (pt 9).
Cassation s’ensuit sur ce motif.
Pour saisir la portée de cet arrêt, il faut d’abord reconstruire le raisonnement supposé du délégué du premier...
Si le propriétaire du fonds assujetti entend transporter l’exercice de la servitude dans un endroit différent de celui où elle a été primitivement assignée, il ne peut proposer comme nouvelle assiette qu’un endroit aussi commode et, partant, ne doit pas méconnaître les prescriptions d’un plan de prévention des risques naturels prévisibles.
Alors que les servitudes d’utilité publique se multiplient, les servitudes conventionnelles sont restées incarner, tant quant à leurs conditions de constitution qu’à leur régime d’exécution, le domaine privilégié de la liberté contractuelle. Le maintien de ces servitudes repose sur l’équilibre entre la charge imposée et le profit procuré. Aussi, sous certaines conditions, il est permis au propriétaire du fonds servant de déplacer l’assiette de la servitude.
En l’espèce, la Cour de cassation précise ces conditions et ajoute que le déplacement de l’assiette ne saurait toutefois méconnaître le droit de l’environnement et, particulièrement, les prescriptions d’un plan de prévention des risques naturels. Le litige a pour magnifique décor l’Île de Beauté, hélas sujette au risque d’incendie.
Différents propriétaires se prévalent d’une servitude conventionnelle de passage, dont l’assiette a été déplacée par le propriétaire du fonds servant. Ils assignent le propriétaire en rétablissement de la servitude.
Confirmant le jugement de première instance, la Cour d’appel de Bastia rejette leur demande par un arrêt du 9 février 2022.
Les propriétaires des fonds dominants se pourvoient en cassation. Ils fondent leur argumentation sur l’existence d’un plan de prévention des risques naturels (PPRN) considérant que la cour d’appel a violé l’arrêté portant approbation de ce plan.
En effet, le PPRN « incendies de forêt » de leur commune impose, en zone rouge, des prescriptions de largeur de voie supérieure à cinq mètres et de pente maximale en long de 20 %.
Pour justifier sa décision, la cour d’appel avait relevé que l’assiette originelle de la servitude n’avait pas été mise en conformité par les propriétaires du fonds dominant, auxquels incombe l’entretien de de la servitude notamment au titre des articles 697 et 698 du code civil. En effet, ces derniers ont droit de faire, à leurs frais sauf...
Lorsqu’un acheteur souhaite exclure un candidat de la procédure de passation d’un marché, il ne peut pas prendre en compte des faits commis depuis plus de trois ans. Lorsqu’une condamnation non définitive a été prononcée, cette durée court à compter de la condamnation.
La créance résultant d’une clause sanctionnant tout retard de paiement dont l’application ne résulte pas du seul fait de l’ouverture d’une procédure collective peut être admise, car elle n’aggrave pas les obligations du débiteur en mettant à sa charge des frais supplémentaires.
Les dispositions d’ordre public de l’article L. 911-8 du code de la sécurité sociale prévoyant un maintien gratuit des garanties santé et prévoyance du salarié licencié jusqu’à douze mois après son licenciement impliquent que le contrat ou l’adhésion liant l’employeur à l’organisme assureur ne soit pas résilié. Cette résiliation, peu important qu’elle intervienne après le licenciement des salariés concernés, met un terme au maintien des garanties au bénéfice des anciens salariés.
Les dispositions d’ordre public de l’article L. 911-8 du code de la sécurité sociale prévoyant un maintien gratuit des garanties santé et prévoyance du salarié licencié jusqu’à douze mois après son licenciement impliquent que le contrat ou l’adhésion liant l’employeur à l’organisme assureur ne soit pas résilié. Cette résiliation, peu important qu’elle intervienne après le licenciement des salariés concernés, met un terme au maintien des garanties au bénéfice des anciens salariés.
Dans un arrêt rendu le 14 février 2024, la chambre commerciale de la Cour de cassation rappelle quelques constantes autour de l’application de l’article L. 133-1 du code monétaire et financier et, le cas échéant, du retour au droit commun de la responsabilité contractuelle en matière de responsabilité des prestataires de service de paiement.
Le contentieux des opérations de paiement donne lieu à un certain nombre de décisions publiées au Bulletin chaque année. On peut se rappeler notamment d’un arrêt sur les effets de la résiliation d’un concours à durée indéterminée rendu à l’automne 2023 (Com. 20 sept. 2023, n° 22-15.878 F-B, Dalloz actualité, 2 oct. 2023, obs. C. Hélaine ; D. 2023. 1644 ; RTD com. 2023. 927, obs. D. Legeais ) ou d’une affaire de la fin de l’été dernier portant sur l’authentification forte de la directive dite « DSP2 » (Com. 30 août 2023, n° 22-11.707 F-B, Dalloz actualité, 28 sept. 2023, obs. C. Hélaine ; D. 2023. 2124 , note J. Lasserre Capdeville ; RTD com. 2023. 925, obs. D. Legeais ). Aujourd’hui, c’est un arrêt portant sur la responsabilité des prestataires de services de paiement, jouant habilement entre l’article L. 133-1 du code monétaire et financier et le droit commun des obligations, qui nous intéresse.
À l’origine du pourvoi, on retrouve une situation assez banale. Une société demande à son établissement bancaire de procéder à trois virements libellés en dollars américains pour régler plusieurs factures émises par des partenaires économiques. La société ayant donné l’ordre de virement se rend compte, quelques temps plus tard, qu’un tiers s’est toutefois immiscé dans son système de messagerie électronique. Les virements ont été faits, dans ce contexte, au profit de comptes tiers différents des fournisseurs créanciers attendant leur paiement.
L’établissement bancaire refuse de restituer l’intégralité des sommes virées. La société ayant donné les ordres de virement assigne donc la banque en responsabilité pour défaut à son obligation de vigilance et de surveillance. En cause d’appel, les juges du fond rejettent cette demande faute d’anomalie apparente des ordres de virement litigieux. La société n’ayant pas obtenu le...
Dans un arrêt rendu le 14 février 2024, la chambre commerciale de la Cour de cassation rappelle quelques constantes autour de l’application de l’article L. 133-1 du code monétaire et financier et, le cas échéant, du retour au droit commun de la responsabilité contractuelle en matière de responsabilité des prestataires de service de paiement.
par Karima Haroun, Chef de rubrique, Dictionnaire Permanent Santé, bioéthique, biotechnologies, Éditions Législativesle 4 mars 2024
Retrouvez toute l’actualité du droit de la santé, dans le Dictionnaire Permanent Santé, bioéthique, biotechnologies, Éditions Législatives.
Transidentité et droit d’asile
Le transfert d’une femme transgenre, ressortissante iranienne, aux autorités croates en vue - de l’examen de sa demande d’asile - est annulé. Le juge rappelle que la requérante fait l’objet depuis son arrivée sur le territoire français, d’un suivi médical et d’un traitement médicamenteux. Dans ces conditions, et compte tenu de la très grande fragilité physique et psychologique de l’intéressée qui soutient avoir été violentée lors de son séjour en Croatie, dans un camp de migrants, du fait de son apparence, le transfert de la requérante aux autorités croates entraînerait un risque réel et avéré d’une détérioration significative de son état de santé. (TA Paris, 16 févr. 2024, n° 2401097)Parcours de transition des personnes transgenres
Le tribunal administratif de Montreuil enjoint à la Haute Autorité de santé de communiquer à l’association Juristes pour l’enfance le document fixant la composition du groupe de travail « Parcours de transition des personnes transgenres », cela inclut leurs noms, prénoms et qualité. L’association rappelle dans un communiqué qu’il est indispensable que le groupe de travail sur ces sujets présente une large représentativité des professionnels compétents en la matière. Elle souhaite par ailleurs que « la composition de ce groupe assure une véritable indépendance des travaux et que les professionnels le composant ne soient pas ceux qui assurent leurs revenus sur les actes de transition médicale : les conflits d’intérêts seraient alors majeurs ». (TA Montreuil, 20 févr. 2024, n° 2308469)Prise en charge des enfants intersexes
Le Conseil d’Etat rejette la requête en excès de pouvoir contre l’arrêté relatif aux règles de bonnes pratiques de prise en charge des enfants présentant des variations du développement génital. (CE, 1er févr....Sélection de l’actualité « Santé » marquante des semaines des semaines du 5 au 19 février 2024.
Sélection de l’actualité « Santé » marquante des semaines des semaines du 5 au 19 février 2024.
Le droit à la preuve est susceptible de justifier la production d’éléments obtenus illicitement qui portent atteinte à d’autres droits fondamentaux, à condition que ladite preuve soit indispensable et que l’atteinte soit strictement proportionnée. Tel est le cas d’un dispositif de vidéosurveillance dissimulé par l’employeur pour révéler des vols, dans un contexte de disparition des stocks, dès lors qu’aucune autre mesure n’était envisageable et que l’enregistrement, réalisé par le seul dirigeant, était limité dans le temps.
Bien que l’arrêt du 15 février dernier rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation soit un arrêt de rejet, il est tout aussi riche d’enseignements qu’un arrêt de cassation, ne serait-ce que parce que la censure n’est écartée par la Cour qu’au prix d’une substitution de motifs.
Au cas présent, une jeune fille, alors âgée de douze ans, avait été grièvement blessée à l’occasion de la visite d’une basilique. À proximité des cierges, ses vêtements s’étaient enflammés lui causant des blessures d’autant plus graves que le nombre d’extincteurs présents ne respectait pas la règlementation applicable aux établissements recevant du public.
La mère de la victime avait alors déposé une main courante au commissariat puis avait, en qualité de représentante légale de sa fille, assigné la paroisse afin de voir indemniser les préjudices subis par cette dernière. Elle avait alors été déboutée de ses demandes.
Devenue majeure, la victime n’avait pas repris la procédure d’appel dirigée contre ce jugement mais avait déposé plainte puis saisi une commission d’indemnisation des victimes d’infraction (CIVI) à fin d’indemnisation de ses préjudices.
À hauteur d’appel de cette seconde procédure, le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI) avait soulevé une fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l’action, le délai de trois ans prévu par l’article 706-5 du code de procédure pénale pour saisir une CIVI étant écoulé. La Cour d’appel de Paris, considérant que la forclusion avait été suspendue durant la minorité de la victime, avait jugé l’action recevable. Estimant que l’élément matériel de l’infraction de blessures involontaires était démontré, la cour d’appel avait ordonné une expertise médicale pour déterminer l’étendue du préjudice de la...
Après avoir rappelé que la suspension de la prescription en raison de la minorité ne s’applique pas, par principe, aux délais de forclusion, la Cour de cassation estime que la carence des représentants légaux à demander l’indemnisation de leur enfant mineur victime devant une commission des victimes d’infractions permet à la victime devenue majeure d’être relevée de forclusion. La Cour rappelle également les conditions pour que l’indemnisation intervienne en présence d’une infraction non-intentionnelle de la part d’une personne physique ayant indirectement causé le dommage.
La Cour de cassation apporte des précisions vis-à-vis de l’étendue des exigences du caractère contradictoire de la procédure visant à la reconnaissance de l’indignité des conditions matérielles de détention et des modalités d’appréciation des allégations des personnes détenues.
Depuis le 1er juin 2017, date d’entrée en vigueur du décret n° 2017-923 du 9 mai 2017, le commissaire de justice chargé de la délivrance des assignations aux fins de constat ou de prononcé de la résiliation du bail, remet au locataire, en main propre ou, à défaut, par le dépôt dans sa boîte aux lettres, un document d’information en vue de l’audience.
Dans un arrêt du 8 février dernier, la première chambre civile de la Cour de cassation s’est prononcée sur les conséquences de l’oubli de la remise ou du dépôt de ce document. En l’espèce, un litige opposait une société HLM à l’un de ses locataires. Plusieurs mensualités étant demeurées impayées, la bailleresse a fait signifier au locataire un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au contrat de bail, puis l’a assigné en constat d’acquisition de cette clause, expulsion et paiement d’un arriéré locatif. Pour se défendre, le locataire attaque l’assignation qu’il estime atteinte de nullité puisqu’elle n’était pas accompagnée, comme le prévoit le décret du 9 mai 2017 précité, du document rappelant au locataire les date, horaire et lieu de l’audience et destiné à l’informer de l’importance de sa présentation à l’audience ainsi que de la possibilité de déposer, avant l’audience, une demande d’aide juridictionnelle et de saisir les acteurs qui contribuent à la prévention des expulsions locatives. La cour d’appel refuse de faire droit à la demande de nullité au motif qu’aucune sanction n’était prévue en l’absence de remise du document et que le locataire ayant comparu en personne devant le tribunal, il avait pu faire valoir ses moyens de défense. Les conditions du prononcé de la nullité pour vice de forme énoncées à l’article 114 du...
Le document informatif institué par l’article 1, I, du décret n° 2017-923 du 9 mai 2017, remis par le commissaire de justice ou déposé au domicile ou à la résidence du destinataire d’une assignation aux fins de prononcé ou de constat de la résiliation d’un bail d’habitation, n’est pas un acte de procédure au sens de l’article 114 du code de procédure civile
Le document informatif institué par l’article 1, I, du décret n° 2017-923 du 9 mai 2017, remis par le commissaire de justice ou déposé au domicile ou à la résidence du destinataire d’une assignation aux fins de prononcé ou de constat de la résiliation d’un bail d’habitation, n’est pas un acte de procédure au sens de l’article 114 du code de procédure civile
Comme en matière d’action directe du tiers lésé, la recevabilité de l’action en garantie dirigée contre un assureur n’est pas subordonnée à la mise en cause de son assuré.
Comme en matière d’action directe du tiers lésé, la recevabilité de l’action en garantie dirigée contre un assureur n’est pas subordonnée à la mise en cause de son assuré.
Lorsqu’il relève qu’une clause contestée du règlement de copropriété relative à la répartition des charges n’est pas conforme aux dispositions légales et réglementaires, le juge doit, d’une part, non pas annuler, mais réputer cette clause non écrite, d’autre part, procéder à une nouvelle répartition des charges en fixant lui-même toutes les modalités que le respect des dispositions d’ordre public impose.
La France ne violerait pas la Convention européenne des droits de l’homme en mettant à exécution la procédure d’éloignement vers la Russie d’un ressortissant russe d’origine tchétchène, dont le statut de réfugié avait été révoqué en raison de la menace grave pour la sûreté de l’État que constituait sa présence en France.
L’article R. 642-37-2 du code de commerce qui dispose que le juge-commissaire statue sur la vente des biens mobiliers du débiteur après avoir entendu ou dûment appelé le débiteur, commande que ce dernier soit convoqué à l’audience à laquelle le juge-commissaire statue.
Une action introduite devant le juge des loyers commerciaux par assignation sans mémoire préalable est irrecevable et la situation ne peut pas être régularisée par un mémoire postérieur à la saisine du juge.
Une action introduite devant le juge des loyers commerciaux par assignation sans mémoire préalable est irrecevable et la situation ne peut pas être régularisée par un mémoire postérieur à la saisine du juge.
La liberté d’expression au travail doit être prise en compte par le juge national lorsqu’il est amené à se prononcer sur la légitimité d’une sanction infligée à un salarié.
La liberté d’expression au travail doit être prise en compte par le juge national lorsqu’il est amené à se prononcer sur la légitimité d’une sanction infligée à un salarié.
Les députés ont définitivement adopté, le 29 février, une proposition de loi qui renforce la protection des mineurs et l’honorabilité dans le sport.
Dans un arrêt rendu le 29 février 2024, la Cour de justice de l’Union européenne vient rappeler que les circonstances exceptionnelles et inévitables de l’article 12, § 2, de la directive (UE) 2015/2302, qui permet à un voyageur de solliciter la résiliation sans frais d’un voyage à forfait, ne peuvent être appréciées qu’au jour de la résiliation.
Un arrêt qui répond à plusieurs questions notamment sur l’opposabilité d’une cession de créance à un fonds de titrisation, sur la voie de recours à l’encontre d’un jugement d’adjudication qui n’a statué sur aucune contestation, enfin sur la qualité de partie de l’adjudicataire et la notion d’excès de pouvoir.
Dans un arrêt rendu le 28 février 2024, la première chambre civile rappelle que lorsqu’un client reproche à son ancien avocat un manquement au devoir d’information sur les honoraires dus, celui-ci doit intenter son action en responsabilité dans les cinq ans à compter de la fin de mission du professionnel.
Dans la mise en œuvre du rapport des donations consenties en avance de part successorale, la règle dite de la « subrogation liquidative » aboutit à priver un donataire d’une partie de la plus-value qu’il aura pu réaliser grâce à un placement judicieux. Cette atteinte à l’exercice du droit de propriété du donataire est conforme à la Constitution car elle est justifiée par un motif d’intérêt général et proportionné aux buts poursuivis.
L’égalité est l’âme des partages, selon l’expression bien connue. Encore faut-il s’entendre sur le sens à donner à ce terme. S’agit-il d’une égalité arithmétique liée à la justice commutative (chacun reçoit autant) ou d’une égalité géométrique relevant de la justice distributive (chacun reçoit ce qu’il mérite)?
En droit des successions, ces deux égalités trouvent leur place d’après la volonté du de cujus. On ne s’étonnera donc pas que, dans cet arrêt rendu le 14 février 2024, la Cour de cassation considère que la règle de la subrogation liquidative est conforme à la Constitution. Elle est certes controversée mais elle est aussi justifiée et proportionnée.
Le rapport des libéralités consiste à réunir à la masse à partager les libéralités consenties par le de cujus en avance de part à ses présomptifs héritiers avant d’y appliquer les taux de dévolution légale (v. Rép. civ., v° Rapport des dons et legs, par D. Guével et J. Boisson). La pomme de discorde est l’alinéa 2 de l’article 860 du code civil, que d’aucuns considèrent comme une bombe cachée dans le code civil.
Lorsqu’une donation (ou plus rarement un legs) est considérée comme rapportable, elle doit être comptée soit d’après le nominal si son objet est une somme d’argent (C. civ., art. 860-1), soit d’après la valeur du bien donné au jour du partage, selon son état au jour de la donation (C. civ., art. 860, al. 1er). La dette de rapport est donc tantôt de somme, tantôt de valeur.
À cette règle générale s’ajoute celle, plus spéciale, dite de la « subrogation liquidative ». Si le bien donné a été aliéné, il convient de troquer le valorisme contre le nominalisme, et de retenir la valeur du bien au jour de l’alinéation. À l’inverse, si cette valeur ou la somme initialement donnée est employée à l’acquisition du bien, c’est le nominalisme qui s’efface devant le valorisme : la valeur à retenir est celle du nouveau bien acquis au jour du partage (d’après son état au jour de l’acquisition).
Cette règle reçoit cependant exception lorsque la dépréciation du nouveau bien était inéluctable au jour de son acquisition (véhicule, équipement informatique ou électroménager, etc.) : la subrogation liquidative alors ne s’applique pas. Le même dispositif existe dans le cadre de l’action en réduction, à la différence seulement que les valeurs sont fixées au jour du décès et non du partage.
Le reproche adressé au mécanisme de la subrogation liquidative tient à la subrogation réelle imparfaite qui fait participer les cohéritiers à l’enrichissement du gratifié. En effet, si le bien a pris de la valeur entre la donation et le partage, cette « plus-value » sera réunie à la masse partageable (sauf si cet enrichissement est lié à la modification de l’état du bien). Ce dispositif de justice arithmétique est parfaitement justifié lorsque le donataire n’a pas contribué à l’augmentation de la valeur du bien, c’est-à-dire lorsqu’il s’est contenté d’être propriétaire et n’a pas fourni d’effort particulier pour valoriser sa donation. En revanche, lorsque par sa...
Lorsqu’une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d’une entreprise de travail temporaire en violation des dispositions visées par l’article L. 1251-40 du code du travail, le salarié peut faire valoir auprès de l’entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa première mission irrégulière, y compris lorsqu’il a conclu avec l’entreprise de travail temporaire un contrat à durée indéterminée intérimaire.
La France trop attentive à l’honneur et à la réputation des personnes dénoncées pour harcèlement moral ou sexuel
Il ne se passe pas de jour où, en France comme ailleurs, la libération de la parole nécessaire pour éradiquer le harcèlement, moral ou sexuel, ne conduise à la dénonciation de personnes qui, présumées innocentes, ne manquent pas de défendre leur honneur et leur réputation en demandant la condamnation pour diffamation publique de leur antagoniste. Face à la tentation toujours plus forte de sacrifier le droit à la présomption d’innocence pour protéger les victimes de harcèlement souvent en situation de faiblesse, l’équilibre n’est pas facile à établir.
Par un arrêt Allée du 18 janvier 2024 (n° 20725/20, Dalloz actualité, 30 janv. 2024, obs. S. Lavric), la Cour a estimé que la France ne l’avait pas trouvé dans une affaire où la secrétaire salariée d’une association d’enseignement confessionnel avait été condamnée à 500 € d’amende avec sursis pour diffamation publique parce qu’elle avait dénoncé par un courriel que son mari avait redirigé sur Facebook, le harcèlement moral puis sexuel auquel le vice-président exécutif l’aurait soumise. La Cour a estimé que cette modeste condamnation avait porté atteinte au droit à la liberté d’expression de l’intéressée parce que les juridictions nationales l’avaient prononcée selon une approche qui avait trop strictement reconnu le caractère public du courriel et en refusant d’adapter aux circonstances la notion de base factuelle suffisante et les critères de la bonne foi qui auraient pu conduire à une exonération de responsabilité. En somme, la Cour, oubliant un peu le principe de subsidiarité eu égard à la gravité des enjeux, reproche à la France la lenteur de ses juridictions à retenir une interprétation évolutive des règles applicables au droit de la diffamation publique qui permettrait de l’adapter aux exigences de la lutte contre le harcèlement moral ou sexuel. Il convient toutefois de souligner qu’elle ne le fait que dans la mesure où ce n’était pas la salariée elle-même qui avait diffusé le mail dénonciateur sur les réseaux sociaux. L’espoir de ne pas livrer la présomption d’innocence des personnes dénoncées pour harcèlement en pâture aux internautes n’est donc pas abandonné et on peut reconnaître à la Cour le mérite de chercher un équilibre entre la liberté d’expression des victimes de harcèlement et la défiance envers les réseaux sociaux.
La France trop lente à donner un cadre légal à l’encerclement policier
Pour faire face à de nouveaux défis, que nul n’avait peut-être prévus à l’époque où la Convention européenne a été rédigée tels que ceux engendrés par des technologies de communication permettant de mobiliser des protestataires « rapidement, secrètement et à une échelle sans précédent », les forces de police des États développent pour y répondre de nouvelles techniques de maintien de l’ordre, parmi lesquelles s’inscrit notamment le « kettling » qui consiste à confiner pendant plusieurs heures à l’intérieur d’un cordon de police des personnes turbulentes pour les empêcher de se joindre à une manifestation qu’ils pourraient bien avoir pour objectif de faire dégénérer en scènes de violence. Or, soucieuse de laisser à la police une certaine marge d’appréciation dans l’adoption de décisions opérationnelles de manière à ne pas l’empêcher de remplir ses devoirs de maintien de l’ordre et de protection du public, la Cour, par un arrêt de grande chambre Austin et autres c/ Royaume-Uni du 15 mars 2012 vivement critiqué par la doctrine pour avoir marqué un net et inquiétant infléchissement de sa jurisprudence (JCP 2012. Actu. 455, obs. F. Sudre), avait estimé que l’utilisation de cette technique contestée n’avait pas provoqué, dans les circonstances de l’espèce, violation de l’article 5, § 1er, de la Convention qui consacre le droit à la liberté et à la sûreté. Or, par un arrêt Auray du 8 février 2024 (n° 1162/22, Auray c/ France, AJDA 2024. 293 ), la France vient de subir des constats de violation de l’article 2 du Protocole n° 4 qui consacre la liberté de circulation et de l’article 11 garant de la liberté de réunion pacifique lu à la lumière de l’article 10 protecteur du droit à la liberté d’expression parce que, face à de prétendus phénomènes émeutiers constitutifs d’actions de véritable guérilla urbaine favorisés par les manifestations contre la réforme des retraites de 2010, les forces de police lyonnaises avaient encerclé, pour ne pas dire « enchaudronné » comme le commanderait la traduction littérale de kettling, 300 personnes sur la place Bellecour pendant plus de trois heures. S’agit-il d’un contournement de la jurisprudence Austin formellement maintenue puisque l’arrêt Auray répète que l’article 5, § 1er, est inapplicable à cette situation où l’on ne peut pas vraiment parler de privation de liberté ? Sur d’autres fondements la Cour en reviendrait-elle à une conception plus protectrice des libertés publiques ? Absolument pas. Si la France a été doublement condamnée, c’est seulement parce que, à l’époque des faits, l’encerclement policier n’était pas encore prévu par la loi, ce qui n’est devenu le cas qu’à partir de la publication par le ministre de l’Intérieur, en décembre 2021, d’un nouveau schéma national du maintien de l’ordre. Depuis, les forces de police françaises peuvent donc, dans des circonstances « compliquées », narguer en toute conventionnalité, les protestataires encerclés. Et dire que d’aucuns s’entêtent à taxer la Cour européenne de droits de l’homme de laxisme quoi qu’elle décide.
Méli-mélo transitoire autour du droit de prélèvement
Une vieille loi du 14 juillet 1819 prévoyait que « dans le cas de partage d’une même succession entre des cohéritiers étrangers et français, ceux-ci prélèveront sur les biens situés en France une portion égale à la valeur des biens situés en pays étranger dont ils seraient exclus, à quelque titre que ce soit, en vertu des lois et coutumes locales ». Par une décision QPC du 5 août 2011, le Conseil constitutionnel avait abrogé cette disposition parce que le droit de prélèvement qu’elle instituait pour rétablir l’égalité entre héritiers garantie par la loi française était réservé à l’héritier français au mépris du principe d’égalité devant la loi. Enfin, la loi du 24 août 2021 a ressuscité dans l’article 913 du code civil le droit de prélèvement purgé de son vice d’inconstitutionnalité. En droit des successions internationales, il y a donc une « génération perdue » pour reprendre le titre d’un célèbre chanteur disparu auquel la question fait immédiatement penser, celle des réservataires sacrifiés qui ont dû faire valoir leurs droits trop tard pour bénéficier du prélèvement de 1819 et trop tôt pour bénéficier de celui de 2021.
La question se posait de savoir si cette lourde machinerie transitoire tenaillerait aussi les espérances des héritiers exposés à l’application d’une loi étrangère ignorante de la réserve héréditaire dans le cas d’une succession déjà ouverte mais non encore liquidée le 5 août 2011 date fatidique de l’abolition du droit de prélèvement réservé aux français. Elle a été abordée le 15 février 2024 par deux arrêts Colombier (n° 14925/18, Dalloz actualité, 29 févr. 2024, obs. M. de Ravel d’Esclapon) et Jarre (n° 14157/18, D. 2024. 357 ). Dans le premier relatif à la succession d’un compositeur de musique de films français décédé en 2004 en Californie où il avait créé un trust avec sa dernière épouse de manière à entraîner l’application de la loi californienne, la Cour, prenant acte du fait que le Conseil constitutionnel, en abrogeant l’article 2 de la loi du 14 juillet 1819, avait décidé de ne pas moduler les effets de sa décision dans le temps pour les situations en cours alors qu’il disposait de cette faculté, ce qui avait eu des conséquences dommageables pour les droits des requérants, a considéré que, pour autant, elle ne devait pas, dans les circonstances de l’espèce, se départir de l’analyse des juges internes selon laquelle le choix de M. Colombier ne heurtait pas la conception française de l’ordre public international à un degré tel qu’il doive conduire à déclencher l’exception d’ordre public international et qu’il s’ensuivait qu’il n’y avait pas eu violation de l’article 8 de la Convention pris isolément ni combiné avec l’article 14.
Le second concerne la succession d’un autre compositeur français de musiques de film décédé en 2009, qui lui aussi en Californie, également avec sa dernière épouse avait orchestré la même combinaison frustratoire de ses héritiers réservataires. La Cour, se prononçant au regard de l’article 1er du Protocole n° 1 qui consacre le droit au respect des biens pouvant pourtant reposer, on le sait, sur une espérance légitime, n’y a pas vu non plus de raison de se départir du raisonnement des juridictions internes dans la mesure, d’une part, où elle n’a jamais reconnu l’existence d’un droit général et inconditionnel des enfants à hériter d’une partie des biens de leurs parents et, où, d’autre part, elles ont vérifié, en l’espèce, que les requérants ne se trouvaient pas dans une situation de précarité économique ou de besoin avant d’exclure l’exception d’ordre public international. Le constat de non-violation de l’article 1er du Protocole n° 1 découlant de ces affirmations a été complété par un constat de non-violation de l’article 6, § 1, parce que la Cour n’a aperçu aucun indice d’arbitraire dans l’application immédiate par les juridictions internes à un litige pendant devant elles et non définitivement réglé, d’une décision du Conseil constitutionnel et de la législation pertinente dans l’état où elle se trouvait au moment où elles ont statué.
Cette férocité à faire prévaloir au détriment des héritiers réservataires une stricte application des règles du droit international privé en dépit de données transitoires rendues encore plus singulières par le rétablissement du droit de prélèvement au moment où la Cour s’est prononcée, est pour le moins surprenante. Y’a quelque chose qui cloche là-dedans aurait subodoré Boris Vian. Pour trouver quoi, il faudrait se livrer à une délicate articulation du droit international privé et du droit transitoire ; ce qui ne saurait se faire immédiatement en quelques lignes.
Entérinement de solutions adoptées par les autorités françaises
Ce n’est pas parce que des requêtes sont souvent introduites contre la France qu’elle est exposée au risque d’avoir systématiquement tort et d’être contrariée dans la mise en œuvre des politiques et des actions qu’elle entend mettre en œuvre dans les domaines les plus divers. Souvent, pour ne pas dire le plus souvent, elle sort confortée de l’épreuve européenne, soit que les requêtes aient été déclarées irrecevables ou bien qu’elles aient débouché sur des constats de non-violation. C’est ce qui, pour cette première période bimensuelle de l’année 2024 a été vérifié trois fois.
L’arrêt U. du 15 février 2024 (n° 53254/20, Dalloz actualité, 4 mars 2024, obs. J.-M. Pastor ; AJDA 2024. 360 ) a estimé que, toutes les conditions nécessaires à l’appréciation pour l’avenir de la situation personnelle d’un tchétchène dont la présence en France constituait une grave menace pour la sûreté de l’État ayant été remplies, la mise à exécution de la décision de le renvoyer en Russie ne violerait pas l’article 3 qui prohibe les traitements inhumains ou dégradants.
La décision Ramadan du 1er février 2024 (n° 23443/23, Dalloz actualité, 15 févr. 2024, obs. S. Lavric) a jugé irrecevable comme manifestement mal fondée la requête d’un célèbre islamologue prédicateur poursuivi pour viols qui se plaignait d’avoir été condamné à une amende de 1 000 € pour avoir diffusé l’identité de la victime d’une agression sexuelle. La Cour a en effet estimé qu’une sanction aussi modeste pour avoir révélé sans son autorisation écrite l’identité d’une victime d’agressions sexuelles constituée partie civile, dont le comportement avait pourtant aidé à son identification, n’était pas une atteinte disproportionnée au droit à la liberté d’expression au but légitime de protection de la réputation et des droits d’autrui poursuivi.
L’arrêt Cherrier du 30 janvier 2024 (n° 18843/20, Dalloz actualité, 6 févr. 2024, obs. J.-J. Memouland ; Cherrier c/ France, AJDA 2024. 185 ; AJ fam. 2024. 61, obs. A. Dionisi-Peyrusse ) rendu à la requête d’une jeune femme abandonnée à la naissance puis adoptée qui reprochait au Conseil national de l’accès aux origines personnelles (CNAOP) de pas avoir surmonté le refus réitéré de sa mère biologique de lui révéler son identité, a jugé que, en l’espèce, le droit au respect de la...
La Cour européenne des droits de l’homme a commencé l’année 2024 sur un rythme modéré puisque, hors arrêts de comités qui, pour le moment en tout cas, ne sont pas couverts par cette chronique, elle n’a rendu au cours des mois de janvier et février qu’une petite cinquantaine de décisions et d’arrêts au nombre desquels ne figure aucun arrêt de grande chambre. Un certain nombre d’entre eux ont cependant eu un fort retentissement médiatique d’abord parce qu’ils concernent la France et surtout parce qu’ils abordent des questions sensibles tels que l’abattage rituel, la protection des victimes de l’amiante, la liberté d’expression des salariés, la détention des malades mentaux ou l’exécution de plan de détention secret pour le compte de la CIA.
Après trois années d’expérience et au moment d’en commencer une nouvelle, l’idée est venue de distinguer les affaires françaises, et en écho à une célèbre formule du doyen Carbonnier, les affaires venues d’ailleurs auxquelles la France doit aussi intéresser en raison de l’autorité interprétative attachée aux arrêts définitifs dont elles font l’objet même s’il doit être bien compris que lorsqu’il s’agit d’arrêts de chambre commentés ou signalés ici moins de trois mois après leur publication, ils ne sont pas définitifs, ce qui statistiquement adviendra quand même plus de neuf fois sur dix.
La Cour européenne des droits de l’homme a commencé l’année 2024 sur un rythme modéré puisque, hors arrêts de comités qui, pour le moment en tout cas, ne sont pas couverts par cette chronique, elle n’a rendu au cours des mois de janvier et février qu’une petite cinquantaine de décisions et d’arrêts au nombre desquels ne figure aucun arrêt de grande chambre. Un certain nombre d’entre eux ont cependant eu un fort retentissement médiatique d’abord parce qu’ils concernent la France et surtout parce qu’ils abordent des questions sensibles tels que l’abattage rituel, la protection des victimes de l’amiante, la liberté d’expression des salariés, la détention des malades mentaux ou l’exécution de plan de détention secret pour le compte de la CIA.
Après trois années d’expérience et au moment d’en commencer une nouvelle, l’idée est venue de distinguer les affaires françaises, et en écho à une célèbre formule du doyen Carbonnier, les affaires venues d’ailleurs auxquelles la France doit aussi intéresser en raison de l’autorité interprétative attachée aux arrêts définitifs dont elles font l’objet même s’il doit être bien compris que lorsqu’il s’agit d’arrêts de chambre commentés ou signalés ici moins de trois mois après leur publication, ils ne sont pas définitifs, ce qui statistiquement adviendra quand même plus de neuf fois sur dix.
La Cour européenne des droits de l’homme a commencé l’année 2024 sur un rythme modéré puisque, hors arrêts de comités qui, pour le moment en tout cas, ne sont pas couverts par cette chronique, elle n’a rendu au cours des mois de janvier et février qu’une petite cinquantaine de décisions et d’arrêts au nombre desquels ne figure aucun arrêt de grande chambre. Un certain nombre d’entre eux ont cependant eu un fort retentissement médiatique d’abord parce qu’ils concernent la France et surtout parce qu’ils abordent des questions sensibles tels que l’abattage rituel, la protection des victimes de l’amiante, la liberté d’expression des salariés, la détention des malades mentaux ou l’exécution de plan de détention secret pour le compte de la CIA.
Après trois années d’expérience et au moment d’en commencer une nouvelle, l’idée est venue de distinguer les affaires françaises, et en écho à une célèbre formule du doyen Carbonnier, les affaires venues d’ailleurs auxquelles la France doit aussi intéresser en raison de l’autorité interprétative attachée aux arrêts définitifs dont elles font l’objet même s’il doit être bien compris que lorsqu’il s’agit d’arrêts de chambre commentés ou signalés ici moins de trois mois après leur publication, ils ne sont pas définitifs, ce qui statistiquement adviendra quand même plus de neuf fois sur dix.
Il résulte de l’article 1355 du code civil que l’autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation reconnue antérieurement en justice.
Le 8 février 2024, un arrêt publié revient une fois de plus sur l’autorité de la chose jugée, notion aussi actuelle que très ancienne (sur laquelle, v. C. Bléry, Retour sur l’autorité de la chose jugée, Le droit en débats, 28 avr. 2020) : l’attribut a pour effet d’interdire de présenter la même demande sauf si un fait nouveau s’est produit entre la première décision et la nouvelle demande. La difficulté porte dès lors sur la notion de fait nouveau : seuls des « événements postérieurs […] venus modifier la situation reconnue antérieurement en justice » peuvent faire obstacle à l’autorité de la chose jugée d’une précédente décision et rendre recevable une nouvelle demande entre les mêmes parties.
Des désordres surviennent dans une maison à la suite d’une sécheresse. Les propriétaires agissent dans un premier temps pour faire dire que leur assureur leur doit sa garantie, donc leur doit paiement de travaux de reprise des fondations. En appel, ils sont déboutés par un arrêt devenu irrévocable.
Par la suite, de nouveaux désordres se produisent qui conduisent les propriétaires à assigner leur nouvel assureur, ainsi que le précédent, en paiement de diverses sommes dont l’une au titre de démolitions. En appel, leur demande est déclarée irrecevable comme se heurtant à l’autorité de la chose jugée de l’arrêt irrévocable : en effet, selon la cour d’appel, elle « a le même objet, soit l’indemnisation des époux [S] au titre de la garantie catastrophe naturelle souscrite auprès de la société Sogessur relativement à l’événement de catastrophe naturelle reconnu par l’arrêté du 7 octobre 2017 ».
Les propriétaires se pourvoient en cassation pour violation de l’article 1355 du code civil : selon le moyen, la seconde demande, aux fins notamment de condamnation du premier assureur à garantir le coût des travaux de démolition/reconstruction de leur villa avait un objet distinct de la première rejetée par l’arrêt irrévocable, « à savoir la réparation d’un préjudice nouveau compte tenu de l’aggravation des dommages subis par leur maison ».
La deuxième chambre civile casse l’arrêt d’appel pour violation de l’article 1355 du code civil. Elle rappelle la règle de la triple identité exposée par l’article 1355 puis la réserve qu’elle apporte de manière constante : « il résulte du même texte que l’autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation reconnue antérieurement en justice ». Or, justement, les demandes introduites par la seconde assignation « résultaient d’événements postérieurs venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice ». Elle fait ensuite application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l’organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile et statue au fond : l’instance se poursuivra devant le tribunal...
La Cour de cassation vient préciser le point de départ de l’action en réduction prévue au titre de l’article 921 du code civil. Selon la juridiction, l’action est soumise à un double délai : l’action en réduction doit être intentée dans les cinq ans à compter du décès ou, au-delà, jusqu’à dix ans après le décès à condition d’être exercée dans les deux ans qui ont suivi la découverte de l’atteinte à la réserve. Cette dernière exigence n’a pas vocation à s’appliquer au délai incompressible de prescription quinquennale.
Article
par Mélanie Jaoul, Maître de conférences, Université de Montpellierle 6 mars 2024
Civ. 1re, 7 févr. 2024, FS-B, n° 22-13.665
Les deux membres d’un couple marié sont décédés respectivement, les 27 décembre 1989 et 30 juillet 2015, en laissant pour leur succéder leurs quatre enfants. Le 14 mai 2018, trois des enfants (les consorts F.) ont assigné leur frère (M. B. F.) en partage des successions de leurs parents et de la communauté ayant existé entre eux ainsi qu’en réduction de divers libéralités et avantages dont il aurait bénéficié.
Saisie de l’affaire, la cour d’appel (Reims, 21 janv. 2022, n° 21/00389) fait droit aux demandes des consort F. à l’exception des demandes de rapport à la succession formées au titre des fermages dus par lui antérieurement au 30 juillet 2010 en se fondant sur l’article 921 du code civil. L’alinéa 2 de ce dernier dispose en effet que « le délai de prescription de l’action en réduction est fixé à cinq ans à compter de l’ouverture de la succession, ou à deux ans à compter du jour où les héritiers ont eu...
La Cour de justice de l’Union européenne s’est prononcée sur les obligations de l’État membre sollicitant la reprise en charge d’un demandeur de protection internationale par l’État responsable de l’examen de cette demande lorsque celui-ci a recours à des pratiques telles que le renvoi sommaire (« pushback ») et la rétention aux postes-frontières.
Après plusieurs années de bataille juridique, le Conseil d’État a rejeté la demande d’un fils de réfugié républicain espagnol tendant au retrait de la distinction honorifique délivrée au dictateur Franco par le maréchal Pétain en 1928 puis en 1930.
Dans un arrêt rendu le 29 février 2024, la Cour de justice de l’Union européenne rappelle que l’indemnisation visée dans le règlement (CE) n° 261/2004 quant à l’annulation d’un vol découle directement du règlement et n’est donc pas de nature contractuelle. La Cour juge également incompatible avec ce texte la clause d’incessibilité de la créance d’indemnisation.
Tandis que tous les éléments du litige sont localisés dans un État membre, la seule stipulation d’une clause d’élection de for au profit des juridictions d’un autre État membre est-elle de nature à conférer au litige sa dimension internationale ?
C’est à cette question qu’a été confrontée la Cour de justice dans un arrêt du 8 février 2024, voué à une large diffusion.
I. En l’espèce, un résidant slovaque et une société établie dans ce même État, agissant l’un en qualité de prêteur et l’autre en qualité d’emprunteuse, ont conclu deux contrats de prêt de somme d’argent en 2016 et 2017, stipulant chacun une clause attributive de juridiction au profit des juridictions tchèques.
L’emprunteuse ayant fait défaut, la société Inkreal, cessionnaire aux termes d’une cession de créances issues des deux contrats de prêt d’argent, a sollicité devant les juridictions tchèques, d’une part le paiement des créances dues par l’emprunteuse et, d’autre part, qu’il soit donné effet, pour statuer au fond, aux juridictions tchèques désignées par la clause attributive de juridiction, soutenant à l’appui de cette demande que la clause est conforme aux dispositions de l’article 25, § 1, du règlement (UE) n° 1215/2012, dit « Bruxelles I bis » et qu’il n’existe pas d’autre compétence, spéciale ou exclusive, d’une juridiction en vertu de ce règlement.
C’est dans ce contexte que la Cour suprême de République tchèque a posé une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne, visant à déterminer si, relève des dispositions de l’article 25 précité, une clause attributive de juridiction par laquelle les parties à un contrat établies dans un même État membre conviennent de...
L’élément d’extranéité, nécessaire à l’application du règlement Bruxelles I bis, est caractérisé en présence d’un litige stipulant une clause d’élection de for au profit des juridictions d’un État membre, et ce même si tous les éléments du litige sont localisés dans un autre État membre.
Sélection de l’actualité « Civil » marquante de la semaine du 26 février.
Exequatur, juge de l’exécution et retrait litigieux
La première chambre civile de la Cour de cassation rappelle sa position avant le revirement de jurisprudence de 2022 concernant la demande de mainlevée d’une saisie-attribution :Sélection de l’actualité « Affaires (hors-fiscal) » marquante de la semaine du 26 février.
Sélection de l’actualité « Immobilier » marquante des semaines des 12, 19 et 26 février.
Le copropriétaire, qui vote en faveur d’une résolution de l’assemblée générale du syndicat des copropriétaires donnant quitus au syndic, s’il n’est pas recevable à demander l’annulation de cette résolution, peut rechercher la responsabilité délictuelle du syndic pour obtenir réparation d’un préjudice personnel né de sa faute.
Par cet arrêt de rejet, qui aura les honneurs du Bulletin, la Haute juridiction affirme que le quitus voté par l’assemblée générale des copropriétaires n’interdit pas à un membre du syndicat de rechercher la responsabilité du syndic à raison du préjudice personnel qu’il a subi.
Au cas particulier, en dépit de l’urgence de la situation (l’immeuble subissait d’importantes infiltrations), un syndic avait tardé à prendre les mesures qui s’imposaient.
En effet, alors qu’il avait été alerté de la gravité de la situation en 2010, ce n’est qu’en 2013 qu’il a saisi, pour avis, un architecte et un bureau d’études et qu’un étaiement a été posé (la même année, l’immeuble faisait l’objet d’un arrêté de péril imminent). Il a fallu trois longues années supplémentaires avant que le syndic n’inscrive les travaux à l’ordre du jour de l’assemblée générale des copropriétaires. Lesquels travaux n’ont été entrepris …. qu’en 2018.
Ayant subi un préjudice financier et un trouble de jouissance à la suite de cette inaction, un copropriétaire avait poursuivi le syndic en justice.
Après avoir été condamné en appel (Rouen, 12 oct. 2022, n° 21/01091, Dalloz jurisprudence), celui-ci a tenté de faire valoir devant la Haute juridiction :
d’une part, que le quitus donné par l’assemblée générale de sa gestion interdisait au syndicat ainsi qu’aux...Le copropriétaire, qui vote en faveur d’une résolution de l’assemblée générale du syndicat des copropriétaires donnant quitus au syndic, s’il n’est pas recevable à demander l’annulation de cette résolution, peut rechercher la responsabilité délictuelle du syndic pour obtenir réparation d’un préjudice personnel né de sa faute.
Par une décision du 2 février 2024, le Conseil d’État estime que la CNIL n’a pas commis d’erreur d’appréciation en clôturant une plainte en refus de donner suite à l’exercice des droits d’opposition au traitement et d’effacement des données inscrites sur le registre des baptêmes de l’association diocésaine d’Angers. La mention de l’apostasie en marge du registre satisfait au droit d’opposition quand le droit à l’effacement ne serait pas applicable. L’arrêt questionne tant quant à la solution retenue qu’au regard du raisonnement mis en œuvre.
La créance d’un organisme de garantie collective qui s’est porté garant d’une agence de voyage est née du contrat qu’il a conclu, et doit donc être déclarée dans les deux mois de la publication au BODACC du jugement d’ouverture de la procédure collective de l’agence de voyage, lorsque le contrat de garantie financière est antérieur au jugement d’ouverture, peu important que la garantie n’ait pas encore été appelée.
Chacun sait qu’en cas défaillance du demandeur, une option est ouverte au profit du défendeur qui a été inutilement troublé dans sa quiétude : il peut requérir un jugement sur le fond ou demander au juge, qui peut aussi y procéder d’office, de déclarer la citation caduque (C. pr. civ., art. 468). C’est là un choix qui relève plutôt de la stratégie procédurale. En requérant du juge qu’il statue sur le fond, le défendeur peut espérer s’abriter derrière l’autorité de la chose jugée attachée à la décision ainsi rendue pour parer les nouvelles initiatives procédurales de son adversaire. De son côté, la caducité de la citation entraîne l’extinction de l’instance (C. pr. civ., art. 385) ; sauf à ce que le demandeur parvienne, dans les quinze jours suivant, à justifier d’un « motif légitime » justifiant de rapporter l’ordonnance du juge, une nouvelle demande en justice peut toujours être formée ; mais encore faut-il que la prescription n’ait pas fait son œuvre alors que la citation, dont la caducité a été constatée, n’a pu interrompre le cours de la prescription (Civ. 3e, 4 juill. 2019, n° 18-16.005, inédit, AJDI 2019. 720 ; Civ. 2e, 21 mars 2019, n° 17-31.502 P, Dalloz actualité, 29 avr. 2019, obs. G. Deharo ; D. 2019. 648 ). Ce sort réservé au demandeur défaillant n’incite guère à la compassion : en prenant l’initiative d’introduire l’instance, il a pu choisir les armes de la lutte judiciaire, conformément à la stratégie procédurale qui lui convenait le mieux (v. sur la stratégie procédurale, L. Cadiet, J. Normand et S. Amrani-Mekki, Théorie générale du procès, 3e éd., PUF, 2020, n° 362 ; L. Cadiet et E. Jeuland, Droit judiciaire privé, 11e éd., LexisNexis, 2020, n° 486).
Les faits ayant donné lieu à l’arrêt rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 8 février 2024, qui fait l’objet du présent commentaire, n’y incitent pas davantage.
Dans l’affaire, le demandeur estimait avoir une « bonne » raison de ne pas s’être présenté à l’audience : son conseil ne pouvait envisager un déplacement de plus de 600 kilomètres pour s’y rendre sans être certain que le dossier y serait plaidé. Il étoffa d’ailleurs cet argument kilométrique, qu’il savait sans doute un peu faible, en faisant valoir que les réformes successives des procédures orales avaient tendance à renforcer la place de l’écrit et que son adversaire, qui avait gardé le silence, n’avait pas jugé bon de lui communiquer ses...
Le défaut de comparution du demandeur peut conduire le juge à prononcer la caducité de la citation en application de l’article 468 du code de procédure civile. Même si, à l’égard du demandeur, la sanction paraît sévère, son prononcé ne porte pas une atteinte excessive au droit au juge garanti par l’article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme.
En matière de pratiques restrictives, la prescription de l’action du ministre, qui ne fait pas l’objet de règles spéciales, est régie par l’article 2224 du code civil. Il s’ensuit que cette action a pour point de départ le jour où ce dernier a connu ou aurait dû connaître les faits qui, caractérisant une pratique restrictive, lui permettent d’exercer ce droit. La conclusion d’une transaction entre des partenaires économiques n’a pas pour effet de priver le ministre des pouvoirs qu’il tient de l’article L. 442, 6, III, devenu L. 442-4, du code de commerce. Une société ayant acquis les titres de sociétés à l’origine de clauses constitutives d’un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties et qui ne cesse pas ces pratiques, et partant, y participe également, peut être condamnée, in solidum avec ces dernières, à une amende civile.
L’appel du jugement de sursis à statuer est particulier en ce qu’il doit faire l’objet d’une autorisation du premier président pour motif grave et légitime (v. égal., pour l’appel d’une décision ordonnant expertise, c. pr. civ., art. 272). Cette procédure d’autorisation préalable, qui doit être introduite dans le mois du jugement de sursis à statuer, pose régulièrement difficulté. En l’occurrence, c’est la question des délais de distance qui a posé un problème : s’appliquent-ils au délai d’assignation devant le premier président à fin d’être autorisé à relever appel du jugement de sursis à statuer ?
Le 23 février 2021, un jugement de sursis à statuer est rendu dans l’attente de l’arrêt d’une cour d’appel. Par acte délivré les 22 et 30 avril 2021, une partie – en l’occurrence une société de droit allemand – saisit en référé le premier président d’une cour d’appel à fin d’être autorisé à relever appel de ce jugement.
Le premier président la déclare irrecevable comme tardive. Selon lui, c’est en vain que la société de droit allemand invoque le délai de distance de l’article 643 du code de procédure civile, alors que ce délai ne présente pas un caractère général s’appliquant à toutes procédures, que l’article 643 précise qu’il s’applique uniquement aux délais de comparution, d’appel, d’opposition, de tierce opposition, de recours en révision et de pourvoi en cassation et non à tout délai résultant de l’application du code de procédure civile, particulièrement à un délai pour introduire une instance tel que celui prévu par l’article 380 du même code. Sur ce motif, le premier président refuse d’accorder à la partie allemande le bénéfice des délais de distance.
Pourvoi est formé contre l’ordonnance. Le moyen de cassation est frontal : l’article 643 du code de procédure civile s’applique à l’appel du jugement de sursis à statuer en général et à la procédure d’autorisation prévue par l’article 380 du même code en particulier, dès le stade de l’assignation devant le premier président.
Au visa des articles 380, 643 et 645 du code de procédure civile, la deuxième chambre civile opine. Le conclusif est net :
« Il résulte de la combinaison de ces textes que les dispositions de l’article 643 du code de procédure civile, auxquelles il n’est pas expressément dérogé par l’article 380 du même code, s’appliquent à l’appel du jugement de sursis à statuer. Dès lors, les augmentations de délai prévues par ces dispositions s’appliquent au délai dans lequel doit être délivrée l’assignation à fin d’autorisation, qui constitue la première initiative procédurale, nécessaire à l’introduction de l’appel » (arrêt, nos 9 et 10).
La cassation est prononcée sur ce motif.
La solution, qui procède d’une compréhension généreuse des articles 643 et 645 du code de procédure civile, est digne d’approbation. Elle pourrait entraîner divers mouvements jurisprudentiels dans son sillage.
Avant d’entrer dans le détail de la question principale, une observation liminaire doit être formulée : aujourd’hui, l’article 380 du code de procédure civile prévoit que le premier président statue selon la procédure accélérée au fond sur la demande d’autorisation de relever appel du jugement de sursis à statuer. L’ancienne version prévoyait qu’il était saisi en la forme des référés, disparue à l’occasion de la réforme de la procédure civile de 2019. Or en l’espèce, la Cour de cassation souligne que la société de droit allemand a saisi le premier président « en référé » (arrêt, n° 2). Si tel est bien le cas, et que la société de droit allemand a saisi le premier président en référé et non en la forme des référés ou selon la procédure accélérée au fond, cela devrait poser difficulté car la saisine est incorrecte : là où le législateur prévoit une saisine selon la procédure accélérée au fond, il n’est pas loisible au plaideur de procéder en référé.
Sous le bénéfice de cette observation liminaire, revenons à la question des délais de distance.
Selon l’article 380 du code de procédure civile, la partie qui veut...
Les dispositions de l’article 643 du code de procédure civile, auxquelles il n’est pas expressément dérogé par l’article 380 du même code, s’appliquent à l’appel du jugement de sursis à statuer. Dès lors, les augmentations de délai prévues par ces dispositions s’appliquent au délai dans lequel doit être délivrée l’assignation à fin d’autorisation par le premier président, qui constitue la première initiative procédurale, nécessaire à l’introduction de l’appel.
La Cour de justice de l’Union européenne juge qu’une demande d’asile fondée sur une conversion religieuse intervenue après que l’étranger a quitté son pays d’origine ne peut pas être automatiquement rejetée comme abusive.
Dans un arrêt de chambre du 15 février 2024, la Cour européenne des droits de l’homme estime qu’il n’y a aucune violation automatique de l’article 3 de la Convention européenne lors de la mise à exécution d’une procédure de renvoi vers la Fédération de Russie. La diligence des autorités françaises dans l’examen de la situation du requérant a permis de valablement établir l’absence de risque réel et actuel de l’exposition à un traitement inhumain et dégradant d’un ressortissant russe d’origine tchétchène ayant bénéficié du droit d’asile en France.
Lors d’une conférence de presse qui s’est tenue le 29 février 2024, les notaires du Grand Paris ont dressé le bilan 2023 du marché immobilier résidentiel ancien en Ile-de-France et ont esquissé les tendances à venir. Ils se sont également intéressés aux achats immobiliers réalisés par les étrangers.
En cas d’engagement collectif réputé acquis, l’exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit, à concurrence de 75 % de leur valeur, des parts ou actions d’une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale transmises par décès ou entre vifs, prévu à l’article 787 B du code général des impôts, ne s’applique que lorsque, pendant les trois années qui suivent la date de la transmission, l’un des héritiers, donataires ou légataires exerce effectivement dans la société son activité professionnelle principale, si celle-ci est une société de personnes, ou l’une des fonctions de direction éligibles, lorsque celle-ci est soumise à l’impôt sur les sociétés, de plein droit ou sur option.
L’actualité du contrôle des soins psychiatriques sans consentement continue en ce début d’année 2024. Nous avions, dans ces colonnes, commenté les premières décisions publiées au Bulletin de l’année avec d’une part une question de désistement d’appel (Civ. 1re, 31 janv. 2024, n° 23-15.969 F-B, Dalloz actualité, 7 févr. 2024, obs. C. Hélaine) mais également, d’autre part, une interrogation autour de l’assistance du curateur du majeur concerné par la mesure (Civ. 1re, 31 janv. 2024, n° 22-23.242 F-B, Dalloz actualité, 12 févr. 2024, obs. C. Hélaine).
Aujourd’hui, c’est un arrêt rendu le 28 février 2024 par la première chambre civile de la Cour de cassation qui nous intéresse et avec lui une interrogation tout à fait légitime, celle de la modification de la mesure pendant le recours aux fins d’en obtenir la mainlevée.
Les faits à l’origine du pourvoi méritent d’être rappelés. Le 10 mai 2016, une personne est admise en soins psychiatriques sans consentement. À partir du 15 juillet 2021, un programme de soins est décidé. La modification de la mesure sera de courte durée car le 19 novembre suivant, le préfet prend une décision tendant à réadmettre la personne en hospitalisation complète et saisit le juge des libertés et de la détention afin de poursuivre l’hospitalisation par application de l’article L. 3211-12-1 du code de la santé publique. La mesure sera finalement maintenue par ordonnance du 29 novembre 2021. L’intéressée interjette appel de la décision par déclaration reçue au greffe le 1er décembre 2021. À partir du 22 décembre 2021 toutefois, l’appelante voit sa prise en charge évoluer par un...
Dans un arrêt rendu le 28 février 2024, la première chambre civile opère une précision intéressante sur les pouvoirs du premier président statuant en appel sur une décision de maintien d’une hospitalisation complète sans consentement quand celle-ci a été, pendant la procédure d’appel, modifiée en un programme de soins.
Est réputée non écrite, la clause insérée dans un bail à ferme, selon laquelle le bailleur donne son accord pour l’apport par le preneur de son droit à une société, sans aucune identification du bénéficiaire de cette autorisation.
Les dispositions de l’article R. 421-5 du code des assurances, qui imposent à l’assureur refusant sa garantie à la suite d’un accident survenu à l’étranger d’en informer tant le fonds de garantie des assurances obligatoires (FGAO) que la victime, s’appliquent dès lors que la victime n’a pas bénéficié d’une indemnisation par un bureau national d’assurance. Dans ce dernier cas, l’obligation d’information de l’assureur n’existe qu’à l’égard du FGAO et est exécutée dans les conditions fixées à l’article R. 421-68.
Tout en rappelant le principe selon lequel seul peut être indemnisé le préjudice reposant sur un droit juridiquement protégé au jour de l’expropriation, la Cour de cassation juge, et c’est une nouveauté, qu’alors même que l’action publique en démolition serait prescrite, la dépossession d’une construction édifiée irrégulièrement et située sur une parcelle inconstructible, n’ouvre pas droit à indemnisation.
Tout en rappelant le principe selon lequel seul peut être indemnisé le préjudice reposant sur un droit juridiquement protégé au jour de l’expropriation, la Cour de cassation juge, et c’est une nouveauté, qu’alors même que l’action publique en démolition serait prescrite, la dépossession d’une construction édifiée irrégulièrement et située sur une parcelle inconstructible, n’ouvre pas droit à indemnisation.
La version actuellement en vigueur des textes régissant l’isolement et la contention en soins psychiatriques sans consentement est, aujourd’hui, assurée par la loi n° 2022-46 du 22 janvier 2022 et par un décret d’application pris quelques temps plus tard le 23 mars suivant (sur ces textes, v. Décr. n° 2022-419, 23 mars 2022, JO 25 mars, Dalloz actualité, 29 mars 2022, obs. C. Hélaine). Avant cette période de relative stabilité, les textes antérieurs ont connu deux séries d’abrogation en 2020 et en 2021 par différentes questions prioritaires de constitutionnalité (v. sur les décis. de 2020, Civ. 1re, QPC, 5 mars 2020, n° 19-40.039 QPC, Dalloz actualité, 15 avr. 2020, obs. C. Hélaine ; Cons. const. 19 juin 2020, n° 2020-844 QPC, Dalloz actualité, 16 juill. 2020, obs. D. Goetz ; AJDA 2020. 1265 ; D. 2020. 1559, et les obs. , note K. Sferlazzo-Boubli ; ibid. 2021. 1308, obs. E. Debaets et N. Jacquinot ; RTD civ. 2020. 853, obs. A.-M. Leroyer ; sur les décis. de 2021, Civ. 1re, QPC, 1er avr. 2021, n° 21-40.001, Dalloz actualité, 15 avr. 2021, obs. C. Hélaine ; RTD civ. 2021. 380, obs. A.-M. Leroyer ; Cons. const. 4 juin 2021, n° 2021-912/913/914 QPC, AJDA 2021. 1176 ; D. 2021. 1324, et les obs. , note K. Sferlazzo-Boubli ; RTD civ. 2021. 619, obs. A.-M. Leroyer ). Dans une décision M. Sami G. et autres rendue l’année dernière (Cons. const. 31 mars 2023, n° 2023-1040/1041 QPC, Dalloz actualité, 6 avr. 2023, obs. C. Hélaine ; D. 2023. 762 , note L. Bodet et V. Tellier-Cayrol ), le Conseil constitutionnel n’a pas prononcé de troisième abrogation, pour le moment du moins.
Toutefois, les nouveaux textes commencent à poser de sérieuses difficultés pratiques sous certains aspects. L’une d’entre-elles réside dans la computation des délais prévus par les dispositions du code de la santé publique. L’avis rendu le 6 mars 2024 permet de s’en convaincre. La demande, formulée par application des articles L. 441-1 et suivants du code de l’organisation judiciaire, a été rédigée par le juge des libertés et de la détention (JLD) du Tribunal judiciaire de Quimper. Elle concerne le délai de sept jours de l’article L. 3222-5-1 du code de la santé publique dont dispose le juge des libertés et de la détention après deux décisions de maintien prises par celui-ci.
Elle est ainsi formulée :
« Le délai de sept jours fixé par l’article L. 3222-5-1, II, du code de la santé publique, imparti au juge pour statuer après deux décisions de maintien en isolement, expire-t-il à la vingt-quatrième heure du septième jour suivant la précédente décision du juge des libertés et de la détention, à l’heure à laquelle la précédente décision a été rendue sept jours auparavant, ou à la minute à laquelle la précédente décision a été rendue sept jours auparavant ? »
Il existe dans l’architecture des nouveaux textes une spécificité certaine dans le délai de sept jours de l’article L. 3222-5-1. Cet article mentionne, en effet, des délais exprimés pour la plupart en heures alors que celui-ci est compté en jours (ce que ne manque pas de rappeler l’avis au pt n° 6). L’autre exception concerne la durée cumulée jusqu’à quinze jours quand il existe un fractionnement des mesures d’isolement. Pour le délai de sept jours, la complexité est du côté des magistrats et des greffiers qui connaissent, en ce moment, une certaine hésitation, source d’insécurité juridique notable pour les personnes intéressées par la mesure d’isolement.
Deux grandes possibilités existent :
Soit on décide de computer le délai de sept jours comme ceux de procédure civile en suivant les règles méthodologiques des articles 640 et suivants du code de procédure civile (C. Chainais, F. Ferrand, L. Mayer et S. Guinchard, Procédure civile - Droit commun et spécial du procès civil, MARD et...
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